Le jeune adolescent était littéralement plongé dans son ouvrage. Depuis toujours, Thétis avait préféré la compagnie des livres et des écrits à celle des hommes et de leurs sentiments trop complexes à son goût. L'Almer avait ainsi passé le plus clair de son temps à lire et apprendre une multitudes de choses sur les peuples d'Azthia et d'ailleurs qu'à écouter parler les grands de ce monde. Alors pour sur, il n'avait pas vu Talia arriver et encore moins ne l'avait-il pas entendu. Le jeune homme pourtant ne réagit pas lorsqu'elle apparut devant lui mais plutôt lorsqu'elle lui parla. Un sursaut parcourut son corps tandis qu'un regard dur mais étonné se dessinait sur son visage.
Dur parce qu'il détestait être dérangé, que tous ici le savaient.
Etonné parce qu'il ne s'attendait pas à voir une si jolie jeune femme l'appeler ainsi.
Une voix lente, posée, totalement dénuée de sentiments comme si elle cherchait à être neutre.

Le jeune homme posa la plume qu'il tenait en main sans même chercher à comprendre comment cette jeune femme était parvenue jusqu'à lui. En réalité, il se demandait sincèrement comment elle avait pu passer la porte sans qu'il n'entende cette dernière grincer sur ses gonds ou encore, comme elle avait pu avancer sur le sol jonché de papiers en tout genre qu'il n'avait pas encore pris le temps de ranger, lui pourtant si contentieux, sans qu'il ne l'entende. Tel un chat, elle s'était présentée à lui et, si son visage semblait lui être familier, Thétis était sur de ne pas la connaître. En silence, le jeune homme attendit, conscient que si elle l'avait interrompu, ce n'était pas par envie mais pour autre chose de bien plus important.
Il ne fut pas déçu. Cette femme savait visiblement beaucoup de choses. Tutnesi notamment et leur lien de parenté, rien que ça surprenait car seule sa mère était au courant et lui bien sur. Un assassin qui pliait l'échine devant lui, peut-être son père avait-il fait quelque chose de bien au fond dans sa vie … mais le plus intéressant était sans doutes ce qu'elle lui proposait. Si elle était là pour lui offrir son dévouement, cela ne pouvait signifier qu'une chose, son père et ses bâtards étaient morts ce qui faisait de lui son héritier. Seulement, Thétis aimait les challenges et gagner ainsi était beaucoup moins intéressant que prévu. Il prit toutefois le temps de réfléchir à la situation, peut-être n'était-elle là que pour lui annoncer que son père le reconnaissait enfin à sa juste valeur et qu'il lui offrait, en lui envoyant son jouet personnel, la possibilité d'être formé à sa future charge.

Beaucoup d'hypothèses pouvaient naitre de cette simple demande aux yeux du jeune Almer et c'était tellement excitant qu'il en posa totalement le livre dont il tenait encore jusque là la couverture dans sa main.

« Mon père et ses bâtards seraient-ils morts ? » demanda-t-il d'un air sérieux.

Thétis ne s'encombrait pas de choses inutiles telle que la politesse ou le reste. Pour lui, seule l'information qu'il obtiendrait et la façon dont il pourrait s'en servir comptait. Il réfléchit encore l'espace d'un instant, incertain de ce qu'il devait penser de la jeune femme. Avant d'échafauder quoi que ce soit, il préféra demander d'un ton plus « aimable ».

« Et qu'elle est ma fonction selon vous ? »

Tutnesi ne l'avait jamais reconnu, pourquoi s'encombrerait-il à le faire maintenant ? Talia était-elle là de son propre chef ? Etait-ce un piège de la part de son père ? Thétis avait beaucoup de questions en tête mais fort heureusement, il était intelligent et comptait là dessus pour se prémunir. Et puis, s'il devait mourir, alors il mourait. Non pas qu'il soit suicidaire simplement, il était pragmatique et conscient que sans arme, cette femme qui se prétendait assassin ne mettrait pas longtemps à le tuer, avant même que quelqu'un ne l'ai entendu hurler au secours.

[ J'ai l'autorisation du Mj pour intervenir. ]

Le jeune homme était calme, son destin entre les mains de la jeune femme, il ne craignait pas spécialement de mourir. Sa mère avait vécu dans la terreur journalière de le voir tomber sous la lame de cette femme, pourquoi en avoir peur aujourd'hui qu'elle se dressait devant lui ? Qu'il meure ce soir, demain ou plus tard, peu importait, la jeune femme était venu lui offrir de précieuses informations comme une aide qu'il ne pouvait se refuser. L'Almer accueillit la réponse de la jeune femme en silence, se concentrant plus sur les conséquences de ce qu'elle disait que sur ce qu'elle disait réellement. Ainsi, Tutnesi et ses bâtards n'avaient pas péri, bien au contraire, ils étaient en vie et cela posait réellement problème. Du peu que le jeune homme s'était renseigné sur les rejetons elfes de son père, il savait que ce dernier les faisait garder jalousement. En revanche, quelque chose soufflait à Thétis que si l'assassin personnel de son père était devant lui, cela signifiait qu'il avait un atout de taille dans sa poche. D'autant qu'elle l'appelait « maître », cela pouvait laisser rêveur …

Il pensait que le peuple serait éventuellement apte à le suivre depuis la trahison de Tutnesi. En épousant l'Elfe et en lui donnant deux enfants, il était évident qu'il avait sali le peuple tout entier et l'honneur des Almers. La cité perdue n'avait fait qu'encourager les Almers à se détourner de leur maître et le P'yra n'avait plus de P'yra que le nom.

Tuer Tutnesi ? Impossible. Le peuple n'accepterait pas sa présence sous prétexte qu'il leur offrait la violence et le sang. Le peuple voulait un maître, quelqu'un en qui croire, et surtout, quelqu'un qui redonnerait sa splendeur au peuple du désert quant à Thétis, il voulait sa vengeance et prendre tout ce à quoi tenait son père pouvait s'avérer être un jeu dangereux. Désormais, avec elle dans ses filets et sous ses ordres, le jeune homme savait que le jeu en valait la chandelle.

« Tuer Tutnesi n'amènera pas la paix pour le peuple, il ne me suivra pas dans le sang. » se contenta-t-il de donner pour toute réponse.

Ses nuits blanches à ressasser la trahison de son père, à tenter de comprendre ce qui avait pu pousser cet homme brillant à se ridiculiser lui avaient fait comprendre beaucoup de choses et notamment, qu'il avait la splendeur d'un p'yra et les compétences pour le devenir. Désormais, il avait l'arme qui allait avec.

« Tutnesi n'est p'yra que de nom, son rôle de tribun et ses récentes épousailles font de lui un traître aux yeux de son peuple. Le tuer ne me servirait à rien, l'évincer est la solution. Il me faut organiser des élections. La plupart du peuple Almer vit ici, à Jafa. Ta mission sera donc de ramener ceux vivant à Erathia. Fais ce que tu veux pour se faire mais ne brutalise personne et sois discrète. »

Son cerveau bouillonnait d'idées, une ligne de conduite venait de se tracer dans son esprit.

« Même si le peuple m'accepte comme p'yra, ce dont je ne doutes pas, Tutnesi n'acceptera pas la défaite, il faut donc le faire plier d'une façon plus subtile. »

Tutnesi était un adversaire redoutable aux yeux de Thétis. Toute sa jeune vie, il avait imaginé que son père était un homme puissant et que c'était pour cette raison qu'il l'avait délaissé mais savoir que son père ne s'était jamais inquiété de son existence avait réduit son rêve en poussière. Il en avait déduit que Tutnesi ne chercherait jamais à savoir qui il était et que jamais il n'aurait le pouvoir. Peu importait à l'Almer d'obtenir le titre ou le pouvoir, en réalité, il voulait simplement mettre son père aussi bas qu'il avait osé mettre sa mère. Lui voler tout ce qu'il avait et maintenant, ce rêve prenait forme. Enfin.

« Tuer les bâtards ne m'avancera à rien. En revanche, les kidnapper et les amener ici me sera utile. Fais en sorte qu'il sache que c'est toi qui les as enlevé, ne fais jamais mention de mon nom. »

Tutnesi entrerait dans une fureur impossible à maîtriser, même pour l'Elfe, si on lui enlevait ses héritiers. A ce moment là, il ne resterait plus à Thétis qu'à rejoindre le père pour proposer son aide. Le reste suivrait, normalement.

Le jeune homme se tut. Il était partie du principe que Talia suivrait, ne restait qu'à attendre sa réaction donc au final, ce qu'il força un peu :

« Tu as des questions ? D'ailleurs, je ne te l'ai guère demandé, quel est ton nom ? »

[Bonjour,
On est très content de ton retour, mais vu le temps de réponse tu imagines que nous n'avons plus le temps maintenant, avec la reprise de l'intrigue, de gérer cette mission en plus malheureusement! On vous propose donc de la continuer sans nous, en quête auto, avec un scénario qu'on va vous faire parvenir en MP.
Bonne soirée ! ]

Je me permets de clore cette mission étant donné l'absence des deux principaux acteurs. J'ai manipulé vos personnages en conséquence. Le RP que j'ai fait s'étant envolé, je me permets de vous faire une réponse moins étoffée ^^'

Elle obéissait au P'yra, peu importait le nom, peu importait la victime qu'il lui désignait, Talia suivait le maître. Mais le chien, aussi bien dressé soit-il, peu parfois se retourner contre son créateur et n'hésitera pas en ce cas à le mordre. Tutnesi avait trahi, de par son engeance, de par son alliance, il ne méritait plus d'être P'yra et Talia ne servait que les P'yra, peu importe leur nom. Alors la jeune femme était partie retrouver le seul vrai héritier de l'homme déchu, et Thétis avait répondu à son appel. Il avait ordonné, elle exécuterait.

L'ombre se faufila sans un bruit dans la Lumineuse. Personne ne la remarquait et le peu qui parvenaient à la voir et à suivre ses mouvements détournaient le regard de peur de devenir la cible de cet étrange démon aux allures félines. Les couloirs du Tribunat qu'elle avait si souvent hantés lui tendaient les bras si bien que la jeune femme s'étonna qu'aucun garde ne les surveille et pour cause ... Tutnesi l'avait chargée elle, personnellement, de veiller sur sa propre vie alors lorsque le chien quittait le maître, le maître se retrouvait seul. Perdu. En proie au premier assassin venu. Mais Talia n'avait pas pour mission de le tuer, ni de tuer la garce avec qui il partageait son lit désormais. Elle obéissait aux ordres, ni plus, ni moins.
Sans bruit, la jeune femme pénétra dans la chambre conjugale, chambre dans laquelle elle n'avait plus le droit de pénétrer sur ordre de sa sainteté d'Elfe ... Sainteté qui avait eu la judicieuse idée d'interdire les armes dans la pièce ainsi, Tutnesi dormait-il du sommeil du juste, proie pour le premier assassin venu. Mais elle n'était pas là pour lui, ni pour elle d'ailleurs.

En silence, la jeune Almer avait rejoint le berceau dans lequel dormait les deux chérubins. Sang impur. Elle aurait volontiers répandu le leur sur le sol mais elle avait des ordres. En vie, absolument. Bien, elle obéirait car elle était le chien et non le maître. Talia saisit un linge qu'elle imbiba d'un poison soporifique de sa création et sans hésiter, elle l'appliqua sur le nez et la bouche des jeunes enfants. Avec ce poison, ils dormiraient à point fermés jusqu'au petit matin, heure à laquelle elle serait suffisamment loin d'Erathia pour éviter les problèmes. Sa besogne ainsi remplie, elle saisit les deux corps endormis et les inséra dans un sac de toile qu'elle avait préalablement percé pour leur permettre de respirer. Jetant le fardeau sur son épaule avec toute la douceur que nécessitait leur survie, elle se dirigea vers la fenêtre, prête à bondir mais à l'instant où elle allait agir, elle se souvint des ordres de Thétis, "agir en ton nom propre" si bien qu'elle se ravisa, déposant le sac à ses pieds.
D'une démarche féline, elle se dirigea vers le lit conjugal et se positionna juste à côté de Tutnesi. Par le passé, elle avait veillé nuits et jours pour le protéger. Il ne dormait alors que d'un œil, prêt à bondir, toujours en alerte mais la garce à ses côtés avait décidé que les armes n'avaient rien à faire dans une chambre avec des enfants aussi dormait-il à poings fermés. Dommage ... Le premier assassin venu n'aurait qu'à le tuer, mais ce n'était pas ses ordres. Violemment, elle planta le poignard qu'il lui avait offert dans la table de nuit et le contact de l'acier sur le bois vit sursauter les deux amants maudits. Sans attendre, alors que Tutnesi allait prendre la parole, elle répliqua d'un ton glacial :

" Je ne sers que le P'yra."

Tandis qu'ils s'éveillaient, elle saisit le sac et sauta par la fenêtre. Ils mirent au moins une demie-heure à se rendre compte de l'absence des jumeaux si bien qu'elle était déjà loin.

[ ... ]

La claque brisa le silence. Douloureuse mais méritée. Thétis réfléchissait désormais à ce qu'il fallait faire pour réparer son erreur maintenant qu'un des deux enfants avait péri sous sa lame, indirectement. Talia, impassible, refusait de lui avouer pourquoi elle en avait égorgé un. Il ne l'apprendrait jamais, certes assumait-elle sa faute mais jamais elle n'oserait lui avouer que c'était parce qu'il avait dit "maman" en elfique qu'elle l'avait exécuté. Aux côtés du corps meurtri, l'autre jumeau regardait la scène, les yeux écarquillés, choqués et totalement terrorisé si bien qu'il tremblait de tous ses membres. Thétis prit sa décision.

Le maître avait ordonné de renvoyer le corps à Silmarie et de choisir des os ressemblant à ceux d'un enfant pour les renvoyer à Tutnesi. Nalween y verrait un signe du destin ou des dieux, peu importait tant qu'elle rentrait chez elle et Tutnesi, fou de rage, voudrait se venger. Thétis avait exigé qu'elle agisse en son nom une nouvelle fois et, sans plus lui adresser le moindre regard, déçu qu'il était que son plan n'ai pas fonctionné tel qu'il l'avait entendu, il emmena l'enfant restant auprès de sa mère. L'enfant se nommait Titouan, en hommage à l'ancien P'yra, et il était celui que le jeune homme avait eu avec une étrange femme. Si sa mère paru ne pas en croire un mot, elle accepta le petit garçon comme s'il était réellement son petit fils et ainsi, tout le monde oublia son origine ...

[ ... ]

Les jumeaux avaient été rendus, l'un à Silmarie, égorgé, l'autre à Erathia, calciné au point qu'il en devenait difficile de l'identifier. Mais la taille, la masse, tout correspondait, les jumeaux s'en étaient allés. Talia n'avait pas hésité une seconde à tuer un enfant innocent pour satisfaire son maître et ce fut sans hésiter qu'elle avait renvoyé en personne les corps. Ainsi, Tutnesi n'aurait de cesse de penser à se venger d'elle et Thétis aurait-il la paix pour agir dans l'ombre et devenir le seul et unique P'yra que méritait le peuple Almer. Nalween quant à elle, salie et trahie, vit en la mort de ces précieux chérubins le signe de sa déchéance et rompit, à la demande de Tutnesi, son mariage.

Ainsi un nouveau P'yra était-il né, dans le sang de ses frères. Un nouveau P'yra adulé par son peuple, aimé des siens et prêt à tout pour sa cité.

[Désengagés : Thétis, Talia]