Contes et Légendes du peuple Nùa

En des temps reculés, oubliés de toutes les races, alors que Lumière et Obscurité s’étaient accouplés pour donner naissance au Monde, les premiers hommes arrivèrent.
D’où provenaient-ils ? Nul ne saurait le dire aujourd’hui… mais la Nature, dont la sagesse est grande, laisse parfois sous-entendre qu’ils descendraient du Ciel lui-même.
Ils étaient grands et beaux, tous autant qu’ils étaient. Une peau couleur soleil les caractérisait, et des traits d’une extrême finesse. On dit d’eux qu’ils possédaient le savoir absolu, et que tout ce qu’ils touchaient ne pouvait qu’embellir.

Les Elus, voilà ce qu’ils étaient.
Ces êtres étaient venus peupler la terre qui deviendrait Azthia, dans un avenir lointain. Ils s’installèrent dans des endroits paradisiaques : des plages de sable fin parcourues sans cesse d’une bise fraîche, qui traînait derrière elle les odeurs de la haute mer, une chaîne de montagnes escarpées qu’on devinait au loin, de vastes plaines où les activités agraires étaient possibles.
Le territoire idoine pour ces hommes et femmes, aimés des Dieux.
Ils prospéraient, et on ne connu jamais époque aussi paisible que celle-ci. Il n’y avait ni chefs, ni lois chez eux ; jalousie et méchanceté ne germaient pas en leur cœur. On leur attribue des constructions somptueuses, d’une ingéniosité sans limite. Et, avec de la chance, il est possible que dans la forêt dense qui recouvre aujourd’hui leur Eldorado, vous trouviez une pierre, fossile d’une ère épique et révolue.

Révolue, oui. Les Elus ne sont plus.
Personne ne sait plus ce qui s’est réellement passé. Des histoires ont circulé, toujours différentes, toujours invraisemblables. Furent-ils rappelés par leurs Divinités ? victimes d’une catastrophe naturelle dévastatrice ? Ou, et le récit est plus macabre, ont-ils été anéantis par un autre peuple, d’au-delà les montagnes ?
Quoi qu’il en soit, le Temps aidant, leur existence fut oubliée des hommes. Aucune preuve de leur passage sur Azthia ne put être apportée. Et les Elus devinrent un mythe, que plus personne aujourd’hui ne conte, pas même les meilleurs troubadours.

Cependant, lorsque les Almers, il y a quelques années maintenant, ont ramené du mystérieux Sud des individus à la peau brunie ; les plus vieux arbres bruissèrent, les plus vieilles rivières s'agitèrent, comme au souvenir du moment où ils n'étaient que frêles boutures et minces filets d'eau.
Les Nùas –c’est ainsi qu’ils s’appelaient— devinrent peuple esclave. Quelques uns avaient été trouvés sur des îles inexplorées. Loin d’être arriérés, ils possédaient au contraire une organisation très développée, qui étonna les envahisseurs. De nature agricole, ils vivaient de la pêche et de la culture des bêtes et des plantes, et leurs connaissances dans ces domaines n’avaient rien à envier à celle des autres contrées. La plupart n’étaient pas très bavards, et on ne leur connaît ni Dieux, ni villes, ni histoire.
Et, aussi étrange que cela puisse paraître, il semblerait que les Nùas eux-mêmes aient oublié leurs origines...

Un manuscrit a été retrouvé chez un libraire Almer, il y a une dizaine d’années. Sa couverture est faite de cuir d’origine inconnue, incroyablement résistant aux intempéries et aux chocs. Je ne saurais vous dire à quel animal cette peau rouge carmin a pu appartenir, car, à ma connaissance, nulle bête en Azthia n’en possède de pareille.
Ici, le parchemin est utilisé pour les écrits communs, et le vélin pour ceux plus importants. Mais les pages de cet ouvrage sont aussi soyeuses que la plus délicate des étoffes. Le temps ne les a pas altérées, et l’on dirait que la peau dont elles sont fabriquées est aussi récente qu’il se peut l’être.
Tout œil, même amateur, aurait pu voir que recueil n’était pas ordinaire, et, quant à savoir ce qu’il faisait chez ce bouquiniste, ce-dernier prétend qu’il l’a trouvé dans une charrette qui revenait du Sud, avec une cargaison d’esclaves Nùas.
Qu’il dise la vérité ou pas, c’est un miracle qu’il soit tombé entre de bonnes mains, car ce trésor culturel ne sera jamais plus égaré. Incontestablement, ce livre avait traversé les âges sans se détériorer, vestige d’un passé révolu.

Il est écrit dans un dialecte bien étrange, formé de signes allongés, de points et de traits très stylisés. Réellement beau à regarder, mais bien plus compliqué à décrypter… Après être passé entre les mains des meilleurs conteurs, des spécialistes les plus compétents, personne ne put en traduire la moindre ligne. Le sujet de l’œuvre n’aurait su être trouvé, si, à la dernière page, une illustration n’avait pas été réalisée.

Haute d’une vingtaine de centimètres, et large d’une quinzaine, tracée semble-t-il, à la plume avec une encre noire, probablement celle d’un gros poulpe, elle est éblouissante de réalisme.
On y voit une montagne, avec sa faune, sa flore, ses neiges éternelles. Au bas du monticule, deux personnages, des enfants semble-t-il, en vue de leur petite taille. Ils s’apprêtent à commencer l’ascension, et à affronter les obstacles de la nature. En effet, une sente serpente entre les roches, et l’on aperçoit d’abord, sur une assez longue distance, des halliers piquants ; un peu plus loin, une étendue d’eau barre la route, et une ville engloutie semble reposer dans les profondeurs aquatiques ; et quasiment au faîte de la montagne, un brasier ardent d’où d’étranges bêtes semblent se consumer ou s’enfuir. Dans le ciel, au-dessus du pic, une brume volatile plane, et dans l’épais brouillard, des silhouettes apparaissent, curieuses par leurs formes, mi-humaine mi-animale.
Des divinités peut-être ? vénérées autrefois par un peuple disparu ? Possible, on ne peut émettre là-dessus que des hypothèses saugrenues. Sans jamais pouvoir en être certains, les spécialistes s’accordent à dire qu’il s’agit d’un livre de contes, peut-être issu d’un vieil héritage Nùa. Lorsque l’on connaît les mystères qui entourent encore ce peuple, on ne peut qu’enrager en sachant que le manuscrit contient sûrement de précieux indices quant à l’origine, la culture et l’histoire de cette communauté.

Voici retranscrit, un extrait qui accompagne l’estampe :

نأسف لعدم وجود نتائج بحث
مَشَى نَهَضَ بِـ سَبِيل كانَ مُرْهِق. أَلْ مَدَى الحَيَاة اِنْبَغَى اِنْقَضَى الزَّمَن.
ها هُوَ ذَا أَلْ حِوَال أَنْ جَمِيع اِنْبَرَى لِـ.

En saura-t-on plus un jour ?

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