-A table ! appela Leina.

-On arrive chérie, répondit Nicolas.

-Maaaaaaaammmannn ! hurla une gamine pas plus haute que trois pommes.

C’était une belle journée d’été, on approchait du solstice d’ailleurs. Il faisait chaud, beau, les oiseaux chantaient, le soleil brillait, les papillons volaient, et une petite fille courrait vers sa mère. Elle avait un grand chapeau de pailles, les cheveux blonds comme les blés, d’où dépassaient deux petites oreilles pointus, et un sourire qui rappelait tout le bonheur que l’on pouvait ressentir.

Cette femme s’était battue toute sa vie, elle avait du quitter son foyer, ses parents, quand ces-derniers l’avaient rejeté alors qu’elle avait osé connaitre l’irréparable. Tomber enceinte d’un cydien ! Des générations et des générations d’elfes souillées par un homme, un homme ! Et c’est portant le fruit de sa déchéance qu’elle partit vivre à Cydonia, dans la maison de son amour. Mais celui-ci était soldat, alors, un matin il partit en campagne mais ne revint jamais, le champ de bataille lui avait été fatal… Enfin c’est ce que lui avait dit un jour sa mère, le jour où elle lui avait donné son médaillon doré. Elle avait du vivre cette perte seule, élevant sa fille du mieux qu’elle pouvait, faisant des petits travailles par-ci, par-là, le jour, la nuit, peu importe, du moment qu’elle pouvait nourrir son bébé. Mais elle s’enfonçait peu à peu et elle avait finis par toucher le fond. C’est Nicolas, qui l’avait trouvé, l’avait relevé, lui avait redonné la vie et surtout lui avait donné tout l’amour qu’elle méritait.

Cet homme, grand et fort, un air paisible sur le visage, qui lui aussi souriait, devant le tableau que formait sa petite famille. Même si Gabrielle n’étais pas si fille biologique, il la considérait comme telle.

L’elfe attrapa sa fille quand celle-ci se jeta dans ses bras.

Puis soudain, son sourire se figea, il tomba à terre, une flèche plantée dans le dos… La joie brillant toujours son regard et le sang, lui, à ses lèvres.

-Gaby, Gaby, Gabyyyyyyyy !

Gabrielle s’éveilla en sursaut, sa mère penchait sur son lit. Elle se frotta les yeux pour tenter d’y voir plus claire, puis s’étira longuement.

-Je t’ai entendu gémir… tu faisais un mauvais rêve? s’inquiéta sa mère

-Je rêvais, je rêvais, heu que je tombais à cheval, tu sais comme je déteste en faire, mentit Gabrielle, ne voulant pas rappeler de douloureux souvenirs à sa maman. Oui elle revivai-t régulièrement la mort de son papa. Elle l’avait aimé comme tel et il lui manquait terriblement. Mais elle devait être forte, pour sa mère ..

-Tu es sur que ça va ?

-Mais oui Maman !

-Bon et bien si ça va, tu devrais te dépêcher tu vas être en retard pour ton entrainement.

-Pour ce qu’on fait ce ne serait pas grave, marmonna la jeune elfe.

-Qu’est-ce que tu as dis ? Je n’ai pas très compris.

-Rien, Maman j’y vais, répondit-elle, excédée.

Sa mère n’avait pas changé, toujours aussi belle, toujours aussi drôle, voir moqueuse, toujours ce sourire lumineux, rappelant les belles journées d’été, mais quelque chose était morte en elle, cette funeste après-midi. Plus jamais elle n’a été comme avant, même du haut de son jeune âge, Gabrielle l’avait compris et avait tout fait pour être un enfant parfait et rendre la vie plus facile à sa mère.

C’est dans la joie et dans la bonne humeur que Gaby s’en alla prendre son petit déjeuner, se laver puis s’habiller. Un coup de brosse sur les dents puis sur les cheveux et la voila partis pour une nouvelle journée. Le chemin pour le Monastère se fit tranquillement, sans accidents quelconques. Arrivée là-bas, elle fonça vers une salle qu’elle connaissait bien. C’était d’ailleurs une salle, bizarrement, peu utilisée. A chaque fois qu’elle y était allée, il n’y avait jamais eu personne, pourtant c’était un lieu magnifique, une architecture somptueuse, digne des grands zélotes qui s’étaient un jour entrainés dans cette pièce. C’est une fois devant la porte qu’elle se rendit compte qu’il y avait du bruit à l’intérieur, finalement elle n’était peut être pas la seule personne à fréquenter cet endroit, elle aurait du sans douter.

Elle se glissa en silence dans la pièce, alla s’assoir sur une chaise dans le fond, aussi discrète qu’une ombre, parfois c’était utile d’avoir la peau violette. Elle observa un moment la personne qui s’entrainait. C’était une jeune fille, blonde, à priori mince, qui avait l’air de maitriser l’eau. Elle se lança dans une danse, le mot endiablé serait inapproprié mais résumait bien la situation. Ses yeux dorés, brillant légèrement dans l’obscurité avaient du attirer l’attention de la demoiselle, car celle-ci s’arrêta dans son élan et s’adressa à elle.

« Tu es bien matinale ! As-tu besoin d'aide ou cherches-tu quelqu'un ? »

Tiens voila qu’elle lui adressait la parole, d’habitude les filles la snobaient, curieux.

Mais les gouttelettes qui étaient restées en suspensions l’intéressèrent plus que les deux grands yeux bleus qui la fixèrent. Gaby eut alors une idée, cela faisait un moment qu’elle voulait tester quelque chose et c’était exactement le moment de le faire. Elle se concentra et glaça toutes les fines gouttes présentes dans la salle. Elle ferma les yeux et sous l’effet de la concentration, on pouvait voir le bout de sa langue sur ses lèvres. Elle condensa les cristaux qui sous la pression finirent par exploser. S’ils avaient été plus gros, cela aurait blessé les gens autours mais pas là. Ils explosèrent tous en même temps, libérant leurs couleurs. Un rayon de soleil passa et on eut l’impression qu’un arc en ciel avait éclaté dans la salle. Du rouge, du bleu, du vert et beaucoup d’autres couleurs. La pièce brillait de mille feux. C’était à coupé le souffle, Gabrielle n’étais pas peu fière, même si telle chose était totalement inutile sur le champ de bataille. Que penseraient ses supérieurs s’ils savaient qu’elle s’amuser à cela.

L’elfette soupira et sauta avec souplesse devant la blondinette.

-C’est ce qu’il faut pour devenir plus fort, s’entrainer tôt le matin, c’est plus tranquille.

Gabrielle sentait qu’elle était très surprise de la voir ici.

-Je viens ici quasiment tous les jours, dit-elle en réponse à la question muette de la jeune fille, et je ne cherche et n’ai besoin de personne.

Voila une entrée en matière disons un peu spéciale.

[Ah ? Ba je savais pas >.> xD]

« Ton maitre doit être fier de toi ! » fut les premières paroles que déclara la jeune blonde, pendant qu’elle détailla Gabrielle du regard.

Gaby plissa les yeux, observant elle aussi la demoiselle.

-Je n’ai pas de maitre, enfin vu comme il s'occupe de moi, c'est comme tel. Je vais aux cours le matin puis je m’entraine seule l’après midi, c’est mieux comme ça je suppose, dit-elle en soupirant.

Mais elle était plus préoccupée par la soudaine popularité de la salle d’habitude déserte qu’elle appréciait tant que par la personne qui lui faisait face. Comme si elle avait lu dans ses pensées, l’inconnue lui expliqua sa venue dans ce lieu si peu fréquenté.

« J'aime cette salle, les rares personnes qui foulent son sol sont les plus anciens de cette cité et leur savoir est incommensurable. J'ignorais que quelqu'un d'autre parmi la jeune génération connaissait cet endroit. Je suis ravie de voir que Cydonia peut compter sur sa relève. »

Gabrielle éclate de rire, la jeune génération ! Elle qui se considérait déjà comme une ancienne, découvrant certes régulièrement de nouveaux passages et de nouvelles cachettes, elle pouvait quand même se permettre de prétendre en connaitre un peu plus que la plupart de ses camarades.

La blonde recommença sa drôle de danse, plus Gaby l’observait, plus elle était fascinée par l’eau. La demoiselle était gracieuse, son liquide magique virevoltant autours d’elle comme un ruban de gymnaste. L’elfette était légèrement tiraillée par la jalousie, elle aussi aimerait bien maitriser pareil élément.

Soudainement elle se rappela avoir un rendez-vous important.

-Je dois faire quelque chose, bonne journée.

Elle partie, comme cela, sans ajouter un mot.