[151 D-P]Le capitaine et son arme (fini)

Elyncia ne s'était pas encore remise du choc de la mort de son frère. Du moins pas entièrement. Elle gardait encore en elle cette terrible douleur de revoir sa tête tomber sur le sol poussiéreux d'Erathia. Quoiqu'elle fasse, elle n'arrivait pas à s'en défaire, comme s'il s'agissait d'une marque indélébile. Enfin de compte, ce n'était sans doute pas faux. Elle devrait garder l'absence de son frère à vie, et c'est sans doute cela qui la rendait folle à lier.
Mais au moins, aujourd'hui était une belle journée... ou du moins la matinée était belle et la brise était douce. Une sorte de réconfort pour son coeur. Seulement, ce moment agréable se termina dans le siège administratif militaire de Cydonia. Son capitaine avait demandé à Nora de dire à ca fille qu'il voulait la voir dans son bureau, et comme Elyncia n'était pas du genre à décevoir Tanurin, elle s'y rendait bien sagement.
Elle frappa trois fois à sa porte puis il l'invita à entrer. Ce n'était pas la première fois qu'elle entrait dans ce bureau. Elle avait déjà dû le faire en revenant de Ptot-Tàh pour faire son rapport détaillé au Capitaine Henrick et à Sir Anatoli. Pourtant, elle était toujours stupéfaite de la propreté et la simplicité du lieux, le deuxième fait permettant sans doute de facilité le premier. Il n'y avait qu'un simple bureau, avec deux chaises, et un râtelier où était posée Siegmund, la lance de son capitaine.

- Vous vouliez me voir mon Capitaine ?

Il la regardait avec un sourire retenu. Tanurin savait ce qu'était de perdre un frère car il en avait perdu deux : l'un de la grippe, l'autre par la hache d'un Astorg belliqueux lors d'une échauffourée. Puis il avait perdu aussi son fils, Niyam. Il savait donc bien qu'Elyncia ne voulait pas voir ce sourire, ni même sentir un mouvement de pitié à son égard, même s'il voulait la protéger de sa tristesse comme il l'aurait fait si elle avait été sa propre fille. Et d'ailleurs il la considérait comme telle avant de la considéré comme son soldat, son arme.

- Assieds-toi et cesse donc de me vouvoyer veux-tu.

- Je ne pourrais vous tutoyer, Capitaine. Je ne veux pas que les autres pensent que j'ai le droit à vos faveurs. Entrainer les recrue en est déjà une bien suffisante, dit-elle en s'asseyant en face de l'officier.

- Tu seras donc contente d'apprendre que ce poste te sera confier à part entière désormais.

Elyncia lui lança un regard interrogateur comme il les aimait temps et elle avait remarqué que cela l'amusait. Toujours avec ce petit sourire, il lui tendit un parchemin l'invitant à le lire. Et lorsqu'elle prit connaissance du document, ses yeux devinrent ronds comme jamais ils ne l'avaient été.

- LIEUTENANT ! Mais je ne peux Capitaine, je... ça fait tout juste un an que je suis entrée dans les rang et je...

- Ne t'en fais pas. Ca a été approuvé par les hautes sphères.

- Avec tout le respect que je vous dois mon Capitaine, vous savez ce que je pense des hautes sphères qui nous envoient au massacre lors de patrouilles nocturnes dans la forêt pour débusquer des bandits. Je connais mes capacités et je n'en ai guère pour me tenir à vos côtés pour donner des ordres. Je serais bien plus efficace en première ligne. Et puis lieutenant... c'est un peu trop.

Les mains sur ses genoux serrés, la jeune femme commença à rougir. Elle n'avait pas l'habitude d'être dans une telle situation. Elle voulait certes monter les échelons de la hiérarchie militaire et elle avait déjà refusé une promotion en tant que sergent déjà. Elle avait peur de ne pas être à la auteur. Quant à Elyfed Tanurin, il n'avait aucun doute sur les capacité de la sirène du cinquième et c'est pour cela qu'il lui dit :

- Je savais bien que tu ferais la difficile. Mais nous avons passé une semaine à éplucher ton dossier, à l'analyser et si j'ai demandé cette promotion pour toi, c'est que je sais que tu en es capable. Elyncia, tu es surement l'un des meilleurs soldats que j'ai eu sous mon commandement et tu dois être récompensée pour ton talent et pour tes faits d'arme. Tu sens, durant ton absence aux entrainement à cause de la mort de Guy, les gars te réclamaient. Ce n'est pas un traitement de faveur que je te fais et tu le sais. Alors maintenant tu vas accepter cette foutue promotion, C'EST UN ORDRE !

Que pouvait-elle répondre à ça ? Il n'y avait surement rien à répondre. Tanurin était une véritable tête de mule et il l'a battait à plat de couture dans cette discipline. Nicolaë le surnommait même "le vieux chieur" et ce n'était pas gratuit. Elyncia souffla en signant au bas du parchemin qu'elle rendit à son supérieur.

- Tu sais, tu as toujours été ma meilleure arme. Ca fait longtemps que Siegmund n'a pas servi au combat. Je suis heureux de savoir que c'est avec toi que mon fils a passé ses dernier instants dans le monde des vivants.

- C'est votre fils qui aurait mérité cette promotion. C'était un redoutable coéquipier.

- Je suis désolé pour Guy... je sais que ces deux-là s'entendaient bien. Au fait, cette promotion ne sera prise en compte que dans un mois. La paperasse est un guerrier redoutable.

Elyncia était surprise de le voir plaisanter ainsi. C'était une facette du personnage qu'elle ne connaissait pas. Mais une fois passé son étonnement, elle se mit à rire elle aussi en ajoutant :

- C'est un ennemi que je vais devoir apprendre à connaitre j'imagine ?

- Tu n'as pas idée.

Sur un regard entendu et tout sourire, la jeune femme se releva, se dirigeant vers la sortie. Elle salua son supérieur avant de refermer la porte derrière elle avant de fondre en larmes mêlée de joie et de tristesse.

[Désengagée]

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