[Ce RP se situe quelques semaines avant qu’Ashrand ne quitte Muria]



Cela faisait à présent quelques mois que le petit Soumis avait atteint le sommet dans l’arène de la cité Amazone. Enfin presque le sommet : il lui restait encore à vaincre le champion, la championne plutôt qui n’était autre qu’Eléa. Le hasard faisait bien les choses, n’est-ce pas ? Toujours était-il que le Cydien restait le deuxième meilleur combattant de l’arène, n’ayant perdu qu’à de très rares occasions ces dernières années. Il fallait croire que les enseignements de maître Jiven portaient leurs fruits : non seulement il l’entraînait à mieux contrôler son Esprit mais en plus il l’exerçait au maniement des armes et pas qu’un peu. Si son maître voyait comment il mettait à profit ses entraînements, il le tuerait probablement : quel genre de futur Templier irait s’adonner aux combats de gladiateurs ? Enfin, il fallait bien se défouler comme on pouvait.

Ashrand n’en avait plus pour longtemps ici, un mois peut-être un peu plus mais c’était là le maximum. Il ne pouvait tout simplement pas se contenter d’une seconde place sans tenter de devenir le meilleur. Le Soumis voulait qu’on se souvienne de lui dans ce village, qu’il ne soit pas qu’un simple homme ayant purgé sa peine avant de partir. Qu’en évoquant le nom d’Ashrand, on se rappelle de quelqu’un qui a vaincu les plus grands dans cette arène, y compris la Princesse. Espoir vain ? Peut-être mais il regretterait de ne pas essayer.

Le plus dur avait été en réalité de provoquer la Princesse en duel, il avait fait son possible pour qu’elle ne prenne pas ça comme une pure incitation à la violence. Au final, il voyait ce passe-temps de gladiateur un peu comme un sport et ayant l’esprit compétitif, il tenait à être le numéro un. C’était il y a quelques temps déjà, il réfléchissait posément à la façon de lancer le défi à l’héritière du trône lorsqu’il l’avait croisée dans les couloirs du Temple d’Ankdor - elle aussi suivait une formation de Templière là-bas – et qu’il avait profité pour lui demander en personne. Après tout si ça avait été à Muria, on ne l’aurait jamais laissé accéder au palais ni plus qu’on ne lui aurait accordé un entretien avec la fille de Philéa. De plus, les chances de la rencontrer en ville comme ce fut le cas lors de leur première rencontre étaient pour ainsi dire nulles. Sans doute aurait-il dû passer par Kiera qui lui aurait fait passer le message. Enfin il y avait toujours moyen de le lui proposer lorsqu'ils allait au Temple d'Ankdor, Eléa, Jelenna et lui mais maintenant qu’il l’avait en face d’elle, autant le lui demander directement et sans détour.

Dans l’ensemble le message était passé et finalement elle avait accepté, l’ayant pris moins mal que ne le croyait Ashrand. Avec elle, on pouvait s’attendre à des sautes d’humeur à n’importe quel moment. Le temps de rentrer à Muria, que la Princesse trouve du temps libre car mine de rien, elle avait l’air d’avoir un planning chargé et finalement de programmer le combat que de nombreux jours étaient déjà passés. Plus que ne l’aurait souhaité le Soumis mais peu importait, il était déjà satisfait qu’Eléa ait accédé à sa requête alors il pouvait bien attendre deux ou trois semaines.

Enfin on l’avait prévenu que l’affrontement se déroulerait le jour d’après et on le convia à le suivre à l’arène où il passerait la nuit pour être sûr qu’il ne tente pas d’esquiver le combat par lâcheté, surtout que c’était lui qui l’avait provoqué. De toute façon, la dernière chose dont il aurait eu envie était de ne pas y participer pour une raison quelconque ; il voulait sa première place et il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour l’obtenir. Dans les règles bien sûr, il n’était pas le genre de personne à commettre des actes odieux pour avoir ce qu’il désirait. S’il perdait Ashrand serait déçu, assurément, mais au moins aurait-il eu le mérite d’avoir essayé. Certes, il connaissait la réputation de la Princesse et pour l’avoir vue se battre plusieurs fois il savait qu’elle serait une adversaire plus que redoutable mais cela ne le découragea pas le moins du monde, au contraire : il n’en serait que plus heureux s’il sortait victorieux. Une chose était sûre : le duel était loin d’être gagné d’avance ! Si Ashrand avait eu le malheur de penser cela, il s’en mordrait les doigts dans pas longtemps ; même en plaçant une grande confiance en ses capacités, il n’était pas assez bête pour croire que toutes les victoires lui étaient déjà promises.

Comme d’habitude, le repas précédant le combat était un festin digne d’un roi : les gladiateurs ne savaient jamais s’ils ressortiraient vivant de l’arène. A vrai dire, personne n’était autorisé à tuer son adversaire mais à partir du moment où il fallait prendre des armes en compte, un accident était si vite arrivé… Bref, il se régala une fois encore, veillant toutefois à ne pas trop manger pour ne pas à en subir les conséquences après. Suite à une bonne nuit de sommeil et une petite séance d’entraînement pour se mettre en condition, le Cydien était plus que prêt à fouler le sable frais de l’arène. Déjà entendait-on les gens qui rempliraient les gradins arriver, signe que ça débuterait dans peu de temps. Enfin pas pour lui, pas tout de suite : La Princesse et lui constituaient le clou du spectacle et par conséquent, ils entreraient en dernier. En attendant, ce serait d’autres Soumis, moins connus mais non moins bons, qui se battraient, histoire de chauffer un peu la foule. C’est vrai, si autant de gens s’étaient déplacés aujourd’hui, c’était bien pour voir la Princesse défendre son titre face au meilleur prétendant dudit titre.

Le jeune homme attendait patiemment son tour, adossé au mur de la cellule. De temps à autres il entendait des cris et autres clameurs venant de là-haut, à chaque fois qu’un combat se finissait ou débutait. Les Amazones présentes semblaient prendre du plaisir à assister à tout cela.
Barbare ? Non pas vraiment. Il fallait voir cela comme une compétition et non des tentatives de meurtres délibérées. Ce n’était pas sans risque, certes, mais qui pouvait se vanter de faire quelque chose en toute sécurité ? Le véritable danger était lorsqu’on affrontait quelqu’un de dérangé ou une Amazone, car les femmes risquaient beaucoup moins si jamais un « accident » se produisait et avec certaines d’entre elles, on n’était jamais sûr qu’elles n’essaieraient pas de forcer le destin.

« Allez, c’est ton tour. Tâche d’assurer le spectacle et de ne pas te faire étaler trop vite. »

Cette phrase eût pour effet de sortir le petit Soumis qu’il était de sa rêverie. Se levant d’un bond, il suivit la geôlières jusqu’à l’armurerie où il pourrait choisir ses armes. Ayant comme d’habitude choisit l’épée que lui avait offert son père, on le dirigea ensuite vers les grilles de l’arène.
On y était. La tension commençait à se faire sentir, d’un coup Ashrand n’était plus aussi assuré que ça. Les yeux clos, il respirait profondément, tentant de retrouver une totale sérénité. Habituellement il n’était pas aussi perturbé que cela d’aller se battre mais aujourd’hui c’était différent : son adversaire n’était pas n’importe qui, c’était Eléa, la gladiatrice la plus prestigieuse qu’il soit possible de rencontrer !
Le calme revint peu à peu à mesure qu’une voix féminine introduisait le combat jusqu’au moment où le grincement métallique que produisaient les grilles en libérant le passage l’obligea à rouvrir les yeux.

On y était. Le pas ferme, Ashrand pénétra sur le sable. Plus forts que jamais, les encouragements du public s’élevèrent. Oui, même si c’étaient des femmes, elles devaient bien reconnaître ses talents au combat. Lui-même portait l’espoir des autres Soumis gladiateurs lui ayant confié leur désir de le voir vaincre la Princesse. L’un d’entre eux lui avait même proposé de faire en sorte que quelque chose de fâcheux arrive à Eléa mais ni une ni deux que le Cydien l’avait envoyé paître. Il n’était pas ici dans le but de blesser voire tuer quelqu’un même si ça arrivait quelques fois, malheureusement.
Saluant la foule, le brouhaha cessa progressivement jusqu’à l’arrivée de l’héritière du trône où une véritable ovation fut faite à son entrée. Quoi de plus normal, en plus d’être la championne elle était aussi la Princesse alors qu’elle soit autant acclamée n’avait rien d’étonnant. Pourtant Ashrand se sentait un peu ridicule sur le moment.
Une fois qu’ils furent tous les deux au centre de l’arène, il prit la parole en premier

« Bien le bonjour Princesse ! Content de voir que vous n’avez pas changé d’avis. »

Il la gratifia d’un sourire rayonnant suite à cela. Elle n’était plus une jeune adolescente comme lors de leur première rencontre. Elle avait grandit, mûri probablement mais surtout embelli ; c’était devenu une bien jolie jeune femme.
Ramenant doucement sa lame devant lui, il adopta une position défensive.

« On commence quand vous voulez » proposa-t-il gentiment.

On pouvait se demander pourquoi quelqu’un d’aussi gentil et innocent qu’Ashrand se livrait à ces jeux stupides dans l’arène, d’autant plus qu’il avait l’air de tout sauf de quelqu’un de dangereux. En réalité la première fois qu’il y était venu et avait demandé à devenir gladiateur, l’Amazone présente à ce moment s’était contentée de lui rire au nez avant de le renvoyer chez lui. Sa place ne fût gagnée qu’à force de demandes incessantes et il avait commencé à gravir les échelons assez vite, acquérant peu à peu une certaine notoriété. A tout ceux et celles qui avaient douté qu’il ne fasse jamais un bon combattant, il allait leur prouver à quel point ils avaient eût tort.

Je m'étais demandé sur le coup pourquoi le Soumis s'était mis en tête de me parler au Temple. Pas que je n'aimais pas l'idée, loin de là, mais je me demandais juste pourquoi il avait choisi ce moment précis alors que nous faisions presque toujours le chemin ensemble, avec Jelenna, vers Andkor. Je devais bien avouer que ce jeune homme m'intriguait tout de même mais j'étais incapable de dire pourquoi ni ce qu'il me voulait.
Un défi ?
Je restais un peu abasourdie par sa question. Il y avait bien longtemps qu'aucun Soumis n'avait eut l'audace de me demander un combat singulier dans l'arène. Cela m'amusait à vrai dire. Depuis que j'avais obtenu le titre de championne, quelques années auparavant, je devais avoir tout au plus quatorze ans, jamais personne n'avait plus remporté le titre. Certains craignaient sans doutes les représailles s'ils blessaient l'héritière du trône, d'autres savaient que je possédais des dons qu'ils ne pourraient contrer et enfin pour les derniers, ils n'aimaient pas trop l'idée de combattre une femme et encore moins, la princesse. Le Cydien n'était visiblement pas de ces cas-là, il semblait bien décidé à me faire comprendre qu'il voulait ma place tout en adoptant un certain tact pour ne pas me blesser. La chose m'amusa grandement, tant et si bien que je décidais d'accepter. Une nouvelle victoire serait toujours agréable et cela faisait bien longtemps que je n'avais pas eut l'occasion de me mesurer à la chair et au sang. Les poupées de paille et autres artifices faisaient leur temps mais rien ne pouvait équivaloir l'excitation d'un combat réel.

Deux ou trois semaines s'écoulèrent avant que le combat ne put être programmé. Peu m'importait la date tant que je pouvais me dégourdir les pattes d'autant que j'avais bien l'intention de ne pas perdre mon titre, tout aussi inutile et ridicule soit-il à mes yeux. Adolescente, j'étais fière d'avoir obtenu le titre de « princesse de l'arène » mais désormais, je m'en moquais totalement, seule comptais la fierté éventuelle de le garder et l'image que cela pouvait donner de moi. Si je perdais ? Sans doutes serais-je énervée mais et alors ? J'avais tout et lui, un misérable titre sans importance. Dans tous les cas, ces jeux étaient passés de mode à mes yeux comme ils n'étaient plus vraiment de mon âge. A l'époque déjà, Philéa râlait que j'aille dans l'arène, aujourd'hui, elle semblait s'en amuser.

La veille de mon combat n'était qu'un jour parmi tant d'autres. Je devais bien avouer que j'étais bien plus stressée lors de mes séances au Tribunat ou au Conseil que par ce combat de rues. Je ne prenais les choses au sérieux qu'au dernier moment. J'avais vu Ashrand s'entrainer au Temple, je savais que le courage ne lui faisait pas défaut ou encore, qu'il était plutôt doué une épée à la main mais il avait le désavantage de ne pouvoir s'en servir que par intermittence du fait de son statut dans la cité. D'autant que je savais pertinemment qu'en dehors de l'Esprit, il ne maitrisait rien de particulier. Si j'avais l'impression d'avoir un avantage considérable sur lui, je me doutais pour autant que je ne devais pas le sous-estimer. Par le passé, ce genre d'erreurs avaient coûté la vie de certaines personnes qui m'étaient chères, je ne tenais pas à réitérer ce genre d'exploits.

Etrangement, je n'avais jamais assisté au spectacle de gladiateurs, et je n'y assisterai pas non plus aujourd'hui. Si j'aimais me battre dans cette arène, si j'aimais l'odeur du sable, de la sueur et les joutes physiques, je n'appréciais pas pour autant de voir les autres combats. Je menais les miens sans haine ou autre, sans user de la violence pour la violence, parce que tel était mon bon plaisir que de combattre dans l'arène. Les autres gladiateurs n'en faisaient pas de même et cela m'agaçait. Tous les coups étaient permis, sauf celui de tuer et parfois, les choses tournaient mal. Je n'appréciais que peu ce genre de spectacle et quand je devais entrer, j'attendais mon tour dans les galeries réservées aux Sentinelles en cas d'émeutes imprévues.

Le moment attendu arriva.
La foule clamait nos noms, visiblement ravie de voir le combat final poindre le bout de son nez, comme si les autres ne les avaient guère plus que distraits en attendant leur arrivée. C'était le genre de choses qui m'énervaient, je ne supportais pas qu'on manque de respect aux combattants mais peu importait, dans cette arène de femmes, il était logique que seul mon combat les intéressent, et je comptais bien leur offrir la victoire. Ma victoire.
J'avais attendu que la Sentinelle en charge de chauffer la foule annonce l'entrée d'Ashrand, je n'étais pas forcément impatiente, pour une fois, je pouvais même dire que j'étais calme. Le combat m'excitait certes, mais sans pour autant me faire perdre la raison ou encore, me pousser à entrer en scène sans qu'on m'y autorise. J'étais princesse certes, mais j'avais compris ces dernières années que cela ne devait pas dire pour autant que je devais tout m'accorder. Mon nom fut prononcé et les portes s'ouvrirent, laissant apparaître l'arène baignée de soleil. Ashrand était face à moi et attendait tandis que la foule m'acclamait comme jamais. J'ignorais pourquoi, mais j'étais heureuse de voir qu'elles m'appréciaient, que malgré les erreurs que j'avais pu faire, je restais leur princesse et leur héritière légitime. C'était un soulagement bien que je me contentais de sourire normalement pour ne pas montrer à quel point j'étais touchée. Une chance que Jiven m'ait appris l'art de cacher ses sentiments et de fermer son Esprit !

J'avançais d'un pas décidé, ne m'arrêtant que lorsque je fus face à Ashrand. Derrière moi, Oni et Haiiro suivaient car, comme le voulait la tradition, toutes les armes et les coups étaient permis. Pourtant, je n'avais pas envie de tirer avantage de la vélocité et du travail d'équipe de mes loups aussi, je saluais la foule d'un geste tranquille de la main et les renvoyaient sur le côté avec ordre de ne pas bouger à moins que ma vie ne soit réellement en danger bien sur. Haiiro obtempéra et se réfugia à l'ombre des gradins, juste à côté de la porte par laquelle j'étais entrée. Oni la suivit de mauvaise grâce, déçu de ne pas participer.
J'avais revêtu ma tenue d'adolescente pour le plaisir de pouvoir entrer dedans à nouveau. Après la naissance d'Aedan, que ma mère tenait dans ses bras pour assister au spectacle, j'avais eut tendance à mettre près de six longs mois avant de retrouver ma silhouette d'antan et maintenant que je l'avais conservée, je ne comptais pas la lâcher ! Mon débardeur retenu par de simples lanières de cuir noir, laissant mon bas ventre visible ainsi que la cicatrice qui parcourait mon épaule, un short ceinturé, quelques lanières de cuir protégeant mes bras, une mitaine noire pour ma main tenant ma rapière et enfin, les mêmes lanières pour couvrir le bas de ses jambes à partir du genou. Ma rapière pendait sur le côté, prête à être dégainée. J'avais choisi celle que Jelenna m'avait offert pour mes fiançailles avec Feanaro plutôt que celle que ma mère m'avait donné enfant. Elle avait une valeur symbolique, notamment parce que j'avais sauvé ma cadette avec. C'était idiot, et alors ?

« Changer d'avis ? Cela aurait été dommage vu l'insistance dont tu as fait preuve pour me provoquer en duel. » le taquinais-je à mon tour.

J'appréciais le jeune homme, je ne tolérais que peu ses réflexions toujours déplacées à mes yeux mais je devais avouer qu'elles étaient bien souvent justes et me forçaient à réfléchir. Il n'était pas non plus désagréable durant les entrainements et sa présence me forçait bien souvent à recouvrer mon calme pour éviter de le blesser. En d'autres termes, je l'appréciais à ma façon.

Je le regardais se mettre en garde avec un sourire évasif. Depuis combien de temps n'avais-je pas tenu ma rapière non pas pour influencer quelqu'un ou défendre ma vie mais simplement pour le plaisir d'un combat sans importance et sans conséquences ? Je dégainais ma rapière à mon tour, détachant le fourreau de ma ceinture et le jetant sur le côté de telle sorte qu'il ne me gênerait pas.

« Tu sais que tous les coups sont permis n'est-ce-pas ? » demandais-je avec un sourire amical.

Je n'avais pas l'intention de commencer à attaquer aussi, j'adoptais la même position que lui. Il était venu me chercher pour ce duel, c'était donc à lui de commencer.

Sa réflexion ne manqua pas de me faire sourire. Il était venu me chercher pour … prendre ma place ? Quel petit plaisantin ! Comme si je pouvais ne serait-ce que le laisser imaginer gagner contre moi ! Quelle serait ma réputation et mon honneur après cela ? En fait, je crois que je m'en moquais un peu et que j'avais accepté ce duel uniquement parce que c'était lui et que j'avais envie de voir ce qu'il avait dans le ventre comme envie de m'amuser un peu. Les enjeux pour lui comme pour moi n'étaient pas les mêmes mais il ne m'avait jamais fallu une motivation particulière pour entrer dans l'arène et gagner.

« Me semble-t-il que tuer est interdit en ces murs mais si tu continues de me provoquer, je te promets que je ferais une exception pour toi. »

Je posais un regard glacial sur le jeune homme sans pour autant briser ma garde, ce n'était pas avec ces petites fadaises qu'il allait m'agacer et encore moins me pousser à la faute. J'avais appris dans ma folle jeunesse de gladiateur que de céder à ses impulsions pouvait certes être très utile mais aussi et surtout très dangereux. Sur le champs de bataille, il n'y avait pas si longtemps que ça, cela avait bien failli me couter la vie quand, dans une envie de venger Feanaro, je m'étais mise en tête de tuer tous les élémentaires croisant ma route. Je savais que ma colère était mon point faible et je ne pouvais sans doutes que remercier Jiven de m'avoir tant appris ces dernières années de ce point de vue là. J'étais moins facilement influençable, plus « douce » et surtout, meilleure combattante depuis que je parvenais à peu près bien à maitriser mes émotions. En d'autres termes, les choses allaient pour le mieux pour mieux et je comptais bien rabattre son caquet à Ashrand. Je savais que le Soumis avait connu une ascension fulgurante dans cette arène et je ne doutais pas de ses talents mais je savais pertinemment qu'il cherchait à m'avoir sur le côté sentimental. Il me connaissait bien pour connaître mes coups de sang et savait surement aussi que ma colère me faisait faire des erreurs de débutante sauf que … dans cette arène, dans cette cité, j'étais Eléa, j'étais la princesse. J'étais son ennemie comme son adversaire et il n'avait pas intérêt à l'oublier.
Je décidais d'avancer d'un pas, ma rapière toujours prête à me défendre tel un serpent capricieux, et le toisais de toute ma hauteur. Je n'étais qu'une gamine certes, une adolescente à peine sortie de mon enfance et pas encore prête à entrer dans l'âge adulte mais peu importait. Je le toisais.

« Sans moi, mes loups t'auraient déjà taillés en pièces. Le combat est déjà inégal, inutile d'en rajouter. »

Du bluff.
Totalement, mais j'avais fait en sorte de le disséminer avec un sérieux déconcertant que j'avais copié sur et appris de Philéa. Je savais que j'avais une chance de gagner, tout comme il en avait une de remporter ce combat mais le physique ne faisait pas tout. Le moral avant tout ! Si le physique était important, la tête et le moral l'étaient tout autant peut-être même plus ! J'avais vu des femmes se battre mieux avec l'énergie du désespoir que des soldats entrainés.

Le regard du Soumis fit taire toutes les répliques. La concentration était la clé.
Le silence retomba sur la scène tandis que pour ma part, je jaugeais mon adversaire. Depuis quand n'avais-je pas foulé la terre de cette arène ? Longtemps. J'aimais le contact de la foule, le souffle distant mais significatif des femmes réunies autour de nous. Ashrand était un Soumis certes mais il avait profité de l'enseignement de Jiven autant psychique avec l'Esprit que physique avec leurs combats. Je savais donc à quoi m'en tenir, en gros, je n'étais pas confrontée au premier venu et surtout, au premier bretteur de la création. Il était doué, aucun doutes, je n'avais qu'à me montrer plus douée que lui en espérant que ce soit possible ! Mais ouais c'était possible … hein ?

La lame du Cydien s'approcha dangereusement de mon épaule mais plutôt que de la parer aussi bêtement qu'il semblait le croire, j'utilisais un mouvement du poignet pour faire plonger la pointe de ma rapière vers le bas. Sa lame fut arrêtée par le pommeau de la mienne, sachant pertinemment que sa première attaque en cachait une autre que je venais ainsi de contrer. J'utilisais l'appui que j'avais sur le sol pour le repousser, appuyant ma force contre sa lame avec la mienne. Dans un même mouvement, je me décidais à faire un pas de côté. Je n'avais pas encore décidé que le combat pouvait commencer ! Je n'avais pas fini mon étude et je comptais bien m'offrir le temps de repérer ses failles.
Se battre à la loyale, je savais faire. Il oubliait cependant que je disposais de bien plus que d'une simple rapière en ces lieux. Il ne voulait pas me faire de cadeaux ? On serait deux. Ni une ni deux, je passais à l'attaque, finalement, je préférais mener la danse plutôt que de lui laisser une chance de m'imposer son propre rythme. Il avait surement l'expérience de l'arène mais j'avais pour ma part l'expérience du combat de rue comme de celui à grande échelle. J'espérais que cela ferait la différence entre lui et moi même si je me moquais un peu de l'issue du combat. J'avais en effet l'impression que j'allais surtout bien m'amuser, pouvant enfin me donner à fond. J'avais pris le temps de fermer mon Esprit avant de me lancer dans le combat.

D'un mouvement, je me lançais dans sa direction, rapière en main bien que je sache que le coup serait paré. Un coup de côté dirigé vers son buste pendant que ma main libre préparait déjà le prochain assaut, qui pour sa part allierait l'arme à l'élément de feu. Je comptais dévier son attention sur ma rapière pendant que je me concentrais pour chauffer ma main libre. Il me faudrait surement quelques échanges avant de parvenir à mes fins mais peu importait si cela pouvait me permettre d'avoir l'avantage ! Si je parvenais à chauffer ma main sans faire apparaître de flammes, je pourrais en faire de même avec celle qui portait l'arme et chauffé à blanc ainsi la lame de cette dernière. Si j'y parvenais, j'infligerais des blessures autrement plus graves qu'avec la rapière à elle seule seulement, je n'avais jamais tenté ce genre de choses auparavant ... Prépare toi petit Ashrand, je me jette dans la bataille avec toutes mes armes !

[ J'ai du mal à décrire le combat, j'ai les idées mais pas les mots XD ]

Éléa avait une confiance aveugle en ses compagnons. Ils avaient certes l'air menaçant et lui donneraient du fil à retordre mais sans Éléa pour batailler à leurs côtés, ils ne feraient que de piètres adversaires, du moins c'était ce que pensait le Soumis. Peu importe comment il retournait la question, pour lui les loups n'étaient dangereux que s'ils épaulaient la Princesse aux cheveux d'ébènes. C'est vrai, quoi : comment pouvaient-ils être de sérieux adversaires alors qu'ils n'avaient rien d'autre que des griffes et des crocs mais cependant rien pour parer son épée. Un coup bien placé et s'en serait fini. Oui, Ashrand n'avait jamais combattu de canidés et ils tenait sa victoire pour acquise face à ceux-ci.
Peu importait, la belle n'avait apparemment pas l'intention de se servir d'eux alors il ne s'en préoccuperait pas. Mais qui sait ce qu'elle ferait si jamais elle se retrouvait en fâcheuse position ? Préserverait-elle sa fierté ou son titre ? Nous verrons bien, ce n'étais pas le plus important dans l'immédiat.

Même en combat singulier, le jeune homme savait qu'il avait une femme très douée pour adversaire, sans doute plus dangereuse que la plupart des Sentinelles de la cité, si pas toutes. Non, Kiera était assurément plus forte qu'elle, il n'en doutait pas le moins du monde car les compétences de la blonde ne pouvaient être mises en doute tant elle avait déjà prouvé sa valeur en tant que meneuse et que guerrière. Toutefois, ce n'était pas une raison pour penser qu'Éléa était faible et, s'il avait le malheur de le faire, il s'en mordrait les doigts très prochainement. Il se devait de garder à l'esprit que la moindre erreur de sa part lui coûterait au minimum la victoire et dans le pire des cas, quelque chose de bien plus grave lui arriverait mais ça, Ashrand préférait ne pas y penser. Autant rester concentré sur le combat et faire en sorte de ne pas oublier qui il avait en face de lui, histoire qu'il n'ait pas à regretter un geste malencontreux.

Sa première frappe fut contrée avec brio par la jeune femme, à tel point que le Cydien ne put poursuivre avec l'attaque suivante qu'il avait planifié. Avait-elle prévu cela assez à l'avance pour le contrer sans aucun mal apparent ? Possible. Après tout, il laissait courir son Esprit sans s'en rendre compte car il n'avait pas pensé un seul instant à dresser des barrières correctes dans sa tête. Cela lui paraissait improbable qu'elle puisse avoir lu dans ses pensées à distance mais si elle était parvenu à le faire il y a deux ans avec un simple contact physique, il n'aurait même pas été étonnant qu'elle arrive à le faire aussi facilement à présent. Ainsi Ashrand ferma son Esprit du mieux qu'il put c'est-à-dire assez partiellement car il n'était pas encore capable de dresser un mur imperméable en lui et l'extérieur mais au moins l'Amazone éprouverai plus de difficulté à lire dans ses pensées si jamais elle en était apte.
Le coup de la Princesse arriva sans qu'elle ne crie gare. Enfin, coup était un grand mot étant donné qu'elle se contenta de le repousser, usant de toute sa force, avant de se mouvoir sur le côté pour éviter ainsi de se faire blesser par une autre attaque venant de la part du Soumis aux yeux bleus.
Le sable crissa faiblement quand le Soumis fut obligé de reculer sous l'impulsion de la jeune adulte, dessinant ainsi deux petits sillons dans le sable là où ses pieds passèrent. La princesse avait de la chance : Le Cydien n'était absolument pas sûr de ses appuis et n'avait été qu'à un pas d'être déséquilibré, par conséquent il ne contre-attaqua pas dans l'immédiat, préférant s'assurer de retrouver une bonne stabilité avant de continuer. Il y a quelques années, il aurait tenté le tout pour le tout et aurait mouliné dur aussitôt qu'il en aurait eu l'occasion mais plus maintenant. Aujourd'hui il se battait avec davantage de sagacité, lui évitant de ce fait d'offrir son corps à la lame de l'opposant. De même, Ashrand savait que ce serait là la dernière chose qui fonctionnerait face à Eléa : contre elle, rien ne devait être laissé au hasard. Rien.
Une nouvelle fois, Éléa frappa à l'aide de sa rapière et prouva une nouvelle fois combien elle pouvait être redoutable une fois qu'elle avait une arme entre les mains bien qu'elle ait d'autres atouts dans sa manche, à savoir la manipulation et de la nature et des flammes. Doutant que la manipulation de la terre lui serve à grand chose ici, Ashrand guettait plutôt le signe d'un feu ou au moins d'une flammèche.

L'arme de l'héritière fila par le côté, ayant visiblement pris son torse pour cible. Un coup simple mais efficace qui en aurait touché plus d'un mais pas lui. Il para, tenant fermement sa lame courte d'une seule main. Il ressentit l'impact jusque dans ses poignets et cela confirma les pensées du jeune homme : la petite avait plus de force que sa carrure ne le laissait penser. Mais il tint bon, même s'il dut contracter tous les muscles de son bras gauche pour bloquer la lame adverse. La manœuvre, bien que risquée penseraient certains, lui permettait par ailleurs de garder une main libre et il comptait bien en faire usage...
Sans attendre, le Soumis ferme le poing et, après avoir fait un pas rapide pour arriver presque au contact, envoya un coup direct à destination du plexus cœliaque de la demoiselle. S'il pouvait juste lui couper la respiration un instant, ce serait suffisant pour lui porter le coup qui la ferait perdre.
S'il ne rivalisait pas sur le panel de compétences et éventuellement sur la technique à l'épée, il profiterait de sa vitesse supérieure pour la vaincre.
Un pas en arrière et il put ramener sa lame face à lui, adoptant à nouveau une position défensive l'espace d'un instant, pour être sûr que si Éléa rabattait sa lame sur lui, il puisse la contrer. Il planta une nouvelle fois ses yeux dans ceux de son adversaire, une flamme semblant s'être allumée dans celle-ci. Le lueur du défi brillant plus que jamais, il attendait que l'Amazone lance leur deuxième échange.

[J'ai comme l'impression que c'est totalement incompréhensible xD]

Il était un adversaire redoutable, je l'avais deviné de part la réputation qu'il trainait derrière lui mais aussi de part la détermination que j'avais pu lire dans ses yeux dès le début de combat. Je savais que le coup que je tentais de lui porter n'était pas suffisant pour lui faire peur et le faire perdre mais il était surtout là pour voir quels étaient les réflexes de mon adversaire. Je comptais bien gagner du temps en fait il fallait bien l'avouer ! Il para le coup avec une certaine aisance preuve que sa réputation n'était pas usurpée. J'aurais du m'en douter en même temps ... On ne tentait pas de combattre la championne de l'arêne tant qu'on était pas au sommet soi-même ... enfin bref.

Il m'étonna. Je devais bien l'avouer, je ne pensais pas qu'il aurait eut assez de courage pour me porter un coup physique. En tant que femme et princesse de la cité qui le retenait prisonnier de surcroit, je pensais qu'il se contenterait de me vaincre à coups d'épée mais j'avais eut tord. En fait, ce n'était peut-être pas plus mal, ça rajoutait un peu de piquant à l'histoire et me permettait de comprendre que j'avais intérêt à être plus vigilante à l'avenir si je ne voulais pas finir à moitié morte d'ici une heure ! Je ne pris pas le coup de plein fouet que par chance. En réalité, je n'avais pas vu le coup venir mais en évacuant mon coup avec son épée et en se posant sur ses appuis, Ashrand m'avait sans faire exprès dévié de ma propre trajectoire. Il me frappa certes mais pas assez pour que j'en perde mes moyens. Néanmoins, je reculais d'un pas sous le choc et d'un autre sous le poids de l'étonnement. Jamais je n'aurais pensé un jour qu'on puisse lever la main sur moi avec autant de violence ! Je fermais les yeux et reculais de telle sorte à me retrouver hors de portée et, pour plus de sureté, j'élevais entre lui et moi un mince rideau de flammes qui disparut le temps de me laisser reprendre mon souffle.

" Frapper une femme ... tu tombes bas petit Soumis ! " lançais-je pour gagner du temps.

La bataille se remportait autant par les coups que par le psychologique. Je me doutais que ma pique ne l'atteindrait pas mais au moins, entre le petit mur de flammes, pas plus haut cependant que ma taille, et cela, j'avais gagné suffisamment de temps pour me remettre du coup ... j'aurais surement un hématome le lendemain ! Mais au moins, ce petit escarmouche m'avait permis de voir une chose : ma technique avait fonctionné. J'étais parvenue à concentrer la chaleur dans mes mains et je m'étonnais encore que cela soit possible ! Maintenant que je parvenais à comprendre comment le tout fonctionnait, et que je louais le ciel d'avoir mis Jiven sur ma route pour m'apprendre à me concentrer et me calmer en toute situation ou presque, j'avais un sérieux avantage.

" Dommage que tu te sois attaqué à moi ! " lançais-je, prête à repartir au combat.

D'un geste, le mur de flammes disparut tandis que je travaillais déjà sur ma nouvelle petite théorie. J'avais délaissé ma main libre pour ne concentrer la chaleur que dans celle qui tenait la rapière, dans quelques minutes, la lame serait suffisamment chauffée à blanc pour en devenir redoutable.
Je m'élançais, incertaine de gagner mais certaine d'une chose, que je n'allais pas me laisser faire. Ma rapière décrivit un moulinet tandis que je l'abaissais vers son poignet. Blesser mais ne pas tuer ? Il aurait pu me tuer avec son coup précédant, pourquoi me retenir dans ce cas de lui prélever un membre ? Si je lui coupais la main, il ne pourrait plus user de son épée ... logique implacable non ?

Je ne m'amusais pas autant que je l'aurais espéré.
J'avais besoin de me défouler et ce fichu titre de princesse m'en empêchait.
Cette foule, cette cité, ce cocon si solidement tissé autour de ma petite personne … si je tuais, serais-je jugée ? Si je blessais, serais-je détesté de ce peuple qui était le mien ? De mes sœurs, de sang comme de cœur. Nul ne connaissait la nature humaine mais tous savait à quel point j'étais un monstre quand je le voulais. Tout ceux qui s'étaient dressés face à Jelenna avaient péri par mon épée. Tout ceux qui avaient touché à sa personne nourrissaient désormais la terre de leur entrailles. Serais-je jugée si je blessais, tuais, annihilais encore une fois une vie ? Je n'avais pas le droit de tuer. C'était la loi de l'arène même si parfois, ce genre de choses arrivaient, mais je n'avais pas non plus le droit finalement de détruire l'image solide que j'avais érigé autour de moi. Lorsque j'avais appris la trahison de ma mère, j'avais passé mon temps à ériger une solide barrière entre les autres et moi, j'avais pris le soin ensuite de devenir la princesse que tous attendaient. La Tribun que tous espéraient. J'avais commencé à rentrer dans ce fichu moule où tous voulaient me voir évoluer, bafouant mes sentiments et délaissant mes vieilles habitudes en public. L'ancienne Eléa me manquait sur beaucoup de points et notamment sur le fait que je n'avais plus l'occasion de m'amuser, de passer mes nerfs sur autre chose que des mannequins sans réplique et sans intérêt.
Prise au piège.
Je m'étais moi-même piégée.
Toutes ces années, ces mois et ces semaines à devenir celle que l'on attendait, petite touche personnelle en plus, tout ce temps à me dire que je pouvais être la princesse de Muria et rien d'autre. J'étais une Cydienne. J'étais une mère. Une sœur. Une femme.
Une combattante.

Ce combat n'avait pas d'importance dans l'absolu, que je perde ou que je gagne, je m'en foutais. Pire, j'en avais rien à foutre de ce titre. Je pourrais l'avoir une autre fois et même si ce n'était pas le cas, qu'est ce que cela changerait ? Ma fierté. J'en prendrais un coup c'était sur même si comme d'habitude je parviendrais à le cacher. Ma foutue fierté serait malmenée certes mais je m'en relèverais. Alors pourquoi ?
Pourquoi ?
Parce que j'avais déjà la réponse.
Ce combat n'avait aucune importance si ce n'était rabattre son caquet à ce Soumis un peu trop présomptueux pour avoir cru s'élever à mon niveau. J'avais besoin de ce combat pour me rappeler qui j'étais, celle que j'avais laissé de côté pour prôner une tolérance dont je n'avais que faire si ce n'était qu'elle me servait rudement bien au Tribunat. Je voulais gagner, voilà pourquoi j'avais accepté ce combat aussi futile soit-il, pour me prouver que je pouvais encore gagner, encore être la meilleure dans un domaine qui ne m'échappait pas, dans un domaine que j'aurais choisi.

Gladiatrice.
J'avais choisi cette voie par mépris des règles, par violence, du fait d'une irrépressible envie de montrer à ma mère que je valais autre chose que ce qu'elle voyait en moi. Que j'étais forte. J'allais être forte. Je savais être forte. Moralement, mais pas seulement. La princesse que j'étais devenue avait juste besoin d'une leçon pour se souvenir à quel point elle était douée au combat lorsqu'elle ne s'imposait aucune limite.
J'étais Eléa, championne en titre de Muria, non parce que j'étais une princesse mais parce que je savais maniais la rapière mieux que personne, parce que je savais me battre comme mes loups, sauvagement et sans scrupule. J'aimais cette personne, je l'avais juste laissé dormir un peu trop longtemps. Je n'étais pas n'importe quelle princesse, j'étais celle qui aurait brulé sa propre cité pour sa cadette, j'étais celle qui brulerait chaque personne qui toucherait aux siens. La politique, les belles paroles faisaient leur temps mais parfois, il fallait revenir aux sources.
Je rentrais dans le combat.
Pour de bon.

La voix du Soumis me rappela à l'ordre.
Il pensait m'avoir avec un simple artifice ? Il pensait m'atteindre avec ses petites attaques de pacotille ? Il avait osé poser sa main sur moi et espérer gagner ? Quelle foutaise.
J'étais ravie de constater que ma petite stratégie fonctionnait. Adolescente, j'avais usé de cela à tord et à travers pour me venger de ceux qui osaient toucher à Jelenna ou même plus simplement à moi. J'avais dressé une barrière pour ne plus revivre l'abandon provoqué par ma meilleure amie. S'il fallait être cruelle et rusée pour survivre, j'étais la prochaine étape de l'évolution !

« Je ne serais jamais ton égal. »

Finalement, qui entrait de le jeu de qui ?

« Ne prétends pas te hisser à ma portée, tu ne sais rien de moi ! »

L'assaut.
Final ?

« Et maintenant, je vais en finir. »

Finalement, je n'étais pas encore une adulte. Pas encore dans le moule.
J'avais encore une chance de devenir moi-même avec un peu de tout ce qu'on attendait de moi et un peu de moi-même.
Pas encore le coup final.
Ashrand para l'attaque avec une agilité déconcertante à mon goût ! Si j'étais sure de moi d'ordinaire, je savais que ce combat, outre contre le Soumis, serait sans doutes le plus délicat à remporter de ma courte vie. Il signifiait sans doutes bien plus pour moi que pour le Soumis. En réalité, je me doutais qu'il ne cherchait qu'à avoir mon titre alors que je tentais par mes actes de prouver qui j'étais. Ce que je valais vraiment.

Le Soumis approcha dangereusement de moi mais fort heureusement, mes entrainements avec de vrais combattantes bien plus aguerries que lui au combat de rue comme au combat de grande échelle me permit d'éviter la majeur partie des coups cependant, il me parut évident au bout d'un moment qu'en réalité, il cherchait surtout à me faire reculer. Ce fut au moment où je compris cela que je me rendis compte qu'il était soit vraiment malin soit totalement fou. M'acculer ? Comme si cela suffirait. Mais c'était rudement bien pensé ! Je devais l'admettre, il me surprenait !

Il croyait avoir à faire à une petite princesse sans défenses ? Je lui envoyais par l'Esprit tout le mépris et la haine que son comportement induisait en moi. Pourquoi ne pas me prendre pour une adversaire sérieuse jusqu'au bout ? Il pensait vraiment que je n'étais qu'une pauvre fille qui avait usurpé son titre ?
Je le toisais de toute ma hauteur.
Lorsqu'il lança sa jambe en direction de mon genou, je m'y attendais un peu. Je ne pensais pas qu'il viserait le genou certes, mais je me doutais qu'il comprendrait rapidement que ce combat devait rapidement être fini. Parfait. Au dernier moment, je reculais d'un pas et posais ma main brulante sur son propre genou. L'odeur de chair brulée se fit vite sentir bien que le contact ait été rapide. Je souriais de voir que ma stratégie avait fonctionné et ce, même si ça m'avait couté mon poignet droit. J'avais du parer au dernier moment pour le laisser croire qu'il avait une chance tout comme j'avais du changer de stratégie au dernier moment. Ma rapière aurait été abimée de toute façon par mon idée originale … encore heureux que j'ai agi sur réflexe plus qu'avec ma tête non ?

A présent qu'il s'était éloigné de moi suffisamment, je plantais ma précieuse amie dans le sol poussiéreux de l'arène. L'attaque m'avait offert quelques secondes de répit. Je me concentrais donc, et renouais avec le premier don qui s'était manifesté chez moi. Des lianes se mirent à pousser et à s'enlacer autour de ses chevilles pour le maintenir solidement en place.

« C'est terminé. » lâchais-je, distante.

« Tu m'as pris pour une gamine sans cervelle, moi qui pensais que tu étais différent. Fais encore un geste, et tu signes ton arrêt de mort. »

J'avais mal.
Non physiquement mais moralement.
Je détestais être traitée en gamine.
Je détestais qu'on se foute de moi.
Je détestais me sentir trahie.
Je détestais l'idée de me sentir trahie par lui, que jusque là je ne considérais pas comme quelqu'un d'important pour moi, quelqu'un qui avait une place dans ma vie et qui, je devais l'avouer, semblait être en fait un "ami" ...
Pire, je le détestais lui, d'avoir voulu ce combat qui m'avait fait ouvrir les yeux sur celle que j'étais et que je voulais être. Je le détestais d'avoir instauré une nouvelle fois le doutes chez moi et je le détestais de le faire avec autant de légèreté, juste pour gagner un titre sans valeur.

J'avais gagné.
Pas ce combat dont je me foutais. J'avais gagné, j'avais retrouvé ce quelque chose que je semblais avoir jusque là perdu. Ce qui faisait de moi une princesse certes, mais avant tout, une femme, une Amazone et un être humain. J'avais retrouvé ce sentiment si étrange de la satisfaction, du bien être que l'on ressent à être soi-même sans s'inventer une personnalité pour s'adapter à la personne que l'on avait en face de soi ...
J'avais gagné.
A moins qu'il ne se relève et qu'il ne m'affronte à nouveau. Je l'attendais, mais cette fois, il ne s'en sortirait pas en un seul morceau. La petite princesse fragile et distante qu'il avait connu existait, mais se cachait derrière ce solide masque une femme qui ne demandait qu'une chose : qu'on la respecte pour ce qu'elle était. Une femme impulsive qui n'hésitait pas à frapper et qui détestait les hommes pour ce qu'ils étaient. Des traitres.

[ Ouah je me suis enflammée O.o
Je crois que je ne suis même pas compréhensible mais c'est comme ça que je voyais Eléa pour le coup O.O'''' J'espère que ça ne pose pas de problèmes, en sachant que si tu veux reprendre le combat, tu peux hein, juste que tu m'as offert une sacrée opportunité ! Sinon, on peut continuer à bavarder enfin toi qui vois ^^ En tout cas je te remercie, tu m'as permis de faire évoluer Eléa vers un chemin encore inexploré XD
Ps : pour la brulure, je peux bien entendu te la soigner en RP ! ]

Le combat avançait, devenait de plus en plus violent et semblant prendre une signification différente pour l’un des deux combattant. Eléa lui avait répondu sèchement qu’il ne pourrait jamais se mettre au même niveau qu’elle, entrant de ce fait dans son jeu. Cependant, elle semblait très mal le prendre tout autant que le duel devenait plus qu’une simple compétition pour elle. Il s’agissait certes de défendre son titre, mais était-ce nécessaire de mettre autant de haine dans chacun de ses mouvements ?

« Vous n’ouvrez jamais votre cœur à personne, comment voulez-vous que je sache quelque chose à votre propos ? »

Cette fois, il ne s’agissait pas d’une provocation, juste d’une constatation. La Princesse dressait une muraille autour de ses sentiments et tout ce qu’elle en montrait était la colère. Pour lui, elle se renfermait en quelque sorte, préférant compter uniquement sur elle-même, et le Soumis savait qu’elle courait droit dans le mur. Certaines choses se devaient de rester des secrets mais il y avait des limites tout de même ! Après toutes ces années, le garçon ne savait vraiment pas grand-chose sur elle car quand ils partaient sur des sujets plus sensibles au cours de leurs rares discussions, il se heurtait à un mur froid.

« Tout garder pour soi n’est pas une solution non plus, Princesse. » lui dit-il simplement.

Elle annonça qu’elle allait mettre un terme au combat qui durait seulement depuis quelques minutes. L’héritière lui envoyait constamment tout le mépris qu’elle éprouvait à son égard et Ashrand put enfin mesurer à quel point elle le haïssait, même s’il ne comprenait absolument pas pourquoi. Parce qu’il lui disait tout ce qu’il pensait sans détour, y compris quand cela pouvait ne pas lui plaire ? Il avait toujours su qu’Eléa ne le portait pas dans son cœur, qu’elle préférait éviter d’avoir à lui parler mais toute cette haine était-elle justifiée pour autant ?
La main brûlante se posa sur son genou et le gladiateur étouffa un cri de douleur. Le contact avait été bref, à peine plus d’une seconde avant qu’il ne recule mais cela avait été suffisant pour le brûler gravement. Si son genou le faisait atrocement souffrir, il ne le laissait pas paraître, se contentant d’arborer une expression un peu crispée au début. Il lui fallait retourner à l’assaut pour espérer clore se combat avant que la douleur ne l’handicape trop mais à peine avait-il tenté de bouger qu’il manqua de perdre son équilibre, ses pieds refusant de se décoller du sol.
Manipuler la nature.
C’était ce qu’elle venait de faire, à en juger par les lianes apparues comme par enchantement et qui restreignaient terriblement ses mouvements.
Terminé ? Oh non, pas encore. Il n’avait pas dit son dernier mot et ce ni cette brûlure ni ce petit tour de passe-passe qui allait le faire renoncer. Il voulait ce titre, et se prouver qu’il était loin d’être aussi insignifiant qu’on le pensait en prenant la première place. Accessoirement, ces combats lui permettaient de se défouler, de profiter d’un affrontement singulier qui n’avait pas grandes conséquences en cas de défaite, un plaisir qu’Eléa avait l’air d’avoir perdu de vue.

« Vous souhaitez tant que ça me tuer ? Je sais depuis longtemps que vous ne pouvez pas me supporter mais je crois que je ne vous ai jamais demandé les raisons de ce ressentiment. »

Il éprouva la solidité de ses liens végétaux et la seule chose qu’il pouvait en tirer était qu’il ne pourrait jamais s’en libérer par la force brute. Le seul moyen était de trancher les lianes avec sa lame mais la fille de Philéa l’en empêcherait. Dans son état actuel, tel qu’il le ressentait par l’Esprit, elle n’hésiterait pas à lui planter sa rapière au moindre signe hostile. Toutefois, le Cydien n’avait pas l’intention d’abandonner sous prétexte qu’on le menaçait. Il décomposa son mouvement très doucement afin que l’Amazone ne sois pas surprise par un geste brusque. Pour l’instant, elle était aussi dangereuse pour lui que pour elle-même et il lui fallait impérativement se calmer ! Ashrand savait que c’était en partie sa faute si sa colère avait été suscitée à ce point, étant donné qu’il l’avait délibérément provoquée…

« Vous ai-je jamais considérée comme une enfant ? Pensez-vous vraiment que j’aurais demandé un duel à une gamine, sachant que c’est loin d’être sans risque ? » demanda-t-il, aussi neutre que possible.

Il tentait autant que possible de la raisonner, de l’empêcher de faire quelque chose qui pourrait lui nuire. Si elle essayait réellement de mettre un terme à sa vie, il n’aurait d’autres choix que de se défendre, aussi déplaisant l’idée de se battre pour défendre sa vie soit-elle.

« Croyez-vous qu’on donnerait vos fonctions à une enfant ? Vous vous méprenez. Tout le monde sait qu’on peut compter sur vous, que vous être quelqu’un à qui on peut faire confiance et je n’y fais pas exception. »

Le deuxième lien fut tranché mais Ashrand ne se relança pas tout de suite au contact.

« Alors cette gamine sans cervelle, elle n’existe que dans votre tête » conclut-il en lui souriant.

Il se remit en garde, lui faisant comprendre qu’il avait l’intention de reprendre le combat pour qu’Eléa puisse reprendre sa rapière. Il s’était laissé surprendre par cette nature qu’elle manipulait, croyant qu’il n’était pas possible de faire pousser quelque chose dans le sable mais il ne répèterait pas cette erreur. A présent, il devait faire attention à cette lame, à cette main brûlante et à ces plantes qui l’entraveraient. Pour la première fois, l’impression d’avoir un net désavantage sur son adversaire envahissait le jeune homme sans qu’il ne désespère de remporter cette jour pour autant.
Il évita de la provoquer une nouvelle fois et se contenta de lui dire

« On y retourne, Princesse. »

Rapidement, les quelques mètres qui les séparaient furent couverts et le Soumis fit plonger sa lame vers l’abdomen de la jolie brune, gardant cependant à l’esprit qu’elle tenterait peut-être d’attenter à sa vie. Sa jambe brûlée lui faisait terriblement mal lorsqu’il marchait et Ashrand ignorait combien de temps cette jambe pourrait le porter, il devait vaincre avant d’arriver à cette limite.

[Je pense que tu peux porter le coup de grâce, n'hésite pas à le blesser tant que tu ne le tues pas bien sûr !
Après, je suis bien partant pour continuer les bavardages enfin, c'est toi qui vois =)]

Ce combat avait pris une tournure que jamais je n'aurais souhaité lui donner.
Ouvrir son cœur, même à la haine, signifiait se montrer faible. Surtout avec la haine.
Je n'étais pas faible. J'étais la princesse. J'étais Amazone. Le sang des grands de ce monde coulait dans mes veines. Un avenir prometteur me tendait les bras si je ne voulais que me donner la peine de le saisir. Le sang de tout un peuple trahi par les hommes hurlait dans mes entrailles. Cet homme n'avait vu en moi qu'une proie facile, un jeu amusant pour obtenir un titre dont je n'avais que faire. Je le lui aurais donné sans peine s'il ne s'était pas moqué de moi. Ne voyait-il donc qu'une femme fragile ? Une gamine tout juste sortie de l'adolescence ?
Il ne savait rien de moi.
Tous ici, hommes ou femmes, ne voyaient en ma personne que ce qu'ils désiraient voir. Une femme d'honneur et de courage pour les unes, une chanceuse pour les autres, une gamine au destin cruel ou encore, une gamine pourrie et gâtée par le destin et la vie en général. Je n'étais rien de tout cela. Je profitais de mon titre de princesse et j'en avais bien le droit. Cette cité était mienne, dans mon cœur comme dans mon corps, je l'aurais défendu au péril de ma vie. Toujours. Sauf si Jelenna était en jeu. Ce peuple était ma famille, mes sœurs, j'aurais tout donné pour leur venir en aide, pour les sauver et les aider. Au final, je n'étais rien d'autre qu'un symbole pour elles. Rien d'autre que la femme à abattre pour gagner un vulgaire titre pour eux.

Je crois que mes pupilles ne se furent jamais plus fines que lorsque j'entendis sa voix prononcer ces quelques mots, « vous n'ouvrez jamais votre cœur à personne, comment voulez-vous que je sache quelque chose à votre propos ». Que je n'ouvre jamais mon cœur à personne ? Je l'avais ouvert à une mère qui n'avait eut de cesse de me mentir, à un père qui n'avait eut de cesse de rattraper un passé révolu et bien trop loin de moi pour espérer quoi que ce soit, à un amant qui m'avait trompée autant physiquement que moralement et qui n'avait jamais cherché à voir en moi autre chose qu'une alliance pour sa cité et une promotion exceptionnelle pour sa carrière. Alors je n'ouvrais plus mon cœur qu'à une personne et une seule car je savais qu'elle était à même de me comprendre et qu'elle m'aimait pour ce que j'étais.

« A quoi cela t'avancerait-il de me connaître ? » rétorquais-je de mauvaise foi et de mauvaise humeur.

J'étais blessée. Totalement perdue et inconsciente du fait que mes sentiments me tueraient sans doutes un jour. J'étais également contradictoire. N'avais-je pas lancé cette pique parce que je regrettais que personne ne cherche à me connaître ? Et maintenant je rétorquais l'inverse ? C'était idiot, gamin, infantile et puéril. Malgré les années passées, je restais une enfant perdue, avec un peu plus de responsabilités, un peu plus de jugeote, mais avec les mêmes problèmes. Je n'avançais pas, je fuyais.
La rage me faisait perdre la raison et avait la fâcheuse tendance à me pousser aux excès de colère. Si j'avais commencé à pardonner à Philéa et Jacen, j'étais encore incapable d'aller de l'avant …

Le combat était fini.
J'avais gagné.
Je le regardais se débattre, ni fière, ni satisfaite. La victoire avait-elle un goût si amer ? N'étais-je pas censée être au paroxysme de ma joie en le battant à son propre jeu ? En lui montrant que je n'étais pas la petite fillette sans cervelle qu'il pensait voir en moi ? Je n'étais pas capable d'éprouver de la joie, j'avais gagné oui, mais le jeu s'arrêtait là.

J'avais souhaité le tuer. Je ne pouvais pas le nier. Dès le premier jour, dès la première rencontre dans cette même arène si mes souvenirs étaient exacts, j'avais tenté de le tuer. Parce qu'il avait tout ce que je voulais. L'aisance du parler, le je-m'en-foutisme de sa positon, la liberté de son état. Il incarnait tout ce que je rêvais d'avoir. Ce masque que je devais porter pour ne jamais porter atteinte à la réputation des Amazones ou de la cité, pour toujours rester conforme au protocole qu'exigeaient les grands de ce monde, j'avais l'obligation de me cacher. Alors oui, je le haïssais de pouvoir vivre libéré de toutes contraintes ! Et je le détestais encore plus de toujours chercher à me pousser dans mes retranchements juste pour s'amuser, pour voir jusqu'où il pouvait aller avant de faire tomber le masque …
Je ne réagissais pas à ce qu'il disait. En réalité, je n'avais rien à dire. J'avais peur de détruire l'image que j'avais construit autour de ma personne, celle qui faisait que tout le monde justement pensait pouvoir compter sur moi parce que toutes ici me considéraient comme forte. J'étais loin d'être aussi forte qu'elles le pensaient et encore pire, je me pensais en dessous de chacune d'elles !

Avoir confiance en moi.
L'idée me paraissait débile et surfaite. Toutes ici avaient confiance en moi parce qu'elles pensaient que j'avais hérité de la hargne et de l'intelligence éclairée de ma mère. Toutes pensaient également que le fait de combattre des Cavaliers faisaient de moi une grande guerrière. Savaient-elles seulement que j'aurais laissé bruler Muria toute entière, que j'aurais sacrifié les Amazones, sans exception, pour la vie de ma jeune sœur ?
J'étais sans doutes la plus indigne de confiance même si je me tuais à remplir les tâches qui m'incombait et puis, quand on voyait comme Lika avait fini pour m'avoir fait confiance, je ne voyais pas quoi c'était glorieux ! Il m'énervait à me faire réfléchir !

Je le regardais se relever, incrédule quelque part de m'être laissée bernée. J'avais du mal à comprendre, s'inquiétait-il vraiment pour moi ? Parce que ses paroles m'avaient touchées et j'étais prête à m'excuser ou plutôt, à laisser tomber. Ou alors, il cherchait simplement à gagner du temps ?
Aucune idée.
Il se précipita sur moi et je ne cherchais pas à esquiver. Pas vraiment. La lame entama le côté droit de mon torse dans une douleur sourde tandis que mes mains s'étaient refermées sur son poignet. J'aurais pu le bruler, je n'en fis rien, je me contentais de le repousser de toutes mes forces. Me concentrant l'espace d'un instant et avant qu'il ne reprenne le combat, je dressais un mur de flammes entre nous, l'obligeant à recule bien plus que mes forces n'avaient pu le faire reculer. Insuffisant pour lui faire peur mais largement suffisant pour lui répondre.
Il m'avait troublée.
Le salopard. Il m'avait complètement retourné la tête.

« Je ne sais plus quoi penser » murmurais-je, sans savoir s'il m'entendait.

« Je t'ai détesté au premier regard, pour tout ce que tu représentais. »continuais-je de façon plus audible, mais étrangement calme, « Tu me demandes pourquoi je te détestes ? », je prenais une pause, « parce que toi, tu peux être libre. »

A présent, un regard accusateur se posais sur lui.

« Je suis princesse, j'ai des responsabilités et, tu as raison, tout le monde a confiance en moi parce qu'une erreur de ma part peut conduire cette cité à sa perte. Une erreur peut tuer ces femmes. Alors que toi, toi sale petit Soumis, tu es libre de dire ce que tu penses quand tu veux. Libre de te montrer sous ton vrai jour ! Libre de dire que tu es malheureux ou heureux sans te retenir ! »

Le ton montait à chaque fois.
Je ne parvenais plus à rester calme ou encore, à contenir ma colère et mon ressentiment.
J'avais avancé vers lui, le mur de flammes avançant au rythme de ma volonté dans sa direction. Un mètre me séparait de lui lorsqu'il tomba, il aurait tout aussi bien pu m'embrocher que je n'aurais pas réagi.

« Tu sais quoi ? Tu es un putain d'homme libre, sans aucun masque à porter et c'est ça qui me tue chez toi. Tu te fous des conséquences puisque rien ne peut être pire selon toi que ta vie ici. Tu te fous de savoir ce que tes remarques font sur les gens tout comme tu te fous de savoir si tu me blesses. Je ne suis qu'une princesse en qui on peut avoir confiance mais tu ne cherches pas plus loin. Tu me places dans une catégorie, cherchant toujours un peu plus à faire tomber le masque par jeu, par envie et par traitrise, sans même chercher à voir ce qu'il y a au delà. Pour toi, c'est juste le jeu de savoir quand tu parviendras à briser l'image que j'ai eut tant de mal à créer, celle justement de cette princesse en qui on peut avoir confiance. »

Je lui racontais tout. Il avait tout voulu savoir.
Il savait à présent.
Je m'avançais de sorte à me trouver vraiment à sa portée cette fois-ci.

« Puisque cela semble t'amuser, n'hésite pas, tue-moi. Tue cette princesse que tous respectent. Vis dans mon monde une seule fois durant. »

Je pleurais.
C'était nul, mais je pleurais, non pas parce que j'avais peur de mourir, mais parce que je portais en moi une haine sans nom envers lui qui n'avait aucun fondement légitime aux yeux du commun des mortels. Pour moi, toute cette colère avait un sens, celui de me dire que jamais je ne pourrais avoir une vie aussi simple que la sienne et que lui ou les autres envie la mienne avait tendance à me tuer sur place.
Les larmes roulèrent sur mes joues tandis que je restais fière et droite.
L'homme baissa son arme.
J'avais baissé ma garde devant lui, j'avais rompu le charme, brisé le masque. Il baissait sa garde. Un partout, next game. J'avais déjà gagné à mes yeux, les flammes, les lianes, la rapière, tout avait été le symbole de ma réussite jusqu'à maintenant et il savait pertinemment qu'il ne gagnerait pas. Il était blessé physiquement, il m'avait meurtri psychologiquement.
Je reculais d'un pas.

Je lui lançais d'une voix neutre :

« Je peux reprendre le combat si tu le souhaites, mais tu as sans doutes compris que tu ne gagnerais pas. Je ne tiens pas à te tuer, finalement, à quoi cela m'avancerait-il …. »

Je n'étais pas un meurtrier, jamais. J'avais tué pour sauver ma vie bon nombre de fois mais jamais pour le plaisir de sentir le sang couler le long de ma lame. Je n'étais pas l'image qu'ils se donnaient tous de moi. Je n'étais pas cette fille si stricte et si prudente. Je n'étais pas cette princesse en qui ils avaient tous confiance. J'étais impulsive, colérique, perdue.
Car moi aussi, j'avais un cœur.

« Si tu veux que je reprennes ce combat, je le ferais mais sache que je n'ai rien à retirer de battre un homme déjà vaincu. Je ne suis pas la sanguinaire que tu imagines, je suis telle que tu me vois. »

Tendant la main vers lui, je répliquais simplement :

« Je peux te soigner si tu le souhaites, à condition que je puisse avoir confiance en toi. »

Aussi bien pour le combat que pour le reste. La phrase sous entendait beaucoup de choses, c'était désormais à Ashrand de saisir l'occasion d'une main timidement tendue. D'une main tremblante dans un monde de ténèbres.

[ Sauf réponse contraire qui me pousserait irrésistiblement à répondre (XD), je suis désengagée ^^ ]

La question que lui posa Eléa le prit un peu au dépourvu. Pourquoi souhaitait-il la connaître davantage ? C’était simple pourtant, qu’y avait-il de plus normal de vouloir en apprendre plus sur une personne qui, au fil du temps, était devenue un peu plus qu’une simple connaissance et de surcroît lorsqu’on savait qu’elle se barricadait constamment et que celle à qui on parlait n’était pour ainsi dire pas toujours celle avec qui on voulait discuter ?

« Depuis le temps que nous nous connaissons, vous n’avez pas cessez de dresser un mur autour de vous. Vous ne montrez qu’une petite partie de vous, montée de toutes pièces, et j’aurais apprécié en apprendre un peu plus sur la vraie Eléa et non sur celle que vous montrez à tous… »

Ashrand savait très bien qu’il n’était qu’un de ces Soumis que la Princesse détestait tant, qu’elle n’appréciait pas beaucoup ses remarques et que, par conséquent, elle n’avait pas à lui offrir ce qui pourrait s’apparenter à de l’amitié, qu’elle lui adresse la parole était déjà pas mal ! Cependant, il savait qu’il y avait d’un côté une princesse superficielle et d’un autre une Eléa spontanée et naturelle. Il n’en avait aperçut que très peu mais il désirait en savoir plus.
L’héritière n’avait jamais ou presque montré de la sympathie envers lui alors pourquoi s’entêtait-il ? Peut-être parce que justement, il ne voulait pas la laisser se renfermer ou alors parce qu’il appréciait beaucoup les rares instants qu’ils passaient ensemble, quand elle ne se montrait ni menaçante ni désagréable.

Aujourd’hui plus que jamais, elle avait laissé libre cours à sa colère. Pire, elle essayait de le tuer à l’instant ! Il avait beau être un peu simplet, au moins n’était-il pas mauvais car bon nombre de personnes auraient tout fait pour que ce combat se finisse en tuerie, surtout vu la façon dont agissait Eléa mais lui foulait ce sable, marchait dans cette arène, pour le plaisir du sport, et non en vue de commettre un meurtre. L’affrontement durait et le comportement de l’Amazone le démoralisait un peu tout autant que cela lui enlevait le plaisir du combat. Lutter pour sa propre vie n’était décidément pas la chose la plus agréable qui soit…
Tandis qu’il se dégageait de ses liens végétaux, elle semblait en proie à la réflexion. Tant mieux car il pu ainsi s’exécuter sans risquer d’être embroché net par son adversaire. Enfin, il repartit à l’assaut et ce fut à son grand étonnement qu’il ne vit pas la Princesse réagir. Il parvint miraculeusement à faire dévier sa lame de sorte qu’elle ne soit pas mortellement touchée, bien que l’acier ait entamé ses chairs. Il l’avait prévenue pourtant ! Il lui avait dit qu’il reprenait le combat alors pourquoi ne pas avoir réagi !? Pire que tout, il avait failli la tuer ! Ashrand avait peiné pour pouvoir lui tenir tête dans ce duel aussi prêtait-il moins attention à la façon dont il portait ses coups, sachant d’une certaine façon qu’ils allaient tout de même être contrés. S’il n’avait pas réussi à rediriger son épée, elle girait probablement là, par terre, et sans vie.
Pourquoi ? La question lui était restée en travers de la gorge. Pourquoi n’avait-elle pas contré ou au moins essayé d’esquiver ? Son cœur sembla s’arrêter dès le moment où il réalisa que le pire scénario possible aurait vraiment pu exister. Le gladiateur s’aperçut à peine qu’elle lui avait saisi les poignets et l’aurait-elle brûlé qu’il aurait à peine réagi. Seul le nouveau mur de flammes l’obligea à reculer suffisamment pour ce mettre hors de portée de ces langues de feu. Qu’elle veuille encore se battre ou non, le Soumis ne le savait pas mais ce n’était pas une erreur de la part de l’Amazone qui l’avait blessée ! Une expression lourde de questions se dessina sur son visage lorsqu’il crût comprendre ce qu’elle avait murmuré. Cependant, il n’eût pas le temps de dire quoi que ce soit, ne tenant pas à lui couper la parole.

Oui, il était un homme, un Soumis qui plus est mais était-ce une raison suffisante pour détester quelqu’un à ce point ? Pour tout ce qu’il représentait, mais que représentait-il justement ? Il n’était qu’un homme enchaîné pour six années à cette cité, jugé et accusé pour ce qu’il n’était pas, placé dans le même sac que les autres hommes. Il n’était rien, il faisait juste partie d’un ensemble, il avait juste été pris dans un système qui le dépassait alors qu’y avait-il à haïr chez lui sinon le fait d’être inférieur aux autres ?
Incompréhension. C’était tout ce qu’il y avait dans la tête du jeune homme. Ainsi, il l’écouta attentivement, tentant de comprendre ce qui pouvait justifier tout ce ressentiment. Il avait l’habitude de ne pas être très apprécié des femmes pour l’unique fait d’être du sexe opposé mais jamais à ce point. Habituellement, c’était juste de la méfiance mais de là à essayer de mettre un terme à sa vie…
Ce qu’elle dit, cela lui fit comprendre à peu près sa situation mais amena encore d’autres questions, de même qu’il se mit à réfléchir. Eléa avait toujours tout eu pour elle, juste parce qu’elle était de sang royal mais jamais Ashrand n’avait compris qu’elle aussi était enchaînée dans un système contre lequel elle ne pouvait rien. C’était la fille de la Reine et elle avait des responsabilités auxquelles elle ne pouvait échapper tandis que lui avait toujours été libre de faire ce qu’il voudrait de sa vie. Pour la première fois, il comprit que ce masque qu’elle arborait était destiné à leur faire croire qu’elle était la Princesse forte et inébranlable que tous souhaitaient et qu’elle n’appréciait pas se cacher derrière cette personne ‘’idéale‘’ qu’elle n’était pas.

« J’ai la liberté et vous avez le pouvoir, c’est quelque chose que nous ne pourrons sans doute jamais changer. Nous voulons chacun ce que l’autre a mais c’est impossible, je le sais bien. Oui, vous êtes la Princesse et cela vous oblige à guider les Amazones, c’est pour cela qu’elles vous font confiance et c’est aussi pour cela que vous vous efforcez d’être la Princesse parfaite, n’est-ce pas ? Ce n’est sans doute pas un bon conseil que je vous donne mais soyez vous-même, autrement vous ne serez jamais heureuse. »

Elle se laisserait prendre au piège dans cette personnalité qu’elle s’était créée jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus faire marche arrière. Qu’elle tente de gommer ses défauts et qu’elle veuille être une bonne meneuse pour ce peuple était assurément une bonne chose mais il ne fallait pas se laisser engluer dans ce ‘’masque de perfection‘’, elle n’était pas obligée de le mettre constamment !
Depuis toujours, le jeune homme aimait taquiner les gens, pointer du doigt les défauts des gens mais il ne le faisait jamais dans le but de les blesser. Il n’y avait jamais rien de méchant dans ses propos mais sans le savoir, il vexait beaucoup de monde. Et bien souvent, il ne s’en rendait compte que lorsqu’il était trop tard, comme aujourd’hui. Toutes ces remarques espiègles qu’il avait lancées à Eléa la blessaient à chaque fois mais, dressant un mur autour d’elle, il n’avait rien vu. Elle avait accumulé ce ressentiment jusqu’à ce que cela déborde et qu’elle laisse sa haine éclater comme elle venait de le faire. Ashrand savait qu’elle ne montrait pas ce qu’elle ressentait mais il s’était lui aussi fait piéger par cette personne que la Princesse s’efforçait d’être : il était persuadé que cela ne la touchait pas, que ses plaisanteries la laissaient juste de marbre.
D’un seul coup il se sentait très mal, il avait été aveugle tout ce temps, ne se rendant pas compte qu’il la meurtrissait à chaque fois qu’il la taquinait. Il voulait s’excuser, lui dire à quel point cela n’avait jamais été son intention, qu’il était vraiment désolé de l’avoir tant fait souffrir,… mais n’était-il pas trop tard pour cela ? Accepterait-elle seulement de l’écouter ?

« Princesse, je… j’ignorais que ça vous blessait. Je plaisantais et, croyez-moi, je n’ai jamais voulu vous faire du mal. Vous ne m’avez jamais rien dit sur tout ça. »

Si elle ne taisait pas autant ses sentiments, le Cydien s’en serait sûrement rendu compte. Actuellement, il culpabilisait et pas qu’un peu !

« Je suis tellement désolé. Si je l’avais su, je vous jure que j’aurais gardé ces taquineries pour moi… » murmura-t-il sur un ton d’excuse, « C’est justement parce que je sais que vous portez un masque, que vous adoptez une attitude superficielle, que je veux le faire tomber. Ce n’est pas un jeu, juste que j’aurais aimé vous connaître un peu plus. Est-ce nécessaire de vous conduire en Princesse avec moi, alors que vous n’avez plus rien à me prouver, ne pouvez-vous juste pas vous comporter naturellement ? Je crois qu’il vous faudrait trouver le juste milieu, la Princesse pour le Tribunat et son peuple lorsque c’est nécessaire et Eléa quand vous le pouvez. »

Il la vit s’avancer, le visage baigné de larmes, et son cœur se serra. Il l’avait blessée encore plus qu’il ne le pensait… Il l’écouta parler, vider son sac. Si cela pouvait la soulager, il la laisserait faire autant de temps qu’il le faudrait. Il mourait d’envie de la prendre dans ses bras, la consoler, essayer de l’aider mais il se doutait qu’elle le prendrait mal. Il y avait des gens autour d’eux et le jeune homme ne pouvait se permettre de se montrer si familier avec elle. Il se contenta de secouer la tête pour marquer son refus

« Non, elles seraient perdues si leur Princesse venait à disparaître. Et puis, vous savez bien que je ne lèverais jamais la main sur quelqu’un dans le but de le tuer »

Il avait baissé les barrières autour de son Esprit pour qu’Eléa puisse constater si elle le souhaitait qu’il était plus sincère que jamais. Tout deux avaient baissé leur arme, lui n’ayant même plus envie de se battre. Il avait voulu ce titre mais là, le cœur n’y était plus. Il perdrait certainement le combat s’ils continuaient et les confessions d’Eléa l’avaient ébranlé à tel point qu’il n’y avait plus aucune combattivité dans son esprit.

« Ca ira, j’admets ma défaite. Vous m’avez prouvé que j’étais encore loin derrière vous. » dit-il humblement, « Les rumeurs disent que vous êtes sanguinaire, oui, mais je suis content d’avoir aperçu ne serait-ce qu’un instant la personne que vous êtes vraiment. »

Etrangement, perdre était moins désagréable qu’il ne l’aurait cru. Au moins avait-il pu remettre les choses au clair avec Eléa, même s’il se doutait qu’elle ne lui pardonnerait probablement pas. L’héritière lui tendit ensuite la main, ce qui marquait la fin du duel.

« Bien sûr que vous pouvez, même si je ne mérite pas votre confiance après ce que j'ai fait. »

Pour preuve, il lâcha son arme qui tomba sur le sable de l’arène, acceptant ainsi sa défaite et prit la main d’Eléa.

« Si jamais, à l’avenir, il y aurait quoi que ce soit que je puisse faire pour vous aider, si maigres soient mes possibilités, n’hésitez pas … »

Il tenait à se racheter pour ces fautes qu’il avait commises à répétitions ces dernières années bien qu’il aurait en tout temps accepté d’aider Eléa car, même si leur relation était loin d’être calme, il l’appréciait quand même.

« Il y aura des soigneuses dehors pour moi, ne vous en faites pas pour ça. Je m’inquiète plutôt pour votre blessure, elle saigne quand même beaucoup, je crois qu’il vaudrait mieux vous occuper de cela avant. » répondit-il gentiment

Elle était davantage blessée que lui et sa plaie saignait assez bien. Pour autant qu’il en sache, le soigneur ne pouvait se guérir lui-même et cela l’inquiétait de voir qu’en dépit de son effort pour ne pas la blesser, la blessure avait l’air profonde. Il lui sourit doucement avant de retourner vers les grilles de l’arène

« J’espère que malgré tout le mal que j’ai pu vous faire, vous accepterez que nous nous revoyons. Encore merci et désolé … »

Le titre de champion ne serait pas pour lui mais il se sentait apaisé d’avoir pu mettre les sentiments d’Eléa au net. Il se sentait un peu moins perdu et il avait pu prendre conscience d’à quel point il avait pu malmener la demoiselle aux cheveux d’ébènes. S’il en avait honte, ce n’était pas forcément une mauvaise chose, au moins ne répèterait-il pas les mêmes erreurs.


[Désengagé]
[Merci pour ce RP ! J'étais obligé de refuser vu la situation, j'espère que ça ne t'obligera pas à refaire un post ^^']