La colombe se regarda dans le miroir fixé au mur avec un roucoulement satisfait. Elle voleta jusqu'au sol, et soudain, se fut une Elfe qui se tint à sa place. Flowène étira ses membres avec volupté et déclara :

Etre colombe, c'est bien, mais je préfère ma forme d'Elfe.

Perce-Neige, qui se tenait à côté d'elle, hocha lentement la tête, comme pour marquer son approbation. Sa maîtresse eut un sourire, et gratta le front de sa chouette des neiges. L'Elfe s'écarta ensuite, et se transforma en salamandre, une salamandre noire et jaune, très mignonne. Perce-Neige ouvrit des yeux intéressés, mais ne bondit pas sur cette proie potentielle. Elle avait déjà essayé la première fois que Flowène avait découvert cette faculté, et elle avait eu la peur de sa vie, c'était bien assez. L'Elfe eut un sourire, et s'amusa à courir à toute vitesse sur les murs, se faufilant derrière les chaises, les tables, voir les pots posés en équilibre sur une étagère. Puis, abandonnant cette forme, elle se changea en panthère noire de toute beauté. Perce-Neige ébouriffa son plumage. Presque deux ans qu'elle avait cette faculté de se transformer, et elle s'amusait toujours autant à en explorer les limites. Elle s'était aperçue que même si elle le voulait, elle ne pouvait choisir une autre forme que la panthère, la colombe, ou la salamandre. Et pourtant, elle avait essayé. Un petit bruit attira son attention : l'horloge. C'était l'heure de l'ouverture. A regret, la panthère se retransforma, reprenant sa forme première et poussa un soupir en se dirigeant vers la porte. D'un geste qui lui était devenu rituel, elle déverrouilla la porte, et afficha « Ouvert », du côté rue avant de rentrer à nouveau pour s'assoir devant le comptoir. Perce-Neige lui pinça affectueusement l'oreille, guettant une caresse. Flowène la caressa d'une main distraite, tandis que les premières fidèles clientes entraient. L'Elfe commença à commander et à servir les habituées, puis elle se rassit derrière son comptoir. La journée s'annonçait longue. Laïssia n'était pas là aujourd'hui, elle devait s'occuper de sa boutique, et Flowène allait devoir rester au Bar Bu toute la journée. Elle se frotta les yeux fatiguée par ses deux emplois. Elle ne devrait pas se plaindre, elle en avait deux, d'autres n'en avaient pas. Mais un de ses quatre, elle aimerait prendre un jour de congé.
Le Bar Bu commença à se vider des clients, qui aimaient venir à l'ouverture, et partir avant que les autres n'arrivent. Aussi, le Bar était à présent presque vide. Flowène attrapa un verre et le nettoya machinalement avec un chiffon bien qu'il soit parfaitement propre. La journée promettait d'être longue...

[Désolée, c'est pas génial --']

Le soleil s’était timidement levé d’abord, pour s’affirmer de plus en plus par la suite, sans qu’il ne fasse très chaud pour autant. Marchant dans l’humidité de la forêt, trois Sentinelles – Millie, Carmina et, naturellement, Méléane – faisaient leur ronde nocturne dans les bois. Elles avaient commencé tôt, alors qu’il faisait encore nuit et avaient assisté au lent lever du soleil ainsi qu’au magnifique spectacle de couleur auquel se livrait la voûte céleste. Comme bien souvent, il ne se passa absolument rien mais on n’était jamais trop prudente… Qui sait si un éclaireur ne parviendrait pas à se frayer un chemin de nuit à travers les fourrés jusqu’à localiser la ville ou si un voyageur n’irait pas s’égarer jusqu’ici car oui, des idiots pareils existaient. Le problème était également que si vagabond perdu il y avait, ce dernier ne serait Soumis que pour une période de six mois alors qu’auparavant, la peine était de six années ! Six petits mois, où était la peine là-dedans ? Les Soumis devraient restés enfermés pour toujours, au moins on serait sûres qu’ils ne commettaient pas d’atrocités au-dehors. La Cydienne était fermement opposée à la façon dont Philéa avait géré à ce niveau depuis l’empoisonnement de Lùkhas, son fils. Non pas que la lancière lui aurait demandé d’être insensible à cela et de faire comme si de rien n’était, elle pouvait à la limite concevoir que l’on puisse être attristée par une atteinte sur un fils, elle-même le fut bien malgré elle lorsque le sien perdit la vie. Enfin, elle était avant tout soldate et n’avait pas à donner son avis sur la façon dont la cité était gérée, après tout cela s’était toujours plus ou moins bien déroulé, restait à savoir comment les choses évolueraient.
Elles terminèrent leur ronde le matin, quand la cité s’était déjà éveillée et que tout le monde travaillait et rentrèrent à Muria pour que d’autres Sentinelles prennent la relève.

« Enfin fini ! Je n’en pouvais plus de patauger dans cette mélasse ! » s’exclama Carmina.

Elle n’avait pas tord : avec la rosée et dans les sous-bois de surcroît, nombreux étaient les zones qui étaient devenues boueuses. Pour preuves, les bottes lacées jusqu’aux genoux de la Vice-Capitaine étaient couvertes d’une bonne couche de boue et un bon décrassage ne leur aurait pas fait de mal.
Toutes les trois avançaient dans les rues en plein essor et elles semblaient être les seules à être épuisées, ce qui n’était pas étonnant puisqu’elles avaient commencé à travailler plus tôt que les autres Amazones. Au moment de se séparer pour que chacune retourne à son domicile, Méléane prit la parole :

« Soyez à l’heure cet après-midi, Kiera veut que toutes les Louves soient là ! »

Kiera souhaitait faire une inspection complète du régiment et, si elle ne l’avait pas ordonné elle-même, Méléane aurait demandé à Myriam de le faire. Du point de vue de la native cydienne, des troupes bien entretenues et surveillées étaient indispensables si elles se voulaient efficaces ! Les lancières avaient tout intérêt à être en ordre tout à l’heure car elles avaient eu tout le temps pour se préparer à cela, toute contrevenante se verrait rappelée à l’ordre immédiatement ! Elle promit à Carmina de lui accorder un duel à la lance après l’inspection et les trois femmes se séparèrent.
Seule, elle marcha en direction de sa maison, celle dans laquelle elle vivait depuis qu’elle était arrivée à Muria, il y a quatorze ans de cela. Elle y avait vécu avec Sélène jusqu’à ce qu’elle soit suffisamment âgée pour habiter seule mais elle reste ce fut celle-ci qui, plus tard, prit la décision de s’en aller lorsque les deux sœurs eurent un gros différend quand la cadette finit par lui avouer qu’elle avait une relation avec un Soumis. La belle fulminait encore contre cet homme qui était parvenu à briser les liens qu’elle avait avec l’unique membre de sa famille qu’il lui restait et cela juste en adoptant une attitude d’homme respectable qui ne méritait pas sa place parmi les autres Soumis de la cité. Elle ne désespérait pas de trouver un jour quelque chose qui lui permette de prouver que cet homme n’était pas aussi blanc qu’il voulait le montrer mais ces preuves ne venaient pas. Plutôt doué pour cacher son jeu, ce mâle.
L’Amazone avait quelques heures devant elle pour se reposer mais bizarrement, elle ne se sentait pas épuisée, les rondes étaient tout juste de longues promenades, aussi hésita-t-elle à rentrer pour essayer de retrouver le sommeil. Non, plutôt faire autre chose, pensa-t-elle. Si Méléane rentrait chez elle, il y aurait de fortes chances qu’elle perde du temps à tourner en rond à la recherche du sommeil, autant mettre ces quelques heures à profit bien qu’elle n’ait pas spécialement envie de faire quelque chose de fatigant étant donné la rude après-midi qui se profilait. Oh oui, la journée promettait d’être longue !
Ce ne fut que lorsqu’elle passât devant le « Bar Bu » que l’idée de s’y arrêter lui vint en tête. Elle y venait de temps à autre, lorsqu’elle avait fini ses journées, histoire de boire un verre, mais rarement de si bonne heure. Bon, ce n’était pas l’heure de l’apéro, par conséquent la Louve ferait une croix sur l’alcool cette fois-ci. Sa décision prise, elle essuya un maximum de boue de ses chaussures sur un carré d'herbe voisin et elle poussa la porte, entrant dans l’établissement qu’elle trouvât pour ainsi dire désert.

« Salut ! » dit-elle simplement, un signe de main accompagnant sa salutation, tandis qu’elle fermait la porte avec l’autre.

Méléane s’approcha du comptoir et adressa un signe de tête à la seule autre cliente présente lorsqu’elle leva la tête avant de s’installer face à l’Elfe à la chevelure azurée et de passer commande. Après tout, elle était bien venue ici pour consommer, non ?

« Tu peux me mettre un café, si tu en as fait ? »

Ensuite elle promena son regard aux alentours, en attendant que son breuvage arrive. L’endroit était comme à l’accoutumée très bien entretenu, ce qui contrastait bien avec le café crasseux de la vieille Marthe, de l’autre côté du village. Par ailleurs, la native Cydienne s’était déjà demandé si le fait que Flowène soir à la fois barmaid et Sentinelle ne nuisait pas à ses qualités de combattantes. Elle n’était peut-être pas engagée parmi les Louves mais ce n’était pas une raison pour que Méléane ne s’en occupe pas. Enfin, peu importait, elle était venue ici pour se distraire et n’avait pas envie de passer son temps à questionner qui que ce soit de la sorte pour l’instant.

« Quelles nouvelles ? » demanda-t-elle, distraitement.

Alors que Flowène lui apportait sa commande, la Cydienne sortait déjà sa bourse en cuir afin de régler l’addition. Elle préférait régler ses notes d’avance quitte à commander une deuxième fois ensuite. Elle dénoua la lanière et sortit une piécette de la petite bourse qu’elle déposa sur le comptoir et qu’elle fit glisser vers l’Elfe.

« Merci » dit-elle d’un ton égal lorsque la tasse de café fut déposée devant elle

Elle huma le liquide noir qui se trouvait dans le récipient avant d’en boire une gorgée. Le liquide chaud bien qu’amer la fit frémir lorsqu’il s’écoula dans sa gorge, lui donnant l’impression d’être réchauffée de l’intérieur. Elle s’était habituée à l’humidité des sous-bois mais maintenant qu’elle était dans un endroit sec et qu’elle buvait quelque chose de chaud, elle se rendait compte d’à quel point elle était gelée. Elle frissonna imperceptiblement d’être ainsi réchauffée et reprit une deuxième gorgée avant de reporter son attention sur la barmaid

« Pas grand-chose non plus, je profite d’avoir une pause de quelques heures pour venir me changer les idées. »

Ce qui n’était pas faux. Serait-elle restée chez elle que l’Amazone se serait fermement ennuyée à attendre un sommeil qui ne viendrait pas, elle le savait. Aussi était-ce sans doute une bonne chose que de venir ici pour tuer le temps bien qu’il n’y ait à vue de nez pas grand monde qui vienne dans un café de si bon matin. D’un autre côté ce n’était pas sa faute si toute sa journée se trouvait chamboulée à cause d’un horaire décalé, surtout qu’aujourd’hui promettait d’être une rude journée mais pas trop pour les épaules de la brune qui ne s’en faisait pas plus que cela.
Mentalement, elle dessina son planning de la journée à venir. Elle avait déjà accompli sa ronde en forêt, voilà une bonne chose de faite ! Après sa pause, rendez-vous au terrain d’entraînement des Sentinelle pour une inspection générale de toutes les Louves par Kiera ensuite entraînement avec quelques autres Louves et en fin d’après-midi, la lancière devrait retrouver la Capitaine des Sentinelles afin de lui communiquer diverses informations, notamment combien elle d’Amazones elle aurait besoin afin de surveiller les Soumis lors de leur travaux. Juste après, elle irait chercher le rapport de celles qui étaient assignées à cette charge aujourd’hui afin de voir s’il n’y avait pas eu de problèmes bien que généralement s’il y en avait, elle était au courant avant même de lire ce rapport. Une grosse journée en perspective, assurément, mais la Cydienne s’en fichait un peu, voilà plusieurs années qu’elle était habituée à un rythme de vie effréné et son corps avait fini par s’y habitué, même s’il lui arrivait aussi d’être sujette à un coup de pompe. La belle repensa dès lors à Ceana, son griffon femelle à qui elle n’avait pas eu beaucoup de temps à accorder dernièrement. Certes, elle était parfaitement capable de se débrouiller seule dans la nature mais elle restait très attachée à celle qui l’avait élevée et de ce fait apprivoisée. Méléane appréciait passer du temps avec cet animal qu’elle avait recueilli il y a déjà bien longtemps de cela, lorsqu’elle égorgea sa mère. Méléane et elle étaient très liée et la bête lui obéissait au doigt et à l’œil malgré ses instincts sauvages. Bien sûr l’éduquer ne fut pas chose aisée, la cicatrice qu’elle portait sur la cuisse en était une belle preuve : plus petite le griffon s’était énervé et avait planté griffes et bec dans sa chair jusqu’à ce que la lancière ne la corrige sévèrement. La marque blanche qui s’étendait jusqu’au genou était tout ce qu’il restait de cette altercation. Elle se souvint des première fois où l’animal était parti chassé seul et qu’il revenait avec des proies telles que des lièvres et dont il gardait toujours un trophée qu’il déposait sur le seuil de la maison de la Louve, ce qui avait le don de particulièrement l’agacer à l’époque.
Ce que lui dit Flowène la ramena sur terre. Si elle avait été tirée du lit ? Oui, en quelque sorte.

« Ne m’en parle pas » dit-elle avec un sourire naissant qui s’évanouit tout aussi vite, « J’étais de patrouille cette nuit, là je viens juste de rentrer en ville et je ne savais pas trop quoi faire, donc je suis venue traîner un peu par ici malgré l’heure. Je n'ai absolument rien à faire, même les hommes se tiennent tranquilles, tu y crois toi ? »

Elle marqua une pause, le temps d’avaler encore une gorgée de ce délicieux café avant d’ajouter

« Je pourrais en dire autant de toi, tu dois bien te lever avant les premières clientes, n’est-ce pas ? Tu arrives à coupler ça avec tes obligations de Sentinelles sans problèmes ? »

Car oui, elle se posait bien la question. Non pas qu’elle déplorait que l’Elfe ait des journées chargées, elle-même devait également se charger de tous les Soumis de Muria, elle se demandait des juste si cela ne la rendait pas moins efficace en tant que protectrice de la cité. Encore une fois, elle cacha ses interrogations derrière une question anodine.


[Désolé c'est pas terrible ^^']

Alors que l'Elfe répondait, Méléane prêta une oreille attentive à ses dires. Non pas qu'elle doutait que gérer son commerce en plus d'assurer ses fonctions de Sentinelle soit hors de sa portée, seulement sa carrure de même que ces yeux fatigués trahissant un manque évident de sommeil l'avaient amenée à se poser la question. Enfin, si Flowène affirmait qu'elle pouvait fort bien se débrouiller, la lancière n'irait pas dire le contraire, surtout que si elle s'était avérée incapable de gérer ce double emploi, la Capitaine de son régiment aurait tôt fait de la forcer à faire un choix entre son établissement et l'armée. En proie à ses pensées, la brune s'était contentée de hocher la tête quand elle eût fini, tandis que son index faisait le tour du bord de la tasse, ce qui révélait peut-être qu'elle réfléchissait...
La question de la barmaid eût pour effet de faire froncer les sourcils de la cliente dont le court souffle qui s'échappa de sa bouche à défaut d'un sourire indiquait un certain amusement.

« Mes Lionnes ? » répéta-t-elle pour voir si la jeune femme avait saisi sa bêtise, « Voyons, Flowène, tu penses bien que si j'étais chez elles, ça se saurait. Je suis Vice-Capitaine des Louves, pas des Lionnes. »

Bien qu'elle ne le montrait pas, la question qu'avait posé la patronne du Bar Bu amusa l'Amazone ; elle avait trop longtemps été habituée à cacher ses émotions, à tenter de paraître forte et sûre d'elle devant ses Sœurs et encore plus devant les Soumis qui pullulaient ici, à Muria, ces derniers prenaient un malin plaisir à frapper là où ça faisait mal alors mieux valait savoir habilement cacher ses sentiments. Méléane avait trop souvent vu d'autres femmes s'attendrir pour un homme après que celui-ci ait manipulé le cœur de la dame à l'aide de paroles mielleuses. Oh oui, ils n'étaient que de fourbes pendards et la dernière chose à faire en ce bas monde était de leur donner l'occasion de le montrer ! La Louve avait appris cela après de nombreuses années passées au sein de la cité cachée et plus encore depuis qu'elle s'occupait de chaque homme qui était amené ici ou de ceux qui naissaient en ces murs, qui d'ailleurs avaient droit à des privilèges notables comparé aux Soumis qui acquéraient ce statut après s'être égaré en forêt et à ceux qui étaient envoyés par les autres villes pour avoir commis divers méfaits. Autant dire que cette catégorie était celle que détestait le plus Méléane qui par nature ne supportait déjà pas les hommes « normaux ». A vrai dire, la Chargée des Soumis n'était pas du tout enchantée de voir se pointer des criminels, de la petite frappe qui avait eu le malheur de s'adonner au larcin à celui qui méritait mille fois la mort pour avoir sali ou battu une femme. Elle avait de toute façon indiqués dans son registre le nom et la raison de la Soumission de chaque homme présent en ces murs et par conséquent, elle avait déjà une idée de ceux qu'il fallait le plus avoir à l’œil.
La soldate avait un avis très tranché sur la question des Soumis à Muria et elle ne doutait pas un seul instant qu'elle serait relevée de ses fonctions sans autre forme de procès si jamais elle avait l'idée malencontreuse d'essayer de défendre publiquement ses idées, restait à espérer que Philéa ouvrirait les yeux, qu'elle se rendrait compte qu'accepter de tels énergumènes ici en échange de la paix avec les autres cités nuisait à la quiétude et à la sécurité de son peuple. La brune n'aurait pas été étonnée d'apprendre que certaines de ses Sœurs ne dormaient plus que d'un œil depuis cet accord, inconsciente était celle qui s'assoupissait en toute insouciance avec ces prédateurs non loin ! D'ailleurs, cela aurait été un mensonge de nier que depuis lors, Méléane avait redoublé de vigilance et d'efforts pour enrayer toute menace émanant des Soumis.
Encore que les Égarés et la racaille se tenaient généralement à carreaux et se montraient dociles jusqu'à la toute fin de leur peine – trop courte à son goût –, les cas graves, eux, avaient quelquefois tendances à récidiver, à céder à leurs instincts bestiaux. Ainsi, la lancière avait parfois à sévir et c'était souvent choix difficile de savoir quelle peine leur appliquer : quelques jours, semaines voire plus au frais ou, lorsque la situation l'exigeait, la potence afin de montrer l'exemple. Ils n'avaient pas plus envie d'être ici alors pourquoi ne se tenaient-ils pas tranquilles afin de voir leur peine rester minimale ? Mystère, par rébellion contre l'ordre instauré peut-être ? Soit, ils voulaient jouer au plus fin et bien ils joueraient, rira bien qui rira le dernier, pensa amèrement la Louve.

Elle avala ce qu'il restait de café brûlant avant de répondre à Flowène.

« Il est délicieux, tu pourras transmettre mes compliments à ta mère pour avoir eu cette idée »

Nulle ironie dans ses paroles, juste de la sincérité cachée derrière un masque d'impassibilité. Il était vrai qu'elle avait coutume de boire son café avait du lait et du sucre mais le goût donné par la feuille de menthe était loin d'être désagréable dans la bouche de l'Amazone.

« D'ailleurs, si tu pouvais m'en resservir un ... » ajouta-t-elle en poussant distraitement la tasse blanche vers la barmaid.

Certes, un « s'il te plaît » n'aurait pas été de trop mais il était connu que Méléane se limitait au minimum de la politesse, juste assez pour ne pas paraître malpolie ou discourtoise. La vérité était qu'elle avait abandonné depuis pas mal de temps ces manières qu'elle jugeait parfois trop exagérées, que déjà elle appréciait peu quand elle n'était qu'une jeune fille de la noblesse et peu de gens lui tenaient rigueur de cette rudesse apparente. Elle pensait bien que le respect de l'un envers l'autre était capital pour maintenir un équilibre mais se perdre en manière brisait tout le naturel d'une relation voire même d'une simple discussion, du moins aux yeux de la native Cydienne.

La Vice-Capitaine s'étira longuement en attendant que sa nouvelle commande arrive, déroulant doucement le dos et étendant les bras jusqu'à ce qu'un soupir satisfait s'échappe de ses lèvres. Cette ronde dans les bois ajoutée à son humidité sa fraîcheur semblait avoir raidi tout le corps de la cliente.

« Quand même, je me demande pourquoi tu ouvres si tôt. Tu perds plus que tu ne gagnes à cette heure-ci, non ? » questionna-t-elle, « Enfin, ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre : sans ça, je n'aurais pas eu grand chose à faire ce matin ! »

[Désolé, je n'avais pas trop d'idées >.< Si jamais je ne t'ai pas laissé assez d'ouvertures, je peux toujours essayer de rajouter un paragraphe ^__^]

[Non, c'est bon, c'est déjà super ^^]

Mes Lionnes ?Voyons, Flowène, tu penses bien que si j'étais chez elles, ça se saurait. Je suis Vice-Capitaine des Louves, pas des Lionnes.

Grosse boulette. Flowène poussa un soupir fatigué. Peut-être était-elle plus exténuée qu'elle ne le pensait...Après tout, une telle faute lui était rare à présent. Méléane avait sûrement raison, l'emploi du temps était dur, il faudrait qu'elle pense à ouvrir le Bar Bu plus tard le lendemain, ou demander à Laïssia à venir plus tôt. L'Elfe se rappela la fois où elle n'avait pas reconnu Eléa, qui n'était tout de même pas personne, quand celle-ci était venue au Bar, un jour. Par la suite, Flowène avait été si gênée... Et puis, après une nouvelle rencontre, elle était devenue amie avec Eléa, bien qu'elle ne puisse la voir souvent, entre elle ses obligations d'Héritière et l'Elfe ses devoirs de ses deux travaux.
Elle avait l'impression d'être redevenue la jeune femme ignorante qu'elle était en arrivant à Muria, ce qui n'était pas franchement agréable. Mais pas question de perdre la face devant Méléane.

Je suis vraiment désolée, c'est une erreur stupide. Je n'ai pas fait attention, excuse-moi. Peut-être que j'ai besoin de plus de repos que je ne le laisse croire !

C'était certes une façon de se rattraper aux branches, mais au moins était-ce sincère. Même si l'assurance elle, était un peu plus forcée.

Il est délicieux, tu pourras transmettre mes compliments à ta mère pour avoir eu cette idée.

Flowène bomba légèrement la poitrine, fière comme un paon aux premiers mots de cette phrase, qui passa un baume sur sa précédente bourde. Mais la suite ne lui plut pas vraiment. Comment pouvait-elle transmettre les compliments à sa mère, alors qu'elle ne pouvait même pas lui annoncer qu'elle était en vie ? La culpabilité lui serra le coeur. Elle était cruelle d'infliger à sa famille pareille inquiétude, mais retourner à Silmarie alors qu'elle l'avait renié par peur était au-dessus de ses forces, même si elle pensait à sa famille. Elle n'en n'avait pas des tonnes mais celle-ci était la plus grande de ses faiblesses. Certes, elle avait pu aller à Tamawa, et aussi à Cydonia. Mais Storghein, la ville du sexe opposé au sien... Enfin, elle la considérait ainsi et Silmarie lui restait inaccessible. La cité de sa soeur, et celle de ses parents, c'était cruel, et même assez ironique, mais ainsi. Flowène se savait incapable même d'envoyer un messager à ses parents, tant elle avait honte de leur réaction. Bref, tout ça pour dire que la réponse de Méléane la mettait bien qu'elle essaya de le cacher (sans grand succès). Heureusement, la Vice-Capitaine des Louves lui donna l'occasion de masquer un peu sa gêne :

D'ailleurs, si tu pouvais m'en resservir un ...

Flowène lui adressa un sourire et s'exécuta. Elle eut le temps de se reforger un masque avenant et joyeux pendant qu'elle tournait le dos à son interlocutrice et de lui tendre son nouveau café.

Quand même, je me demande pourquoi tu ouvres si tôt. Tu perds plus que tu ne gagnes à cette heure-ci, non ?Enfin, ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre : sans ça, je n'aurais pas eu grand chose à faire ce matin !

Flowène gloussa et réfléchit à la question posée par la Chargée des Soumis. Elle n'avait pas tort, mais l'Elfe avait besoin d'argent pour s'entretenir, et si elle travaillait moins tôt, déjà, elle n'aurait plus les habitués du matin, ce qui serait une perte non négligeable. Ensuite, elle avait fini par apprécier ce Bar, abandonné par son ancienne propriétaire. Elle se sentait fière de l'ambiance qui y régnait, et du monde, certes pas toujours nombreux, mais sympathique pour la plupart, qui venait. Beaucoup ressortaient le sourire aux lèvres, ce qui lui donnait une grande joie la barmaid.

Déjà, je décevrais beaucoup d'habitués qui aiment venir très tôt, soit pour éviter le monde, soit pour être sûr d'avoir le temps d'y aller avant de devoir se rendre au travail, ou les non-habitués d'ailleurs. Puis, c'est un travail qui me plait, je n'y vais pas la boule au ventre, ce qui m'aide à sauter du lit tous les matins. Ca me met de bonne humeur, et je suis presque en forme avant mes entraînements. Mais tu n'es pas un modèle de grasse matinée non plus ! Faire des patrouilles de nuit, ce n'est pas ma tasse de thé, même si je ne rechigne pas à les faire. Ca ne te dérange pas, dans ton cas ? Peut-être as-tu l'habitude des nuits blanches ? Après tout, en quelque sorte, toi aussi tu as deux boulots, les Soumis, et les Louves. En gros. Ou peut-être considères-tu ça comme un tout ?

D'un geste vague de la main, l'Amazone lui indiqua que son lapsus à Flowène ne l'avait pas dérangée

« C'est pas grave »

La façon dont l'Elfe s'était excusée lui rappela vaguement les manières d'une enfant timide. Qui donc tiendrait rigueur à quelqu'un pour une si petite bêtise ? Elle-même en commettait parfois, tout le monde le faisait en fait mais personne n'irait se vexer pour si peu, surtout quand c'était involontaire !
Pour la suite, Méléane n'était sans doute pas en mesure de décider si oui ou non la barmaid avait besoin davantage de sommeil car après tout, elle même n'était pas une partisane des longues nuits. Dormir était une perte de temps d'après elle, toutes les heures passées à roupiller auraient pu être mise à profit pour faire quelque chose de plus utile. Ainsi, la brune atteignait rarement les six-sept heures au lit qui bien souvent étaient indispensables à d'autres. Cela avait été difficile au début, étant malgré elle habituée à la vie confortable de la noblesse, toutefois ce rythme de vie s'était peu à peu imposé de lui-même puisqu'elle avait souvent un tas de choses à faire.

Le café commandé arriva et la lancière la remercia silencieusement à l'aide d'un hochement de tête avant d'apposer ses mains sur la tasse brûlante, qui se réchauffèrent avec la chaleur émanant du breuvage noir. Se fournir une paire de gants ne serait pas superflu, nota la native Cydienne pour elle seule. Si le printemps était là et que les arbres commençaient à bourgeonner, les nuits restaient fraîches quand même ! Oui, l'été chaud où elle pourrait tomber son épais manteau était encore loin, trop loin à son goût, en attendant elle aurait droit aux rhumes de printemps qui ne tarderaient pas à se manifester. Méléane porta le récipient à ses lèvres et écouta ce que la gérante du Bar Bu avait à lui dire.
Cette dernière lui confia qu'elle se levait si tôt et ne tardait pas à ouvrir pour la simple et bonne raison qu'elle aimait ce travail, la Louve ne put qu'approuver ses dires. Elle aussi se trouvait dans cette situation : elle adorait remplir ses fonctions, tant de soldate que de chargée des Soumis. Médéa , celle qui les avait sauvées, Sélène et son aînée, d'une mort certaine, lui avait certes un peu forcé la main pour qu'elle se mette à manier l'arme d'Hast mais la nouvelle arrivante avait tout de suite pu apprécier cet art. Elle ne tarda d'ailleurs pas à révéler quelques talents dans le maniement de la lance et à l'épouser. Depuis lors, l'Amazone côtoyait les autres Soldates et Sentinelles avec plaisir jusqu'à ce qu'elle soit désignée pour s'occuper des hommes qui peuplaient la cité. Elle devait bien avouer avoir été un peu sceptique au début, n'ayant accepté cette fonction que pour s'assurer par elle-même que le travail était correctement fait, mais peu à peu cela s'était montré gratifiant. La femme était fière d'être une des pierres qui avait aidé à ériger une relative sécurité en ces murs.

« Il est certain que c'est plus motivant de travailler quand on aime ce qu'on fait » répondit-elle tout simplement, « Oh, je te rassure, c'est assez exceptionnel que j'aie à m'occuper de faire une ronde dehors : Kiera sait que j'ai d'autres choses importantes à faire et dont moi seule peut m'acquitter »

Ce qui n'était pas faux car en effet, nulle autre que Méléane ne pouvait gérer les hommes de la cité, du moins pas au niveau où elle s'en occupait, aussi il était plutôt rare que ce soit la lancière qui doive se charger de surveiller les bois une fois la nuit tombée mais lorsqu'elle le devait, la brune ne se plaignait jamais ; il était normal qu'elle continue d'effectuer ses tâches militaires malgré tout.

« C'est vrai que je dors juste ce qu'il m'est nécessaire, je trouve inutile de paresser au lit toute une matinée alors qu'il y a toujours moyen de faire quelque chose d'un peu plus... utile, tu ne trouves pas ? »

La belle haussa les épaules avant de poursuivre

« L'habitude, j'imagine. C'est sûr qu'il y a d'autres activités plus plaisantes à faire mais si tu ne le fais pas, qui s'en chargera ? J'aime autant me rendre compte par moi-même que rien de dangereux ne nous guette au-dehors »

Là, c'était du Méléane toute crachée qui préférait accomplir les choses seule plutôt que de laisser une autre éventuellement moins compétente le faire ! Une des raisons qui l'avait poussée à accepter de prendre le poste de Chargée des Soumis, en vérité, mais pouvait-on l'en blâmer ? Elle s'était après tout toujours plus ou moins bien débrouillée alors autant la laisser continuer sur sa lancée.

« Non, ce sont deux choses bien distinctes, il est possible d'accomplir l'une sans l'autre. Je continue d'exercer ces deux métiers pour la même raison que tu continues à gérer ce café, parce que j'aime ça. Crois-moi que le jour où j'en aurai marre d'être une Louve ou de m'occuper des Soumis, j'aurai tôt fait de rendre mon tablier ! Enfin, je t'avoue que même si ce n'est pas toujours aisé, le salaire est également un argument de poids pour poursuivre »

Un bref sourire étira ses lèvres après ce qui aurait pu s'apparenter à une plaisanterie. Néanmoins, cela restait un fait : grâce à ses deux activités, Méléane jouissait d'une vie plutôt confortable en comparaison à celles qui se bornaient à être Sentinelles, et ce n'était pas pour lui déplaire.

« Au fait, simple curiosité maintenant que nous en parlons, de quel régiment tu fais partie, déjà ? » demanda-t-elle.

Elle venait juste de se poser là question et maintenant qu'elle discutait boulot avec Flowène, la femme aux cheveux d'ébènes en profita pour y mettre une réponse. A vrai dire, elle ne savait même pas quel genre d'arme maniait l'Elfe...

[Désolé du retard :/]

[Pas grave ^^]

Flowène une un haussement d'épaules et un sourire quand la Louve lui déclara que ce n'était pas grave. Moui, ce n'était pas une faute très grave, même si pour Flowène c'était une boulette honteuse. Mais face à une femme comme Méléane, perdre la face lui faisait moyennement plaisir.

Flowène adressa un signe de tête en réponse au remerciement de la Louve, quand celle-ci continua :

Il est certain que c'est plus motivant de travailler quand on aime ce qu'on fait. Oh, je te rassure, c'est assez exceptionnel que j'aie à m'occuper de faire une ronde dehors : Kiera sait que j'ai d'autres choses importantes à faire et dont moi seule peut m'acquitter
C'est vrai que je dors juste ce qu'il m'est nécessaire, je trouve inutile de paresser au lit toute une matinée alors qu'il y a toujours moyen de faire quelque chose d'un peu plus... utile, tu ne trouves pas ? 

Flowène hocha la tête, même si elle n'était pas tout à fait de l'avis de Méléane. Les grasses matinées pouvaient prodiguer un grand bien quand on était fatiguée, et bien que lève-tôt, l'Elfe ne protestait pas devant quelques heures de sommeil en plus, surtout lorsque la journée avait été dure. Puis, on ne peut pas être efficace en étant fatiguée à mort. C'était un fait. Et dormir pouvait être utile ! L'Elfe se contenta donc d'un hochement bref et mou de la tête, pas franchement d'accord.

L'habitude, j'imagine. C'est sûr qu'il y a d'autres activités plus plaisantes à faire mais si tu ne le fais pas, qui s'en chargera ? J'aime autant me rendre compte par moi-même que rien de dangereux ne nous guette au-dehors

Là par contre, elle comprenait parfaitement la Cydienne. Elle-même était du genre à se dire que si ce n'était pas par elle que c'était fait, se ne serait forcément pas comme elle le voulait vraiment. Laïssia en était la preuve. Elle avait eu beaucoup de mal à l'embocher, mais elle n'aurait pu être Sentinelle et Barmaid sans aide. Elle avait bien dû se résigner... Mais finalement, Flowène n'était pas si déçue de sa co-gérente, car, bien qu'un peu tête en l'air, elle était plutôt pas mal.
Par contre, l'allusion au danger qui guette plut moyennement à l'Elfe. A part la bataille contre les Erathiens, elle avait connu une vie douillette presque sans incident. Elle n'était pas du genre aventurière, qui aime le danger et se rit des obstacles. Se sentir protégée était vraiment ce qu'elle voulait. Elle aimait se sentir bien, car déjà que les petits problèmes quotidiens lui prenaient la tête, si elle devait s'inquiéter de sa survie, elle deviendrait folle. Et le « nous guette au dehors » n'était pas du genre rassurant. Déjà qu'elle avait du mal à sortir de Muria sans se sentir mal à l'aise...Flowène tira une grimace.

Moui, tu n'as pas tort, fit-elle pour cacher son trouble.


Non, ce sont deux choses bien distinctes, il est possible d'accomplir l'une sans l'autre. Je continue d'exercer ces deux métiers pour la même raison que tu continues à gérer ce café, parce que j'aime ça. Crois-moi que le jour où j'en aurai marre d'être une Louve ou de m'occuper des Soumis, j'aurai tôt fait de rendre mon tablier ! Enfin, je t'avoue que même si ce n'est pas toujours aisé, le salaire est également un argument de poids pour poursuivre.

*Comment pouvait-on éprouver du plaisir avec des hommes ? Le salaire, je comprends, mais le plaisir...*

Oui, c'était une chose qui la dépassait et elle fronça les sourcils. Même si au sourire de Méléane, elle su que l'argent jouait un rôle plus pesant dans la balance, même si il ne faisait pas tout... Enfin, si elle était à sa place, l'argent serait son seul réconfort... Mais peut-être la Cydienne ne voudrait-elle jamais être barmaid ? Chacun ses goûts, même si ça, Flowène ne le digérait pas.

Au fait, simple curiosité maintenant que nous en parlons, de quel régiment tu fais partie, déjà ?

Mais pourquoi cette conversation avec Méléane lui rappelait tant Eléa ? Lorsqu'elle n'avait pas réussi à répondre à cette question, que lui avait posé la princesse... Quel honte....

Je suis archère, de la section des Faucons. C'est mon arme de prédilection, bien que le sabre n'est pas pour me déplaire, c'est mon arc que je préfère. D'ailleurs, toi, c'est la lance c'est ça ? Tu l'utilises comme une arme de jet ? J'avoue que je n'y connais rien sur cette arme....

A mesure que Méléane parlait, elle remarque bien entendu les diverses expressions se peignant sur le visage de son interlocutrice. Il ne fallait pas être devin pour deviner que si Flowène ne disait rien, elle n'en pensait pas moins pour autant. La brune se demandait d'ailleurs pour quelles raisons la barmaid se taisait puisqu'elle semblait avoir un avis contraire, par prudence peut-être. Autant qu'elle émette son opinion sur la question, elle n'allait pas se faire manger. Certes Méléane n'était pas quelqu'un qui changeait facilement d'avis et qui n'appréciait pas toujours d'être contredite mais aux dernières nouvelles, elle n'avait encore mordu personne qui lui apporte un autre point de vue, bien qu'elle soit rarement d'accord avec celui-ci.
L'Elfe apporta ensuite la réponse qu'elle attendait, à savoir à quel corps de l'armée Amazone elle appartenait. Les faucons ? Bizarrement, cela n'étonna qu'à moitié la lancière ; beaucoup de femmes se spécialisaient à l'arc et c'était devenu en quelque sorte la marque de fabrique de Muria. Redoutées étaient ses archères mais il y avait pourtant des tas d'autres bonnes soldates dans les rangs l'armée.
La Vice-Capitaine, elle, gardait un souvenir amer de sa première expérience avec un arc dans les mains car elle aussi s'y était essayé un beau jour, voulant montrer que ce n'était pas sorcier de tirer une flèche correctement. Plutôt que de s'exercer à courte distance comme il était conseillé de le faire aux débutantes, elle et sa grande gueule décidèrent à la place de s'y prendre à cent cinquante pieds de la cible, ce qui n'était déjà par rien pour qui n'avait jamais tenu un arc de sa vie. Sur les trois traits qu'elle décocha, un seul toucha le mannequin de paille, les deux autres allant se perdre à des mètres de là dont une qui alla se figer dans la poule de la voisine. Cruelle humiliation qu'elle avait eu à subir ce jour-là, elle avait alors très mal pris les taquineries de ses Sœurs à ce sujet et même maintenant, il était plutôt déconseillé de lui reparler de cet épisode. Encore qu'à l'épée ou a la dague, elle parvenait à donner des résultats probants, l'arc était une tout autre histoire ... Enfin, elle n'en avait plus touché depuis, préférant se concentrer sur le maniement de la lance qui était une arme différente mais tout aussi efficace. Au moins cela lui avait-il enfoncé un peu d'humilité dans le crâne, du moins concernant les armes qu'elle ne maniait pas.

« La lance, oui. »

Elle se garda bien entendu d'avouer s'être essayée à d'autres armes que celle-ci, ne souhaitant pas non plus mettre entre les mains de Flowène ce qui pourrait devenir une moquerie déplaisante, si jamais elle avait eu vent des exploits d'archère de Méléane.

« C'est pas une très bonne idée » répondit-elle ensuite, « Encore que si tu rates ta cible avec une flèche, ce n'est pas trop grave puisque tu en as d'autres dans ton carquois. Par contre, loupe seulement ton adversaire en lui envoyant ta lance et tu n'auras plus grand chose pour te défendre »

Ça dépendait des circonstances, elle-même avait parfois eu à utiliser sa lance comme d'une arme de jet quand elle n'avait d'autres choix que celui-là. Cependant, elle se débrouillait plutôt bien au lancer de javelot et elle admettait que faire ça avait plutôt de la gueule.

« Comme toutes, elle a ses avantages, tu peux toujours passer au terrain d'entraînement un de ces quatre si le cœur t'en dis, je pourrais te montrer comment ça fonctionne »

Réel plaisir à le faire ou tentative détournée de faire reconnaître la lance plus qu'elle ne l'était déjà ? Un peu des deux sans doute. Depuis longtemps, la Chargée des Soumis aimait à s'adonner à l'entraînement des débutantes, jeunes et moins jeunes. La lueur qu'elle voyait dans leurs yeux pétillants de satisfaction lorsqu'elles parvenaient à exécuter un quelconque mouvement la gonflait d'orgueil et, au fond, elle appréciait former la prochaine génération de Louves. Par ailleurs, elle vantait bien souvent les mérites de son régiment, parfois plus que nécessaire, ce qui lui avait valu quelques rivalités amicales avec les officières des autres sections de l'armée Amazone. Pour autant, elle était toujours fière de voir des jeunettes s'orienter vers la lance plutôt qu'ailleurs.

« Si jamais ça t'intéresse, dis-le moi que je puisse prévoir » ajouta-t-elle, désireuse d'en connaître la réponse.

Alors que l'Elfe s’excusait, Méléane hocha la tête avec un air très peu convaincu mais ne répondit rien. Même s'il s'était agi d'une petite taquinerie de la part de la gérante, elle admettait que sa réaction à l'instant était un tantinet exagérée. Enfin, elle n'appréciait pas beaucoup cette forme de plaisanterie et ça, ce n'était pas prêt de changer mais comme Flowène s'excusait... peut-être n'était-ce qu'une malheureuse erreur de sa part ? Peu importait, autant oublier cela et faire comme si elle n'avait rien entendu, elle avait ainsi poursuivit sur un ton égal, préférant ne pas se prendre la tête pour l'instant.

Par la suite, la tenancière sembla accepter la proposition qui lui avait été faite. Elle n'avait pas tort en disant que ce serait amusant car oui, il y avait de fortes chances que ça le soit, ou au moins que ça se révèle intéressant. La Louve aimait déjà à la base s'exercer avec les autres Sentinelles ou même former les jeunes filles qui n'étaient pas forcément à sous-estimer car, inexpérimentées, elles n'en étaient que plus imprévisibles. Elle avait certes une nette préférence pour la lance qui resterait son arme favorite quoiqu'il arrive mais elle appréciait aussi varier les plaisirs en troquant sa hampe contre la poignée d'une épée, et s'entraîner ainsi avec une arme qu'elle maîtrisait moins et ne partenaire dont elle ne savait rien promettait d'être plaisant : à la longue, l'Amazone connaissait le niveau de toutes ses subordonnées ou presque et voilà bien longtemps qu'elle n'avait plus affronté une adversaire inconnue.
Méléane réfléchit ensuite à quand ceci serait possible, énumérant à voix haute ce qu'elle aurait à faire.

« Avec l'inspection du régiment et mon propre entraînement avec mes Louves cet après-midi, je ne crois pas pouvoir caser ça là, d'autant que j'ai deux-trois trucs à régler. Et de la paperasse m'attend ce soir... »

Quelques petites choses découlant de sa position de Chargée des Soumis nécessitaient que la brune y jette un œil dans la soirée, notamment le rapport d'une autre Soldate de la cité. Bref, elle n'aurait pas le temps aujourd'hui, à moins que Flowène ne ferme son bar dans les trente secondes pour qu'elles puissent s'y mettre dès à présent mais même dans ce cas, cela arrangerait peu la Louve : pour l'instant, elle avait davantage envie de se détendre et de prendre un peu de bon temps que d'aller s'entraîner.

« Demain, ça risque d'être limite aussi » poursuivit-elle, « Donc pourquoi pas après-demain ? J'aurai du temps durant l'après-midi. Après, je ne sais pas ce qu'il en est de ton côté »

Il était vrai que l'idée plaisait pas mal à la lancière qui avait presque oublié la pique lancée par Flowène quoiqu'elle ne manquerait pas l'opportunité d'appuyer elle aussi là où ça ferait mal sitôt qu'elle trouverait un défaut chez l'Elfe. Elle posa ses yeux sur son interlocutrice et déclara :

« Je pense que je vais y aller, il y a une chose que j'ai besoin de faire avant midi »

L’Amazone ne fournit pas plus de détail là-dessus. Nulle obligation professionnelle, non, autrement elle n'aurait pas même mis un pied ici ce matin, elle s'était d'ailleurs promis de se consacrer à elle en cette fraîche matinée. La vérité était qu'elle voulait au moins prendre le temps d'entrer dans un bon bain chaud et se changer afin d'avoir l'air un minimum présentable pour cet après-midi. Après avoir passé une partie de la nuit dans les forêt, à patauger dans la boue et à se balader entre les arbres, elle se sentait un peu sale et n'aurait pas été étonnée de trouver une feuille emmêlée dans ses cheveux en pagaille – elle passa inconsciemment une main dans sa crinière de jais en pensant cela – d'autant que le froid qui la mordait jusqu'aux os depuis un bon moment ne semblait pas vouloir la quitter ; un bain devrait y remédier.

« Je repasserai peut-être plus tard dans la journée » dit-elle après avoir payé sa deuxième commande .

Puis, elle se leva, salua la barmaid et sortit en se disant que cette petite pause au Bar Bu lui avait tout de même fait du bien en dépit de ce que lui avait dit Flowène. La bise froide manqua presque de la faire frissonner, plus vite elle aurait échangé ses vêtements humides, mieux ce serait ! Bien, à présent il fallait encore se préparer car la journée ne faisait que commencer pour elle !


[Désengagé]
[Je te laisse te désengager par toi-même, je n'ai plus rien à ajouter. En tout cas, c'était un vrai plaisir de pouvoir RP avec toi ! n__n]

« Avec l'inspection du régiment et mon propre entraînement avec mes Louves cet après-midi, je ne crois pas pouvoir caser ça là, d'autant que j'ai deux-trois trucs à régler. Et de la paperasse m'attend ce soir...Demain, ça risque d'être limite aussi. Donc pourquoi pas après-demain ? J'aurai du temps durant l'après-midi. Après, je ne sais pas ce qu'il en est de ton côté »

Flowène réfléchit à son emploi du temps. Ce jour-là, elle aurait un entraînement, et elle était de service au Bar l'après-midi... Elle allait devoir demander à Laïssia de travailler toute la journée au Bar Bu. La Cydienne allait beaucoup râler... Mais l'Elfe ne voulait pas risquer d'offusquer Méléane. Si elle se disait non disponible, elle avait peur de vexer la Chargée des Soumis, encore une fois, comme si elle se trouvait une mauvaise excuse. La Cydienne avait déjà mal pris la propostion de Flowène par rapport à l'arc, inutile de remuer le couteau dans la plaie. Au choix, elle préfèrerait les râleries de sa co-gérente plutôt que la froideur de la lancière.

Ca me va, je me débrouillerais avec ma co-gérente.

« Je pense que je vais y aller, il y a une chose que j'ai besoin de faire avant midi »

En bonne marchande, Flowène ne demanda pas ce qu'était cette « chose ». Une de ses règles fondamentales : « Si les clients ne parlent pas, c'est qu'ils n'en ont pas envie. Si ils ne veulent pas trop en dire c'est leur choix, pas de curiosité mal placée. ». Annabeth aurait sûrement posé la question. L'Elfe se rappelait combien la curiosité mal placée de sa soeur l'agaçait à l'époque.

J'espère que cette conversation vous a fait autant plaisir qu'à moi !

Ben quoi ? C'était pas du « lèche bottes », mais la vérité. A part le malentendu sur cette histoire d'arc, ça avait agréable, et elle connaissait mieux la lancière à présent. Susceptible, mais plutôt aimable. Lors de leur entraînement, il faudrait qu'elle pense à ne surtout pas la relancer sur cette histoire d'arc. Une fois ça suffisait, pas la peine d'en remettre une bonne couche.

« Je repasserai peut-être plus tard dans la journée » dit-elle après avoir payé sa deuxième commande .

Méléane sortit du Bar Bu à grands pas. Flowène la salua de la main, ne sachant même pas si la lancière l'avait vue, puis, elle empocha le paiement avec satisfaction. Elle aimait que ses clients repartent avec l'envie de revenir. Et malgré le manque de délicatesse de Flowène, elle avait l'impression que la Cydienne tiendrait sa promesse. Puis, cet entraînement ne pourrait pas faire de mal à l'Elfe après tout. Elle pourrait non seulement comparer les armes, mais aussi le style d'entraînement entre Méléane et Kiera. Finalement, la journée avait bien commencé...

[Désengagée.
De même pour moi, merci pour ce RP ! ^_^ ]