[D-A] Férus de Fer ou As de l'Acier ?

- Voilà quelques jours que le Spadassin avait pris ses quartiers dans cette "nécropole de glace", il n'y avait pas d'autres qualificatifs à exposer sur cette cité. Si ce n'est sa rencontre avec une badaude un peu éméchée, son escale n'avait pas porté ses fruits. Si on parlait des Astorgs comme de géants redoutables, on oubliait de dire que leurs gens n'étaient que des traine-savate qui faisaient leur dents de lait sur du menu fretin.

- Syndrome de l'aberration à grande gueule, mais aux petites pattes. Toujours est-il qu'Abisheï avait passé sa journée non-loin de la caserne, a lorgner la milice "s'entrainer". Analysant leur technique de combat, leurs bottes ainsi que leur système de ronde. Initiative qui ne pouvait qu'être bénéfique pour la préparation de futures ... intrusions ? Il avait finit par échanger quelques passes d'armes avec des membres de la garnison. Émulation qui lui avait alors apporté une révélation, il devait s'équiper. Sa fidèle Nogphushankaas, bien qu'efficace, était une entrave pour les rixes en lieux clos. Après avoir parcouru deux petites échoppes, louché sur l'arsenal de la garde et inspecté quelques râteliers, il n'avait fait l'inventaire que d'un monceau de vieilles lattes rouillées. Las et de toute évidence irrité, le Baroudeur était allé chercher sa monture chez le palefrenier.

- C'est donc rennes à la main, aiguillant Ashürel, son cher bourrin, qu'il arpentait les artères de la ville. Bientôt posé sur un banc de pierre grossièrement taillé près du rempart Sud, il flattait l'encolure de son comparse de cavale. Bouffarde suspendue aux lèvres, regard perdu vers la voûte couverte d'une strate de nuages compacts. Il semblait presque s'attendre a ce que ceux-ci déversent sur lui, une pluie drue et glacée. Oui, monter une caste valable. Souder une élite et réussir a construire quelque chose avec ce groupe, lui sembla aussi ardu que de commettre un parricide armé d'une cuillère, chaussé de bottes ferrées. Et trouver des armes exotiques en Storghein semblait tout aussi difficile, pour ne pas dire impraticable.

" Ah. Tu as la chance d'avoir des fers mon ami ... Je suis certain que tu aurais rendu ce paltoquet eunuque si il n'avait pas fait un travail d'orfèvre avec tes sabots crottés. "

- Ricanant silencieusement, l'Almer hocha la tête avant de s'essayer à l'ébauche de quelques silhouettes fantasmagoriques, avec la fumée qu'il recrachait. Ces spectres informes alors s'envolaient pour combler ce ciel pâle et chargé. Une légère bruine commença à tomber.

Le ciel m'a toujours frustré.
Mes pas résonnaient dans les allées de terre battue de la cité Storghein, mon regard azur se perdant dans l'infinité céleste.
C'était beau, pur, magnifique. Des dizaines de nuances se mélangeaient sur le plafond du monde, titillé ici et là par des couleurs plus sombres ou plus claires tels le vert ou le noir, constellé d'amas cotonneux, tels le duvet des cygnes, nuages emplis de gouttes qui n'attendaient qu'un ordre pour se déverser toutes ensemble sur moi et les géants blonds qui peuplaient ces montagnes.
Le ciel m'a toujours frustré.
Je n'ai jamais réussie à capter entièrement sa profondeur, lorsque je construisais mes rêves. Il y avait toujours quelque chose d'absent, toujours quelque chose qui laisse ce goût d'inachevé, d'insatisfaction. Pour quelqu'un d'aussi perfectionniste que moi, le ciel était une énigme, un obstacle, une barrière qui s'élevait inlassablement.
Ou un plafond, dans ce cas-là.

Je me languissais de Silmarie, et de ses vertes forêts.
De plus, je ne trouvais ici, aucune clientèle qui serait intéressée par mes dons.
Et je venais de dilapider mes derniers deniers, je devais m'abstenir de mon prochain repas.
Et ça, ça ... Ça ne passerait pas, je refuse de me passer d'un repas, quel qu'il soit.

En habillement léger, c'est à dire sans ma lourde armure de plaque, mon regard se baladait, songeur, alors que je m'engouffrais dans les profondeurs de la ville, à la recherche de quelqu'un pouvant répondre à mes souhaits.
Le rempart Sud fut finalement en vue, aussi semblable que ces trois frères. Mais, sur un des bancs taillés en sa proximité, un regard attentif me permit de découvrir un sombre cavalier, somme tout mignon.
Il était temps que j'utilise magnifiquement mes dons dans la linguistique.
Je m'avançais sur un pas aérien, dans mon regard songeur qui pouvait très bien dire que j'arrivais ici par hasard, vers lui et son puissant canasson, me pointant juste devant lui et m'exclamant par la suite, joyeusement :

- Bonjour ! Pain au chocolat ?!

Ces deux mots étaient vraiment mes préférés. J'en connaissais quelques autres, pas beaucoup plus, mais qui m'ouvraient bien des portes, partout où j'allais.
C'était vraiment quelqu'un de bien, ce Naesala. Dommage qu'il se soit pris un coup de masse à ma place, sa tête a pas aimé.
Enfin, je crois ?