[D-A Mi-Soufflevent] Le temps d'une histoire (PV Xialan) [terminé]

La forêt portait encore le manteau humide offerte la veille par la pluie, les rares oiseaux qui n'étaient pas encore partis pour des terres plus chaudes chantaient tristement. L'automne arrivait et avec lui venait la grisaille et les mauvais temps. Cependant c'était bien des rires que l'on pouvait entendre. Ils provenaient d'un petit comptoir marchand situé au bord de la route et qui servait d'étape pour de nombreux voyageurs désirant se restaurer et se rendre à Cydonia. Un nouvel éclat de rire résonna entre les troncs des arbres, suivi de bruits d'assiettes, les voyageurs prenaient leurs repas. Une voix forte se fit entendre.

"Et c’est ainsi que mourut le dernier Roi des Murlocks !"

Clavim exécuta une révérence comique, des applaudissements ponctuèrent sa performance, du bout de la main droite il désigna l'écuelle en bois à ses pieds, des pièces tintèrent. Des personnes se levèrent et regagnèrent leurs chevaux, leurs caravanes en vue du départ. Il ne resta bientôt plus qu'une petite bande d'enfants aux vêtements sales. Clavim les avaient repérés un peu plus tôt, les malheureux ne semblait pas rouler sur l'or, eux et leurs parents ne s'étaient même pas restaurer. Il vit les parents occupés à sangler la mule qui tirait leurs chariots en mauvais état. Clavim prit l'or qu'il venait de gagner et compta les pièces. Il apostropha le jeune homme qui s'occupait du service.

"Hey gamin va donc me chercher une assiette de ce délicieux ragout que t'as tante prépare avec autant d'amour ! Et rajoutes-y deux miches de pains et une cruche d'eau, je paye rubis sur ongle !"

Clavim étira sa carcasse, plutôt grand, les épaules larges, la mâchoire carré, il ressemblait à un vieux soldat, mais à en juger par son petit ventre arrondi et son allure générale on sentait bien que son apparence était loin d'être une priorité, il fit craquer ses épaules et soupira d'aise, le jeune homme vint lui amener sa commande, il prit en main son ragout et trempa un morceau de pain dedans. Les enfants étaient toujours devant lui, pas un mot, pas un mouvement. Ils se contentaient de rester là à le regarder avec de grands yeux ronds. Clavim leva les yeux vers eux, il leur adressa un petit sourire puis il leur envoya la deuxième miche de pain qu'il avait commandé. Les enfants le regardèrent surpris. Les parents revinrent chercher leurs enfants, lorsqu'ils virent la miche de pain ils la confisquèrent et la tendirent à Clavim en le priant d'excuser le comportement de leurs enfants. Le conteur d'histoire explosa alors de rire.

"Me voler ? Vous plaisantez ? Vous m'avez écouté parler toute la mâtiné, vous méritez bien un dédommagement ! Maintenant installer vous et trempez donc votre pain dans se ragoût, à défaut d'être un bon plat il fait un sauce passablement correcte haha"

Clavim leur adressa à nouveau un sourire et il les invita à prendre place autour de lui, les paysans acceptèrent péniblement. Le conteur d’histoire se tourna vers une fillette aux jolis cheveux bruns.

"Et où te rends-tu comme ça jolie princesse ?"

Fillette : "Au port de Cydonia, mon papa il est pêcheur alors il va chercher sur un grand bateau sur l’eau."

Clavim éclata de rire et arracha un nouveau morceau de pain qu’il engloutit.

"C'est de grand bateaux qu'il y a là-bas...et l'eau sur laquelle va naviguer ton papa tu savais toi qu'elle était salée ?"

La fillette répondit par l'affirmative.

"Mais je parie que tu ne sais pas pourquoi l'eau de mer est salée pas vrais ?"

Les enfants firent non de la tête, Clavim regarda les parents, faisant semblant de les interroger également.

"Alors laissez-moi vous raconter une histoire de plus si vos oreilles peuvent me supporter une fois de plus..."

Des étoiles scintillèrent dans les yeux de la fillette, les mêmes qu'avait sa cousine au même âge pensa Clavim. Il adorait ce moment-là, en réalité, il adorait ce qu'il faisait pour ça.

"C’est une vieille histoire Jinmen que je tiens d’un vieux tanneur de cuir parti vendre ses peaux à Silmarie, il y a fort longtemps vivaient à Koubaï deux frères. Wang, l'aîné, était le plus fort et brimait sans cesse son cadet. À la mort de leur père, les choses ne s'arrangèrent pas et la vie devint intenable pour Wang-cadet. Wang-l'aîné accapara tout l'héritage du père : la belle maison, le buffle et tout le bien. Wang-cadet n'eut rien du tout et la misère s'installa bientôt dans sa maison.
Un jour, il ne lui resta même plus un seul grain de riz. Il fut donc obligé de se rendre chez son frère pour ne pas mourir de faim. Arrivé sur place, il le salua et lui parla en ces termes : « Frère aîné, prête-moi un peu de riz. » Mais son frère, qui était très avare, refusa tout net de l'aider et le cadet repartit bredouille. e sachant que faire, Wang-cadet s'en alla pêcher au bord de la mer jaune. La chance n'était pas de son côté, car il ne parvint pas à attraper le plus petit poisson. Il rentrait chez lui les mains vides, la tête basse, le cœur lourd quand soudain, il aperçut une meule au milieu de la route. « Ça pourra toujours servir ! » pensa-t-il en ramassant lameule, et il la rapporta à la maison.
Dès qu'elle l'aperçut, sa femme lui demanda : « As-tu fait bonne pêche ? Rapportes-tu beaucoup de poissons ?
— Non, femme ! Il n'y a pas de poisson. Je t'ai apporté une meule.
— Wang-cadet, tu sais bien que nous n'avons rien à moudre : il ne reste pas un seul grain à la maison. »
Wang-cadet posa la meule par terre et, de dépit, lui donna un coup de pied. La meule se mit à tourner, à tourner et à moudre. Et il en sortait du sel, des quantités de sel. Elle tournait de plus en plus vite et il en sortait de plus en plus de sel.
Wang-cadet et sa femme étaient tout contents de cette aubaine tandis que la meule tournait, tournait et le tas de sel grandissait, grandissait. Wang-cadet commençait à avoir peur et se demandait comment il pourrait bien arrêter la meule. Il pensait, réfléchissait, calculait, il ne trouvait aucun moyen. Soudain, il eut enfin l'idée de la retourner, et elle s'arrêta.
À partir de ce jour, chaque fois qu'il manquait quelque chose dans la maison, Wang-cadet poussait la meule du pied et obtenait du sel qu'il échangeait avec ses voisins contre ce qui lui était nécessaire. Ils vécurent ainsi à l'abri du besoin, lui et sa femme.
Mais le frère aîné apprit bien vite comment son cadet avait trouvé le bonheur et il fut assailli par l'envie. Il vint voir son frère et dit : « Frère-cadet, prête-moi donc ta meule. » Le frère cadet aurait préféré garder sa trouvaillepour lui, mais il avait un profond respect pour son frère aîné et il n'osa pas refuser.
Wang-l'aîné était tellement pressé d'emporter la meule que Wang-cadet n'eut pas le temps de lui expliquer comment il fallait faire pour l'arrêter. Lorsqu'il voulut lui parler, ce dernier était déjà loin, emportant l'objet de sa convoitise.
Très heureux, le frère aîné rapporta la meule chez lui et la poussa du pied. La meule se mit à tourner et à moudre du sel. Elle moulut sans relâche, de plus en plus vite. Le tas de sel grandissait, grandissait sans cesse. Il atteignit bien vite le toit de la maison. Les murs craquèrent. La maison allait s'écrouler.
Wang-l'aîné prit peur. Il ne savait pas comment arrêter la meule. Il eut alors l'idée de la faire rouler hors de la maison, qui était sur une colline. La meule dévala la pente, roula jusque dans la mer et disparut dans les flots.
Depuis ce temps-là, la meule continue à tourner au fond de la mer et à moudre du sel. Personne n'est allé la retourner.
Et c'est pour cette raison que l'eau de la mer est salée !"

Un grand sourire fendit la trogne des enfants et même des parents qui s'excusèrent humblement de ne pas pouvoir rémunérer le conteur d'histoire. Clavim ne voulu rien savoir concernant une quelconque rémunération. Il se contenta de glisser trois pièces dans la main du pêcheur.

"Je ne vous demanderai qu'une seule chose, en vous rendant au port de Cydonia, chercher le capitaine en faction là-bas et dit-lui ceci : « Nulles rayures sur les vases du potier Krassus » Retiens bien pêcheur, dit-lui que tu viens de la part de Clavim le conteur, peut être pourra-t-il te trouver une place sur un navire...bonne chance braves gens que Fortune vous accompagne.."

Il leur sourit une dernière fois et il les laissa partir, ignorant le torrent de remerciement qu'ils versèrent sur lui. Clavim s'étira de nouveau puis commanda une outre de vin cette fois. Il la sirota, pensif. Pas de cas particulier sur cette nouvelle vague d'arrivant pour Cydonia. Clavim était ici pour repérer d'éventuel fauteur de trouble et ainsi informer les autorités de la ville, une bonne combine pour celui qui veut éviter les ennuis. Il resta là un petit moment à fixer le tronc des arbres devant lui, prélevant mécaniquement des gorgées dans son outre de vin. Finalement il se redressa et commença à empaqueté ses effets personnels, avant de quitter le comptoir forestier il aperçut un magnifique équipée blanc. Clavim était loin d'être connaisseur en matière de chevaux mais il savait reconnaître quelque chose de beau quand il en voyait. Il s'avança de l'étalon qui était attaché à une barrière. Il récita un mi voix un petit poème qu'il avait entendu une fois.

"Toi qui es confiant,
tu es aussi très élégant,
Quand tu te cabres dans le vent,
Avec tes yeux brillants,
Et ta robe d'argent,
Tu attires toutes les juments,
Toi, plus beau qu'un diamant,
Tu es resplendissant,
Avec tes reflets blancs,
Et c'est avec fierté,
Que l'on t'a nommé : Esprit du vent."

Clavim voulu approcher sa main pour lui flatter l'encolure....

Quarante-deux lieues, sept jours de chevauchée sans presque aucune interruption. Xialan sentait la fatigue du voyage s’accumuler. Son périple dans le passage gelé et la région glacée de Storghein avaient été les étapes les plus éprouvantes pour la jeune femme. A présent qu’elle s’approchait de Cydonia, le temps devenait plus clément et la douceur qui régnait dans les sous-bois, malgré que la mi-soufflevent approchait, la surprenait agréablement.
En poursuivant son cheminement, elle faisait ses comptes. A Storghein, elle n’avait réussi à vendre que l’étalon noir. Bien que déçue, elle était tout de même soulagée car deux étalons réunis ne faisaient pas forcément bon ménage surtout quand des juments étaient dans les parages. Elle en avait tiré un bon prix malgré son niveau d’astorg assez faible et un client peu enclin à la patience. Au détour d’un virage, des éclats de rires et des raclements de couverts parvinrent aux oreilles de la jeune femme. Elle n’avait voyagé qu’une demi journée mais pourtant l’envie de s’arrêter et de profiter de cet agréable paysage la pris soudain.
*Pourquoi ne pas m’offrir un peu de repos, après tout nous arrivons à peine à la mi-soufflevent et le voyage sera plus rapide quand je serais seule avec Xuehua.*
Sa décision prise Xialan se dirigea vers les abords du comptoir marchand sans pour autant se mêler à la foule, elle avait besoin de se rafraîchir et de panser les chevaux avant de vraiment pouvoir se détendre. Elle attendrait pour cela que la majeure partie des personnes présentes s’en aillent. Durant son voyage, elle avait pu constater que ses origines Jinmens attiraient encore beaucoup l’attention des gens d’Azthia, et bien qu’elle fût elle aussi curieuse de tous ces nouveaux visages, elle n’avait pas envie d’être dérangée lors de son repos.
Elle laissa Xuehua près d’un jeune chêne afin qui puisse paître le temps qu’elle s’occupe des deux juments. Xialan n’attachait jamais son étalon, le lien qui les unissait était trop fort pour cela et le voleur qui arriverait à s’emparer de la bête n’était pas encore né. Tandis qu’elle laissait les juments s’abreuver, elle se nettoya le visage et les bras des poussières du voyage. Si sa mère la voyait ainsi, débraillée et poussiéreuse elle ne manquerait pas de se plaindre qu’elle n’aurait jamais de petits enfants. Un petit sourire naquit sur le lèvre de la demoiselle, quand soudain elle entendit le mot « jinmen » qui la fit réagir. Restant là où elle se trouvait, elle tendit simplement l’oreille à la voix grave et sonore qui narrait une légende de son enfance. Son père lui avait raconté cette histoire maintes fois, mais c’est seulement quand elle grandit qu’elle comprit que Koubaï était bien trop loin de la mer pour qu’une meule puisse rouler jusqu’à tomber dedans.
*L’âge adulte est une succession de désillusions, quel bonheur d’être enfant et de croire que tout est possible !*
Cet instant de nostalgie passé, la jeune femme se remit au travail et, attrapant les rennes des juments, les ramena près de son étalon. Alors qu’elle s’approchait de l’endroit où elle avait laissé son compagnon, elle vit un homme s’approcher et quand elle entendit sa voix grave, elle reconnût celle de la personne qui plus tôt narrait la légende jinmen, un conteur sans doute. Celui-ci était en train de réciter quelques vers à l’animal qui agitait ses oreilles en signe de curiosité.
En s’approchant dans le dos de l’inconnu, qui se révélait être de grande taille, Xialan put percevoir plus clairement les mots qu’il prononçait. Les éloges faîtes à son ami emplissaient le coeur de la jeune femme de fierté, mais c’est pourtant d’un ton bourru, dans un cydien teinté de son accent jinmen, qu’elle interrompit le geste du conteur qui tendait la main vers Xuehua.

« Continuez à lui susurrer des mots doux et c’est de vous dont-il va tomber amoureux ! »

Un petit sourire en coin flottait sur les lèvres de la jeune femme, et bien que pétillant de malice, ses prunelles d’obsidienne laissaient transparaître sa méfiance. Curieuse de savoir à qui elle avait affaire, mais aussi un peu lasse, elle attendait que l’étranger daigne lui faire face.

Son geste fut interrompu lorsqu'on l'apostropha, il étouffa un petit rire lorsqu'une plaisanterie salace naquit dans son esprit, il la garda pour lui. Il se retourna pour faire face à son interlocutrice, il avait remarqué son accent exotique, il ne fut pas surpris de découvrir une Jinmen menue qui le dardait de ses prunelles d'ébènes. Il lui sourit avant de répondre.

"Je suis peut-être de ceux qui aiment les animaux plus que les individus ? Pourquoi diable ne pourrais-je donc pas témoigner mon affection à cette noble créature ? Je suis de ceux qui pensent que nos yeux sont faits pour voir de belle chose."

Il fit un pas de côté pour s’éloigner de l’équidé, espérant ainsi chasser la méfiance chez la jeune femme.

"Je suis pris sur le fait, je dois vous avouer que je voulais prendre ce cheval et m'enfuir avec lui dans les bois, après avoir parcouru quelques milles lui et moi nous nous serions surement installé dans un petit coin tranquille, là je lui aurais avoué mes sentiments naissants pour lui, il les aurait acceptés sans peine j'en suis certain. Ensuite nous aurions pu couler des jours heureux, je vous aurais écrit bien évidemment... pour donner des nouvelles et tout ça..

Non attendez je me souviens....

Lorsque je l'ai aperçu au loin j'ai bien cru voir l'un de ces Qilins d'on votre peuple narrent les légendes, je me suis dit Clavim mon gars, c'est un signe que voilà, ne le laisse pas filer....

A moins que....à moins que je vous aie repéré tout à l'heure, un joli brun de femme comme vous ne passe pas inaperçu dans un endroit comme celui-ci, et....disons que je ne savais pas comment vous approcher alors j'ai monté ce plan avec ce cheval, je savais que c'était le vôtre.. je vous ai vus arriver avec...

Alors alors...laquelle de ces histoires préférez vous choisir ? Je vous donne un indice, elles sont toutes grotesques, maladroites et surtout intensément fausses..."

Clavim réprima un éclat de rire en observant la mine sérieuse de la jeune femme, il prit son outre de vin et en préleva une gorgée, il se sentait d'humeur joviale aujourd'hui et puis on ne rencontrait pas souvent de Jinmen, Clavim aimait bien échanger quelques mots avec eux, c'était souvent un bon moyen d'entendre des histoires inédites et Clavim raffolait de leurs histoires. Il passa une main dans son épaisse tignasse avant de s'adosser au chêne où se tenait l'étalon blanc.

"Mais ma curiosité maladive me fait manquer à toutes les politesses du monde, je ne me suis pas présenté, Clavim, humble compteur d’histoire qui parcourt ce vaste monde en quête de mythes et légendes ainsi que, je dois bien l’avouer, de quelques pécunes…
Je devine aux chevaux qui vous entoure et au fait que vous êtes loin de chez vous que vous baignez dans quelque chose propre au monde de l’équidé ?"

Un nouvel élan de fierté emplit à nouveau le cœur de la jeune femme lorsque l’inconnu lança un second compliment à propos de son cheval. La flatterie ne la touchait pas vraiment sauf lorsqu’elle est sincère, ce qui lui semblait être le cas ici. Elle réprima pourtant un sourire et conserva sa mine sérieuse. Où voulait en venir cet homme ? Il était très difficile à cerner au premier abord.
Xialan prit donc à parti de le laisse parler afin de voir un peu plus clair dans son jeu. Par ailleurs, il s’était écarté du cheval ce qui permit à la jeune femme de se détendre un peu. Elle était sûre que Xuehua ne partirait jamais loin d’elle, mais si l’homme était un désaxé, il pourrait blesser son ami. Elle resta donc vigilante et écouta avec attention le flot de paroles que débitait son interlocuteur sans que Xialan ne puisse placer un mot.
Mais voilà, plus il parlait, plus ses propos devenaient grotesques. La jeune Jinmen avait de plus en plus de mal à contenir l’éclat de rire qui gonflait dans sa poitrine et montait dans sa gorge, bien que de l’extérieur elle su rester impassible grâce à son expérience dans le marchandage.

*Quel étrange personnage, je comprends mieux pourquoi les gens étaient si enjoués tout à l’heure avec un tel comédien face à eux il est difficile de rester sérieux…*

Elle fût interrompue dans ses pensées par le brusque changement de sujet de l’homme qui maintenant se présentait à elle et l’interrogeait sur les raisons de son voyage.

"Mais ma curiosité maladive me fait manquer à toutes les politesses du monde, je ne me suis pas présenté, Clavim, humble compteur d’histoire qui parcourt ce vaste monde en quête de mythes et légendes ainsi que, je dois bien l’avouer, de quelques pécunes…
Je devine aux chevaux qui vous entoure et au fait que vous êtes loin de chez vous que vous baignez dans quelque chose propre au monde de l’équidé ?"

Xialan en fût tellement prise au dépourvu qu’elle perdit sa concentration, son visage s’éclaira, quittant sa sévérité, et elle laissa exploser un grand éclat de rire. Un rire enfantin, celui qui vous plie en deux au point de vous fait monter les larmes aux yeux. C’est ainsi que la jeune femme laissait toujours éclater sa joie et son amusement. Sa mère la reprenait toujours sur ses manières de garçon bien trop voyantes alors qu’une fille bien élevée devait toujours se montrer discrète et douce.
Ce rire dura un petit moment, puis quand elle repris un peu son souffle, elle parvint à hoqueter quelques mots au conteur.

« Ex…Excusez mon rire…Je…Vous…Vous êtes quelqu’un de très surprenant. Laissez-moi une seconde reprendre mon calme. »

Quelques secondes à peine s’étaient écoulées, la jeune femme s’était apaisée même si son visage rayonnait toujours de gaieté. Elle s’approcha du chêne et s’assis sur le sol, le dos appuyé contre le tronc et les jambes repliées contre sa poitrine entourées de ses bras.

« Voilà, à présent ce sera plus facile pour discuter. Enchantée de vous rencontrer Clavim, je me nomme Xialan, éleveuse et marchande de chevaux, propriétaire du Galop de Koubaï. Je suis en effet bien loin de ma terre natale dans le but de vendre quelques bêtes. Les éleveurs de chevaux du clan de la licorne sont réputés pour la qualité de leur dressage et de leurs bêtes, et ce depuis la nuit des temps. Connaissez-vous Oyashima ? Je vous aie entendu narrer une histoire de mon enfance un peu plus tôt...»

Elle inclinait légèrement la tête pendant qu’elle parlait à Clavim afin de regarder son interlocuteur. Sa question était dénuée d’arrière-pensées, elle était vraiment curieuse de savoir si les gens d’Azthia connaissaient son pays, et quelle image ils en avaient.

Clavim esquissa un sourire lorsque son interlocutrice éclata de rire.

"Mais en voilà un joli rire...nul besoin d'excuse, il faut toujours laisser sortir ce genre de choses sous peine d'oublier comment faire !"

Le conteur d'histoire préleva une nouvelle gorgée dans son outre de vin, la jeune femme vint s'asseoir au pied de l'arbre à côté de lui. Elle se mit alors à raconter un petit bout de son histoire, éleveuse de chevaux du clan de la licorne. Cela expliquait pas mal de choses pensa Clavim. Le cydien se laissa tomber lourdement au pied de l'arbre vénérable, un mince sourire sur les lèvres, il leva la tête en direction des cimes des arbres lorsque Xialan le questionna sur Oyashima.

"Au Yashima vous dîtes ? Je ne pense pas connaître, est-ce un établissement ou quelque chose de ce genre ?"

Clavim regarda en coin la jeun femme avant de pouffer de rire.

"Pardonnez-moi, je ne devrais pas me moquer de votre accent...j'imagine bien tous les efforts qu'il vous à fallut pour apprendre notre langue ...mais il est absolument irrésistible !"

Clavim garda un rictus amusé au coin des lèvres lorsqu'il reporta son attention vers la cime des arbres.

"Oyashima... je m'y suis rendu une fois, cela remonte à deux ans... non attendez, trois ans, c'était une période propice aux voyages, la découverte de votre pays était dans les esprits de chacun, je n'y faisais pas défaut à l'époque. J'avais rencontré un groupe de marchand qui en revenait, nous échangeâmes des histoires sur nos voyages mutuels, c'est alors qu'ils me narrèrent leurs séjours dans votre pays, ils m'évoquèrent les merveilles naturelles de vos terres ainsi que la beauté prude de vos femmes."

Clavim marqua un temps d'arrêt pour adresser à Xialan une caricature particulièrement grotesque d'un sourire charmeur qu'il exagéra volontairement.

"Me voici donc en quête d'une terre de rêve peuplée de belles demoiselles toutes prête à s'amouracher du jeune et brave conteur d'histoire que j'étais à l'époque. Chevauchant contre vents et marrés à travers les montagnes séparant nos deux pays, je rejoignis un groupe de prêtre en voyage sacré dans l'un de vos temples. Aucun d'entre eux ne partageaient ma passion pour les femmes jinmens, aussi surprenant que cela puisse paraître...."

Il ponctua sa phrase d'un clin d'oeil complice et d'un sourire malicieux.

"Finalement je franchissais vos frontières, épuisé et brisé par le voyage. Je dû faire face à la magnificence de vos paysages, tout était si...différent, il se dégageait une telle harmonie, comme si tous les éléments s'étaient entendu pour modeler le paysage, jamais de ma vie je n'ai vue de terres si anciennes et sages. J'ai visité votre capital, un joyau dans un écrin d'or. J'ai découvert quelques une de vos boissons, raconté quelques histoires, apprit certaine des votres qui aujourd'hui encore n'en finissent pas de m'émerveiller."

Il raconta tout cela avec un air rêveur, les yeux perdus dans les hauteurs sylvestres. Il finit par baisser les yeux sur Xialan.

"J'ai également pu admirer les beautés prudes de votre nation. Xialan, noble Dame, je dois dire que je fusse grandement impressionné par votre pays qui, je le crois, à sut capturer mon coeur, je me verrai bien finir mes jours dans une petite demeure qui borderait cette forêt de légende...Shinomen Kyuki si vous me pardonnez mon Jinmen pataud. Je raconterai à mes petits enfants des histoires inventées sur mes aventures héroïques, ma préférée serait comment j'ai réussi à capturer le coeur de leur grand-mère... oui ce serait une bonne histoire...."

Clavim fit semblant de sortir d'un songe profond, avec un sourire franc il se tourna vers son interlocutrice.

"À votre tour noble Dame, comment trouver vous notre pays ? N'oubliez aucun détail j'en suis grand amateur. "

Il bût une nouvelle gorgée de vin.

Xialan eut une moue boudeuse face à la remarque taquine du conteur concernant son accent alors que ce dernier se laissa choir sur le sol à ses côtés. En effet, malgré ses talents, elle avait encore du mal à gommer sa prononciation typique des Jinmens. Mais bon elle ne lui en tenait pas rigueur après tout, elle aussi s’était montrée un peu mutine face aux vers qu’il avait soufflé à Xuehua.
Ensuite, le regard du conteur se perdit dans les feuillages et il se mit à décrire ses souvenirs. Tous ses propos semblaient toujours emprunts une note comique que ce soit dans sa voix, ses tournures de phrases ou encore dans ses gestes, Clavim donnait l’impression de tout prendre à la légère. Pourtant derrière ses rires et ses grimaces, on sentait la part de vérité qui se dérobait à celui qui n’écoutait que superficiellement.
La façon qu’il avait de décrire la terre natale de la jeune femme, bien que cela tourna beaucoup autour des femmes, toucha la jeune Jinmen et lui réchauffa le cœur. Qu’un étranger ait su apprécier la beauté de son pays lui faisait très plaisir, d’autant plus que celui-ci disait qu’il se verrait bien finir ses jours dans ces terres exotiques. Un petit sourire fier se dessina sur les lèvres de la jeune femme, son pays savait être accueillant pour ceux qui savaient l’apprécier.
Quant aux femmes, et bien, il vrai que d’après ces observations elles étaient très différentes des femme d’Azthia. Enfin, l’homme finit sa tirade pleine de douceur et d’admiration, et il questionna Xialan sur ses impressions face à la nouveauté que représentait Azthia.
Elle étendit ses jambes et se mit à parler.

« Je suis ravie d’entendre que mon pays ait pu vous faire si forte impression. Mon cœur en est empli de fierté et de nostalgie. Vous m’avez fait redécouvrir ces terres que je connais pourtant depuis ma tendre enfance. Toutefois, méfiez-vous de nos « beautés prudes » comme vous les appelez car certaines d’entre elles cachent derrière leur doux sourire et leurs frêles épaules immaculées un caractère bien trempé! »

Elle avait prononcé cette dernière phrase avec un petit rire, car cela la décrivait très bien. Puis elle reprit sa narration.

« Je dois avouer que ce n’est pas la première fois que je foule le sol d’Azthia. Je suis déjà venue une fois accompagnée de mon père mais nous ne nous sommes pas aventurés très loin. Cette fois-ci, pour mon premier voyage seule, je voulais découvrir la vrai Azthia. »

Elle marqua une pause l’évocation de son père ayant fait trembler sa voix. Lorsqu’elle recommença à parler, sa voix s’était teintée d’excitation et ses yeux brillaient d’admiration.

« Votre pays est tellement différent du mien. Les peuples y sont multiples, c’est un véritable tourbillon de races, de langues, de cultures et de traditions. Je trouve que vivre au milieu de cet environnement si coloré est une chance contrairement à mon pays où tous se ressemblent et partagent la même culture. En plus, vous vivez aux côtés des dieux elfes comme s’ils s’agissaient de vos égaux ! Je trouve cela tellement incroyable alors que ceux qui peuplent Oyashima se tiennent en retrait dans l’abri que leur offre la forêt. »

Elle repensa un instant à Lohaar qu’elle avait rencontré dans la montagne et eut un sourire.

« Nous sommes tellement ignorant de la variété des espèces intelligentes à Oyashima. Alors que je séjournais dans le Passage Gelé, j’ai failli embrocher un elfe noir transi de froid en le prenant pour un Oni, un démon dans la langue de mon peuple. Imaginez un peu ! J’ai bien ri de ma bêtise lorsque je me suis aperçu qu’en fait il s’agissait d’un être de chair et de sang, et qui plus est d'un elfe ! »

Ne pensant plus au temps qui passait, elle continua de parler décrivant ses impressions face à la glaciale et impressionnante cité de Storghein, le bonheur qu’elle avait ressentit à parcourir les lieues qui la séparait de Cydonia à travers les paysages magnifiques. Puis elle se rendit soudain compte qu’elle ne cessait de bavasser sans réfléchir et surtout de façon complètement détendue, ce qui était rare quand elle se trouvait en présence d’un homme. En souriant à son auditeur, elle lui lança un petit compliment déguisé.

« De quel tour usez-vous pour faire ainsi parler les gens ! Les conteurs sont-ils mages à Azthia ? Mais je suppose que c’est ce qui fait un bon conteur, savoir écouter et mettre les gens à l’aise pour mieux raconter ensuite.»

Clavim passa une main sur ses joues mangées par une barbe d'une semaine, il finit par se gratter le menton d'un air septique suite à la dernière tirade de la jeune femme.

"Ma foi je crains fort de n'user d'aucun secret, je suppose que vous devez être d'un naturel bavard sans pour autant vous l'avouer !"

Lui aussi détendit ses jambes, il se laissa glisser un peu plus bas sur le tronc pour prendre une position plus confortable, les bras croisés sur son ventre, l'outre de vin toujours entre ses mains, il regarda un instant le paysage devant lui. Il avait bien noté le changement dans la voix de Xialan lorsque cette dernière avait évoquée son père, sans doute un souvenir douloureux, il n'aborderait pas le sujet, premièrement car il s'en fichait et deuxièmement car cela ne le regardait pas, il n'était cependant pas bien sûr de l'ordre dans lequel classer ses raisons...
Il prit un air faussement sérieux.

"Ainsi donc votre passe-temps est d'embrocher de pauvre elfe mourant dans les montagnes... venant de la bouche d'une étrangère avouez qu'il y a de quoi s'inquiéter, je devrai peut-être prévenir la garnison du coin..."

Il la dévisagea un instant

"Mais je crains fort que vos frêles épaules immaculées ainsi que votre caractère bien trempé ne viennent à bout de tous les barreaux qui se dresseront devant vous. Alors qu'importe, je connais une poignée d'elfe qui mériteraient bien qu'on les embroches pour sûre...
Mais je pense que cela ajouterai une note déplaisante à votre voyage, j’avoue avoir du mal à imaginer qu’on puisse prendre des elfes pour des créatures divines…croyez-moi, chaque créature qui peuplent Azthia à son lot de pêchés et de défaut, aussi loin que j’ai voyagé je n’ai jamais rien vu approchant du divin, sauf peut-être le ragout que l’on sert ici…S’il existait une religion concernant ce plat je me convertirai aussitôt."

À nouveau il lui adressa un clin d’œil taquin avant de poursuivre.

"Azthia est effectivement composée d’une mosaïque de peuples et de culture, c’est ce qui fait sa force, sa beauté et sa richesse. Mais tout cela est également une épée de Damoclès qui menace de s’abattre et de tout faire voler en éclat. Je pourrais vous conter des heures durant les innombrables conflits sanguinaires qui ont ravagés ces terres des siècles durant."

Clavim eut une mine un peu plus sombre l'espace d'un instant, il soupira et but une nouvelle gorgée de vin, il appuya sa tête contre le tronc de l'arbre vénérable qui les accompagnait.

"Mais de quoi je me plains, tout cela est mon gagne pain..."

Aussitôt, il se mit à fredonner un petit air rythmé, il s'éclaircit la gorge et commença à chantonner de sa belle voix de baryton.

« Je me maquille ou porte un masque
Prêt à jouer n’importe quel rôle,
Portant une toge ou bien un casque,
D’un air menaçant ou bien drôle
Car vous faire rire, vous faire pleurer,
Ça, mes amis, c’est mon métier.
Peu vous importe si je suis triste
Par quelque chagrin accablé
Je suis juste un clown sur la piste,
Qui se doit de vous amuser qui dans son chariot déambule,
Chaque jour, de l’aube au crépuscule.
Un acteur, qu’il soit jeune ou vieux,
Ridicule ou bien héroïque,
Doit toujours faire de son mieux.
Morceau comique, scène tragique,
Il s’efforce inlassablement
D’meriter vos applaudissements et se r’gardant dans son miroir,
Il se demande : Qui suis-je ce soir ?" »

Il dodelinait de la tête à chaque fin de phrase, regardant Xialan comme si c'était la première fois qu'il la voyait.

"Mais en voilà une tête ! Ne chantonnez-vous donc jamais jeune fille ? Je parierai le contraire ! Je vous imagine très bien par une chaude après-midi de printemps, forcée d'apprendre quelques chansons, mais votre esprit vagabonde et vous n'arrivez pas à retenir ne serais-ce qu'un couplet, vous sentez monter de la cuisine une douce odeur de cannelle, et... attendez...."

Clavim fit semblant d'humé l'air ambiant

"Serais-ce des amandes qui cuisent dans du beurre ? Quoi qu'il en soit vous adorez ça, si bien que vos pensées soient entièrement tournées vers ces délices qui, vous le savez, sont réservés au dessert de ce soir. Au-loin vous entendez un cheval qui hennit, peut-être ce bel étalon blanc à l'époque où vous et lui n'étiez que des bambins."

Le cydien coupa court à son récit et regarda sa compagne en fronçant les sourcils.

"Je vois je vois...vous n'étiez donc pas très assidue avec vos chansons... j'espère au moins que les gâteaux étaient bons..."

Clavim sourit puis fouilla dans sa sacoche qu'il portait en bandoulière, il en sortit une gourde en métal entouré de fourrure.

"Vous savez ce qui est très bon avec les gâteaux ? Une infusion bien chaude."

Il entreprit de dévisser le bouchon, de la fumée sortit du goulot, une douce odeur d'agrume et de poivre envahit aussitôt les alentours. Clavim foudroya à nouveau Xialan du regard, comme un parent disputant un enfant.

"Si vous voulez vraiment voir la vraie Azthia il va falloir commencer par ces spécialités culinaires ! Voici une boisson typique de Cydonia, j'achète toujours ce doux breuvage à un couple de vieillard adorable qui ont toujours un lit et une assiette pour un roublard dans mon genre, vous m'en direz des nouvelles noble Dame."

Il lui tendit la gourde d'infusion chaude.

"Puis-je me permettre de vous demander de me narrer une histoire, un poème ? Ou bien même une chanson que vous auriez finalement réussie à apprendre ? Sauf si cela vous semble malvenu de ma part, dans ce cas je vous saurais gré de pardonner mon impolitesse."

Clavim s'installa confortablement contre l'arbre, attendant la réponse de la jeune femme.

[HS : Les câlins virils c'est efficace pour l'inspiration ^^]

Xialan était soulagée que Clavim n’ait pas relevé le tremblement de sa voix, le souvenir de son père était encore trop présent et elle ne voulait pas montrer cette faiblesse à un étranger, si sympathique soit-il.
L’après-midi continuait de défiler tranquillement, Xiala écoutait le conteur avec ravissement. Dans ses propos, on sentait la tension qui régnait en son cœur face aux conflits qui ont fait l’histoire d’Azthia. La Jinmen pensa au fond d’elle-même que les êtres doués d’intelligence, ou du moins d’instincts moins primaires étaient finalement semblables à ceux qu’ils sous-estimaient.

*On cherche toujours à imposer sa supériorité et doué d’une conscience ou non, cela s’exprime toujours de façon violente. Quelle tristesse…*

Elle fût surprise par le chant du conteur qui la tira de sa rêverie. Elle devait avoir l’air un peu hébétée car Clavim crût qu’il l’avait choqué. Bien au contraire, elle trouva ce chant très agréable car il lui donnait l’impression dans rentrer dans l’intimité du conteur. Puis celui-ci se mit de nouveau à divaguer, inventant au fur et à mesure une histoire sur l’enfance de Xialan. La jeune femme riait bien qu’en effet elle aime les sucreries, le chant et la danse sont les seules choses qui font d’elle une véritable jeune femme aux yeux de sa mère qui la traite toujours de garçon.
Puis l’homme partagea avec elle une infusion qu’elle bût avec plaisir, en effet c’était un régal. Quelques instants plus tard celui-ci lui proposa de narrer une légende Jinmen. Xialan souria doucement et répondit à son interlocuteur :

« Vous savez, un peu plus tôt vous vous seriniez car vous regrettiez les guerres et les conflits. Je trouve que cela vous rend humain, raconter ces histoires est important car il faut se souvenir des moments difficiles afin de ne pas répéter les mêmes erreurs. Le fait que narrer ces histoires soient votre gagne pain ne veut pas dire que vous vous réjouissez de ces malheurs, cela prouve que vous avez du cœur ! »

Puis elle se remit debout et se plaça devant le conteur.

« Je vais vous faire profiter d’un chant traditionnel de mon clan qui s’accompagne d’une danse. Lors d’une fête très particulière, les jeunes femmes en âge de se marier doivent effectuer un spectacle en chantant et en dansant sur cet air afin d’attirer le bonheur dans leur maison. Je ne suis pas bien sûr de son efficacité car bien que j’ai moi-même participé à cette célébration je ne suis toujours mariée ! A moins que ce soit dû à mon côté tête de mule. Bon fini l’introduction, seulement soyez clément avec moi je suis loin d’être une professionnelle, je suis plus à l’aise sur une selle que sur scène ! »

Elle s’échauffa les poignets et les chevilles, éclairci sa voix et commença. Retrouvant sa langue natale elle se détendit, sa voix retrouvant un peu de douceur et de gaieté. Bien sûr Xialan n’était pas une de ces magnifiques geishas dont on vantait la douceur et la grâce mais sa danse n’était pas désagréable à regarder et son chant bien qu’assez banal était juste. Ses mains s’animèrent et commencèrent leur parade adoptant plusieurs poses, appuyant les paroles. Elle gardait les yeux fermés de peur de perdre sa concentration et laissa refluer ses sentiments. Le chant tantôt triste, tantôt gai résonnait dans la forêt. Même Xuehua se manifestait comme si lui aussi reconnaissait cette chanson que sa maîtresse avant tant répété dans les écuries près de lui. Elle se laissa porter par l’histoire et perdit la notion du temps en tourbillonnant. Puis sa voix mourut, ses gestes ralentirent pour adopter la pose finale.

Elle resta ainsi un instant et rouvrit doucement les yeux. Un peu essoufflée, elle se tourna vers son compagnon d’une après-midi :

« J’espère que cela vous a plu mais je ne sais pas si vous avez saisi la totalité de l’histoire. Si vous me permettez je vais maintenant la narrer dans votre langue afin que vous puissiez la rapporter. Je me disais juste que d’avoir la version originale aurait pu vous intéresser. »

Elle reprit son souffle avant d’enchaîner :

« Ce chant vante la vertu et la fidélité d’une femme. Il y a très longtemps, alors que les membres du clan de la licorne étaient pour la plupart éleveurs ou agriculteurs, un jeune noble qui se vit promis à une demoiselle de bonne famille. Bien sûr ils ne se connaissaient à peine et n’avaient guère de sentiment l’un pour l’autre, d’autant que la jeune femme était très autoritaire ce qui déplaisait grandement à son fiancé qui passait son temps à la fuir. Un jour, alors que celui-ci était à la chasse, il s’écarta du groupe. Errant dans les bois et profitant de ce moment de solitude, il entendit une voix si douce qu’il avait l’impression d’être caressé par la soie la plus délicate qu’il n’eût jamais touché. Il mit pied à terre et s’approcha sans faire de bruit, une clairière perça alors dans la masse compacte des arbres et il vit une jeune Jinmen à la peau immaculée et à la bouche vermeille chanter et danser au milieu de celle-ci. Alors qu’il allait faire un pas pour aller à la rencontre de cette créature de rêve, il vit un cheval plus blanc que la plus pure des neiges s’avancer vers la jeune femme qui bien qu’elle avait arrêté sa danse continuait de chanter. Sur le front de la bête perçait une corne irisée qui luisait faiblement au soleil.

Une licorne ! Cet animal qui vivait à travers nos légendes existait réellement et cette femme, si belle qu’elle avait capturé le cœur du jeune homme dès le premier regard, avait la capacité de s’en approcher. Alors que le jeune noble resta béa devant cette scène, les appels de ses compagnons lui firent tourner la tête une seconde. Se retournant à nouveau vers la clairière, il ne put voir qu’un éclair blanc disparaître entre les feuillages. La jeune femme et l’animal s’étaient évaporés dans la nature. Il rentra donc chez lui.

Les lunes passèrent et l’homme devenait de plus en plus obsédé par cette apparition divine. Il décida donc de la retrouver et de l’observer discrètement chaque jour s’enivrant de sa beauté. La jeune femme, qui avait certains pouvoirs, était bien entendu au courant de cet homme qui l’observait, elle qui avait grandit dans la forêt sans autre compagnie que sa grand-mère maternelle était bien curieuse de cet être nouveau. Elle l’observait donc en secret. Le temps passa et leurs sentiments s’intensifièrent malgré qu’ils ne se soient jamais abordés ni même approchés l’un de l’autre. Mais un jour le jeune homme ne vint plus, la curiosité poussa la jeune femme à s’approcher de Koubaï où par des rumeurs elle apprit que le jeune homme dont son cœur s’était amouraché était un noble héritier qui à cause de ses nombreuses escapades dans la forêt avait fini par tomber gravement malade et était sur le point de rejoindre le monde des âmes.

Désespérée, la jeune femme ne pouvait supporter que cet être disparaisse et qui plus est à cause d’elle ! Elle retourna dans la forêt où elle supplia les esprits qui l’avaient bercée depuis son enfance de lui venir en aide. Ceux-ci acceptèrent d’aider le jeune homme à condition que la jeune femme reste dans la forêt et ne poursuive pas son idylle avec son aimé, sinon le charme se romprait et l’homme mourrait. Elle en fit donc le serment et une licorne apparut devant elle, les esprits lui soufflèrent de gratter légèrement la corne de l’animal afin d’en tirer une poudre permettant de guérir son bien-aimé. Elle s’exécuta et courut jusqu’à la ville offrir le remède aux parents du jeune homme qui, désespérés, étaient prêts à tout essayer. Evidemment les esprits avaient dit vrai et le noble héritier se rétablit rapidement.

Quand celui-ci retourna à la clairière, il ne vit qu’une vieille femme qui chantonnait en tressant des couronnes de fleurs sauvage. Le jeune homme s’approcha et lui demanda s’il n’avait pas vu une jeune fille dans cette clairière. La voix tremblotante de vieillesse et les yeux étrangement brillants, la grand-mère lui répondit qu’il n’y avait jamais eu de jeune femme ici et qu’elle vivait seule.

- Aurais-je été pris de folie, un tel ange ne peut-il pas exister ? Et bien puisqu’il en est ainsi je ne reviendrai pas dans cet endroit maudit qui a failli me coûter la vie !

Sur ces mots cruels, car il était bien trop impétueux, il partit sans se retourner et ne revint jamais dans la forêt laissant derrière lui la vieille femme dont la silhouette devint flou. L’illusion s’évanouissant, elle laissa apparaître la jeune fille dont les larmes de tristesse et de joie ruisselaient sur son visage… »

Achevant son récit Xialan poussa un profond soupir. Elle avait toujours aimé cette histoire bien qu’elle pensait que l’homme était un idiot d’avoir abandonné si facilement. Elle reporta son regard, qui au fil de l’histoire s’était perdu dans les feuillages, vers Clavim.

« Voilà ce qui fait la valeur d’une femme du clan de la licorne. Son habilité avec les équidés, sa grâce, sa vertu et son dévouement envers celui qu’elle aime. J’espère que vous avez apprécié mon histoire ! »

Clavim souffla sur le goulot de sa gourde avant de boire, il sentit la boisson chaude dans sa gorge, avec la fraîcheur ambiante c'était un véritable plaisir. Le conteur écouta sa comparse, il n'était pas entièrement d'accord avec sa vision des choses mais, il se garda bien de-le lui dire, Clavim n'avait pas envie d'entamer un débat sur quelque chose d'aussi futile.
La jeune femme se leva et répondit par l'affirmative à la demande du cydien, Clavim esquissa un sourire et se redressa.

"Je vous laisse danser votre rituel nuptial à la seule condition qu'il n'existe aucun risque de mariage ! J'apprécie vos efforts mais comprenez-moi.... je suis déjà marié à l'aventure...."

Clavim éclata de rire et prit appuie sur le sol pour se lever, il croisa les bras sur sa poitrine et s'adossa contre le chêne pour assister au bout de représentation qu'allait lui offrir la jeune femme, un mince sourire flottant aux coins des lèvres, elle avait toute son attention. Xialan semblait s'échauffer avant de commencer, cela amusa le cydien, à quel genre de spectacle allait-il assister ? Sa curiosité était piquée au vif. La jeune femme entama un chant mélodieux, la Jinmen avait beau ne pas être une artiste, il nota qu'elle maîtrisait très bien sa voix, une voix douce et délicieusement mélodieuse, Xialan captura toute l'attention du conteur. Son corps se mouvait avec une aisance fascinante, Clavim n'aurait jamais soupçonné un tel talent chez la jeune femme, il la dévorait des yeux, tentant de percer les mystères de la signification de telles ou telles postures, sa connaissance du Jinmen était bien trop pauvre pour comprendre ce qu'elle racontait cependant la musicalité de la langue allié à ses pas de danse rendait la scène quasi surréaliste. Voir le petit corps menu de Xialan évoluer ainsi, obligea le cydien à la comparer à l'une de ces figurines de porcelaine de boîte à musique.
Xialan apparaissait si fragile, petite chose perdue dans un maelström de paroles et de gestes. Clavim ne parvenait pas à se souvenir s'il avait déjà vu pareil spectacle, un aspect de son voyage chez les Jinmens qu'il avait beaucoup apprécié, ce peuple savait y faire en matière d'art et de spectacle. Le cydien pensa, non sans humour, comment la jeune femme avait-elle fait pour ne pas déjà être marié, la concurrence était-elle si dur ? Clavim sourit en imaginant son coeur lâcher devant une vingtaine de femmes exécutant des danses et des chants de cette qualité et tout cela pour attirer l'attention d'un mari.

"Je crois que si nous instaurons une tradition pareille à Cydonia, les troupes de Muria grossiraient encore un peu plus hahaha."

Xialan termina bientôt sa représentation, Clavim, un large sourire aux lèvres, applaudit avec entrain. La jeune femme proposa maintenant de lui raconter dans sa langue l'histoire, le conteur apprécia la peine qu'elle se donnait. Le cydien l'invita à se rassoir au pied de l'arbre avant de narrer l'histoire. Une fois de plus il se trouvait être un bon auditoire, Clavim la laissa conter une histoire de son clan, il mémorisa le moindre détail, appréciant d'être de l'autre côté. Le récit lui plut, il comportait tous les ingrédients pour captiver les spectateurs de plus, il était empreint de cette touche d'exotisme qui transcende les gens. Clavim tendit sa gourde d'infusion cydienne à Xialan.

"Vous devez avoir soif après tout cela, Noble Dame je vous le dis, vous avez un talent certain pour les arts... Seul les Jinmens savent comment allier parfaitement danse et chant pour transporter son auditoire. C'est une bien jolie histoire que vous venez de narrer, quoiqu'un peu triste, c'est sans doute dans la nature de vos hommes d'être aussi impétueux, si cela avait été moi, j'aurais sans doute retourné la forêt à la recherche de cette jeune femme... je serais venu chaque jour casser les oreilles de cette vieille bique pour savoir où elle était, elle, ou les esprits auraient fini par céder."

Clavim sourit avant de poursuivre.

"Votre talent est indéniable Noble Dame, vous auriez pu devenir une grande artiste j'en suis certain, mais étant donné que vous avez emprunté la voie du commerce, supposons que je veuille partir pour un long voyage prochainement, j'aurai besoin d'une bonne monture, êtes-vous capable de me fournir cela ? Je crains fort d'être difficile car il me faut une bête robuste et disciplinée, aurais-je la chance que vous disposiez de pareil trésors ?"

Xialan accepta avec plaisir la gourde que lui tendait le conteur tout en écoutant ses louanges envers elle et son peuple. Elle avait apprécié ses applaudissements sincères, heureuse d’avoir pu partager un petit bout de son existence et de sa culture. Elle repensa à la boutade que lui avait lancé Clavim avant qu’elle ne commence sa démonstration. Une boutade qui l’avait fait sourire, car loin d’elle l’idée de conquérir un quelconque époux. Une pensée l’effleura alors tandis qu’elle se remémorait l’année où elle avait dû apprendre cette danse et le chant qui l’accompagne.

*Si j’avais mis tant d’effort à répéter cette danse c’était plus par soucis de faire plaisir à mes parents en leur offrant un joli spectacle, plutôt que par envie de trouver un mari. La semaine qui suivait le spectacle j’ai repoussé quatre demandes en mariage au grand désarroi de mes parents*

Elle eu un petit sourire amusé puis revint au propos de son compagnon de l’après-midi.

"Vous devez avoir soif après tout cela, Noble Dame je vous le dis, vous avez un talent certain pour les arts... Seul les Jinmens savent comment allier parfaitement danse et chant pour transporter son auditoire. C'est une bien jolie histoire que vous venez de narrer, quoiqu'un peu triste, c'est sans doute dans la nature de vos hommes d'être aussi impétueux, si cela avait été moi, j'aurais sans doute retourné la forêt à la recherche de cette jeune femme... je serais venu chaque jour casser les oreilles de cette vieille bique pour savoir où elle était, elle, ou les esprits auraient fini par céder."

Remerciant le conteur pour ses compliments d’un signe de tête plein d’humilité, elle continua de l'écouter avec attention. La Jinmen approuvait totalement ce qu’il disait concernant la chute de l’histoire. Elle aurait voulu pouvoir répondre à ses propos mais celui-ci ne s’arrêta que le temps d’un sourire avant de continuer.

"Votre talent est indéniable Noble Dame, vous auriez pu devenir une grande artiste j'en suis certain, mais étant donné que vous avez emprunté la voie du commerce, supposons que je veuille partir pour un long voyage prochainement, j'aurai besoin d'une bonne monture, êtes-vous capable de me fournir cela ? Je crains fort d'être difficile car il me faut une bête robuste et disciplinée, aurais-je la chance que vous disposiez de pareil trésors ?"

Alors comme cela il cherchait un cheval robuste et discipliné cela tombait bien puisqu’elle ne s’était pas encore séparée de ses deux juments. Elle reprit donc à son tour la parole.

« Clavim, je vous rejoins complètement sur votre opinion à propos de la chute de mon histoire. Chez nous les hommes sont encore très puissants et les femmes vouées à une docile obéissance, du moins en apparence. Au moindre rejet ou refus, ils se braquent blessés dans leur fierté ce qui pour eux est intolérable car ils ont été élevés dans la croyance de leur supériorité. Les femmes d’Azthia sont bien plus libres de s’exprimer que chez nous. Chacun de mes refus face à un prétendant a amené la honte sur mes parents dont on dit qu’ils élèvent une vieille fille. Mais je ne veux pas d’un homme qui cherche une docile femme au foyer à qui on peut imposer le moindre de ses désirs, ou pire, une femme dont la position, la richesse ou encore la réputation fait d’elle une épouse intéressante. L’homme que j’épouserai devra se battre jusqu’au bout pour m’obtenir et devra me laisser vivre comme je l’entends. »

Elle avait un regard rêveur lorsqu’elle termina sa tirade. Puis elle secoua la tête comme pour chasser ses pensées avant de changer de sujet avec un large sourire.

« Bon ! Trêve de bavardages, passons aux choses sérieuses. Le mariage n’est pas ma priorité et j’ai un commerce à faire tourner. Vous chercher une belle bête robuste et docile ? Alors vous vous êtes adressé à la bonne personne. Les chevaux que je vends on été dressés par mes soins, je peux donc vous assurer de la qualité de leur éducation. Ils ne broncheront pas face à vos ordres ni face aux obstacles. »

Pendant qu’elle parlait son ton de voix changeait et devenait de plus en plus professionnel bien que toujours chaleureux.

« Hélas, j’ai déjà vendu un étalon à Storghein mais il me reste deux juments. Si vous voulez de la docilité, je pense qu’une jument est le meilleur choix. Les étalons ont tendance à être plus difficiles à gérer, un peu comme les hommes au final. »

Sa remarque lui tira un bref éclat de rire, tandis qu’elle invitait d’un geste le cydien à la suivre. Arrivés quelques mètres plus loin, les juments alezanes étaient sagement en train de paître. S’approchant tranquillement, Xialan fit les présentations.

« La jument avec la tâche blanche sur le chanfrein a 4 ans, j’ai fini sont dressage il y a peu. C’est une bonne bête mais un peu gourmande. Quant à celle avec la crinière et la queue noires, elle a 6 ans. Très douce. Il n’y aura pas de problème avec elle, évitez simplement de la mettre en contact avec d’autres juments. Elle ne peut pas les supporter, la seule qu’elle tolère est sa comparse ici présente. Elles ont été élevées ensemble donc elles sont assez proches. Je vous ferais une ristourne d’amis en remerciement de votre compagnie pour l’après-midi. Sachez que vous ne regretterez pas une bête qui sort de mon haras, il est très réputé pour sa qualité. Je vous laisse faire connaissance avec elles ! Prenez votre temps. »

Elle s’éloigna de quelques pas pour se rapprocher de Xuehua lui flattant l’encolure en attendant que le conteur la rappelle. Bien sûr, bien que Clavim était sympathique, elle ne le connaissait que très peu et ne se tenait donc pas trop éloignée. C’est donc près de son compagnon de route qu’elle profitait encore des derniers rayons de soleil de cette après-midi qui déjà touchait à sa fin.

Il sourit suite aux propos que tenait son interlocutrice, cette femme avait du caractère, c'était certain, le conteur fut impressionné par les convictions de la Jinmen. Xialan changea radicalement de ton lorsqu'elle se glissa à nouveau dans la peau de la marchande de chevaux. Clavim s'en amusa. Elle lui conseilla de faire l'acquisition d'une jument, cela tombait bien, il avait l'habitude d'en monter, il trouvait les étalons trop fougueux et imprévisible à son goût. Xialan lui présenta ces deux équidés encore disponible, deux magnifiques créature, tout en muscles et en tendons, d'une belle robe alezane. La jeune femme s'éloigna ensuite afin de laisser Clavim faire son choix, du coin de l'oeil le conteur remarqua qu'elle resta tout de même à porter, sa prudence fit sourire le cydien. Il décida de profiter quelque peu de la situation, il tourna autour des chevaux, se tenant le menton avec deux doigts, feintant d'expertiser les deux bêtes, il prit soin de faire ses remarques suffisamment fortes pour que Xialan puisse les entendre

"Hummm, joli teint de peau....de belles jambes incroyablement longues, forte et puissante... faites pour tenir sur des milles et des milles, la truffe semble humide, le bastingage semble bien aligné avec l'ossature... les courbes du corps sont assez évocatrices, pleine de rondeur et de candeur... le poil est brillant, le ventre pas trop détendu, ma parole voilà deux belles pouliches sacrément bien faites."

Derrière ses idioties Clavim s'était livré à un petit contrôle sur les critères qu'il jugeait important, la largeur du pied ainsi que la hauteur du talon, les jarrets bien secs, la musculature, la queue toujours à l'horizontale. Il guettait d'éventuelles disproportions sur l'animal qui témoigneraient de trouble de la santé. Force lui fut d'admettre que Xialan avait fait des merveilles avec ses chevaux. Il s'approcha de la jument avec la tâche blanche sur le chanfrein, parlant sur un ton plus faible.

"Tu es une bête magnifique cependant là où je vais-je crains fort que ta gourmandise ne te fasse souffrir là où je vais et cela n'est pas dans mes habitudes..."

Il lui flatta l'encolure puis il se dirigea vers la seconde jument, celle avec la crinière et la queue noire. Il lui flatta également l'encolure avant de s'adresser à elle.

"Bonjour à toi douce Dame, je me demandais si vous accepteriez de voyager en ma compagnie quelque temps, je ne vous promets pas la gloire ou la luxure, loin de là je crois même, cependant je peux vous garantir que vous voyagerez bien plus loin qu'aucun autre de vos semblables, vous verrez des centaines de choses et lorsque que la force de la jeunesse nous aura quittée tous les deux je vous ramènerai chez-vous et nous finirons nos jours en nous remémorant nos aventures, cela serait-il à votre convenance douce Dame ?"

Pour seule réponse il sentit la jument glisser son museau dans la paume de sa main. Le conteur sourit.

"Ta maîtresse dit que tu n'aimes pas la compagnie des autres juments, tu as donc un fort caractère, tout comme ta maîtresse j'en suis certain haha... je pense que nous allons bien nous entendre..."

Le choix d'un destrier avait toujours été important pour le cydien, il voyageait beaucoup, il avait donc besoin d'une monture fiable et vaillante prête à affronter Azthia, son prochain voyage allait demander beaucoup d'effort. Clavim flatta une dernière fois l'encolure de la jument. Il revint vers Xialan, un sourire au coin des lèvres.

"Vous faites honneur aux femmes de votre clan Noble Dame, vos bêtes sont magnifiques assurément... je vais prendre cette beauté à la chevelure d'ébène, quel est son nom ?"

Du coin de l’œil la jeune éleveuse observait le conteur faire le tour de ses deux bêtes, les examinant d’un air connaisseur. Toutefois quand ce dernier commença à énoncer à haute voix les caractéristiques des juments les joues de l’innocente jeune femme se teintèrent de rose et elle tenta d’étouffer un rire face au double sens, certainement volontaire, des propos de Clavim.

"Hummm, joli teint de peau....de belles jambes incroyablement longues, forte et puissante... faites pour tenir sur des milles et des milles, la truffe semble humide, le bastingage semble bien aligné avec l'ossature... les courbes du corps sont assez évocatrices, pleine de rondeur et de candeur... le poil est brillant, le ventre pas trop détendu, ma parole voilà deux belles pouliches sacrément bien faites."

*Décidément ce conteur est un véritable bouffon, il ferait fureur dans les cours royales.*

Derrière cette drôle de description, qui donnait l’impression que le cydien était en train d’examiner une femme, Xialan constata néanmoins qu’il pointait les critères importants qui définissent la qualité d’un cheval.

*Un bouffon certes, mais qui est loin d’être idiot, ça c’est certain !*

Sa voix baissa soudain, et même si Xialan ne pouvait clairement percevoir ce qu’il disait, elle savait qu’il s’adressait aux bêtes ce qui l’enchanta intérieurement. Voilà un homme à qui elle pouvait confier sans crainte l’un de ses petits trésors ! La jimen avait volontairement éviter d’orienter le choix du conteur sur l’un ou l’autre de ses juments afin de voir si son choix serait celui qui lui conviendrait le mieux, certes, mais qui conviendrait également à la monture qu’il désignerait. Selon le choix que lui annoncerait Clavim, elle pourrait confirmer son opinion sur lui mais aussi savoir si son animal serait bien traité. Sur ce dernier point, la jeune femme se faisait une question d’honneur de ne vendre un animal qu’à une personne qui lui offrirait un traitement décent. Certes ses chevaux étaient une marchandise qu’elle échangeait contre des talents sonnant et trébuchant mais ils restaient néanmoins des êtres vivants auxquels l’éleveuse s’attachait lors des longs mois, voire années, que durait le dressage. Continuant de caresser Xuehua qui semblait grandement cette escale anticipée, elle attendit donc patiemment que le conteur prenne une décision. Ce qu’il fit assez rapidement finalement car, quelques instants plus tard, il revint vers la jinmen d’un pas décidé, un petit sourire en coin affiché sur son visage.

"Vous faites honneur aux femmes de votre clan Noble Dame, vos bêtes sont magnifiques assurément... je vais prendre cette beauté à la chevelure d'ébène, quel est son nom ?"

Xialan s’inclina modestement face à ce compliment qui plus que tout autre lui faisait très plaisir, puis d’un hochement de tête elle valida le choix qu’avait fait le cydien.

« Assurément vous vous y connaissez en chevaux ! Je suis heureuse de voir que je confie l’une de mes précieuses juments à quelqu’un qui sait en apprécier la valeur et pourra en prendre convenablement soin. Son nom est Nüwang, cela signifie Reine dans votre langue. »

Elle affichait à son tour un sourire satisfait et poursuivit son discours.

« Je pense que ce sera la compagne idéale pour vous qui êtes un aventurier solitaire. Elle a du caractère et ne s’effraie pas de grand-chose. De plus elle est assez solitaire elle aussi, je pense que vous vous accordez bien. Mais si vous le voulez bien maintenant nous pourrions passez aux questions qui fâchent !»

Elle avait lancé sa dernière phrase avec un regard rieur puis annonça son prix. Un prix tout à fait raisonnable d’ailleurs pour une bête de cette qualité. En effet, comme promis, elle avait diminué le prix d’origine en remerciement de l’agréable après-midi qu’ils avaient passé à converser.

« Et puis en ce qui concerne la selle et les rennes je vous en fait cadeau. Ce n’est pas un équipement de roi, certes, mais ma mère les a confectionné afin qu’elles soient résistantes tout en étant confortables. Cela sera un bon début, vous pourrez toujours vous en procurer d’autres par la suite mais au moins pour aujourd’hui vous n’aurez pas besoin de monter à crue. Bon, que dites-vous de mon marché ? Cela vous convient-il ? »

Elle se tût alors laissant la parole au conteur.

Clavim croisa les bras sur sa poitrine.

"Nüwang....quel prénom magnifique pour une créature qui l'est tout autant....c'est assurément la reine de toutes les juments qu'il me fût donné de voir."

Clavim écouta la commerçante sans un mot, quant-elle eut finit il posa ses poings sur ses hanches et fronça les sourcils.

"Avant de poursuivre sur le prix de notre affaire j'aimerai clarifier quelques points, dans un premier temps...."

Son visage se fit boudeur.

"Je ne suis pas si solitaire que ça..."

Puis il sembla rayonner, un grand sourire sur les lèvres.

"Un souci se pose, dans la mesure où je serai un aventurier solitaire et que Nüwang serait une jument solitaire, part définition il nous serait impossible de voyager ensemble car il me semble que solitaire ne peut être utilisé pour désigner deux individus."

Clavim regarda droit devant lui faisant semblant d'être perdu dans d'intenses réfections, finalement il claqua des doigts et regarda la Jinmen très sérieusement.

"Je sais ! C'est à cause de votre parler, votre petit accent Jinmen vous joue des tours semble-t-il ? Vous vouliez dire « solidaire » et non « solitaire » j'imagine.... Ne vous en faites pas, vous m'êtes suffisamment sympathique pour que je ne vous en tienne pas rigueur lors de notre négoce."

Le conteur éclata de rire avant de passer une main dans ses cheveux, c'est le moment que choisit la jeune femme pour annoncer son prix, Clavim failli perdre l'équilibre. Il s'était attendu à un prix assez haut, et pourtant la Jinmen affirmait lui avoir fait un prix plus bas pour le remercier de ce brin de causette. Clavim hurla intérieurement comme un écorché à l'idée de se séparer de pareille somme, mais Nüwang valait bien plus que ça. La mine amusée du conteur disparue lorsque Xialan évoqua le matériel de monte. Malgré le peu de parole qu'ils s'étaient échangés, Clavim avait bien noté l'attachement de la jeune femme pour sa famille, il lui répugnait d'accepter une selle et des reines fabriquées des mains de sa mère. Il grimaça comme s'il avait mordu dans un citron puis il adressa un sourire gêné, il dégrafa de sa ceinture une petite bourse en peau qu'il fit sauter dans la main de la jeune femme, au poids Xialan pouvait déduire qu'il y avait plus que le prix qu'elle avait donnée. Clavim ne roulait pas sur l'or mais il aimait récompenser ce qui devait l'être.

"Voici donc le prix demandé Noble Dame, plus un petit supplément pour vous remercier du temps passé à vos côtés ainsi que pour le matériel, je puis accepter un tel artisanat de votre famille, mais me faisant une idée de votre caractère je doute que vous me laissiez partir sans, aussi je préfère rémunérez le travail accomplit par votre mère, je m'engage également, lorsque que mon voyage sera terminé, à vous rapporter ce même matériel, je ne saurais garder un morceau de votre famille égoïstement avec moi."

Il exécuta une révérence impeccable avant de lui adresser un sourire.

"Noble Dame je vous remercie infiniment de m'avoir permis, un humble conteur tel que moi, échanger quelques mots avec vous, je garderais un excellent souvenir de cet après-midi. Je ne vous retiendrais pas plus longtemps et je vous souhaite un excellent voyage. Ayez l'esprit tranquille, je veillerai sur Nüwang."

[HRP: Désolée pour le temps de réponse et la qualité pas terrible de ma réponse xD]

Oups. La jinmen aurait-elle vexé le conteur ? Gênée, la jeune femme tira sur ses manches comme à son habitude. Alors qu’elle allait ouvrir la bouche pour s’excuser, une nouvelle pirouette verbale de Clavim la sortie de son embarras.

"Je sais ! C'est à cause de votre parler, votre petit accent jinmen vous joue des tours semble-t-il ? Vous vouliez dire « solidaire » et non « solitaire » j'imagine.... Ne vous en faites pas, vous m'êtes suffisamment sympathique pour que je ne vous en tienne pas rigueur lors de notre négoce."

Reconnaissante, Xialan inclina légèrement sa tête pour le remercier avant de se joindre au rire du conteur.

« Puisque vous me pardonnez ma maladresse, je peux dès à présent vous annoncer mon prix ! »

Lorsqu’elle s’exécuta, elle vit l’expression de Clavim changer. Apparemment, le conteur ne pensait pas effectuer une telle dépense. Se séparer de sa bourse semblait bien difficile mais cela n’empêcha l’homme de gonfler la somme convenue en remerciement de l’équipement et du temps passé ensemble. Cependant, il faisait erreur sur un point.

« Détrompez-vous cet équipement n’a pas de valeur sentimentale pour moi. Seule celle qui équipe Xuehua est spéciale à mes yeux. Au galop de Koubaï, nous vendons bien sûr des chevaux mais pas seulement. Nous nous occupons également de l’équipement pour les bêtes. Toutefois, vous êtes le bienvenue dans notre boutique dès que vous le désirez, cela nous donnera une nouvelle opportunité de converser. »

Elle eut un sourire lorsque le cydien s’inclina et répondit à son au revoir.

« Je ne doute pas un seul instant que Nüwang est entre de bonnes mains. Je suis heureuse qu’elle puisse vivre de belles aventures en votre compagnie. J’ai également passé une après-midi des plus agréables, elle restera gravée dans mon esprit ! J’espère avoir la chance un jour de vous rencontrer à nouveau. Peut-être quand nous serons vieux et fatigués et que vous viendrez vivre dans mon pays ou bien avant ça. Seul l’avenir nous le dira. Sur ce, je vous souhaite bon voyage et que les onis se tiennent loin de vous. »

Elle s’inclina à son tour, et lui sourit.

[Désengagée]

Le conteur salua la jeune femme d'un dernier signe de la main avant de la regarder s'éloigner, un petit sourire énigmatique flottait sur ses lèvres. Il attrapa par la bride sa jument fraîchement acquise et il lui flatta l'encolure. Xialan ne semblait pas être une menace pour Cydonia, la jeune femme lui avait fait par de sa destination, en tant qu'informateur pour le compte de la ville, Clavim avait été obligé de se faire une idée de ses motivations ainsi que potentiellement, son niveau de dangerosité.
Mais les palabres échangées avec la Jinmen se révélèrent être très agréable d'ailleurs le cydien ne se souvenait pas avoir déjà discuté ainsi avec Orientale depuis la découverte de leur royaume. Clavim reporta son attention sur sa monture.

"Et bien Nüwang ma belle, nous allons devoir prouver que ton dressage compte parmi les meilleurs de tout Azthia, nous allons voyager d'un bout à l'autre du continent..."

Le conteur sourit et ébouriffa la crinière de l'équidé, Clavim esquissa un sourire amusé qui s'effaça rapidement.

*Elyncia...*

Le conteur se souvenait de l'étrange missive qu'il avait reçu quelques jours plutôt et qui impliquait sa cousine, dans quel genre de situation avait-elle bien pu se retrouver pour avoir besoin de son aide ? Et qui était l'auteur de cette lettre ?
Inconsciemment Clavim regarda autour de lui, était-il observé ? Et s'il était suivi depuis Cydonia ?
Nüwang sortit le cydien de ses rêveries en tapant son sabot contre le sol, était-elle impatiente de prendre la route ? Clavim n'aurait pas sut le dire.
Il harnacha ses maigres bagages à la selle de sa monture avant de s'engager sur le sentier de terre battue dans la direction opposée qu'avait prit Xialan un peu plus tôt. Lorsque le camp et ses animations furent loin derrière, le conteur enfourcha sa monture qu'il lança au galop.

"Voyons un peu si j'en ai pour mon argent ! Montre-moi un peu de quoi tu es capable ma mignonne ! Direction Tamawa !"

[Désengagé]

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