Si la neige était fine et chaude, elle serait du sable. Un jour un philosophe à dit que le nom d'une chose faisait la chose, ce qui expliquait que la neige soit de la neige et le sable du sable. Le problème, c'est que Talphan, lui, il s'en fiche complètement. Bien que toute personne un tant soit peu poli n'utiliserais pas les termes qu'il emploi actuellement, notre ami almer se trouve avoir très froid. Le pire, c'est qu'il ne s'y habituait pas à tout ça. "Storghein, Fierté Astorg", qu'on appelait cette cité. Lui ne voyait que neige à perd de vu, et pas un grain de sable à l'horizon. Bien sûr, Talphan mettait ça sur le compte de l'hiver qui bien heureusement touchait à sa fin. Autre point négatif, les maisons. De belle maison, bien solide, qui résistait au vent froid du nord, mais toute en bois. Absolument que du bois, pour retenir la chaleur. Il n'aimait pas ça, les maisons en bois au toit oblique. Chez lui, les toits étaient plats, les murs en pierre blanche du désert, ce qui rendait l'escalade aussi facile qu'une promenade de santé. Le tout sans aucune écharde. Tout ça, ce n'était vraiment qu'un détail. Des détails désagréables certes, mais des détails. Le pays était froid, non pas par sa température complètement aux antipodes du pays où a toujours vécu Talphan, mais par le fait qu'on le regardait en biais dans la rue dès qu'on le voyait. Et ces yeux bleus perçant... Heureusement tout le monde n'avait as les yeux bleus clair ici, mais le regard froid par contre si.

C'était peut être de la paranoïa, peut être qu'on ne le regardait pas constamment comme s'il avait une maladie contagieuse... La tragédie de Ptot Tàh devait être en rapport avec ça. En plus, cela n'arrangeait pas sa réputation auprès des femmes de la région qu'il trouvait très exotique. Elles avaient la peau si claire, et un grand nombre les cheveux blond et soyeux... Ça lui changeait de l'ordinaire, la peau mate et les noisettes, ça avait son charme mais tout de même...

*Bon. Y parait que l'alcool ça réchauffe. Il est temps d'aller vérifier ça.*

Cela faisait trois jours qu'il se disait ça, il n'arrivait pas à déterminer si c'était vrai ou pas. Il n'arrivait jamais à s'en souvenir. Il sortit de la petite ruelle dans laquelle il s'était arrêter afin de se plaindre à voix basse et se dirigea vers la taverne des quartiers sud. La même que ces derniers jours. Leur serveuse était très agréable à regarder, du genre à faire tourner la tête d'un mort dans la rue et à le faire hurler à la lune avant qu'il se souvienne de son état mortuaire. Dommage qu'il ai encore beaucoup de mal avec la langue astorg. Il arrivait à se faire comprendre, mais adieu les poèmes et la sérénade pour courtiser les filles. Adieu les questions philosophique aussi... Comme s'il se soucier de ça ! Il entra à "L'arrose gosier". Ce nom en valait un autre se disait Talphan. Il entra donc, sous le regard d'une dizaine de client et s'avança d'un pas ferme vers le bar. Le tavernier n'était guère surpris et avait le sens des affaires, un immigré assoiffé rapporte parfois plus qu'un voisin.

"Un verre tavernier ! lança t-il avant de rajouter : s'il vous plait."

Voilà est-ce que ça commence toujours ici. Seulement, on ne sait jamais comment ça fini...

-C'est bon, Euphorie, on s'arrêta là.
Sheireen mit pied à terre, visage plissé sous le soleil. Elle mena sa jument jusqu'à ce qu'il semblai être une taverne et la confia à un garçon d'écurie. Elle jeta quelques pièces à celui-ci et entra dans "L'arrose Gosier". Cela faisait maintenant plus de 12 heures qu'elle n'avait rien avalé, et elle espérait qu'en plus de la bière, le tavernier servait aussi des copieux repas. Elle s'assit tandis qu'un homme à la peau hallée s'installa un peu plus loin. La jeune fille le remarqua aussitôt. Même s'il n'était pas "baraqué", cet inconnu se déplaçait avec discrétion, souplesse et savait se faire oublier. Mais pas par quelqu'un de sa même espèce. Sheireen, un sourire énigmatique aux lèvres, s'approcha de lui. Elle aussi, se déplaçait sans bruit. Mais elle se doutait bien qu'un voleur -oui, car cet homme était un voleur cela ne faisait aucun doute- aurait d'assez bonnes oreilles pour l'entendre venir. Mais soit, elle ne cherchait pas à se dissimuler.
"Un verre tavernier ! S'il vous plait."
Sheireen passa sa main dans ses cheveux sombres et s'arrêta dans son dos.
-Bonjour, fit elle.
Elle s'installa sur le siège à côté de l'inconnu et se mit à l'observer attentivement. Les yeux bruns, svelte, les cheveux qui lui tombaient sur la nuque. Elle le gratifia d'un sourire et reprit:
-Alors, les affaires sont bonnes en c'moment ? Oh, me cache pas que t'es un méchant méchant malfaiteur qui vole les vieilles dames grosses et riches. C'est clair comme de l'eau d'roche.
Elle sortit le poignard qui ne quittait pas sa ceinture et fit jouer la lumière qui se refletait sur sa lame.
-Joli, hein ? fit-elle à l'attention de son arme. En argent, le manche! Si, j'te jure.
Elle réprima un petit rire et reporta son attention sur sa nouvelle connaissance. Finalement, elle ne voyageait peut-être pas pour rien.

"Bonsoir jeune fille. Si tu veux tout savoir, les affaires ne sont guère fleurissante. Il semblerait qu'on se méfie de moi dans les parages, une question de couleur de peau je crois."
La jeune fille lui jeta un regard surpris mais ne répondit pas.
Joli, hein ? En argent, le manche! Si, j'te jure.
"J'en conçoit, c'est une belle arme, mais tu as déjà eu l'occasion de t'en servir ?"
Sheireen tressaillit. Pourquoi cette question ? Perplexe, elle rangea son arme et écarta une mèche de cheveux lisse. Si elle avait eu l'occasion de s'en servir ? Oui. Certes, à Silmarie les gens étaient peu agressifs, mais au cours de ces voyages, bon nombre de gens employaient des assassins pour se débarrasser d'elle. Et alors, sa maîtrise du poignard lui était plus qu'essentielle. Et ce serait mentir que de dire qu'elle n'avait jamais tuer. Certes cela lui procurait une horrible sensation mais sinon ça ne la gênait pas plus que ça. Elle décida d'être sincère, et répondit :
"Pour être franche... Ouep'. J'm'en sers assez souvent, même. Et je ne te cache pas que j'ai déjà tué pour de simples chaines en or. Ne croie pas que je suis une sans coeur, mais ... "
Elle secoua la tête. Elle n'allait quand même pas raconter sa vie à un inconnu. Même si cet homme lui attisait respect et confiance, elle avait apprit à se méfier. Elle releva la tête et éclata de rire comme pour justifier le rose qui lui brûlait les joues.
"Bon, fit-elle pour changer de sujet. Et toi ?"
Elle ne s'occupa pas d'attendre la réponse, déjà elle criait à l'adresse du tavernier :
-Toi! Une chope de bière.
Elle balança une pièce sur le comptoir et sirota la boisson que lui tendait l'homme bourru qui s'occupait de la taverne.
-Elle est fraîche. Tu veux goûter l'ami ?
Comme pour accompagner ses paroles, elle tendit le verre à sa nouvelle conaissance et lui fit un sourire.
-Au fait, tu t'appelle comment ?

Edit Eléa : Merci de respecter les règles d'écriture miss ! Les actions doivent être en italique n_n Attention également, il faut 10 lignes minimum !

[Je me permets de m'incruster =}. Je suis pas ultra rapide pour répondre, j'espère que ça ne vous embêtera pas. Un détail me chiffonne : vous parlez quelle langue >.< ?]

La porte de la taverne s'ouvrit et le vent glacial de la nuit s'engouffra dans la pièce, précédant de peu un tourbillon de couleurs... et de miaulements ! La petite silhouette emmitouflée sous plusieurs couches de couvertures dont ne dépassait qu'une touffe de cheveux multicolores, referma précipitamment le battant de bois, manquant de coincer un chaton moins rapide que les autres. Parce qu'ils étaient cinq à suivre Gaëlle depuis plusieurs heures déjà. Le pelage soigné et certains ventres bien remplumés démontraient que ce filage n'avait rien d'intéressé et que ces chats n'attendaient pas que l'Amazone leur lâche un morceau de viande ou une goutte de lait. Ils la suivaient, comme hypnotisés, pour une raison qu'y échappait aussi bien aux passants qu'à Gaëlle elle-même. Elle pensait d'ailleurs que cette attirance qu'avait les félins pour elle disparaîtrait une fois qu'elle aurait quitté Muria. Il n'en fut rien ! Quelques courageux l'avaient suivi sur l'Orage Sanglant et de nombreux autres continuaient à la harceler à travers les ruelles enneigées de la Capitale Astorg.

Sans leur prêter plus d'attention, elle se débarrassa d'un gros manteau bien chaud, puis d'un second, avant de lancer un regard circulaire. Elle passa outre le regard réprobateur que lançait le tavernier aux drôles de compagnons qui se tenaient à ses côtés, préférant s'attarder sur les clients. Elle essayait d'ignorer l'étau qui nouait sa gorge alors qu'elle détaillait le comptoir, la cheminée, la clientèle. En vain. Trois mois qu'elle n'avait pas mis les pieds dans une taverne. Et la dernière fois c'était au Bar Bu. Sa taverne. Chez elle, à Muria.

Gaëlle ferma les yeux, refoulant la vague de souvenirs, à la fois si récents et si lointains, et l'avalanche de sentiments contradictoires qu'ils faisaient remonter. Elle lâcha un soupir exaspéré avant de s'assoir au comptoir. Elle resta un instant immobile, fixant droit devant elle, faisant le vide dans son esprit tourmenté. Un chat noir en profita pour bondir sur ses genoux se blottissant sur son pantalon de velours. Gaëlle passa machinalement une main pensive dans le pelage sombre de la bête et se tourna vers son voisin de gauche.

Il s'agissait d'un homme qui sortait considérablement du lot. Et pas seulement parce que c'était certainement le seul Astorg a avoir les cheveux noir corbeau ! Les clients semblaient d'origine modeste alors que lui dégageait une certaine noblesse qui n'avait pas échappé à Gaëlle. Et si elle paraissait contrariée et perdue – et même si c'était un peu le cas – ce n'était pas par hasard que l'Amazone s'était retrouvée à côté de ce type-là. Elle ignorait qu'un autre homme, à la peau aussi dorée que la sienne, avait déjà repéré cette proie potentielle et cogitait les mêmes plans qu'elle...

Le tavernier vint à sa rencontre et elle se contenta de lui désigner le verre de son voisin, sans savoir si le patron lui avait demandé ce qu'elle désirait boire ou si elle était libre pour la nuit... Elle ne comprenait pas un traître mot d'Astorg et avait su à ses dépends que le Cydien n'était guère apprécié, même s'il venait d'une jeune femme, aussi charmante soit-elle. Gaëlle appuya sa tête aux mèches folles et colorées sur sa main avant de dévisager son voisin. Un sourire triste étira ses lèvres alors qu'elle entamait la conversation...

« Je suppose que vous non plus vous ne comprenez pas le Cydien... ? »

La lassitude résonnait dans le ton de sa voix et se reflétait dans le noir de ses yeux.
Pourtant, elle savait pertinemment que ce gars-là avait quelques mots de Cydien dans son vocabulaire...

[Comme Hasmed n'a plus de pc, je me permet de sauté son tour avec son accord ^^. Gaëlle on parle Cydien]

La porte de la taverne s'ouvrit, laissant entrer un courant d'air qui glaça les os de Talphan. La porte, grâce à Dieu, se referma bien vite après qu'une demi-dizaine de chat soit entré. Et une femme aussi, les chats n'ouvrent que très rarement les portes des tavernes. Si l'almer n'était pas en pleine réflexion sur ce que disait Sheireen, il aurait remarqué Gaëlle entrer. Il n'aurait absolument eu aucun mal à la voir même dans une foule de monde, car son teint trahissait ses origines aussi simplement que deux et deux font quatre. Une autre Almer. De plus, avoir les cheveux de la couleur de l'arc-en-ciel n'est pas vraiment gage de discrétion, Talphan l'aurait vu venir à des kilomètres à la ronde. Pour cela, il aurait fallu qu'il regarde. L'expatrié devait avouer que depuis le fléau de Ptot Tàh, il était toujours un peu décalé. Il avait tant perdu, tout le pays avait tant perdu. Il n'était pas très patriote, un hors-la-loi patriote est assez rare, mais ce qui était arrivé à sa nation lui en avait mis un sacré coup dans les gencives. Il espérait se reprendre, car baisser sa garde ne rapportait rien de bon pour un mécréant dans son genre. Après avoir regardé le mur en face de lui quelque instant, il se retourna finalement vers son interlocutrice. Elle ne semblait pas très perturbé de lui avouer qu'elle avait déjà tué. Et cela sans grand intérêt pour la victime. C'était ce genre d'agissement qui laissait Talphan pantois. Il comprenait les crimes passionnels, la haine de l'amant de sa femme, le désir de venger un frère tombé sous le fil d'une épée... Ça, c'était compréhensible. Tuer pour de l'or, sans se soucier de l'homme, c'était mal. Mais le monde allait mal, alors même si cela l'attristait, Talphan ne pouvait juger. La morale était subjective, libre à chacun de suivre son code morale comme il l'entendait. Si cette jeune fille pouvait vivre avec ce point sur la conscience après tout...

"Et toi ?" Lança Sheireen.
Cela eut encore plus d'effet que de lui jeter un sceau d'eau froide. Et lui ? Il fit non de la tête, jamais il n'avait tué, à pars des insectes nuisibles qui viennent en pleine nuit vous sucer le sang. Mais les moustiques ne comptaient pas vraiment. Jamais il n'avait vraiment envisagé ce genre d'option d'ailleurs. C'était contre son enseignement. Toute sa vie, il avait fait en sorte d'éviter toute confrontation. Ça lui paraissait impensable. Il espérait ne jamais avoir à envisager de passer à l'acte. On lui tendit une chope, la bière était bonne à première vu. Lui n'avait droit qu'à un alcool distillé transparent capable de tuer n'importe quel parasite intestinal. Il ne savait pas comment demander autre chose en fait, alors forcément ça n'aidait pas. Il accepta et bu une gorgée. C'était bon, très désaltérant et frais. Il en commande une autre pour lui.

"Mon nom est Talphan. Dit il en levant sa choppe et rajouta en Almer : A ta santé !"
Bien sûr, c'était plus pour lui-même que pour elle. Il ne savait pas exactement comment le dire en Cydien, encore moins en une autre langue. Suite à cela, il bu une bonne gorgée puis finalement se tourna vers elle.
"Et à qui ai-je l'honneur ?"

Il ponctua sa question d'un sourire chaleureux. Boire lui remettait les idées en place. Il pouvait avoir une conversation avec quelqu'un, alors il n'allait pas s'en priver. Mieux valait oublier le passé, la moralité et ce qui pouvait advenir après. Ce soir, mieux valait boire et seulement boire. Bien entendu, s'il pouvait auxiliairement se faire un peu d'argent, il n'aurait pas dit non. Il n'oubliait pas qu'un homme juste à côté de lui semblait pouvoir se délester d'un peu de monnaie sans que cela ne soit véritablement gênant pour lui. Mais Talphan n'était pas pressé. Le temps ne lui manquait pas après tout. Une occasion facile de gagner de l'argent se présentera bien assez tôt. Et s'il n'est pas trop soûl, il la saisira, c'est à n'en pas douter.

« Entre autre ». Gaëlle ne put s’empêcher de le trouver un peu pédant, ce gars-là. Tant pis. C’était un des rare qui ne lui crachait pas dessus après qu’elle ait lâché quelques pauvres mots de cydien… Mais contrairement à ce qu’il semblait penser, elle ne possédait que cette langue impure dans son vocabulaire. Sans doute se fiait-il à la peau sombre de l’Amazone. Mauvaise pioche ! Non seulement l’almer était une langue très peu parlée par son propre peuple, mais en plus elle n’avait d’Almer que le père, qu’elle n’avait jamais vu, et dont elle se moquait éperdument – vieux réflexe amazone – ce qui réduisait considérablement ses chances de baragouiner cette langue morte. Il devrait donc se contenter des intonations dangereuses que le cydien impliquait...

« Non, je suis désolée… Mais je pense que nous allons être contraints de nous exposer aux foudres des Astorgs, le Cydien est la seule langue que je maîtrise. Je comprendrais que ça vous embête, j’en suis désolée… Vous, vous n’êtes pas obligés de prendre ce risque enfin… je comprendrais… »

Chassez le naturel…

Il est vrai que les récents événements – bouleversements oui ! – qui avaient changé sa vie profondément lui avaient donné une nouvelle confiance que jamais elle n’aurait soupçonné posséder. Elle ne bégayait – presque – plus, et manipulait les mots avec moins de maladresse. Cependant, cette fâcheuse habitude qu’elle avait à se confondre en excuse à chaque occasion, ce rouge un peu honteux qui teintait ses joues bronzées, ça, elle n’avait su y remédier.

Tout comme elle ne put s’empêcher de renverser le verre d’eau de vie, fraîchement servi par un tavernier avenant et souriant – façon de parler. Il maugréa quelques jurons, qui échappèrent à Gaëlle, auxquels elle répondit par un sourire désolé. Pas question d’aggraver la situation ! Lorsqu’il eut le dos tourné, elle demanda discrètement à son voisin :

« Comment vous dites "désolée" en Astorg ? »

Quelle piètre pirate elle faisait ! Voilà qu’elle se retrouvait à demander de l’aide à celui qu’elle était sensée détrousser. Elle avait été bien naïve de croire un fol instant qu’elle était capable de se charger seule de cet homme si richement vêtu. Elle passa sa main dans ses mèches colorées, geste nerveux dont elle n’avait su se débarrasser.

Elle aurait mieux fait de rester plantée sur son perchoir…

Mais elle n’avait pas conscience que ce côté fragile et maladroit, qui la définissait, avait tendance à plaire, à la rendre attachante. Peut-être que cet Astorg prétentieux se laisserait séduire par ce bout de femme un peu perdu.

Ou pas.

Une jeune femme dans son genre n'allait que rarement seule dans les tavernes. Bon, son apparence, ses cheveux surtout, et son escorte féline, étaient peut-être le signe d'une volonté de s'imposer. Si l'apparat ne vient pas par la personnalité, qu'il se fasse par l’œil. Et pourquoi s’excuser? Les hommes capables de parler autre chose que leur langue d'origine ont toujours été rares, son cas ne faisait qu'entrer dans une généralité. Puis, si parler cydien m'avait déplu, je ne lui aurais simplement pas répondu.

Je laissais m'échapper un soupire, avant de lui répondre.

"Parler cydien ne me pose pas de problème, ne vous mettez donc pas dans un état pareil..."

Et puis, alors que j'allais avaler une nouvelle gorgée d'aquavit, la jeune inconnue laissa échapper son verre, qui déversa son contenu sur le comptoir. Quel gâchis, un verre d'eau de vie même pas entamé, à peine servi. Surtout que, malgré ce que le décors peu avenant laisserait présumer, cette taverne servait sûrement l'une des meilleures de la ville. Lorsqu'elle se tourna vers moi, j'hésitais une seconde avant de lui répondre, n'étant pas vraiment sûr qu'elle mérite mon attention. Et puis, finalement, sa question, preuve de sa volonté de s'adapter au moins un peu à la situation, méritait tout de même mon attention.

"Comment vous dites "désolée" en Astorg ?"

"Comme ceci:"

Je plongeais ma main sous mon manteau, et tirait quelque talents de ma bourse, de quoi calmer l'agacement du tenancier et payer un nouveau verre plein à ma compagne, et je les déposais sur le comptoirs avant de m'adresser à l'homme bourru qui remplissait une choppe pour un autre client. Dans ma langue natale, évidemment.

"Excusez la demoiselle et resservez-la donc..."

Ce geste n'était pas gratuit. Aucun de mes actes ne l'est, d'ailleurs. Il ne fallait pas y voir une forme d'approche purement graveleuse, une tentative de séduction mal inspirée. Évidemment, il aurait été aisé d'y croire. Mais mes attentions en étaient bien éloignées. Je m'étais rendu compte, à vrai dire, il y a quelque temps déjà, qu'avoir des amis, des contacts, même de simples connaissances, prêtes à rendre un service, pouvait se montrer extrêmement utile dans de nombreuses situations. Et étant donné l'avenir que j'escomptais, j'aurais sans aucun doute besoin de personnes pour me soutenir, ou démentir si l'on me soupçonnait. Et même si cette demoiselle me paraissait trop voyante et pas forcément digne d'un grand intérêt, elle pourrait sans doute me servir, plus tard, d'une manière ou d'une autre. Il suffisait de trouver quand, et à quoi. En attendant, faire connaissance.

"Sinon, hum, je m'appelle Hasmed. Hasmed Noad. Et vous êtes..?"

Edit Eléa : attention aux 10 lignes complètes jeune homme ! ^^

Edit Hasmou : Je crois que c'est enfin bon \o/

Gaëlle eut du mal à prendre sur elle. Beaucoup de mal.

Alors que le tavernier approchait avec un nouveau verre d'eau de vie et un regard désapprobateur, faute de pouvoir dire ouvertement ce qu'il pensait de cette étrangère trop voyante et maladroite, Gaëlle faillit le balancer à la figure de son interlocuteur – le verre, pas le tavernier. Au lieu de ça, elle prit un sourire désolé – alors que pour une fois, elle ne l'était pas du tout – et en même temps qu'elle répondait au fameux Hasmed avec entrain, elle sut enfin ce qu'elle allait faire de lui.

« Gaëlle. Enchantée. »

Tu parles ! Elle aurait préféré lui vomir dessus, sur ses vêtements suant la richesse et la suffisance ! Pas question par contre de lui offrir le nom de sa mère. Inutile de la mettre au milieu. La famille Azalée était d'origine modeste et était toujours restée dans les lignes de bonne conduite, espérant qu'un jour leur ferveur envers un monde juste, sans corruption ni vol, les récompenserait. Autrement dit tout le contraire de la pirate qu'était devenue Gaëlle.

Restait pourtant chez elle un sentiment, non plus, une fierté particulière, qui n'avait su s'estomper aussi facilement que s'en était allé le nom d'Azalée. Une certitude que des années passées au milieu de femmes fortes et fières, s'était encrée au plus profond d'elle même. Les hommes n'étaient rien de plus que des jouets divertissants, dont elle profitait de temps en temps, mais dépourvus de toute bonne foi, de sincérité et donc en aucun cas dignes de confiance. Ne jamais d'y attacher. Ne jamais dépendre d'eux.

Amazone un jour, Amazone toujours.

Et ce gars-là, parce qu'il avait la bourse pleine de talents – excusez l'expression – venait de bafouer tout ce en quoi elle croyait. Vraiment, elle lui aurait bien envoyé son poing à la figure lorsqu'il avait sorti son argent et avait acheté la tranquillité de la Dame qu'elle était, avec une arrogance écoeurante. Pour qui se prenait-il ? C'était une femme ! Une femme indépendante qui plus est !

« Merci pour le verre, répondit-elle cependant, un vrai faux-sourire sincère sur les lèvres. »

Par miracle Gaëlle sut contenir la vague de colère qui manquait de déferler et d'entraîner avec un chapelet de jurons et une remise au point nécessaire sur les valeurs féministes de Muria. Elle descendit cul-sec le verre avec une petite grimace qui en disait long sur le taux d'alcool qu'il pouvait contenir. Avec un petit sourire, elle lança :

« Je suis Almer et je... »

Des miaulements à ses pieds l'interrompirent, et alors qu'elle jetait un regard étonné par terre, elle remarqua deux nouveaux chats qui se frottaient à ses jambes avec une dévotion étrange. Ils venaient de traverser l'auberge alors qu'ils dormaient depuis plusieurs heures déjà au bord de la cheminée de la taverne.

« … et je suis un vrai aimant à chats ! »

Elle éclata de rire en se baissant pour ramasser un des nouveaux compagnons.

« Mais vous aviez dû remarquer... »

Son sourire timide la rendait attirante. A moins que ce ne soit son regard envoûtant...

"Gaëlle. Enchantée."

Je ne savais pas vraiment quel en était la cause, mais j'avais l'impression que l'atmosphère qui nous englobait quelques instants auparavant, cette jeune femme colorée et moi, subissait un genre de tension subite. Plus qu'une certitude, c'était une sensation. Elle avait sans doute dû voir dans mon acte un essai de séduction mal fichu, enfin, j'imagine. Cependant, elle n'en laissait rien paraître, et je savais bien que je ne pouvais pas baser mes actes sur une simple intuition. Cependant, j'osais espérer qu'en effet, la demoiselle s'était refroidie. Voilà qui la rendrait autrement plus intéressante que toutes ces insupportables catins attirées par le poids de ma bourse, ou de tout ces crétins avinés qui souhaitaient se voir offrir leur dose d'alcool. Peut-être, cette fois, étais-je tombé sur quelqu'un dont l'esprit était suffisamment développé pour mériter une autre attention que mon mépris déguisé. Peut-être, mais toute la question consistait à manœuvrer de la bonne manière, celle qui me permettrait de vérifier mes attentes sans risquer de la faire déguerpir. Mais elle dit quelque chose qui me fortifia dans mon idée.

"Je suis Almer et et je suis un vrai aimant à chats ! Mais vous aviez dû remarquer..."

Je m'en étais en effet aperçu. Déjà, du sang Almer qui coulait dans ses veines. Et puis, de cette véritable meute de félins qui l'entourait. Pour ça, j'avais deux pistes. Soit elle nourrissait les chats de son quartier, créant une sorte de lien de fidélité, soit c'était un genre de capacité, qui lui serait venu à la naissance, ou qui viendrait d'un entraînement quelconque, comme j'avais moi-même appris à régénérer mon corps durant mon sommeil. Et justement, l'un comme l'autre pouvait la rendre nettement moins ennuyeuse que je le craignais lorsqu'elle s'était adressée à moi, à son arrivée. La première n'était pas forcément très impressionnante, mais aurait dénoté d'une aptitude à contrôler et manipuler facilement, même si c'était par un simple lien de maîtresse à animal, reste que les techniques "d'endoctrinement" utilisées sur les animaux avaient tendance à fonctionner sur l'homme également. Et puis, si c'était l'autre solution, elle prouvait soit d'une forme de supériorité raciale, soit d'une faculté d'apprentissage et de réflexion nettement supérieur à la plupart de nos semblables. Donc, ça s'annonçait plutôt bien.

Bon, je pensais ça en grand optimiste, mais il n’empêche qu'au fond, je ne pouvais pas m’empêcher de me demander si ce n'était pas qu'un hasard, et tout en parlant, je cherchais un moyen d’arrêter d'imaginer des possibilités pour passer à des preuves plus empiriques des compétences de la demoiselle. Mais là, je séchais, un peu. Peut-être que si j'avais eu moi-même un chat (dans ma poche, par exemple?), j'aurais pu le vérifier? Irréaliste, mais amusant.

"Oh, je l'ai remarqué. Enfin, surtout les chats - dis-je avec un petit rire à peu près sincère. Vous êtes plutôt, hum, colorée; c'est assez rare à Storghein, on fait plutôt dans le terne, par ici."

Talphan s'étonnait toujours du tournant qu'avait pris cette soirée. Non pas que cela le gène, au contraire, cependant une multitude de sentiments et de pensées tourbillonnaient dans sa tête. La rue aussi tanguait un peu, alcool aidant, cependant il occulta ce détail capable de lui donner le mal de mer sur la terre ferme. L'almer était tout d'abord heureux, la jeune Sheireen aussi croyait qu'il retrouverait son père. Aussi sûr que deux et deux font quatre. Il ne le retrouverait pas ce soir, mais cette certitude était ce qui lui servait de phare lorsque tout autour de lui semblait n'être que ténèbres et noirceur. Pourtant, ce soir, il y avait une autre lueur dans le noir. Sheireen. La voleuse l'acceptait. Il lui avait tendu une main et elle l'avait pris, acceptant son amitié.

« Un ami... » murmura-t-il.

L'almer ne s'en rendit pas compte mais c'était sans doute ce qu'il lui fallait le plus en ce moment. Il avait tout perdu et il lui semblait impossible de pouvoir tout reconstruire. Mais plus maintenant. Le père de la jeune fille lui avait donné un bon enseignement, car les nuages finissent toujours par disparaître. Talphan leva les yeux au ciel, ce dernier était dégagé, tout comme son avenir. La réflexion de Sheireen sur leur différence d'âge le fit rire. Il trouvait cela tellement futile, le fait qu'elle soit encore adolescente ne changeait pas grand-chose. L'âge n'est qu'un gage d'expérience, rien de plus. Cela ne change pas la personne, si elle est bonne ou mauvaise, la peine qu'elle porte en elle et toutes ses choses qui ne sont pas influencés par le temps qui passe.

Une perle salée roula sur la joue de la jeune fille, Talphan ne la vit pas dans la pénombre de la nuit, pourtant il savait que la jeune fille était en proie à une émotion intense. L'espoir. Le jeune homme aurait voulu que cet instant dur une éternité, malheureusement, la fatigue, l'alcool et le rythme de vie qu'il avait depuis un moment l'avait rendu las. Il allait devoir rentrer se coucher, demain est un autre jour après tout.

« Tu peux ne pas écouter la parole d'un homme tout aussi ivre que toi... Cependant, il ne fait pas bon rester dehors à une heure pareille, je rentre me coucher. Tu devrais en faire autant, il serait malheureux qu'il t'arrive malheur. »

Puis, après cela, sans s'en rendre compte, il s'approcha d'elle et la prit doucement dans ses bras. Cela se fit sans aucunes arrières pensées typiquement masculine, il l'enlaça comme on enlace un enfant pour se rassurer, ou une soeur pour prouver son amour. Il lui murmura à l'oreille d'une voix douce mais audible :

« Cela n'a rien d'un adieu, juste un au-revoir. »

Puis il s'écarta d'elle, inclina légèrement la tête, comme pour s'excuser et fit volte face. Talphan ne fit que quelques pas avant de tourner la tête et de lancer à la jeune fille !

« Et puis, peut être qu'on aura l'occasion de travailler ensemble. Qui sait ? A bientôt Sheireen. »

Puis il disparut dans les ténèbres de la nuit d'une démarche lente et chancelante. Il avait dit vrai. Cela n'avait rien d'un adieu, juste un au-revoir.

[Je suis vraiment désolée pour l'attente... ça a été la panne d'inspiration totale >.< !]

La conversation n'avait rien de naturel et l'un et l'autre semblaient marcher sur des charbons ardents, tâtant le terrain avec précaution, échangeant des banalités, le tout sur un ton affreusement hypocrite. Si seulement Gaëlle n'avait pas eu deux mains gauches, elle se serait contentée de passer une main sous les habits somptueux de l'Astorg afin de récupérer la bourse qu'il avait exhibé quelques instants plus tard. Elle n'aurait pas été obligée d'user de subterfuges ridicules à base de « Quel temps pourri à Storghein ! » ou « Quel dommage qu'aucun ne parle Cydien » ou encore...

« Oui ! Je trouve ça vraiment déprimant ! Ca manque cruellement de bruns ténébreux dans le coin... »

Un petit rire amusé accompagna ses mots ainsi qu'un petit clin d'oeil à l'attention de Hasmed, plus complice qu'aguicheur. Gaëlle avait abandonné ce jeu trop dangereux et préférais miser sur des rapports amicaux, plutôt que de s'enliser dans des séances de drague foireuses. Une Amazone ne s'abaisserait pas à vendre ses sourires séduisants et encore moins son corps brun pour quelques Talents. Il faudrait qu'elle trouve un autre moyen de faire des profits à l'Orage Sanglant.

« C'est pourquoi j'espère vous recroiser... à l'occasion. »

Sur ce, elle déposa délicatement le chat qui avait pris ses aises sur ses genoux, descendit de son siège et prit congés de Hasmed.

« Merci encore pour le verre. Me voilà réconciliée avec les Astorgs ! »

La petite Gaëlle reprit ses couvertures, s'y emmitoufla. La porte de la taverne s'ouvrit et le vent glacial de la nuit s'engouffra dans la pièce, succédant de peu un tourbillon de couleurs... et de miaulements !

[Navrée de finir ce RP en queue de poisson, j'aime pas ça mais sincèrement c'est pas faute d'avoir essayé =S.]

Le temps passe et jamais ne s'arrête.

Le changement de saison s'annonce et bientôt, le blanc manteau de l'hiver qui recouvrait ce monde laissera place à l'herbe grasse et aux timides rayons du soleil. Le silence cédera sa place au chant des oiseaux et le monde s'éveillera petit à petit, sortant lentement de son cocon de glace. Dans ce décor que le temps semblait avoir figé, le moment est venu de s'éclipser, de laisser la nature reprendre ses droits et le cours des choses se faire.

[ Désengagés : Hasmed, Talphan, Sheireen ]