[Terminé][DA - PV Seliand et Clovis] Et la Folie s’abattra sur le Monde... .:Chapitre I:.

.: Chapitre I: Tomber est permis, se relever est ordonné :.

Le soleil déclinait sur l'horizon, inondant les alentours d'un beau rouge flamboyant. Un superbe décor dans lequel les silhouettes de Kurai et d'Arashi se mouvaient lentement, appréciant la fraîcheur qui tombait sur eux. La journée avait été longue et chaude alors c'était on ne plus agréable. La jeune femme menait son cheval à la longe, marchant à ses côtés pour l'économiser et qu'il puisse récupérer au mieux pour le lendemain... Ils avaient encore un bout de chemin à parcourir pour rallier le village dont on lui avait parlé.

La rumeur disait qu'un maître Maho terrorisait les habitants pour leur soutirer leurs biens. Pas quelle soit altruiste mais les derniers évènements la poussaient à avoir un peu plus d'empathie pour ceux qui n'avaient pas les moyens de se défendre et non plus ce vague mépris mêlé d'indifférence. Cimber et son expérience sur le bateau lui avaient fait découvrir qu'elle était sensible... Un peu, quand il s'agissait d'enfants. Mais son but premier n'était pas de sauver les pauvres âmes sous l'emprise de son ancien maître, seulement de le trouver lui et de lui faire payer sa trahison. Ça passait bien au-delà du fait qu'il ai voulu la tuer, bien avant ça, il l'avait manipulé et usé d'une maléfice pour qu'elle se livre et se confie à lui, utilisant tous ces relents de haine et d'injustice pour la former à un art destructeur. Un art qu'il pensait invincible, tellement puissant qu'il pourrait convaincre une multitude de nouveaux adeptes de le suivre et de propager une vague de terreur sur ce monde pour en prendre le contrôle... Un véritable malade... Mais ce n'est pas ce qu'elle avait vu. Le monde, elle s'en contrefichait. La jeune femme lui avait fait confiance et il s'était simplement servi d'elle comme d'un vulgaire pion, ignorant tout de l'affection qu'elle commençait à avoir pour lui, à la manière dont elle aurait pu aimer un père.

A plusieurs reprises déjà, elle avait failli renoncer à sa vengeance mais avait-elle seulement une autre motivation que celle-ci pour continuer de vivre? Pour le moment, aucune. A part peut être Aewen mais il s'agissait de tout autre chose, un droit au bonheur qu'elle ne s'accordait pas. D'un soupire agacé, la Jinmen chassait ces considérations hors de propos de son esprit. Pour l'heure, il lui fallait trouver un endroit pour la nuit ainsi qu'un point d'eau pour remplir ses gourdes ainsi que pour qu'Arashi puisse s'abreuver.

-" Nous arrivons Arashi... Encore un petit effort.... Et espérons que le puits soit encore irrigué." Soupirait-elle, posant des mots sur ses craintes pour les raisonner. En l'absence de personne à qui parler, Arashi était un interlocuteur de choix, toujours de son avis, jamais une parole plus haute que l'autre... Un vrai bonheur quoique manquant un peu de répondant. L'idée la fit sourire mais lui rappela également sa soif par la douleur de ses lèvres sèches s'étirant douloureusement. Elle espérait vraiment qu'ils trouveraient le refuge qu'ils venaient chercher ici.

De part ce qu'elle avait apprit des voyageurs qu'elle guidait, elle savait qu'il se trouvait une ancienne halte sur ce chemin poussiéreux, abandonnée bien sûr. Vu la fréquentation de cet itinéraire, ce n'était pas étonnant d'ailleurs. Une route plus longue mais aussi plus sûre avait la préférence de la plupart des voyageurs qui traversaient ces plaines mais elle n'avait pas de temps à perdre. La peur de rater à nouveau son ancien Maître la hantait alors elle n'avait hésité que peu de temps. Au loin se dessinait les contours d'une bâtisse qui semblait en piètre état. Un toit effondré sur lui même, un puits dont la margelle perdait ses pierres... Mais la grange semblait résister au temps et à l'abandon. Ce serait leur hôtel pour la nuit. Pas que ça la réjouisse de dormir dans un endroit dénué du moindre confort mais au moins, ils auraient un toit sur la tête et de l'eau.

-" Enfin... J'ai cru que cette journée n'en finirait jamais..."

La cavalière et sa monture se hâtaient d'arriver auprès du bâtiment et après un rapide examen des lieux, Kurai descella Arashi pour le soulager. Malgré la fatigue de la journée et la sécheresse de sa gorge, elle remplissait d'abord l'abreuvoir pour son compagnon de route avant d'étancher sa propre soif. Un miraculeux carré d'herbes poussait tout autour du puits, permettant à l'animal de brouter à son gré, nul besoin de l'attacher, il était parfaitement dressé à revenir auprès d'elle. Au moins pour ce soir, ils ne mourraient ni de faim ni de soif, en soit, c'était déjà une grande chose et un réel soulagement. Si elle devait mourir, autant que ce soit par la main de son maître que si bêtement morte de soif en plein désert...

Apaisée, la guide s'asseyait sur le bord du puits, observant les derniers rayons de soleil effleurer la Terre en mangeant quelques vivres qu'elle avait emporté, ses idées noires refaisaient surface avec l'obscurité qui s'abattaient sur les plaines au point qu'elle ne fit plus attention à rien, plongeant corps et âme dans sa solitude et ses doutes. Ses yeux se posaient machinalement sur les bandages à ses poignets avec une légère grimace de dégoût, cette magie la tuait autant qu'elle la sauvait mais elle n'avait que ça.

Il y avait une belle lumière rouge-orangée, distillée par un soleil agonisant comme une bougie en fin de mèche. Il tombait mollement vers l'horizon, ses derniers rayons venant caresser les nuages, leur conférant toute une gamme de teintes tirant vers le rose pâle. Dans l'air sec et immobile, six cavaliers avançaient à petit trot sur la silhouette de route qui fendait la pleine. Pas après pas, les sabots des montures crissaient sur les gravillons du chemin, seul son perturbant le calme du crépuscule. Jusqu'à-ce qu'une voix doucereuse pose une question sur un ton sarcastique.

"Hey, Nyv, t'es sûre que c'est la bonne route..?"

Celle qui répondait à ce nom haussa les épaules puis tira un parchemin accroché à la selle de son canasson. Ses doigts fins défirent soigneusement le noeud qui maintenait le rouleau avant d'étaler la carte devant son regard. Les yeux parcoururent le plan plusieurs longues secondes.

"Je crois... Je suis pas certaine, hein; mais je crois... Qu'on est perdus."

Cette petite phrase déclencha une dispute bruyante qui résonna longuement dans l'étendue à peu près vide qui entourait le groupe. Elle portait sur une multitude de sujets, des capacités intellectuelles de Nyv en passant par l'intégrité morale et la vie privée de sa génitrice. La jeune femme, face à tant d'agressivité, se défendait en menaçant les virilités d'à peu près tout le reste de la troupe d'une amputation rapide -mais douloureuse. Menant la meute, Seliand éclata d'un grand rire pendant presque toute sa durée. C'est d'ailleurs lui qui y mit fin, d'un subtil et diplomate toussotement qui se traduisait de manière très claire: "silence, bande de moules". Il pointa un doigt révélateur vers une petite ferme abandonnée qui se dressait sur le bord de la voie, et plus directement sur ce qui pouvait ressembler à un cheval et à une forme humaine à proximité du puits.

"Bon, bah je vais aller demander. Belfar, tu commences à préparer le repas? Je vais tenter de pas faire trop long."

Sur ses mots, le magicien fit légèrement accélérer sa monture, s'écartant du groupe désormais immobile. Son cheval trottina sur les trois ou quatre cents mètres qui les séparaient de leur destination. Arrivé sur place et une fois les pieds à terre, le nuà s'inclina légèrement devant la demoiselle, puis se redressa en arborant un large sourire en travers de son visage. Tout en parlant et sans la quitter des yeux, il s'affaira à frotter vivement les pans de son manteau rouge sombre pour en chasser la poussière sale qui s'était évidemment collée sur le vêtement pendant tout le voyage.

"Salut, je suis Seliand! Comment tu t'appelles? T'es toute seule, ici?"

Kurai posait un regard sur le groupe qui approchait à l'opposé de là où elle venait. Il aurait été difficile de ne pas les voir dans cette plaine à peine parsemée d'imposants rochers qu'on aurait dit tombés du ciel par hasard. L'une des personne du petit groupe se détachait de celui-ci et continuait d'approcher alors que les autres semblaient monter un campement rudimentaire. Pas qu'elle en ai spécialement quelque chose à faire mais dans un endroit aussi perdu que celui-ci, sur une route quasiment oubliée et empruntée le plus souvent par des guides chevronnés ou des bandits, il valait mieux rester sur ses gardes, surtout pour une femme seule.

Elle observait attentivement le cavalier approcher sans bouger de la margelle du puits, son regard se durcissant à mesure qu'il s'avançait vers elle. Pas un mot ne passaient la barrière de ses lèvres alors qu'il descendait de cheval. S'il avait fait arrêter le groupe plus loin c'est qu'il n'avait pas l'intention de faire venir toute sa bande dans la grange... Qu'est ce qu'il lui voulait alors? Son sourire ne l'aidait pas à être aimable ou ne serait-ce que patiente mais il se décida assez rapidement à lui adresser la parole... Mais pas comme elle l'aurait voulu.

Une légère grimace de mépris flotta sur son visage alors qu'elle se remettait sur ses pieds, l'air le plus froid de sa collection sur le visage.

-" On se connaît? Il ne me semble pas que l'on ai gardé les cochons ensembles, la moindre des politesse est de vouvoyer une personne que vous rencontrez pour la première fois."

Un accueil glacial et méprisant au possible, elle n'avait rien à offrir à Seliand alors ce n'était même pas la peine d'essayer de venir avec des questions pseudo amicales... Elle tenait à sa solitude autant qu'au peu de bien qu'elle transportait.

-"Il est évident que nous sommes seize dans mon kimono... Par ailleurs, je ne vends ou ne prêtes rien aux inconnus, je ne vis pas ici, Silmarie c'est par là" Elle désignait la direction dont elle venait du doigt puis reprenait: " Et Ptot Tah par là. Maintenant, si vous le permettez, je vais me reposer. L'eau du puits est potable. Bonsoir."

Elle tournait les talons avec un air qui signifiait clairement "t'es une crotte, pourquoi tu me parle?!" et sifflait Arashi qui revenait au petit trot vers elle. Loin d'être confiante, elle ouvrait la porte de la grange emplie de foin et cherchait déjà du regard de quoi la bloquer de l'intérieur mais à part un vieux et grand coffre ouvert sur ce qui semblait être des draps, rien qui puisse retenir la force de cinq assaillants. A force d'écumer les routes seule ou en tant que guide, elle avait apprit à ne faire confiance à personne lors d'un voyage, encore plus qu'en temps normal. Que ce soit par appât du gain ou pour soulager une envie de compagnie féminine, les hommes étaient parfois prêts à tout et au vue de la journée qu'elle venait de passer, utiliser la Maho pour se défendre aurait été une bien mauvaise idée surtout avec les compagnons de route du blond qui stationnaient à quelques centaines de mètres de là.

Ah là là, cette fierté déplacée était vraiment l'un des traits de caractères les plus exaspérants. Depuis un moment déjà, il tombait presque toujours sur des gens comme ça. Des petites frappes à la verve venimeuse et au ton acéré. Ce n'était pourtant pas compliqué: lorsque on se sent menacé, soit on fait face sabre au clair et on défend son honneur, soit on se recroqueville et on prie. S'enfuir en agitant la langue pour tenter de vexer l'adversaire, c'est d'une bêtise et d'une arrogance...

L'humeur de Seliand en prit un sacré coup. En plus, il n'avait même pas fait montre d'une quelconque agressivité! Mais si cette femme voulait que les évènements prennent cette tournure, pourquoi lui refuser ce souhait? Le magicien commença à s'approcher de la grange. Lentement, l'acier froid de sa dague coulissa le long de son bras. La lame tranchante en avant, elle tomba hors de la manche, et le nuà en saisit le pommeau d'un geste vif. Avançant d'une démarche rythmée, se balançant légèrement à chaque pas, il arriva près du bâtiment. L'arme tranchante tournoyait entre ses doigts.

"Allez, sois un peu polie mademoiselle! Tu pourrais au moins me dire ton nom, tu crois pas?"

Il se mit à sifflotter un air joyeux, tout en contournant la vieille bâtisse de bois usé. La porte était fermé, maintenant, et il se doutait bien que l'ouvrir serait pénible. Il devait probablement y avoir une autre entrée, comme souvent dans les granges. C'était sans doute une petite porte située à l'arrière. Au pire, il mettrait le feu à l'endroit, c'était amusant le feu, aussi. Moins qu'une belle danse, mais le nuà se contenterait de ce qu'il pourrait obtenir, évidemment.

"Ou bien tu es joueuse, c'est ça? C'est un jeu? Il faut que je t'attrape pour que tu répondes?"

Finalement satisfait de la tournure des évènements, le magicien eut un rire enjoué. Ca faisait quelque temps qu'il n'avait pas eu l'occasion de s'amuser, comme ça. Toujours dans les préparations, le recrutement, l'organisation; il était vraiment content de pouvoir changer un peu d'activité, surtout si le programme comportait une danse avec une inconnue, qui en plus l'avait bien cherchée.

Kurai frémissait rien qu'à entendre son sifflement, elle n'avait bien évidement pas répondu à sa première remarque, se contentant de fermer les portes de la grange avec un regard glacial, les consolidant d'une fourche passée au travers des poignets de celles-ci. Ce n'était pas grand chose mais déjà mieux que rien.

Elle poussait Arashi dans un coin plus isolé de la grande grange pour qu'il ne soit pas atteint en cas de combat. Il était précieux pour elle... Bien plus que toute autre chose. Grâce au sifflement de l'autre hurluberlus elle pouvait suivre son déplacement autours du bâtiment et elle se heurta à un tas de foin colossal lorsqu'il s’arrêta.

Cette énorme masse de foin s'était effondrée devant l'unique sortie alternative qui lui restait lorsque le plafond du grenier à foin avait cédé... Il bouchait totalement l'accès à la petite porte mais si elle n'avait pas la force et l’énergie nécessaire pour l'écarter de celle-ci, peut être que Seliand l'aurait. Maudissant sa malchance désormais légendaire, elle reculait vers le milieu de la grange, ne prenant toujours pas la peine de répondre au blond. Il semblait totalement fou, pas de ces gentils doux dingues qui proclamaient la fin du monde au coin des rues ni même ceux qui parlaient aux animaux... Plutôt du genre sadique et psychopathe en puissance. Le genre d'homme qui trouvait n'importe quel prétexte pour torturer et tuer quelqu'un, le seul motif? Leur amusement.

La Jinmen lança un regard tendu à Arashi, souhaitant qu'il ne lui arrive rien même si le combat venait à la tuer, qu'il puisse au moins s'échapper et filer vers les terres amazones. Il y retrouverait les siens et serait bien traité.

Kurai se calmait d'un souffle profond, il n'y avait pas beaucoup d'éventualités possible. L'autre semblait assez dingue et intelligent à la fois pour parvenir à passer ces portes ou à la faire sortir sortir, le combat était donc inévitable. Pas qu'elle soit très forte mais elle avait l'avantage de la Maho avec elle... Si c'était un avantage. D'un geste rapide, elle défaisait ses bandages aux poignets avant de les rouvrir d'une morsure chacun. Elle ne pourrait lutter longtemps, alors elle espérait vraiment parvenir à le mettre hors d'état de nuire très rapidement.

D'un geste presque négligeant, elle balançait quelques gouttes de son sang sur chacun des murs de la grange. S'il osait s'aventurer face à elle, elle ne le raterait pas. Prête au combat, bien campée sur ses jambes, son regard s'assombrissait alors qu'elle mobilisait déjà son énergie pour utiliser la Maho, la tenant en alerte.

-" Entres si tu tiens tant à jouer! Je t'attends!"

Le ton était sans équivoque. Elle ne se laisserait pas faire ni même intimider par Seliand. Plus que jamais, elle ne pouvait compter que sur elle-même pour se défendre et cette rencontre la confortait dans l'idée qu'elle devait sérieusement apprendre à s'exprimer de manière moins... froide.

Avec une lenteur toute calculée, Seliand avait fini de tourner autour de la grange. Il avait bien pris son temps, le but étant de faire mijoter la demoiselle, de la faire s'impatienter, s’inquiéter, s'effrayer toute seule. La peur des autres avait toujours fait rire le magicien, et son père montrait toujours une grande fierté lorsqu'il parvenait à faire frémir son adversaire (ou son public), dans la fosse, jadis. Mais il n'avait jamais très bien compris pourquoi les gens étaient aussi facilement effrayés par la danse. Est-ce que c'est aussi le cas avec le tricot ou la peinture? Il faut être tordu pour avoir peur d'un simple passe-temps.

Enfin, comme je le disais, le jeune homme se retrouvait maintenant derrière le vieux bâtiment. Et exactement comme il s'y attendait, une seconde entrée se trouvait là. Manque de chance, par contre, il semblerait qu'une quantité non négligeable de foin aie décidé d'obstruer la porte. C'était gênant, quand même: pourquoi avoir mis un énorme tas de paille devant une porte? Le type qui avait fait ça devait être une sacrée tête à claque. Dans tout les cas, Seliand n'avait désormais plus qu'une solution, mettre le feu.

Il prit une petite poignée de paille, tira son briquet à silex de la poche intérieure de son manteau rouge, et commença à frotter la pierre sur le bout de métal, faisant jaillir des étincelles sur les brins de foin secs qu'il tenait serrés. C'était long. C'était fastidieux. La sueur lui perlait au front, à force. En même temps, un manteau Astorg n'est pas idéal pour une randonnée dans les plaines arides. Et puis le vent rendait la tache compliquée. Heureusement qu'il deviendrait une forte aide une fois que les premières flammes auraient prises. Voilà, quelque minuscules braises rougeoyantes sur la poignée d'herbe. Le magicien se hâta de les glisser dans le tas de paille et souffla, souffla, souffla, pour qu'elles répandent leur chaleur brûlante. Rapidement, une fumée banche et âcre commença à s'élever. Et les premières flammes se mirent à crépiter. Bientôt, toute la bâtisse serait incendiée.

D'un pas vif, le nuà retourna vers l'autre porte, s'attendant à ce que la demoiselle en jaillisse d'un instant à l'autre. Tout en se balançant d'un pied sur l'autre, excité d'avoir bientôt sa dose de violence, Seliand espérait de tout son cœur que la victime qu'il s'était choisie ne soit pas une manipulatrice des flammes. Ou il serait -littéralement- cuit!

Merde. Voilà ce qu'elle pensait en entendant le briquet... Il y avait pensé avant qu'elle n'ai pu trouver un moyen d'éviter que le feu ne prenne sur tout le bâtiment.

-" Fait chier..."

Elle sentait déjà la fumer s'élever, vers le toit de la grange pour le moment mais elle ne tarderait pas à se répandre dans toute la bâtisse. Son piège tombait à l'eau, il lui fallait trouver un moyen de se défendre et de se dégager de la menace du taré dehors. Ça commençait à crépiter de partout, l'atmosphère se faisant de plus en plus en irrespirable. Arashi se mettait à piaffer d'affolement et elle s'empressait d'aller le détacher et de le rassurer.

-" Ca va aller mon grand. "

Kurai réfléchissait à milles à l'heure, se tournant en tous sens pour tenter de trouver une autre issue, elle ne doutait pas une seule seconde qu'il l'attendait face à l'entrée principale, prêt à en découdre. Son cheval lui donnait du fil à retordre pour l'empêcher de paniquer, risquant de se blesser mais ça finit par lui donner une idée. C'était risqué mais pas moins que d'attendre bêtement ici en attendant une pluie providentielle en plein désert... Bizarrement, ce n'était pas de la peur qu'elle ressentait, juste de la colère de s'être fait avoir, de la haine et de la rancune. Il n'en fallait pas plus pour la pousser à agir sans plus attendre.

Le plus silencieusement possible, elle retirait la planche qui barrait la porte et amenait Arashi devant la porte... Avant de lui asséner une claque monstrueuse sur la croupe. L'animal hennissait bruyamment et se jetait sur la porte, l'ouvrant à la volée pour se ruer dehors au galop. Sa monture ne s'arrêterait pas de courir de sitôt entre la panique des flammes et la claque qu'il venait de se prendre... Tant mieux, il ne serait pas là lors du combat qui s'annonçait.

Kurai sortait enfin du bâtiment en flammes, retenant difficilement sa toux pour garder un semblant de fierté face au blond. Il voulait jouer, elle était prête à en découdre, son sang ruisselant sur ses mains et goûtant sur le sol poussiéreux.

-" Tu voulais que je sorte, je suis là."

Derrière elle, la grange s'affaissait sans même qu'elle ne se retourne pour y jeter un oeil. Désormais, il n'y avait plus qu'eux d'eux.

C'était une joli spectacle, quand même, cet énorme brasier. La fumée s'élevait en un large torrent vers le ciel assombri, les remous à sa base s'illuminant de la lueur des flammes. Il y a quelque seconde, la porte de la grange s'était violemment ouverte, et un canasson rendu fou par l'incendie avait jaillit du bâtiment crépitant comme un démon hors de sa boite. Surpris que ce ne soit pas celle qu'il attendait qui débarque en premier, Seliand avait faillit se faire piétiner par la bête. Mais comme il se tenait déjà sur le qui-vive, il eut le temps de l'esquiver d'une gracieuse pirouette. A la suite de l'animal, une silhouette émergea du chaos. Forme féminine, sale et noircie, ensanglantée; droite et fière malgré la situation, elle prenait d'un coup une forme intimidante.

"Tu voulais que je sorte, je suis là."

C'en était trop. Bien trop pour que le nua puisse rester sérieux. Il se mit à applaudir, riant aux éclats. Tout prenait un air bien trop théâtral pour éviter la dérision. Calmant peu à peu son fou-rire, il offrit son plus beau sourire à la demoiselle.

"J'ai adoré, tu veux pas me la refai..."

Le son des sabots frappant le sol en rythme vinrent interrompre le magicien. Ce n'était pas la monture de la femme, déjà loin. Ni celle du jeune homme non plus, elle semblait complètement tétanisée, au bord du puits. Alors ça ne pouvait être que...

"Qu'est-ce que c'est que ce bordel? Tu ne devais mettre que quelque minutes, et on se retrouve avec un incendie?"

Oui, l'un des compagnons de route de Seliand. La voix, s'adressant en Astorg bien qu'ayant un fort accent Cydien, appartenait à un homme grand et fin, élancé, avec l'air d'un intellectuel plutôt antipathique. Il portait un long manteau noir brodé d'or, visiblement d'une très grande qualité et montait un étalon au pelage anthracite. Dès qu'il s’arrêta, il jeta un regard méprisant à la femme.

"Casse-toi, Delsini, je m'occupe d'elle et j'arrive. Gardez-moi du rab de souper. Et si tu pouvais rappelle à Belfar de pas laisser cramer ma brochette, cette fois, ça m'arrangerait."

"Mh. A ton service, chef. Si jamais tu te sens un peu trop faible pour y arriver, appelle-nous, muhuhu."

Il repartit rapidement, couvrant du fracas de ses sabots le juron que lui rétorqua le nua. L'air plutôt agacé, Seliand reporta toute son attention sur son adversaire.

"Avec tes bêtises, tu me mets en retard! T'as le droit à une punition, pour ça."

Tout ne dura qu'un bref instant. L'énergie s'éveilla dans tout son corps, dans ses os et ses muscles, dans ses yeux et ses mains, dans son ventre et son esprit. Il en fit une lance, un harpon, une pointe. Et d'un claquement de doigt, il la projeta comme un éclair dans la tête de la demoiselle, pour bouleverser sa réalité. Puis, pivotant rapidement sur lui-même pour donner plus d'élan, il lança la dague qu'il tenait vers le ventre de sa cible, tentant de profiter de la courte absence que provoquerait son illusion.

Elle restait stoïque face au fou rire de son agresseur, tendue mais prenant ça comme un peu de répit avant que le réel combat ne commence. La Jinmen ne doutait pas une seconde qu'il aurait lieu mais peut être serait-il encore retardé... Derrière le blond, un cavalier arrivait vers eux avec l'air aimable d'une porte de prison. Sur ses gardes, elle reculait d'un pas comme si cette précaution toute instinctive aurait pu la protéger des deux hommes...

Kurai n'aimait pas le regard du nouveau venu sur elle et elle lui rendait, brûlant de haine et plus méprisant encore. Certes, elle devait être pitoyable mais il se soumettait aux requêtes du blond, non sans une touche de moquerie au passage.... Preuve qu'il la sous estimait bien.

-" C'est ça, va faire la popotte..."

Seliand lâchait un juron qui l'aurait fait sourire si son ardente attention ne se tournait pas vers elle, visiblement agacé de devoir retarder son repas.

-"Avec tes bêtises, tu me mets en retard! T'as le droit à une punition, pour ça."

Il était sérieux là ? En même temps, elle s'étonnait de cette soudaine perte de bonne humeur alors que cet homme l'attaquait sans même avoir une raison valable! Et il venait de détruire le seul abris potentiel à des lieues à la ronde dans ces plaines arides... Ne fallait-il pas être fou pour se prêter à de pareils actes ?

Kurai n'eu pas le loisir d'y réfléchir davantage. Le nua la saisissait d'un sort qu'elle ne connaissait pas et qui l'atteint de plein fouet. La jeune femme se figeait, ses yeux s'acarquillant sur ce qu'elle voyait, qui n'était pas sa réalité mais une autre, plus onirique et pourtant encore plus sombre. Une vive douleur dans le ventre, similaire à celle infligée par la main de son ancien maître....

✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥

Elle baissait les yeux pour voir ce qui la blessait, lui coupant le souffle mais ce n'était pas une arme, un serpent fait de ce qui semblait être de la cendre et immense sortait de son corps, lui arrachant un cri de souffrance. La vive douleur la fit tomber à genoux, haletante, effrayée par l'horreur de cette scène. Sous ses doigts, ce n'était pas la terre craquelée des plaines mais des crânes, des crânes humains qui s'entassaient pour former un monticule qui lui sembla démesurément haut soudain.

Elle était désormais seule sous un ciel de sang et de cendre, tumultueux quand une mer déchaînée, quand ce monde s'était-il dérobé sous elle ? Aussi effrayant put-il être, il lui semblait le connaître, comme un vieux souvenir ou quelque chose que l'on rencontrait tout les jours au point de ne plus le voir...

* Reprends-toi! Ce... Ce n'est pas la réalité!*

Ses doigts se crispèrent sur les ossements qui jonchaient le sol mais alors qu'elle allait se relever, le serpent revenait avec deux de ses congénères, l’enlaçant, presque tendrement, sans lui faire de mal mais sans lui laisser la moindre chance de se défaire d'eux. Ils la relevaient en lui donnant la désagréable sensation d'être... Importante pour eux, ces monstres d'écailles qui se montraient quasiment affectueux, frottant leurs têtes à ses mains, à son menton...

-" Lâchez-moi!"

* Non Mère... Nous devons t'aider.*

-" Mère ?"

* Nous as-tu déjà oublié ?*

La Jinmen n'osait répondre, ils auraient très bien pu la broyer en quelques secondes et ses os fragiles n'auraient pas tenu face à la taille colossal de ces animaux.

* Nous sommes tes fils, Haine, Vengeance et Souffrance. Ne t'alarme pas, bientôt Folie nous rejoindra...*

-" Folie ? Qui... Qui est-ce ?"

* La voilà...*

Incapable de bouger, Kurai ne pouvait qu'observer, des ossements sortait quelqu'un, squelettique, des cheveux sombres, un kimono blanc, le deuil.. Tâché de sang. Une autre Jinmen? L'inconnue définitivement féminine se redressait, ses cheveux masquant encore son visage lorsqu'elle rampait sur les crânes pour en rejoindre le sommet, Kurai et ses "fils". Elle était là avec ce lampion, celui que l'on utilisait pour les veillées funèbres dans son peuple, elle se redressait enfin, fantomatique et pourtant lui paraissant si réelle, si... Elle-même. Cette femme, c'était elle!

-" Non! Vas-t-en!"

Kurai fut prise de panique en la voyant approcher, si différente et à la fois si semblable à elle mais impossible de bouger, ses fils l'en empêchait et un phalange osseuse se posa sur ses lèvres. Brusquement, le visage cadavérique n'était plus qu'à quelques centimètres du sien.

-" Chut... Calme toi Kurai, ma soeur.... Je suis là pour t'aider."

-" ... Allez vous- en..."

-" Ne vois-tu pas que je viens te prêter ma force? Je suis toi autant que tu es moi, tu nous chasse depuis trop longtemps et aujourd'hui, tu as besoin de nous..."

-" NON! Je... Je ne suis pas comme toi!"

-" Si... Tu es moi. Je suis ta Maho, je suis ton propre sang, ta vie à l'état pur. Tu me laisse filer trop librement."

Ses mains se glissaient dans les siennes, son corps s'imiscant dans le sien dans une brûlure de souffrance qui tirait un cri d'horreur à la Jinmen, elle se serait cru mourir avec cette douleur mais ça ne durait pas... Tout à coup, tout s'estompait, ne restait que ses fils et elle.

* Que tu es belle mère...*

Kurai rouvrait les yeux, fixant les alentours, plus trace de ce semi squelette qui disait être elle... mais en osant regarder l'un de ses fils, elle vit sa main, amaigrie, ne lui laissant que la peau sur les os...

-" Non..."

-" Je suis toi, je te l'ai dit. Désormais je serais tout le temps à tes côtés pour t'aider. Laisses-toi aller et permets moi de te seconder..."

-" ...Je..."

Elle ressentait une étrange plénitude angoissante, pleine d'un force, de quelque chose de sombre et orageux mais à la puissance dévastatrice tourbillonnant dans son ventre...

-" Regarde comme tu es forte et belle désormais... Laisse-moi t'aider."

-" Folie..? "

-" Oui ? "

-" Aides-moi..."

Elle aurait presque pu la voir sourire au creux de son être, ses fils semblaient ravit, avides à l'idée de se dévoiler enfin sans chaînes. L'esprit de Kurai se réfugiait en Folie, lui cédant la place, épuisée. Il était temps de ne plus se retenir, de se perdre, de laisser ces êtres si étranges et familiers à la fois prendre le dessus... Sa seule volonté n'avait rien donné de bon, se retenir, être discrète, ne tuer qu'en cas de danger imminent... Tout ça en contenant sa soeur et ses fils, elle et ses sentiments les plus profonds, les plus noirs et pourtant si représentatifs de ce qu'elle était...

Spoiler:

✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥ ✥

Sur le sol poussiéreux, Kurai se redressait lentement, le regard vide mais semblant calme et sereine. D'une main qu'elle passa sur son ventre, elle teinta ses doigts de pourpre et sourit, ravie de voir son sang malgré la douleur.

-" Il me semble que c'est à toi que je dois ma liberté... Mais je ne t'autorise pas à me blesser!"

La Jinmen arrachait la dague de ses chairs avec un violent spasme de douleur mais sans se départir de son sourire alors qu'une flopée de sang se répandait à ses pieds. D'un regard presque admiratif, elle fixait l'arme teintée de carmin avec un sourire avant de lui renvoyer... Pas forcément dans le but de blesser d'ailleurs.

Seliand voguant vers d'autres terres, le RP est terminé. Merci de votre compréhension.

Désengagés : Seliand, Kurai

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[Terminé][DA - PV Seliand et Clovis] Et la Folie s’abattra sur le Monde... .:Chapitre I:.

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