[D-A] Inside man, l'homme de l'intérieur (mission Kiera) (fini)

Le temps était sans doutes venu de dire adieux.
C'était à peu près ce que tout le monde avait pensé en voyant l'adversaire que Maximus devait affronter dans l'arène le lendemain. Lui, le Soumis s'étant cru plus malin que les autres en choisissant de devenir gladiateur pour "payer sa dette" plutôt que de devenir un larbin au service des amazones. C'était aujourd'hui lui qui se faisait prendre à son propre piège car l'adversaire qu'il aurait à affronter le lendemain ne serait pas des plus facile, pire encore, il serait le dernier. Et Kiera le savait, tout le monde le savait, Maximus n'était pas à la hauteur, personne ne l'avait jamais été contre lui.
Le Soumis n'avait donc aucune chance de s'en sortir ... cela promettait en d'autres termes. Même la Chef des Sentinelles ne pouvait intervenir, seule la reine pouvait le faire et il était évident qu'elle avait d'autres chats à fouetter que de s'occuper d'un Soumis dont le sort était de mourir dans l'arène. La guerre, la disparition de sa fillette, tout ceci était beaucoup plus important que la mort d'un homme dont elle ne connaissait même pas le nom. Si Kiera voulait sauver son bien-aimé, il lui faudrait agir vite et surement trahir ... j'dis ça j'dis rien.

Si un jour on m'avait dit que je tomberais amoureuse, je crois que j'aurais ri au nez de celui qui aurait osé me dire ça. Mais c'était bel et bien le cas. Maximus n'avait pas été le premier homme à partager mon lit bien au contraire, toutefois, il avait le premier à ne plus le quitter, ce qui en soit relevait d'un exploit. Je n'étais pas particulièrement attirée par les hommes, ni par les femmes d'ailleurs. J'avais toujours pensé que les hommes étaient monstrueux et lâches, à l'image de mon père qui nous avaient abandonnées ma mère et moi alors que j'étais enfant. J'avais toujours pensé qu'il valait mieux les éviter ou tout au moins, éviter de s'y attacher mais il était différent. Dès le premier soir, il avait su conquérir mon corps comme mon cœur. Dès le premier soir, j'avais espéré que l'éternité me préserve de la mort, que le temps ne cesse de s'écouler pour rester à ses côtés à jamais. Jamais auparavant je n'avais ressenti cela et c'est à partir de ce jour que je me suis rendue compte que tout ce que l'on disait dans cette cité n'était pas le reflet de la réalité, pas toujours du moins. Les hommes que toutes ces femmes avaient fui n'étaient pas tous les mêmes. Certains valaient le coup, d'autres non, n'en était-il pas de même parmi nous ? Maximus avait su ouvrir mon esprit jusque là fermé à toutes idées étrangères concernant la gente masculine. Il avait su ouvrir mon âme à leur cause. J'avais alors pu savoir ce que c'était d'être de leur côté, du côté de ceux qui ne connaissent pas la liberté avant d'avoir fini leur tâche en nos murs. Les Soumis ... j'avais jusque là pensé que c'était normal d'avoir des Soumis, des hommes qui permettraient de faire tourner la cité dans tous les domaines qui leur étaient réservés sans en avoir les inconvénients. J'avais toujours vu leur situation comme telle et je ne pensais même pas qu'elle puisse évoluer un jour. Qu'elle doive évoluer. N'étaient-ils pas une forme de mal ambiant ?
Maximus avait donc ouvert mon esprit, ainsi, j'en étais venue à douter de la cité elle-même, de la manière dont nous traitions les Soumis et, pour éviter que ma bonne foi et ma fidélité ne flanche, j'avais préféré être mise au service de la petite Jelenna plutôt que de rester à les surveiller. Je finissais en effet par voir leur situation comme injuste, par vouloir les aider alors que je n'aurais même pas du avoir ce genre de pensées ... en réalité, je voulais surtout l'aider lui. A chaque combat qui s'annonçait, je trouvais sa situation des plus absurdes. Pourquoi devait-il se battre pour notre plaisir ? Pour survivre ? Je trouvais cela tellement injuste et pourtant, je ne pouvais rien faire de plus que de l'observer, le regarder combattre quand je le pouvais, l'imaginer quand je n'étais pas sur place. Et chaque fois, je craignais de le perdre mais chaque fois, il revenait. Il était là, m'attendant dans mon lit, m'attendant moi, Kiera. La chef des Sentinelles n'existait pas dans ses bras et j'avoue que c'était une place bien confortable. Mais ce soir, ce soir ce n'était pas pareil.

Le dernier.
Il m'annonça le nom de son adversaire dans un souffle comme si lui-même ne croyait pas à sa victoire. Il n'y avait jamais cru, lui qui d'ordinaire était si confiant était tel un enfant apeuré ce soir. Je connaissais cet homme ... ce combat était en effet perdu d'avance. J'avais vu l'homme en question. Grand, musclé, un dieu vivant dans les murs de Muria. En réalité, il était choisi par mes sœurs pour punir ceux qui contrevenaient trop aux règles et il semblait que Maximus en fasse partie. Sauf que d'habitude, les Soumis abandonnaient la partie avant le combat et se rangeaient docilement mais ce n'était pas le cas de mon compagnon, jamais. Il préférait mourir, ce qui serait le cas à coup sur.
Aucun espoir.

" Maximus ... "

Je ne savais pas quoi dire. J'étais incapable de le raisonner et incapable de faire changer d'avis mes sœurs. L'ordre venait de trop haut, de Philéa elle-même suite aux plaintes des amazones chargées de le surveiller. Je ne pouvais que reconnaitre que Maximus n'était pas un Soumis facile, il désobéissait aux ordres, ne faisait que ce qu'il voulait et pire que tout, n'hésitait pas à se montrer violent s'il le pouvait envers les Sentinelles qui le gardait. Non, franchement, il n'était pas possible de l'aider. Je ne pouvais plaider sa cause auprès de notre souveraine tout comme je ne pouvais pas l'aider à se sortir de ce mauvais pas. Combattre pour lui ? Mais bien sur, quelle idée stupide. J'avais des attributs qui ne passeraient pas inaperçus et ma taille de guêpe comme ma taille tout court n'aideraient pas. C'était l'idée la plus sotte que j'ai eut. L'empêcher de combattre ? Non, il avait été condamné à mort rien de plus. Le blesser pour qu'il ne puisse pas combattre c'était le condamner tout de suite à mort. Ne me restais qu'une idée ... tout aussi folle que les autres. Une idée qui me terrorisait encore plus que de le perdre.

" Maximus ... si ... si tu t'enfuyais ? "

L'homme attendait, perplexe.
Visiblement, il se demandait ce qu'il allait devenir. Il était évident que la mort l'attendait dès le combat entamé et bien sur, il n'avait aucune envie de mourir. Mais la question était : comment s'en sortir sans casse alors que visiblement, il n'y avait aucun espoir. Kiera était la solution.
Elle avait toujours été là pour lui éviter le pire, ce soir, il en attendait donc beaucoup d'elle. C'était son unique chance. Et comme par miracle, elle venait tout juste de lui offrir la solution sur un plateau d'argent voire même d'or. S'enfuir, elle était prête à l'aider. C'était un vrai petit miracle.

" Tu m'aiderais ? "

La réponse était évidente vu ce qu'elle venait de dire mais la question était de savoir comment elle allait faire pour qu'il puisse quitter la cité.

Je regardais l'homme avec qui je partageais ma vie depuis quelques temps maintenant sans vraiment oser formuler ce que mon cœur me criait. Bien sur que je souhaitais l'aider mais étais-je pour autant prête à faire ce que je venais moi-même de lui soumettre comme idée ? Un moment, je fuyais son regard, n'osant pas lui répondre. Que devais-je répondre de toute façon si ce n'était que mon devoir envers la cité était plus important que tout le reste pour moi ? Que je devais le laisser derrière moi alors même que je venais de lui laisser entrevoir un espoir de survie en lui proposant de fuir. Et puis, il y avait cette épée de damoclès au dessus de sa tête. Si je ne l'aidais pas, le combat du lendemain signerait sa perte, je ne pouvais pas l'ignorer.
Les minutes s'écoulèrent et pourtant, rien ne me venais en tête. Ni idée pour l'aider, ni idée pour m'aider moi-même. Je ne pouvais pas l'abandonner, ma conscience comme mes sentiments envers lui m'interdisaient de le faire mais je ne pouvais pas non plus me résoudre à trahir Muria, pas après tout ce que la cité m'avait apporté et après tout ce que je lui avais moi-même apportée. J'étais la Chef des Sentinelles, en cette période troublée, comment ma trahison serait-elle prise par les amazones alors que je représentais la main armée de leur reine ? Philéa en perdrait de son influence, la cité en serait ébranlée et pire que tout, je serais exécutée sans sommation pour un crime que j'aurais commis en toute impunité. Quel était mon intérêt d'aider Maximus à fuir si c'était pour mourir à sa place ?

Alors quoi ?
M'enfuir avec lui ? C'était une possibilité qui avait effleuré mon esprit mais maintenant qu'elle devait se concrétiser, ce n'était plus la même chose. C'était comme si mes convictions et mes certitudes quant à Maximus se brisaient contre le mur de ma raison. J'avais des responsabilités et je l'aimais certes mais que devais-je choisir ? Pourquoi choisir d'ailleurs ? N'y avait-il pas d'autres choix à ma disposition ? Pas en si peu de temps. J'aurais pu influencer Philéa pour qu'elle repousse la date de son combat même si cela aurait éveillé les soupçons, j'aurais pu lui dire la vérité et jouer de mon grade pour obtenir quelque chose, ne serait-ce qu'une sorte de remise de peine mais tout cela aurait prit trop de temps.

Je lui avais proposé de partir sans réfléchir.

Le cœur a ses raisons que la raison ne connait pas. Mais ma raison n'avait pas envie de gâcher sa vie, pas envie de laisser partir non plus l'homme de sa vie. Alors que devais-je faire ? Maximus semblait attendre une réponse, tous ses espoirs reposant désormais sur ma personne. Prenant mon courage à deux mains, je m'apprêtais à décliner mon offre, mais ses yeux me firent perdre la tête le temps de murmurer un "oui".
Comprenant mon erreur au moment où il soupira de soulagement, je ne pouvais pas me résoudre à lui dire que j'avais agi sans réfléchir, sans solution. Maintenant que je venais d'accepter, même à demi mot, la question était de savoir ce que j'allais faire. Les rondes étaient organisées la nuit et j'étais bien trop connue de mes Sentinelles pour passer inaperçue, surtout avec ma jument. Il faudrait se passer de la jument et éviter les Sentinelles, c'était faisable, mais cela impliquait également que je signais mon forfait. Qui d'autre que la personne ayant mis au point ces tours de garde pouvait faire évader un Soumis sans que personne ne s'en rende compte ? Non, c'était impossible. Il faudrait une évasion spectaculaire, qui se remarque, sans quoi, les preuves m'accuseraient.

Maximus s'assit sans rien dire, visiblement en train de réfléchir lui aussi à la situation. Finalement, je ne parvenais pas à trouver un quelconque plan qui ne me relie pas à lui. Fatiguée, lasse et désespérée, je m'asseyait à côté de lui, posant ma tête sur son épaule. Soupirant, je lui demandais :

" Comment faire ... quoi que je pense, tout reviens toujours à me demander ce qu'il adviendra de moi une fois que tu seras partie. Ne pense pas que je sois égoïste, c'est juste qu'il faut que je pense à rester en vie une fois que tu seras hors de ces murs. "

Sans parler qu'il fallait que je tienne mon rôle. J'aimais cette cité tout autant que lui même si c'était idiot à dire. Mais cela, je n'osais pas le lui avouer. Peut-être aurait-il une meilleure idée que moi ...

L'homme t'observa, visiblement déçu de ta réaction. Pourtant, il passa son bras autour de tes épaules et n'ajouta rien. Ce simple geste signifiait sans doutes qu'il ne t'en voulait pas. Il se mit alors à réfléchir comme jamais auparavant il n'avait eut à le faire. S'évader de Muria était un rêve et d'autant plus urgent qu'il allait y laisser sa peau le lendemain dans l'arène s'il ne faisait rien ce soir. En réalité, il avait espéré que tu trouverais la solution toute seule mais comme ce n'était pas le cas, comme toujours, il allait devoir s'en sortir seul. Avec ses propres moyens.
Il ne parla pas pendant plus de vingt minutes, vingt longues minutes de silence durant lesquelles aucun bruit ne vint perturber sa réflexion, aussi désagréable cela soit-il pour toi. En effet, l'atmosphère dans la pièce ne donnait pas vraiment envie d'y rester.

" Je crois que j'ai un plan. "

Il tourna alors la tête dans ta direction, te fixant droit dans les yeux.

" Tu es chef des Sentinelles, tu as donc les clés des cellules. Il te suffira d'ouvrir ma cellule environ deux heures après que je sois rentré, personne ne connait notre relation, tu ne seras pas soupçonnée pour cet oubli. Ensuite, je me débrouillerais pour sortir du chantier, je pense pouvoir le faire sans problème. "

Il se tut un instant avant de reprendre, sérieux :

" Tu devras m'attendre près de l'école, le soir, il ne doit pas y avoir trop de roulement par là non ? Ensuite, toi qui connais la cité, tu pourras bien nous trouver une porte à la dérobée non ? Et comme les amazones connaissent bien la cité, tu ne seras pas soupçonnée car n'importe qui aurait pu agir de la sorte pour m'aider et même, j'aurais pu trouver moi-même la porte un jour de sortie. "

Il s'arrêta une deuxième fois et reprit enfin :

" Demain matin, lorsque l'alerte sera donnée, tu seras forcément convoquée par Philéa, fais comme si de rien n'était entre nous, soit en colère je ne sais pas mais ne laisse rien transparaitre, tu en es capable non ? Et puis ensuite, lance toi à ma poursuite, tu auras ton excuse et en ce qui nous concerne, on avisera pour la suite. Qu'en penses-tu ? "

Apparemment, il avait pensé à tout.

Je ne savais pas quoi faire.
Ma vie semblait s'écouler devant mes yeux. Je me disais qu'il n'y avait rien de pire que de devoir choisir entre Maximus et ma cité mais je ne savais pas comment réagir. Cette contradiction me prenait littéralement la tête et rien ne me venait à l'esprit pour me sortir de ce mauvais pas. Dans le premier cas, je perdais l'homme que j'aimais pour toujours car il était évident qu'il ne survivrait pas à cette épreuve. Dans le second cas, je perdais la confiance de ma souveraine, mon poste de Chef des Sentinelles et pour finir, je serais condamnée pour trahison et surement ne survivrais-je pas à cela, ne serait-ce que par honte. Comment pouvais-je choisir entre les deux choses les plus importantes dans ma vie. Maximus mit fin à mes pensées. Apparemment, il était évident qu'il était plus doué que moi pour échafauder les plans et le pire était sans doutes que je pensais que le sien était le plus adapté à notre situation. Il semblait détenir la vérité entre ses mains, rien que parce qu'il répondait à mon dilemme. Il venait de me prouver qu'il comptait vivre avec moi et prenait soin de ne pas me mettre en porte à faux vis à vis de ma cité natale.

« Maximus … »

Je regardais l'homme que j'avais choisi par pur caprice un soir où je me sentais un peu seule et plongeais mon regard dans le sien. Finalement, c'était peut-être le destin qui m'avait fait rencontrer Maximus et non le pur hasard d'une nuit solitaire. Quoi qu'il en soit, il semblait avoir raison, son plan semblait sans accroc et c'était le principal. Je récapitulais la scène dans ma tête et me décidais à répondre après quelques minutes de silence :

« Nous allons donc faire cela. Je viendrais ouvrir ta cellule d'ici trois heures. Les Sentinelles en poste seront à la surveillance de l'arène. »

L'homme se leva, étrangement satisfait à mon goût mais je prenais cela pour un espoir nouveau. En effet, de cette sortie de la cité dépendait sa vie. Il quitta les lieux après m'avoir embrassée. En attendant l'heure venue, je me préparais à ce que j'allais accomplir. Dans ma tête, la honte se mêlait déjà à la culpabilité. Je venais de faire le choix entre ma fidélité envers ma cité et celle que je pouvais avoir envers lui. C'était sans doutes mal et je m'en voulais déjà mais je n'avais pas le choix. C'est ainsi que j'arrivais à me calmer. Devant les injustices sourdes, il fallait bien que je réagisse.

L'heure était venue d'accomplir mon forfait.
Mon cœur tambourinait à mes oreilles. J'avais peur, je craignais qu'on ne découverte subterfuge, je craignais plus que tout de perdre la confiance que les amazones m'avaient accordée. Mais mon amour me guidait et cela me paraissait encore plus étrange lorsque je me penchais sur la question. Moi qui n'étais pas capable de me lier d'amitié avec qui que ce soit en dehors de Gäelle, voilà que j'étais amoureuse au point de remettre en cause tout ce qui jusque là avait fait partie de moi, me définissait.
La cellule de Maxime n'était pas surveillée, comme prévu. Je pris les clés avant de l'ouvrir et l'homme fila au plus vite. Il était évident qu'il ne devait pas perdre de temps en discutaillant avec moi mais sa réaction me fit quand même mal. Avec tous les risques que je prenais pour le faire sortir, j'aurais espéré qu'il réagisse … d'une autre façon, même si j'étais incapable de dire qu'elle réaction j'aurais aimé qu'il ait. Quoi qu'il en soit, il fila comme prévu dans la rue sombre. Nous devions nous rejoindre plus loin …

[ J'espère que je n'ai pas trop avancé! ]

Petite jeune fille fais attention, tu joues avec le feu !
L'homme que tu venais de libérer ne prit pas la peine de te saluer, il fila dans l'ombre vers votre lieu de rendez-vous et ce, sans demander son reste. C'était déjà bien trop beau que tu ai décidé de l'aider alors des fois que tu reviennes sur ton choix, mieux valait filer ? Sans doutes était-ce ce qu'il pensait, mais peut-être que je me trompe. Quoi qu'il en soit, il partit en direction de l'école comme prévu. Les Sentinelles étaient en effet rare autour de l'école le soir, considérant que les Soumis ne passeraient pas par là pour sortir de la cité, c'est vrai que les lieux ne donnaient pas trop envie m'enfin là n'est pas la question. L'homme t'attendait près de l'école, caché dans l'ombre. Tout allait bien jusqu'au moment où deux amazones passèrent non loin de lui.

" Qui va là ? "demanda la première Sentinelle, ayant entendu du bruit.

Heureusement pour toi, elles venaient de t'entendre, toi, et non le gladiateur. Tu avais intérêt à bien jouer le jeu sans quoi, votre aventure allait s'arrêter ici !
Bon courage en tout cas, mais en tant que Chef des Sentinelles, tu ne devrais pas avoir trop mal, n'oublie pas toutefois les conséquences de ce que tu es en train de faire petite Sentinelle ...

[ Ne t'en fais pas, je m'adaptes. Le but est de te débarrasser des amazones, tu peux aller jusqu'au moment où vous vous trouvez près des portes pour sortir. ]

J'avais vu filer Maximus qui n'avait pas pris la peine de me dire quoi que ce soit. Dans cette situation, qui aurait voulu s'attarder ? Il avait préféré fuir et c'était sans doutes beaucoup plus sage de sa part. J'avais attendu avant de le rejoindre près de l'école comme convenu mais là encore, les choses ne se passaient jamais comme prévue. Là où Maximus avait pensé à tout, il avait omis le détail de penser aux éventuelles Sentinelles et moi, comme une idiote, j'avais complètement oublié de vérifier leur trajet. Dire que c'était moi qui l'avait fait ... La Sentinelle avait senti quelqu'un et heureusement pour mon compagnon, ce n'était pas lui mais bel et bien moi. J'hésitais un instant avant de sortir de l'ombre mais je me doutais que plus je prenais le temps de réfléchir, moins la Sentinelle resterait à sa place et plus le Soumis avait de chance de se faire découvrir ! Je décidais donc de sortir de l'ombre et me présentais à la Sentinelle, adoptant un air déterminé. Sans lui laisser le temps de réagir, je précisais d'une voix forte :

" Un Soumis s'est échappé, cet espèce de salaud m'a échappé un peu avant l'école, je suis sure qu'il est parti par là," et je leur montrais la direction opposée, " mais je cherchais de l'aide pour être plus efficace. Je savais que vous étiez là, maintenant, aidez-moi. "

Faisant mine de réfléchir, j'ajoutais :

" Toi par là et toi de l'autre côté, si jamais il est encore ici, on le prendra en tenaille. "

Les demoiselles m'obéirent et quelque part, je me sentis coupable de leur mentir. Elles allaient perdre leur temps pour rien et c'était de ma faute ... Tant pis, Maximus devait survivre ... Et justement, alors que les Sentinelles filaient dans la direction que je leur avais indiqué, il sortit de sa cachette, venant à mon encontre. Il me fit un signe dans la direction à prendre et je le suivais. Petit à petit, nous évitions les rues encombrées, les Sentinelles qui cherchaient l'évadé en question qui ne l'était pas encore et enfin, nous arrivâmes à la porte de sortie. Enfin !

La porte de sortie était juste devant vous et par chance, aucune Sentinelle ne la gardait. Bien sur, tu devais t'en douter mais le fait de le constater devait te rassurer. Et sans doutes cela devait-il rassurer Maximus aussi. Ce dernier avança, posa un pied en dehors de la cité et souffla bruyamment. Il était enfin sortie d'affaire, enfin presque. Il se retourna vers toi et sourit.

" Merci Kiera, sans toi, je n'aurais rien pu faire. "

Il s'approcha et déposa un baiser sur les lèvres de ce qui avait été sa promise.
Etait ?
Les choses changent et parfois, ce n'est pas une bonne chose. Parfois, on fait des choix qui nous mène loin, très loin et Maximus avait fait ce choix. Il avait décidé dès le premier jour que tu lui serais utile. Et il avait eut raison mais maintenant, c'était fini, il était sorti d'affaire et c'était certes grâce à toi, mais cela ne changeait rien. Maintenant, il était libre et tes idées de vivre avec lui prenait fin ici même. Il sourit une nouvelle fois, heureux.
Il recula d'un pas et planta son regard dans le tien avant de dire :

" Merci oui. "

Il sembla réfléchir tandis que tu attendais ce qu'il avait à dire. Tu lui avais laissé le soin d'imaginer la partie du plan à partir de là mais sans doutes allais-tu être déçue par ce qu'il allait t'annoncer :

" Tu sais que je t'aime n'est ce pas ma Kiera. "

Il recula encore d'un pas.

" Et que j'ai toujours aimé ta compagnie. "

Le mais allait venir.

" Mais "

Qu'est-ce-que je disais !

" Tu es une Sentinelle, une amazone tandis que moi, je serais un Soumis et fuyard qui plus est ! Comment pourrais-tu vivre avec moi ? Ce n'est pas à toi de porter un si lourd fardeau ! Non, je ne veux pas t'imposer cela et c'est justement pour ça que j'ai décidé de te quitter, parce que tu es trop bien pour moi. "

Sur ce, il sourit, se retourna, et son corps ne fut plus qu'un bref souvenir. Un chien avait pris sa place et s'élançait déjà vers la sombre forêt en quête de liberté.

La porte de sortie se dessina devant nous comme un alléluia.
Aucune Sentinelle n'était sur place, comme prévu. J'avais choisi cette porte en particulier parce que je savais qu'aucune amazone ne serait sur place à cette heure-ci et que donc, en conséquence, la voie serait libre pour Maximus. Ce dernier l'avait bien compris car il souffla bruyamment, marquant ainsi son soulagement. Il était à présent sur de pouvoir s'enfuir sans qu'aucune Sentinelle ne l'en empêche. Je ne lancerais les recherches que le lendemain matin sur la bonne piste, ce qui lui laisserais une bonne longueur d'avance, peut-être même aurait-il eut le temps de quitter la forêt d'ici là. Pour l'heure, j'attendais de savoir qu'elle serait la suite car ma partie du plan s'arrêtait là. C'était à son tour d'inventer la suite. Perplexe, j'attendais qu'il se décide à me dire comment on allait faire pour que je le retrouve, même si au fond, je n'étais pas sure de vouloir abandonner ma cité. Fuir était la meilleure option pour nous mais je n'étais pas prête à me l'avouer, Muria était tout pour moi. La cité m'avait tout offert, la vie, la protection, un poste sur, un travail fatiguant mais agréable dans le fond. La cité était comme ma mère et je ne pouvais pas l'abandonner comme ça.
Maximus me remercia, ce qui eut le bienfait de me tirer de mes sombres pensées. Il déposa un baiser sur mes lèvres, faisant ainsi s'envoler mes doutes. Il m'aimait, j'en étais à peu près sure aussi de mon côté, et j'étais à présent prête à le suivre, même si cela signifiait sacrifier la place que je m'étais faite ici. J'allais le lui dire lorsqu'il continua à me remercier et, étrangement, cela me mit la puce à l'oreille. Pourquoi me remercier de la sorte, avec CE ton ? Je me demandais s'il n'était pas en train de regretter ce que je venais de faire pour lui, s'il n'avait pas peur et quelque part, cela m'étonnait de lui. J'allais lui dire que c'était inutile de penser à cela, que maintenant, les choses étaient faites et qu'il valait mieux aller de l'avant plutôt que de se poser des questions qui nous feraient douter mais au lieu de ça, il recula d'un pas en me disant qu'il m'aimait.

Et voilà que la tournure des choses ne me plaisait pas du tout. Il m'aimait ? Alors pourquoi reculait-il ? Il aimait ma compagnie ? Dans ce cas, pourquoi s'obstinait-il à vouloir la fuir ? Je ne comprenais vraiment pas ce qui se passait. Ou plutôt si, je ne comprenais que trop ce qu'il se passait et c'était bien là le problème justement. Je n'avais pas envie de voir la suite et pourtant, l'issue fatale arriva.
L'homme que j'avais cru aimer venait clairement de m'affirmer qu'il n'avait fait que se servir de moi et qu'en prime, il osait me dire qu'on était pas du même monde ! L'homme que je venais de sauver d'une mort certaine venait, devant mes yeux, de se changer en chien et de filer sans demander son reste. Et le pire, c'est que je n'avais même pas réagit sur le coup.

" Mais quel connard ! "

Cette simple constatation eut le bienfait de me remettre les idées en place. Comment avais-je pu être aussi débile et croire le premier homme venu qu'il m'aimait ? Je ne pouvais pas croire que j'avais été aussi stupide ! C'était ... c'était à la limite de la stupidité ! Je m'étais fait rouler !
En colère contre moi-même comme contre lui, je hurlais :

" Le Soumis est sorti de la cité, poursuivez-le ! "

Sur ce, je prenais la direction empruntée par le chien quelques minutes plus tôt. Il était inutile d'essayer de trouver sa trace en pleine aussi, je décidais de me servir de mes talents naturels pour le retrouver. Les choses n'allaient pas s'arrêter là ! Invoquant l'esprit du chat, j'obtenais par là même la vision fabuleuse de nuit de l'animal. Mais cela aurait été inutile sans le flair développé du loup, aussi, je me débrouillais pour conjuguer les deux et ainsi, je partais à la recherche de ce chien. Si je le retrouvais ... il avait intérêt à avoir une bonne excuse !

Et voilà, les hommes sont adorables n'est-ce-pas ? Maximus s'était servi de toi et pire que tout, surement dès le début de votre histoire. C'était sans doutes ça le pire, être trahie alors que tu t'apprêtais à trahir ta cité. Quel effet cela fait ? Apparemment, pas bon effet vu ta réaction et tu as sans doutes bien raison. La fuite de ce Soumis peut te valoir rachat auprès de ta chère Muria ! Profites-en ! L'homme s'est transformé en chien, est-ce un signe ?
La forêt était sombre mais heureusement, tu avais eut deux bonnes idées, la première, utiliser tes dons naturels, la deuxième, mettre suffisamment ta colère de côté pour prévenir tes Sentinelles. Ainsi, à plusieurs, vous aviez plus de chances de trouver le fuyard. C'était plutôt malin. Et heureusement que tu avais fait ça car le bruit avait affolé les sens aiguisés du jeune homme et il s'était retrouvé pris au piège. Il était là, oreilles retroussées, face à toi. Affolé mais surtout conscient qu'il ne s'en tirerait pas si facilement et pourtant, il n'était pas loin de la sortie de la forêt, à quelques mètres à peine et cela voulait dire la liberté tant promise pour lui ! Il se mua en homme et se dressa devant toi. Acculé contre un arbre, il devait te charmer pour pouvoir passer derrière toi et quitter ce lieu maudit.

" Kiera, ma belle ... " commença-t-il.

" Je n'avais pas le choix, je pensais revenir te chercher, vraiment ! Mais j'ignorais comment alors j'ai préféré agir de la sorte ! "

Il se sentait surement mal parti alors il ajouta :

" Je t'aime tu sais. "

J'étais énervée, trahie, salie, trompée.
Comment avais-je pu me laisser berner aussi facilement par ce crétin ? Ah il était beau le jeune homme si fort et doué pour me manipuler maintenant qu'il était acculé contre un arbre et ne pouvait pas m'échapper. La vengeance ne faisait pas partie de mes traditions et encore à cet instant, je n'avais pas l'intention de me venger. Je me doutais que de le ramener à la cité suffirait pour le punir. Les Soumis qui fuyaient n'étaient pas tellement bien traités, bien loin de là. D'autant plus qu'il participerait ainsi à son combat du lendemain et que l'issue, toute aussi fatale qu'elle puisse être, ne dépendrait que de lui et après cette petite escapade nocturne, quelque chose me disait que d'une part, il ne serait pas en forme et que d'autre part, il n'obtiendrait pas la pitié de la reine amazone. Sa seule erreur fut de parler.
Que se passa-t-il dans ma tête à cet instant ? Je n'en avais aucune idée mais il fallait l'avouer, ça ne devait pas tourner rond dans ma caboche. J'observais l'homme en question et à cet instant, je compris pourquoi la cité amazone avait été créée, pour protéger les femmes de ce genre de personnes, du mal et de la souffrance qu'elles peuvent amener aux femmes sans s'en soucier. Pour les punir eux qui ne comprenaient rien à la nature de la femme, eux qui nous crachaient dessus sans vergogne. Lui qui avait osé me trahir et me trahissait encore.

A cet instant, je compris qu'il n'y aurait pas d'autre choix. De toute façon, le ramener vivant dans la cité n'était pas logique n'est-ce-pas ? Après tout, il pourrait avouer que je l'avais aider à quitter la cité et même si mes soeurs me faisaient confiance, il pourrait donner des détails sur notre relation qui entacheraient cette confiance. Qui les ferait douter de moi. C'était logique, il devait mourir, ni plus ni moins. Je n'allais pas risquer de perdre ma place pour un homme comme lui. Muria avait été créée pour nous protéger de gens à son image et j'allais le prouver. La flèche se posa machinalement sur l'arc, à cet instant, mes yeux ne le quittaient plus. Il tenta de murmurer quelque chose, se doutant surement du funeste destin qui l'attendait. J'avais tué beaucoup d'hommes, énormément même sous les ordres de Philéa mais jamais un de ceux que j'aimais. Je n'avais que rarement ouvert mon coeur et ce soir, j'allais le refermer à tout jamais.
Je bandais l'arc.
Il me supplia, cherchant veinement à s'enfuir là où ma flèche ne pourrait pas l'atteindre. Les moments passés ensemble défilèrent devant mes yeux comme si c'était moi qui allait mourir. Les jours et les nuits volés aux yeux de tous, ces instants simples qui ne me manqueraient plus. Toutes les vérités n'étaient pas bonnes à dire, celle là en faisait surement partie. La vérité faisait mal, très mal mais la souffrance qu'il m'avait infligée était bien pire. Son sourire, tout ces faux-semblants n'étaient finalement que le prélude à ce qui se jouait ce soir. L'acte final était en marche, bientôt, lentement, mais. Surement.
Je visais.
Il ne bougeait pas, ne sachant pas comment faire pour quitter les lieux. Il me suppliait du regard, me disait qu'il m'aimait, qu'il regrettait, mais tous les mots du monde me semblaient faux. Surtout venant de lui. Les hommes étaient ainsi, des traitres, des lâches qui utilisaient les femmes pour arriver à leur fins et les jettaient ensuite, tels de vulgaire objets rouillés, de vieilles armes sans utilité. Nous n'étions rien de plus que des objets, de précieux objets jusqu'au jour où ils en trouvaient d'autres. Ce ne serait pas son cas.

Le destin s'envola.
Pour la première fois de ma vie, aucune larme ne roula le long de mes joues.

L'homme t'avait trahi et tout le monde sait qu'une femme trahie peut être la pire des garces. Oui je sais, le MJ est vraiment adorable, merci !
Il te regardait, espérant encore que tu allais le sauver, que tu l'avais aimé ne serait-ce qu'un minimum pour ressentir à son égard quelque compassion que ce soit. Mais il n'en fut pas ainsi, l'homme le savait, tu étais une guerrière, sans doutes la meilleure de la cité et tu le tenais, là, dans tes filets. La flèche encochait. Mais il savait également que tu l'avais aimé, il te connaissait, sous cet air strict se cachait la vraie Kiera, celle qui était sensible, douce, délicate. Visiblement pas comme dans tes souvenirs car ce fut sans hésitation que la demoiselle te visa et tira la flèche. Comme elle l'avait dit, le destin était en marche et tu n'allais peut-être pas en aimer la teneur. La flèche avait été tirée par une experte en tir à l'arc, peu de chance donc d'y échapper.
L'homme n'y échappa pas.
La flèche se ficha en plein cœur et ce fut sous ton regard impassible que l'homme s'écroula de toute sa hauteur. Peut-être qu'au fond il regrettait, peut-être pas, il avait tenté sa chance et avait perdu. Tu ne saurais jamais le fond de sa pensée mais sans doutes te sentais-tu suffisamment vengée. La souffrance reviendrait mais sans doutes serait-elle plus facile à supporter maintenant que tu avais fait ce qu'il te semblait juste. Pour la première fois, ta réputation en prenait un coup car tu n'avais pas pleuré. L'avait-il remarqué avant de mourir à tes pieds tel le plus parfait et le plus fidèle des amants ? Sans doutes pas. Peut-être, qui sait, même le MJ ne sait pas tout ! Mais ton honneur allait être sauf, car au moment où tu l'achevais, tes fidèles Sentinelles arrivaient, ameutées par le bruit.

Elles découvrirent le corps sans surprise et l'affaire s'arrêta là. Philéa reconnu une fois encore ton talent d'archère et l'histoire, encore une fois, s'arrêta là.
Peut-être pas pour tout le monde, mais ça, c'est une autre histoire ...

[ Fin de la mission. ]

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