Ce n'était pas possible, c'était même impensable à son âge !
Tomber enceinte ? Encore ? Philéa se leva de son lit, énervée par la nouvelle comme jamais, l'Amazone la lui ayant annoncé ne sachant plus vraiment quoi faire devant la fureur de sa Reine. Sans doutes s'était-elle attendu à ce que Philéa soit heureuse de la nouvelle, avoir un enfant étant toujours un petit miracle des dieux, mais la Reine semblait bien loin de cette idée. Elle convoqua immédiatement le Conseil et leur donna ses ordres pour les jours durant lesquels elle serait absente. Peu d'Amazones l'avaient déjà vu dans un tel état d'agacement et de colère aussi toutes s'abstinrent de commentaires et laissèrent leur souveraine vaquer à ses occupations. Jelenna était au Temple pour quelques mois et c'était bien à cause de cela que Philéa allait devoir se déplacer en personne à Ankdor pour faire venir son époux. Elle connaissait les liens étranges qui se tissaient entre Templiers du fait de l'Esprit et savait notamment que sa petite princesse bis comme le vieil ami de Jacen pouvaient le joindre à tout moment, qu'il soit à des lieues ou non d'eux ce qui bien évidemment n'était pas son propre cas.

Philéa enfila une tenue beaucoup moins princière qu'à l'accoutumée, consistant en un pantalon de toile beige et un haut noir sans manches, et retira sa fine couronne, bien qu'elle soit discrète, pour s'éviter des ennuis. Elle accrocha son fidèle fouet à la scelle de sa jument tout en faisant en sorte que les épines ne lui déchirent pas le flanc et harnacha Roxanne sans un mot. Ce fut sans un mot une nouvelle fois qu'elle monta en scelle, telle une cavalière émérite qu'elle n'était pas et qu'elle sortit en trombe de la cité. Elle savait qu'une dizaine de lieue la séparait de Tamawa mais peu importait. La nuit tombait certes, mais elle serait sortie des bois avant qu'il ne fasse nuit noire et qu'elle ne puisse plus se repérer. Une fois sortie de la forêt scindant Muria, il lui suffirait de suivre les sentiers de marche qu'on avait pris la peine d'éclairer à la lanterne tous les cent mètres environ et qui étaient bordés de bornes miliaires pour se repérer. Philéa avait vu juste, il faisait nuit noire lorsque la jument lancée au galop pour sortir plus vite de la forêt foula les premiers sentiers. Peu importait à partir de là que la nuit soit tombée ou non, les lanternes suffisaient à se repérer et l'Amazone connaissait suffisamment bien le chemin pour espérer ne pas se tromper d'aiguillage.

Philéa avait obligé Roxanne à maintenir la cadence, ne lui offrant que de maigres pauses toutes les heures pour éviter que la jument ne succombe et ce fut en sueur que l'animal arriva, à la nuit tombée, devant les portes de Tamawa. La cité neutre avait l'avantage de ne jamais fermer ses portes, pas même la nuit, ce qui était là une chance pour Philéa. Sa colère n'avait pas décrue depuis la veille tant et si bien qu'elle dirigea sa monture directement vers le lieu escompté, au pas toutefois pour ne pas tuer sa vieille compagne de toujours. Roxanne piaffa de colère lorsque la souveraine de la cité des femmes libres la confia au palefrenier réveillé en trombe malgré l'heure peu tardive, visiblement, la jument en voulait à sa maitresse mais cela n'inquiéta pas le moins du monde Philéa qui avait d'autres préoccupations en tête. Sans attendre, la reine, bien qu'exténuée par la chevauchée, se dirigea vers l'entrée du Temple pour y trouver son mari. A l'entrée, elle se présenta comme la Reine Amazone et demanda à voir Jacen … qui était absent. Une chance pour lui visiblement vu l'état émotionnel de Philéa pourtant, la souveraine garda toute sa contenance et ajouta qu'elle souhaitait parler au directeur du Temple, qui n'était autre que Jiven. On lui apprit qu'il était actuellement dans son bureau et la Dame s'y rendit sans hésiter.

Philéa ne frappa pas à la porte du bureau, entrant comme si elle était attendu, si ce n'était pas le cas, son humeur excusait cette attitude. Sans même attendre la réaction du directeur du Temple, elle referma la porte derrière elle en le saluant :

« Mon cher Jiven, cela faisait bien longtemps que je ne t'avais pas vu même si j'aurais préféré te rendre visite en d'autres circonstances. »

Philéa avait toute la superbe d'une reine, car elle était venue en tant que tel. Certes le service qu'elle allait lui demander était d'ordre personnel, mais elle était trop fière pour s'abaisser à le demander en tant qu'amie.

« J'ai besoin de parler à Jacen. Je connais le lien qui vous unit et suis désolée de me servir de toi comme émissaire, mais c'est trop urgent pour que j'emploie des méthodes plus orthodoxes. »

Elle ne put s'empêcher de penser que ce genre de choses n'arrivaient qu'à elle, ou encore, qu'elle ne comprenait pas comment tout cela était possible, étant trop vieille pour enfanter à ses yeux. De la sueur coulait le long de ses tempes mais la Cydienne n'y fit pas attention, elle posait sur Jiven un regard dur mêlé d'anxiété.

Un nouveau jour venait de s'éteindre et Jiven se sentait particulièrement fatigué. Les années passaient et le poids de ces dernières commençait à se faire sentir sur les épaules du directeur bien qu'il n'en laisse rien paraître au commun des mortels. Evenor, son apprenti le plus prometteur malgré son caractère, deviendrait bientôt un Templier digne de ce nom, la princesse Eléa quant à elle serait bientôt suffisament douée pour quitter le Temple tandis que le jeune Cydien qu'elle lui avait présenté avançait à grands pas vers la sortie. Jiven sentait qu'une nouvelle page de sa vie était en train de s'écrire sans lui et il regrettait quelque part de ne pas pouvoir y faire grand chose. L'homme s'était retiré dans son bureau, comme chaque soir après le diner, pour écrire quelques lignes dans ses inombrables mémoires. Jiven était incapable de passer ne serait-ce qu'une journée sans écrire son vécu, et ce, même s'il était incapable de dire pourquoi il s'y sentait obligé. Avec un soupir, le directeur du Temple attrapa la plume qui trônait sur son bureau et la trempa dans l'encrier. Il avait choisi une encore bleu marine, la préférant au noir ces derniers temps, non pas pour des raisons esthétiques quelconques mais pour des raisons pratiques comme notamment le fait de lui permettre de différencier les choses. Le bleu marine pour les papiers d'ordre personnel tandis que le noir était réservé aux papiers officiels. Jiven ne devenait pas gâteux au point de ne plus savoir ce qu'il faisait, il était tout simplement un homme qui aimait l'ordre.

La porte s'ouvrit à la volée sans aucune sommation. Jiven songea bien évidemment à son jeune apprenti et ne releva pas la tête, se préparant déjà à une déclaration sans intérêt évident d'Evenor, mais au lieu de cela, la porte se referma en douceur, chose peu commune pour le jeune Elfe songea le directeur en relevant les yeux, et son regard s'arrêta sur les courbes graciles de Philéa. Etonné de sa présence, lui qui était trop concentré pour percevoir qui que ce soit de particulier, Jiven posa sa plume et invita du regard la souveraine à s'assoir. Il était inutile pour Jiven d'ouvrir son Esprit totalement pour constater que Philéa était en colère, ses traits neutres ne trahissaient aucune émotion particulière, preuve du grand art de comédienne de la jeune femme, mais ses yeux semblaient prêt à foudroyer sur place le premier malotru.

« Ta visite est toujours un plaisir ma chère Philéa. » se contenta-t-il de répondre en l'observant avec plus d'attention.

Jiven avait connu Philéa des années auparavant, lorsque Jacen la lui avait présenté. A l'époque, l'homme s'était senti jaloux de son ami d'avoir trouvé une si belle femme et aujourd'hui encore, les courbes de la reine Amazone ne le laissait pas aussi indifférent qu'il l'aurait souhaité. L'homme se demandait pourquoi Philéa faisait appel à lui pour appeler son mari. Jiven se souvint alors que Jelenna était au Temple en ce moment même et espéra que rien ne lui soit arrivé bien qu'il en doutes. Sans doutes les derniers nés de la famille Ryran avaient-il un problème suffisamment urgent pour que la Cydienne se décide à lui demander une telle faveur qui au regard de Jiven n'en était pas une. Il établit le lien avec son vieil ami sans trop de difficulté, malgré la distance, les années d'entrainements et de vie commune à ses côtés leur avaient permi d'instaurer un lien unique et puissant qui traversait les frontières si c'était nécessaire. Jiven appela le Templier à rentrer au plus vite à Andkor et si possible, ce soir même. Ce fut alors qu'il rompait le lien spirituel entre son ami et lui que Jiven capta les pensées de Philéa. La reine semblait inquiète de pouvoir enfanter encore à son âge, ce qui signifiait qu'elle était enceinte pour la quatrième fois si ses calculs étaient exacts et ce qui, bien entendu, ne laissa pas Jiven indifférent.

« Philéa, tu devrais t'assoir dans ton état, Jacen ne devrait pas tarder. »

Il espérait sincèrement que ce soit vrai, ne se sentant pas de subir la colère de la dame ou encore, de lui apporter le réconfort dont elle semblait manquer cruellement en cet instant. Jiven posa le regard le plus délicat possible sur elle et lui affirma :

« Tu ne devrais pas lui en vouloir mais plutôt remercier les dieux de t'honorer une nouvelle fois ma chère. Nombreuses sont les femmes qui aimeraient avoir ta chance et nombre d'enfants n'ont pas la chance de naitre dans un palais. »



[ Je n'avais pas vu le sujet ! >.<""""" ]

S'il y a bien une chose qu'il appréciait, de l'autre côté de la montagne, c'était bien les petits-déjeuner! Jamais il n'avait mangé de soupe, de riz ou du poisson grillé si tôt le matin, et finalement il adorait cela. La camériste versa lentement le thé vert, d'abord à Seppun Kyo en tant qu'hôte, puis tour à tour aux deux ambassadeurs qu'il logeait dans son immense demeure. Autour de la table se préparait à manger quelques autres invités, la maison du Seppun n'étant jamais descendu à moins de dix convives depuis que Jacen était passé en Oyashima. Imitant les manières Jinmens qu'il connaissait sur le bout des doigts, Jacen leva sa tasse lorsque Kyo en fit de même. A travers sa main, il sentait la chaleur de la boisson, son odeur sucrée chatouillant ses narines. Ah, quel plaisir il allait s'offrir à s'y tremper les lèvres, réveiller son coeur et son corps avant une longue journée de travail.

Seppun Kyo salua ses invités par un hochement de tête, portant sa tasse à sa bouche. Tous répondirent par un salut, remerciant l'hôte de sa générosité au quotidien. Jacen tenait la tasse entre ses deux mains, rapprochant inexorablement la délicieuse boisson de ses lèvres et de son palais. Brûlant la première seconde, le thé de la camériste diffusa rapidement ses saveurs colorées et sa douceur dans sa bouche. Jacen ferma les yeux, se laissant transporter par le bonheur.

**JACEN!!!!**

Tout se passa très vite. Dans un mouvement incontrôlé par la surprise et le sursaut, Jacen recracha son thé devant lui. Le liquide dans la tasse virevolta et se rependit sur sa manche, ébouillantant sa main, lui arrachant un petit cri de douleur. Sa main valide réceptionna la porcelaine alors qu'il toussait grassement de s'être étranglé avec le thé brûlant.

"Ryran-san, le thé n'est-il point comme vous l'appréciez?"

Une fois la toux passée, Jacen s'épongea la main et le menton avec sa serviette blanche, cherchant rapidement dans ses idées quelle explication il pourrait servir à son hôte.

"Nullement, Seppun-sama."

"Vous a-t-il brûlé?" questionna à nouveau le petit homme d'état Jinmen, l'air inquiet.

"En aucun cas, j'ai simplement été distrait de ma contemplation par un appel d'un ami traversant les montagnes."

"L'absence d'un ami fait vite un étranger, Ryran-san. Vous devriez méditer et y répondre au plus vite."

"Bien, Seppun-sama".

Les autres convives furent amuser de la situation caucasse. S'il n'était d'aucun secret les pouvoirs de l'Esprit dont été doué Jacen dans cette pièce, les Jinmens avaient encore du mal à l'identifier comme cela se faisait en Azthia. Ils appelaient cela plus largement "méditation" qu'Esprit.

Le Templier se leva, salua, et s'éclipsa derrière la porte coulissante. Sa manche trempée était d'un désagréable énervant qu'il s'efforça d'oublier le temps qu'il établisse le contact avec Jiven. Averti de la requête urgente de sa femme, craignant le pire pour ses enfants, dont l'un avait déjà été victime d'empoisonnement, Jacen craignait le pire et confia son intention de se rendre au Temple le plus rapidement possible. Par magie de la peinture, bien sûr, mais cela prendrait tout de même plusieurs heures de préparer les tableaux d'aller et venue. Il promit de rédiger une lettre d'excuse pour le conseil d'ambassadeur aujourd'hui avant que Kyo ne le congédie, non sans sourire.

"L'absence est à l'amour, ce qu'est au feu le vent ; il éteint le petit, il allume le grand."

Certainement ne devait-il pas savoir l'accueil que lui réservait Philéa pour dire cela.
C'est donc en habit serré tacheté de peintures que Jacen apparut au jardin du temple. Dieux qu'il faisait chaud à Tamawa ce jour-là, le soleil de midi étant déjà passé depuis et ayant cuit les pavés et la pierre. Furetant, il atteignit la présence de sa femme et s'y agrippa pour la rejoindre, dans le bureau de son ami. S'ils avaient mangé, ce n'était pas le cas du père de famille, bien trop inquiet pour ses bambins.
Entrant de la pièce sans attendre l'ordre d'entrer (Jiven devait déjà l'avoir senti), il se précipita sur Philéa, lui prenant les bras, inquiet.

"Que se passe-t-il, nos enfants sont-ils saufs?"

La jeune femme posait sur le Templier un regard dur mêlé d'une anxiété sincère. Incapable de savoir comment réagir face à l'annonce de cette grossesse impromptue, elle n'avait pas réfléchi un seul instant et s'était lancée sur son destrier pour aller à la rencontre de Jacen. Ce n'était finalement qu'une fois en face de Jiven que la dame avait compris à quel point sa réaction pouvait sembler puérile, cependant, elle ne regrettait pas sa présence en ces lieux. Lors de son dernier accouchement, la Reine Amazone avait fait promettre à son époux de ne plus enfanter, se sentant déjà incapable d'élever trois enfants supplémentaires là où la cité requérait déjà la majorité de son temps si l'on décomptait le temps de sommeil. L'arrivée des triplés avait fait basculer sa vie dans un enfer lorsqu'elle s'était rendue compte du poids de son âge face à ces bouches à nourrir, ces pleurs à calmer … et Jacen qui l'avait laissé assumer tout, toute seule. Si les deux petites dernières étaient suffisamment débrouillardes pour qu'elle n'ai pas à s'en préoccuper plus que cela, ce n'était pas le cas de leur frère cadet, Lùkhas. Depuis l'accident qui avait manqué de lui couter la vie, le petit dernier de la famille, s'il était très souvent en compagnie de sa sœur ainée, n'en restait pas moins une source de conflits et d'ennuis permanent.
Philéa aimait ses enfants, il ne fallait d'ailleurs pas espérer grande clémence de sa part si on osait toucher à l'un d'entre eux, cependant, elle n'en restait pas moins elle-même, à savoir cette femme ambitieuse, fière et implacable lorsqu'il s'agissait de sa cité. Cette femme qui avait abandonné son mari, le privant de son unique fillette à l'époque, pour vivre ses rêves de grandeur et de liberté. Aujourd'hui, si Philéa était une femme comblée autant politiquement que personnellement, il n'en demeurait pas moins qu'elle se sentait privée du peu de liberté que lui autorisaient ses fonctions avec la présence de ses enfants. Si elle confiait leur éducation comme la plupart de ce qui les touchaient de près ou de loin au soin de nourrices, la Reine était incapable de les délaisser, aussi passait-elle beaucoup de temps avec eux, ne serait-ce qu'à les regarder dormir une fois la nuit tombée. Sans doutes était-ce égoïste de dire cela, mais jamais Philéa n'aurait souhaité une telle vie … si on lui avait demandé de signer dans ces conditions, jamais elle ne l'aurait fait même si quelque part, elle ne regrettait pas son couple et sa vie de famille, chose qu'elle n'avait que peu eut dans son enfance.

Philéa était une reine, pas une poule pondeuse !
En réalité, la jeune Cydienne était surtout terrifiée à l'idée de tomber enceinte, pour la quatrième fois de sa vie, à son âge. Elle s'était rendue compte que l'âge n'aidait en rien que ce soit durant la période de gestation comme une fois l'enfant né. L'accouchement d'Eléa avait été terrifiant par sa primauté mais celui de Jelenna puis des triplés, par la douleur et la fatigue. Philéa avait cru mourir sur ce champs de bataille en mettant au monde ses derniers nés … que se passerait-il si elle venait à passer l'arme à gauche en mettant celui-là au monde ? Muria en serait délaissée, mise entre les mains d'une gamine de vingt ans à peine qui, si elle était formée en ce sens, n'était absolument pas prête à en prendre les rênes ! S'il avait fallu résumer la situation, Philéa était tout simplement anxieuse à l'idée de perdre la vie en mettant au monde son enfant comme de l'élever à près de quarante ans. Jacen n'étant pas là, cela ne l'avait guère aidée à appréhender la chose facilement et posément.

La jeune femme remercia du regard Jiven pour son invitation. Si seulement elle avait épousé le directeur au lieu de celui qui vaquait toujours à ses occupations loin d'elle ! L'idée la fit sourire. L'ombre d'un instant, Philéa se souvint du couple étrange mais paisible que formaient Jiven et Celyween et, si la Dame ne supportait pas spécialement la présence de l'Elfe à l'époque, elle ne pouvait s'empêcher de se souvenir à quel point leur couple semblait plus solide que le sien. Cette pensée eut raison de l'inquiéter un peu plus et, tout aussi paradoxalement, de l'apaiser quelque peu.

« Combien d'entre eux profitent d'une mère aussi âgée que moi mon ami ? »

La colère perçait malgré le fait qu'elle tentait de la contenir.
Jacen arriva plus tard dans la journée, le temps pour Philéa de s'entretenir avec le Templier qui n'avait eut de cesse de calmer ses angoisses et de taire ses doutes. Si Jiven était un bon orateur et s'il avait toujours tendance à apaiser son entourage, l'anxiété comme la colère de Philéa n'avaient finalement que peu décrues. L'homme lui proposa avec cette même convivialité mêlée de sérieux qui le caractérisait depuis tant d'années de se joindre à lui pour le repas. En réalité, la Reine Amazone n'avait que faire de manger ou non, mais elle sentait que l'invitation, aussi polie et bien tournée soit-elle, ne souffrait d'aucun refus. La Cydienne faisait confiance au plus vieil ami de son mari pour savoir qu'il trouverait les mots justes pour la contraindre à rester en forme.

Jacen arriva dans le bureau tandis que le Directeur entretenait la jeune femme d'une tout autre affaire, à savoir les progrès tant de sa petite princesse bis que de sa fille ainée. Si Philéa avait toute confiance en lui, elle n'en était pas moins rassurée d'entendre dire que ses filles avaient un don exceptionnel pour l'Esprit et qu'elles parvenaient à le maitriser, chacune à leur rythme, de façon toute aussi exceptionnelle.

« Je suis ravie que leur formation se passe si bien, même si je dois avouer que leur absence me pèse. Jelenna est une enfant docile et tellement agréable, j'espère que ton enseignement sera aussi efficace que celui que tu as prodigué à son ainée. »

Philéa ne donnait pas d'ordre à Jiven, bien entendu, simplement, elle avait appris les rouages de la guerre, de la politique et du beau parler. Certes la dame aurait pu exiger de lui qu'il la prenne sous son aile, mais elle savait que le Temple ne jouait pas selon les mêmes règles que les autres cités. Ici, elle n'était que l'invitée, l'ami, l'alliée potentielle, rien de plus. Elle n'avait de reine que le titre et ce, parce que tous le lui reconnaissaient volontiers et que personne n'oserait s'attaquer à elle directement ou lui manquer de respect. Par nature, pas par obligation. Aussi avait-elle fait comme si la nomination du mentor de Jelenna était déjà entendu, comme si Jiven s'était déjà lui-même proposé et ce, parce qu'elle connaissait fort bien l'homme et le savait incapable de refuser une telle formulation.

Jacen entra sans que Philéa ne s'y attende réellement, n'ayant pas entendu frapper à la porte ou autre. Jiven quant à lui ne semblait pas vraiment étonné et la jeune femme maudit l'espace d'une seconde encore l'étrange pouvoir d'empathie que leur confiait l'Esprit. Elle se tut, attendant que le Cydien entre mais sentant sa colère et ses peurs refaire surface. La Reine se contenta de se lever tandis que lui se jetait déjà sur elle, lui tenant les bras et lui demandant si les enfants allaient bien. La seule chose qui ne pouvait qu'énerver un peu plus la belle.

« Il aurait fallu que tu sois plus souvent là pour le savoir certes mais ils vont bien. »

Elle s'entendit prononcer clairement et distinctement chacun des mots avec froideur et distance puis, elle ajouta :

« On ne peut pas en dire autant de leur mère. »

D'un geste souple, elle libéra sa main de son emprise et une gifle s'écrasa sur sa joue. Les enfants, toujours les enfants, et elle dans tout ça ? Ne comptait-elle donc jamais ? Etait-elle devenue l'espace de quelques années la mère de ses enfants sans mériter plus son titre de femme et d'épouse ?

La scène aurait très bien pu se jouer ainsi mais Philéa n'était pas aussi impulsive que sa fille ainée. Si elle l'avait été par le passé, les années, la politique et le reste avait eut raison de ce trait de caractère bien assez tôt. Lorsque l'homme entra dans le bureau, l'Amazone était encore assise et n'esquissa qu'un mouvement dans sa direction. Lorsqu'il lui saisit les bras avec une inquiétude non feinte sur le visage, Philéa comprit que sa famille représentait tout pour Jacen et que, s'il s'inquiétait seulement du bien être de ses enfants, c'était uniquement parce qu'il savait qu'elle ne risquait rien. Qu'elle était saine et sauve, en bonne santé et bien en sécurité entre les murs de sa cité. Voilà pourquoi il était parti en lui laissant le soin de gérer leur famille, parce qu'il avait confiance en elle, parce qu'il était déchiré à l'idée de les quitter sans pouvoir faire autrement mais qu'il les aimait. Et elle aussi, l'aimait.

« Ils vont bien, rassure-toi. » souffla-t-elle à regret, « en revanche, ce n'est pas mon cas ».

La jeune femme vit se peindre de l'inquiétude sur le visage de Jacen aussi lui conta-t-elle tout ce qu'il avait manqué, pour finir par la nouvelle qui l'effrayait et l'agaçait tant. Elle était enceinte. De lui. Encore. Leur réactions étaient toujours le strict opposé l'une de l'autre mais pour une fois, si le Templier ne cacha pas sa joie, il n'en demeura pas moins inquiet pour son état de santé. Lasse, fatiguée et toujours en colère, la dame préféra ajouter :

« Nous devrions en parler en privé, Jiven n'a pas à subir cela. Jiven, je te remercie de ton accueil chaleureux, puisses-tu être aussi délicat envers mes filles. Je m'entretiendrais avec toi demain si tu le permets à leur sujet, je te souhaite une bonne soirée. »

La belle et son époux sortirent.
Ils avaient beaucoup à se dire, mais Philéa savait que Jacen serait là.
Elle savait qu'il était toujours là. C'était sans doutes ça le pire. Incapable de lui en vouloir et de partager ses doutes comme de laisser aller sa colère, la dame savait que tout ceci n'était qu'une mascarade. Si Jacen serait là quoi qu'il arrive, cela ne l'empêchait pas de lui en vouloir et d'appréhender le jour où cette vie déciderait de sortir de son cocon maternelle. Mais ce jour-là, il serait là n'est-ce-pas ?

[ Désengagés ]
[ Ce post est terriblement nul, désolée. Je ne voulais pas jouer Philéa comme je joue Eléa résultat, c'est n'importe quoi et c'est pire que tout mais j'en ai marre de le refaire. Merci Jiven pour le RP ^^ ]