[D-E] Faites l'amour pas la guerre (Pv Philéa, Eléa, Jelenna)(fini)

Être une princesse avait pas mal d'avantages en somme quand on y réfléchissait bien, mais encore fallait-il bien y réfléchir. Et pour l'heure, je n'avais pas vraiment envie de voir les bons côtés, c'était bien plus amusant, ou du moins ça permettait plus de remarques, de voir les aspects négatifs de la chose. Oui, princesse mon œil parce qu'encore une fois, j'étais obligée d'aller à je-ne-sais-quel réunion de conseillers ... obligée était le bon mot car ma mère avait insisté pour que je m'y rende. Bon, quelque part, j'aurais du me sentir honorée que ma présence soit ainsi requise mais non, l'idée ne me plaisait guère. Si j'appréciais qu'on reconnaisse ma valeur en tant que future dirigeante de Muria, je me languissais de ces réunions à n'en plus finir, d'autant plus que je ne connaissais même pas la nature de celle qui allait venir. Mais bon, si les caprices d'une princesse sont casse-pied, autant dire que ceux d'une reine sont pires et qu'on ne peut décemment pas y déroger comme ça. Etre princesse ne m'était pas favorable en ce jour.

Brefle, tout ça pour dire que ce fut avec regret que j'avais quitté Liyana la veille au soir, consciente qu'il me faudrait dormir un temps soit peu pour être en forme le lendemain. De quoi pouvait-on parler ? Sans doutes d'une nomination ou alors de la folie passagère qui avait conduit ma mère à accepter cette alliance douteuse avec les Elfes. Si je respectais Nalween et Philéa, je ne supportais pas les pactes fait à la va-vite ainsi, ou pire, l'idée qu'une guerre puisse un jour pénétrer les murs protecteurs de la cité et mettre en péril sa vie. Enfin, je n'étais pas reine et sans doutes que celle des Amazones n'avait pas l'intention de revenir sur ce sujet au vue de mon opinion là-dessus.
M'habiller fut rapide, tout autant que de me préparer pour la-dite réunion qui commençait déjà à me pomper l'air alors qu'elle n'avait même pas débuté. Mais bon, il fallait bien que j'intègre dans ma tête que mon futur peut-être rôle incombait que je fasse de la politique et donc, que j'assiste à tout ce genre de cérémonies. Ainsi, ce fut dix minutes avant le début de la discussion que je me retrouvais devant les portes de la salle menant au trône.
La dernière fois que j'avais pénétré dans cette salle, c'était pour y conduire une victime, pardon, un vieux réflexe, pour y conduire Feanaro, ce capitaine de la garde Elfe qui n'avait eu de meilleure idée que de nous proposer cette fichue alliance sans intérêt. Enfin si, justement, elle en avait puisque Philéa l'avait accepté, or elle n'acceptait que rarement les offres qui ne lui étaient d'aucune utilité. Quoi qu'il en soit, depuis, et un bout de temps était déjà passé, je n'avais plus remis les pieds dans cette pièce. En même temps, ce n'était pas plus mal. La porte émit un couinement familier en s'ouvrant sur la scène et je m'avançais pour prendre place.

~

Philéa, reine des Amazones était assise là, sur son trône, bien en face de la porte. Ou plutôt, c'est ce qu'il me sembla appercevoir, l'habitude sans doutes car la pièce, habituellement dénuée de table, en comportait momentanément une au centre. Ronde, chez les Amazones, on prônait l'égalité entre toutes, car après tout, nous étions toutes des soeurs. Autour de cette table se trouvait déjà assises Kiera, la Chef des Sentinelles, Lyne, la scribe personnelle de la reine et Elysia, la conseillère toute aussi personnelle de Philéa.
Ok, la réunion était un vrai conseil d'état major ma parole ! Bon, où était la principale intéressée ?

Sans attendre, je prenais place, prenant la peine de saluer chacune de mes soeurs ici présentes. Comme à son habitude, Kiera me sourit gentiment, à croire que notre récente "amitié" avait toujours été et je pris place à côté d'elle. Habillée en noir, je faisais tâche parmi le tableau des Amazones, surtout auprès de Lyne et Elysia. La première était en bleu pâle, une tunique simple mais qui lui allait comme un gant et mettait en valeur ses traits ... on aurait une fée-Lyne. Le tout était réhaussé par ses cheveux bruns qui courraient le long de ses épaules et dans son dos. Pour Elysia, le rouge semblait sacré, une robe couleur rouge sang était donc de mise, le tout relevé par quelques bijoux en or. Brefle, autant dire que ma tenue provocante à souhait et noir n'était pas trop dans le genre de la table. Mais bon, elles étaient habituées et quand bien même, je faisais ce que je voulais. Point barre.
Philéa entra dans la pièce. Habillée d'une robe immaculée relevée d'un liseré noir courant jusqu'au bas du tissu, certie de bracelets en or courant le long de ses bras et d'une couronne légère sur la tête, elle avait plus que l'allure d'une reine. On aurait pu croire à une déesse. Ses cheveux d'or étaient assemblés en une simple coiffure, bien plus sobre que le reste de l'ensemble. Le plus surprenant toutefois n'était pas l'accoutrement de ma mère non, j'avais l'habitude de ses robes jamais identiques, mais plutôt la petite silhouette qui se profilait dans son ombre. Lorsque la reine prit place autour de la table, la petite, qui n'était autre que Jelenna, suivie de près par Haiiro, la louve cendrée, vint s'assoir entre Lyne et moi.

Que faisait ma cadette ici ? A une réunion aussi importante qui plus est ?
Certes il était vrai qu'en rentrant, j'avais noté que trois chaises étaient vides mais j'avais plus pris ça pour une erreur ou plus simplement, un oubli. Mais non, la présence de la petiote était bel et bien la volonté de notre mère qui la regardait d'un air rassurant. Tu parles, comme si à sept ans on pouvait être rassurée de se retrouver au milieu des cinq personnes les plus influentes de Muria ! Non mais je vous jure. Enfin bon, chacun ses méthodes hein, je n'étais pas sa mère aussi. Mais Jelenna semblait plus curieuse de la suite - que moi ça c'était sur - qu'effrayée - elle me faisait mentir en somme -. Bon, c'était bien beau tout ça, mais on allait peut-être maintenant savoir pourquoi nous étions là non ?

Ayé, Philéa prenait enfin la parole pour annoncer :

" Bien, je vous ai réunies ici pour parler de l'alliance passée avec les Elfes. "

Oui, il y avait des jours où être princesse n'était pas mon fort. Des jours où comme ça, on avait beaucoup moins envie de se lever quand on voyait ce qui nous attendait ... La discussion allait être longue ... très longue. Et puis, que faisait Jel' dans tout ça ? C'était pas qu'elle n'était qu'une enfant mais presque !

Être princesse ...
Ce mot sonnait dans les oreilles de la petite Jelenna comme un mythe, une chimère que jamais elle ne serait capable de devenir. Ou plutôt, que jamais elle n'oserait devenir. Et pourtant, si on en croyait les autres, elle était déjà la petite princesse aux cheveux d'or. Celle toute sage qu'on rêverait d'avoir pour Reine. A croire que tous oubliait qu'elle n'était pas encore officiellement princesse, du moins pas dans sa tête, que Eléa était la véritable princesse de Muria, qu'elle seule monterait sur le trône de la cité pour les protéger. Ne voulaient-ils donc pas d'une telle princesse ? Il était vrai que son ainée était des plus étranges, peut-être même excentrique. Toutefois, à ce qu'elle voyait d'elle, Jelenna ne pouvait que croire en sa sœur. Croire et savoir qu'elle ferait une bien meilleure reine qu'elle-même et peut-être même, que Philéa ! Car Eléa était son contraire. Forte, courageuse bien qu'impulsive, intelligente même si elle prétendait et montrait souvent le contraire, belle, douée au combat, bonne cavalière et fine tacticienne malgré tout. Jamais Jelenna ne serait ainsi, ce n'était pas son caractère, pas sa nature, elle savait avoir hérité des gènes de son père. Cela ne la faisait guère souffrir, mais pourtant, aujourd'hui, Philéa, leur mère, lui avait demandé de l'accompagner.

Était-ce pour la pousser à devenir plus forte ?
Jelenna n'aurait su le dire malgré sa grande vivacité d'esprit, sa mère restait souvent un mystère pour elle. Philéa était capricieuse, elle le savait. En effet, la reine amazone faisait des différence, montrant plus d'affection à la gamine qu'à son ainée qui prendrait sa place. Pour autant, si l'éducation qu'elle donnait à Eléa était plus stricte, dénuée presque d'amour, elle était pleine de compassion et de confiance, ce que Jelenna n'avait pas. Mais peu importait, l'enfant amazone aimait sa mère plus que tout ou presque. Pour autant, Jelenna doutait de devenir ce que sa mère souhaitait pour elle, elle allait même jusqu'à craindre que sa sœur ne disparaisse, uniquement parce qu'il lui faudrait monter sur le trône à sa place ...
Mais aujourd'hui et pour l'heure, elle suivait l'impressionnante reine de son peuple dans les couloirs, en direction de la salle du trône. Sa mère, malgré tout l'amour qu'elle lui portait, l'intriguait, lui faisait parfois peur et surtout, l'impressionnait. Oui, elle rêvait ... Jelenna rêvait d'un jour être à la hauteur de Philéa, d'être digne d'elle et de sa superbe. Du haut de ses sept ans, la petiote se permettait d'espérer leur ressembler.

" Jelenna, ce que tu vas entendre ici ne devras pas être divulgué. Écoute, et retiens. "

Elle allait écouter, ça, elle n'en perdrait pas une miette car c'était la première fois que l'enfant était conviée à une réunion si importante pour l'avenir de son peuple. Lorsque la Dame entra dans la salle du trône, une table ronde siégeait au milieu de cette dernière. Autour de la-dite table, Eléa bien sur, mais aussi Kiera, Lyne et Elysia était assises. La première regarda sa cadette avec des yeux ronds et sa mère, pleine d'appréhension. Sans doutes devait-elle penser que la place de la petite n'était pas ici. Allez Jelenna, si tu avais quelque chose à faire pour l'heure, c'était bien de leur prouver que ta place était méritée.
Sans attendre, la jeune demoiselle alla s'assoir entre Lyne et Eléa. La présence de sa soeur l'apaisait ... dans sa robe immaculée, avec son fin cercle d'or pour retenir ses boucles blondes, Jelenna ressemblait à une prêtresse. Pure et innocente, voilà ce qu'elle était et, en effet, à entendre ce qui allait se jouer dans la pièce, sa place n'était peut-être pas ici. Pour autant, elle avait bien envie de savoir la suite, elle en était même excitée !

Cet elfe avait fait plané sur elles un bien lourd avenir à voir les visages obscurcis par l'annonce de Philéa quant au contenu de l'entretien à venir. Ainsi, la guerre se préparait dans l'ombre, cruelle et dévastatrice. Beaucoup de personnes mourraient sans doutes, peut-être même ses proches. Pour autant, Jelenna n'avait pas aussi peur qu'elle aurait du. Non, au contraire, elle attendait les réactions de sa soeur, peut-être parce qu'elle savait au fond d'elle que cette dernière la protègerait corps et âme, ainsi que Haiiro, toujours à ses côtés, cadeau d'Eléa. Ou peut-être encore parce que cette dernière ne laisserait pas la guerre venir aux portes de Muria ... Oui, le monde de Jelenna tournait autour de cette cité, de Philéa, Kiera et essentiellement, Eléa et Haiiro. L'idée même que ce monde puisse s'effondrer n'effleurait pas l'esprit enfantin de la gamine. L'idée même qu'une guerre atroce, pour l'heure encore au stade primaire de chimère, puisse venir troubler sa vie ne faisait pas encore chemin dans sa tête ...

La guerre se préparait ...
Serait-elle de ceux qui protégent ou de ceux qui fuient ?

" Bien, je vous ai réunies ici pour parler de l'alliance passée avec les Elfes. "

La voix de Philéa avait brisé le silence tendu qui avait suivi son entrée dans la pièce. Dans sa robe immaculée, ses cheveux retenus par un simple anneau d'or et ses bras emprisonnés par de multiples cercles d'or, la reine Amazone en imposait, c'était clair, mais pour autant, il était tout aussi évident que les convives se demandaient d'une part ce qu'elles faisaient là, pour un entretien si solannel et d'autre part, pourquoi la jeune princesse Jelenna était présente. Jamais de par le passé la cadette de la famille royale n'était conviée aux réunions, et encore moins pour celles de cette ampleur. Une fois le sujet de la-dite réunion évoqué, il était clair qu'elle n'avait donc pas sa place légitime ici aux yeux des autres, et visiblement, son ainée elle-même semblait reprocher cette décision à leur mère. Bon, il fallait commencer par le commencement, annoncer le sujet ne servait à rien puisqu'elles se doutaient toutes ou presque de quoi parlerait l'entretien. Allez, il fallait se lancer.

" Je vois que la présence de Jelenna en perturbent certaines. Peu importe, en tant que membre de la famille royale, en tant qu'Amazone, elle se doit d'être présente et de connaitre l'enjeu de la guerre qui se jouera bientôt. Ainsi, nulle ne pourra contester sa présence en ces termes. "

Un point de marqué.
Il était important que la gamine soit un peu au courant des affaires de la cité et, mieux ou pire encore, qu'elle cesse de croire que le monde était beau et gentil. Il lui fallait faire face à la réalité, aussi dure soit-elle et de manière aussi cruelle soit-elle. Brefle, sa présence ainsi justifiée, il n'était pas la peine de s'étendre plus sur le sujet. Il fallait se concentrer sur le réel sujet de l'histoire : leur alliance nouvelle avec les Elfes contre une guerre chimérique peut-être mais éventuellement probable quand on savait que les prédictions de la Prêtresse étaient toutes réelles et réalisables.
Pourquoi avait-elle choisi de faire cette alliance ?
Toutes ici devaient se poser la question, y comprit Eléa qui avait sans doutes déjà deviné qu'elle y voyait un intérêt. Sinon, pourquoi aurait-elle accepté si vite cette alliance chimérique pour une guerre prévue pour dans X temps ? Non, Philéa n'était pas vraiment convaincue par cet elfe, ce Feanaro, quand bien même elle faisait confiance à Nalween, par respect pour son prédécesseur, pas plus convaincue non plus par cette hypothétique guerre menée par un peuple éteint depuis des années. Depuis bien avant sa naissance mais quant bien même, cette guerre ,cette alliance auraient un avantage en temps voulu, si temps voulu il y avait. Mais pour l'heure, il fallait expliquer son choix, montrer que tout était plus ou moins prévu, qu'elle n'avait pas pris les choses à la légère ...

" Comme je le disais, je vous ai réunies dans l'unique but de parlementer sur cette alliance. Pour celles l'ignore encore, je n'ai pas conclu d'accord à la légère avec les elfes. Dans cette guerre, aussi hypothétique soit-elle, tout le monde sera convié. Ceux qui refuseront périront les premiers, aussi, il m'a paru utile de nous mettre du côté des vainqueurs, ou du moins, de ceux qui avaient le plus de chance de remporter la victoire. "

La reine Amazone se tut, laissant ses arguments pénétrer la conscience de chacune, lisant sur leur visage tantôt l'incompréhension, le doute ou encore ... sans commentaire en fait, elle savait déjà ce qu'Eléa pensait de la chose, mais sa présence était nécessaire. Sa fille aussi avait un rôle à jouer dans l'histoire. A observer Kiera, Philéa sentait que celle-ci cherchait déjà à répondre aux questions techniques qu'une guerre engendrerait pour Muria. Quant aux deux autres, elles attendaient, visiblement troublées.

" Il va sans dire que ce qui sortira d'ici ne devra être divulgué qu'en temps et en heure. Mais passons ce détail et poursuivons. Cette alliance disais-je, permettra également d'obtenir un jour la protection de nos amis elfes. Il ne faut pas nous croire invincible, chaque jour, d'avantage de personnes vont à la recherche de notre cité, et toutes les aides nous serons utiles le jour venu de notre guerre. Celle qui opposera Muria et sa cité aux autres ... "

Voilà, c'étaient ici quelques uns de ses arguments les plus convainquants, les autres étant pour le moment encore trop personnels pour être révélés. D'autant plus qu'elle ne les confieraient sans doutes qu'à Kiera ou Eléa ... pas plus. Pour l'heure, elle attendait juste la réaction de ses convives, persuadée que discussion il devait y avoir. Des oppositions, des idées ... elle s'attendait à tout et était parée à tout. Elle avait pris sa décision et savait que c'était la bonne, quant bien même elle mènerait Muria à une déchirure ou pire, à sa perte ... Alors, qui prendrait la parole en premier ? Quelque chose lui disait que ce serait la jeune princesse, Eléa.
Car ici, dans ce conseil, toutes avaient été choisies. Jelenna pour sa naïveté et son innocence, pour les raisons expliquées plus haut, Eléa pour sa fougue, son parler franc, ses idées posées et sa fidélité à Muria, Elysia et Lyne pour leur fidélité, leur place et leur caractères, l'une protectrice, l'autre favorable au conflit, et enfin, Kiera pour le côté technique des choses. Maintenant, il ne restait plus qu'à discuter et quelque chose disait à la reine Amazone que ce ne serait pas aussi simple qu'elle ne l'espérait.

Je ne pouvais pas y croire.
En fait, si. Je savais que Philéa n'avait pas accepté cette alliance par hasard, mais l'entendre de sa bouche était différent que de se l'imaginer. D'autant plus que les raisons qu'elle avouait pour l'heure, j'étais en effet consciente qu'elle ne nous dirait pas tout aujourd'hui quant à ses autres motivations, sans doutes plus personnelles, étaient des plus ... ridicules à mes yeux. Comment pouvait-on décemment engager son peuple dans une guerre hypothétique et, si elle venait à se réaliser, un conflit qui décimerait la population de la cité. Nalween n'avait-elle pas parlé d'une guerre sans précédent ? D'une guerre sanglante et qui brulerait tout sur son passage, ou à peu de choses près ? Et elle qui nous disait comme ça, qu'elle venait de signer notre probable arrêt de mort. Avec le sourire en prime !
Je n'eus pas le temps de prendre la parole que déjà, Lyne me devançait, suivie de près par Kiera et Elysia. La première approuva le choix de sa reine sans plus de précision. La demoiselle était connue pour son gout de la guerre, qu'elle soit justifiée ou non, et pour son sens tactique des choses. Elle n'était donc là que dans l'unique but de conforter Philéa ou encore, de mettre en place une stratégie le temps venu, et, pour cela, il fallait bien qu'elle soit au courant et non pas prise au dépourvue. Jusque là, c'était logique. Elysia pour sa part, exprima quelques doutes quant à notre position à la fois très défendable et très dangereuse. Muria était dissimulée par la forêt, atout certes, mais si celle-ci venait à bruler, les Amazones seraient piégées et prises en étau ... n'était-ce pas un risque important à encourir pour un mythe ?

" Si guerre il y a, je ne pense pas qu'au vue de la géographie d'Azthia, nous soyons la première cité attaquée. Notre alliance nous demandera surement de nous déplacer, ainsi, nous protègerons les sœurs restées ici pour protéger les plus jeunes. "

Voilà, ma mère venait de balayer le premier argument en défaveur de sa décision. Elysia semblait sceptique mais elle ne poursuivit pas, se contentant d'attendre une réaction du reste de l'assemblée. Ce que Kiera fit sans attendre. La jeune femme avait beau être ma rivale de toujours, je ne pouvais m'empêcher de penser qu'un rôle tout aussi lourd que le mien incombait à ses frêles épaules. Oui, elle forçait le respect ... et je devais bien l'avouer. Pourtant, la Chef des Sentinelles ne semblait pas contre l'idée d'une guerre et la proposition d'accord entre les Elfes et les Amazones, bien au contraire. Elle débuta donc son discours :

" Je pense que cette alliance est toute aussi dangereuse qu'elle peut nous être profitable. Si l'on considère le fait que nous soyons appelées loin de Muria, cela protègera en effet la cité ... en revanche, il est probable, au vu du rêve de Nalween, que cette guerre décime notre population ... toutefois, ne pas agir serait sans doutes pire. Sur ce point, je suis tout à fait d'accord. En revanche, il faut penser que si nous avons à nous déplacer, il faudra prévoir les vivres, mais également le fait que nous serons peut-être confrontés au fait de devoir traverser des cités ennemies ou encore, de nous allier avec ces mêmes cités. "

Kiera avait parlé tellement calmement qu'on sentait presque l'atmosphère de la pièce s'apaiser. Pourtant, lorsque Philéa reprit la parole, le phénomène retomba aussi vite qu'il était apparu. Ce fut avec force que la reine Amazone avança les arguments suivants :

" J'y ai réfléchi. Il est évident comme tu le soutiens que nous devions participer à ce conflit s'il doit aboutir, comme le prédit la prêtresse, à un cataclysme. Nous connaissons toute le passé de ces terres, il ne serait profitable à personne qu'il se répète ... voilà pourquoi j'ai pris cette décision. Tu parles ensuite de vivres ... je ne pense pas qu'il faille se pencher sur ce problème en premier, bien que je connaisses ton attachement à la question technique du conflit, il faudra s'y pencher plus tard. Pour ce qui est des cités ... ennemies. J'y ai également pensé. "

Elle marqua une pause avant de reprendre de plus belle :

" Dans ce conflit, nous devrons tous nous allier sous peine de forfaiture. C'est ce que nous as fait comprendre l'elfe en tout cas et je pense que devant l'ampleur de la tâche, tous les comprendront. Si jamais il venait à nous en couter de nous allier à eux, nous obligerons les elfes à nous protéger. "

" Penses-tu vraiment qu'ils combattraient sur deux fronts ? " ne pus-je m'empêcher d'intervenir.

La discussion me fatiguait. Pourquoi la reine nous avait-elle conviée ici si ce n'était que pour la confirmer dans ses choix ? C'était idiot, elle n'avait pas besoin de nous pour savoir si ce qu'elle faisait était juste ou non. D'autant plus que l'atmosphère trop pesante jouait beaucoup sur mon comportement. Entre Elysia qui désapprouvait silencieusement sa souveraine, Lyne qui était excitée à l'idée d'un futur même improbable, conflit et Kiera qui émettait des doutes ... sans parler de Jelenna, apeurée par la situation que lui promettait sa mère. Merci du bazar dans ma tête !
Non, j'en avais marre, il fallait dire les choses ? Parfait.

" Je pense que cette alliance se retournera contre nous. D'une part parce que les autres cités qui viendraient à s'allier à Silmarie n'accepteront jamais notre présence. D'autre part, parce que si nous ne périssons pas sous les coups de cette armée fantôme, nous mourrons sous ceux des autres armées. Nous sortirons au mieux affaiblies de cette guerre chimérique ... et ce ne sera que profitable aux autres. "

" Pour autant que je le sache, tous sortirons affaiblis de cette guerre. Et comme je l'ai déjà dit, tous serons amenés à participer d'une façon ou d'une autre au conflit alors pourquoi s'inquiéter de savoir s'ils nous attaqueront ? "

" Penses-tu vraiment qu'une guerre puisse avoir lieu, une guerre de cette ampleur ? Crois-tu vraiment que tu pourras regarder tes sœurs mourir sans le regretter ? "

" Nalween est la prêtresse au même titre que tu es princesse, cela devrait te suffire, pour le reste, c'est le lot quotidien d'une reine et il semble pour l'instant, que tu ne sois pas encore capable de l'assumer convenablement. "

Paf.
Bah ouais, elle appuyait là où ça faisait mal. De toute façon, il était inutile de réfuter ce qu'elle avançait. A chaque argument contre, elle apportait un argument d'une logique implacable. Un serpent qui se mordait la queue ... en même temps, elle était habituée aux jeux politiques, à l'art de manipuler les foules et les mots. Inutile, malgré tout ce que je pouvais penser, je me révélais incapable de lutter pour le moment contre elle sur ce terrain là.

" Si cette guerre vient à voir le jour, sache que je te suivrais, mais je tiendrais également ma promesse. "

Voilà tout ce que je pouvais ajouter aux yeux d'une mère qui ne semblait pas être perturbée outre mesure d'engager ses filles dans une lutte qu'elles n'avaient pas choisi. Peu m'importait que le monde soit englouti, que l'on meurt ou autre, seule ma liberté comptait. Celle des autres Amazones avec elle ... sans parler de Jelenna.
La suite de la conversation se passa sans moi. Trop occupée que j'étais à réfléchir à ce conflit hypothétique comme au conflit interne qui m'animait. Peu importait que cette guerre n'éclate, il y a longtemps que c'était la guerre dans mon cœur de toute manière. Ce n'était pas ça qui me ferait peur. De toute façon, j'aurais beau être contre, avancer tous les arguments possibles et inimaginables pour défendre Muria, Jelenna et les autres, rien n'y ferait. Philéa avait décidé, s'était engagée et parlait maintenant stratégie. Point final ...

La reine et son assemblée se levèrent sans que je ne m'en rende vraiment compte, perdue que j'étais dans mes pensées. Il me faudrait lire le ''rapport'' de ce rendez-vous pour en savoir plus. Pour l'heure, il me fallait parler à Jelenna ... à moins que ce ne soit l'inverse. J'avais en effet remarqué que la gamine était perturbée depuis le début de la conversation. Philéa sortit, suivit des trois autres sans que je n'y prenne garde. Qu'avaient-elles décidé pour notre peuple ? De toute façon, ce ne pouvait être que le mieux du pire dans la situation actuelle. Philéa ... parfois était un grand mystère à mes yeux. Là encore, qu'elle puisse faire confiance et suivre aveuglément les idées d'une soit disant prétresse me perturbait mais je n'avais pas encore la possibilité de faire quoi que ce soit contre ou de la faire changer d'avis. Bref, je me répétais ...

" Eléa ... cette guerre va vraiment arriver ? "

L'innocence parlait avec des mots trop durs.

[ Bon de toute façon, je ne vais jamais arriver à faire ce que je veux XD ]

Jelenna avait tout écouté de la discussion. N'en perdant pas une miette, son impatience et sa curiosité s'étaient vite muées en peur et en incompréhension. Pourquoi Philéa, sa propre mère qu'elle aimait tant, avait décidé de l'amener ici si c'était pour lui annoncer la fin proche de toutes vies sur terre ? La petite ne comprennait pas l'intérêt de tout ça, encore mieux, elle ne savait pas ce qu'on attendait d'elle. Ce que lui résevait sa position. Car la reine l'avait précisé, en tant qu'héritière potentielle, si son ainée venait à disparaitre, Jelenna était censée être là, censée assister à tous les conseils. Mais pour l'heure, l'enfant n'en voulait pas de ce privilège. On ne parlait que mort et désastre futur, même si la-dite guerre en était encore de l'ordre du rêve de la Prêtresse. Pas question qu'elle en entende plus ... oui, la gamine était terrorrisée, non pas à l'idée de cette guerre en elle-même, mais plus à l'idée de perdre ce qui faisait sa vie. Les gens qu'elle aimait, la cité qui la protégeait jour et nuit, la forêt qui l'avait vu naitre ... tout. Le contact d'Haiiro rassura la petite princesse bis un court instant.
Ce fut à ce moment précis que Eléa prit la parole, visiblement contre cette guerre qu'elle nommait de chimérique. Mais Philéa était têtué, Jel' le savait mieux que quiconque ou presque. Elle était même persuadée, du haut de ses sept ans, que sa mère n'avait réunie ici que les personnes qui lui confirmerait qu'elle avait eu raison. Car même si certaines émettaient des doutes, à l'image de la scribe ou de sa soeur, elle les balayait d'un revers de la main pour ensuite mieux affirmer ses positions. Philéa était maitresse dans l'art de manipuler les gens, dans l'art de la politique.

La discussion se poursuivie, houleuse entre la mère et la fille. Lorsque tout fut dit, Philéa se concentra sur les trois autres membres de son jury pour ensuite en conclure que tout serait prêt à temps mais qu'aucune autre Amazone ne devait être au courant de ce qui se jouait en ce moment. Facile à dire quand on est adulte, mais quand l'enfance nous berce encore dans ses bras d'innocence, on ne tient pas aussi facilement sa langue sur un sujet qui nous effraye voire nous terrorise. Perdre tout ce qu'elle avait ici ... Jelenna n'arrivait pas à se faire à cette idée, même si elle ne relevait encore que de la simple hypothèse. Pour autant, elle comprenait aisément l'attitude de sa mère face à cette menace, et encore plus celle de sa soeur, qui semblait partager peu sans faute sa vision des choses.
La reine Amazone sortit tandis que la jeunette était toujours perdue dans ses pensées. Qu'en serait-il de sa soeur et de sa mère qui partirait le jour venu, rapière et fouet à la main ? L'image aurait pu faire sourire la gamine en temps normal, mais pour l'heure, elle n'avait pas le coeur à rire, plutôt ... à pleurer. Se retenant de toutes ses forces, elle attendit que toutes aient quitté la pièce. D'ailleurs au passage, elle se demandait ce que son ainée avait voulu dire par la promesse ... celle de la protéger coûte que coûte ? Non, personne à part les deux soeurs n'avait connaissance de cette promesse. C'était la leur, celle qu'elles se juraient tous les soirs, quand Jelenna allait en cachette dormir auprès d'Eléa. Impossible ! Qu'était-ce alors ?
Bien qu'elle cherche, Jel' ne trouva pas la réponse. Son esprit était embrumé par cette annonce cruelle que son monde allait bientôt s'écrouler. Péniblement, s'empêchant à tout prix de pleurer, l'enfant articula tout bas :

" Eléa ... cette guerre va vraiment arriver ? "

Elle craignait que son ainée ne lui dise oui. En réalité, elle craignait toute réponse de sa part, sachant pertinnament, ayant appris son histoire d'Azthia, que les rêves de la grande Prêtresse se réalisaient toujours. Mais comme toute enfant qui se respecte, elle avait juste besoin qu'on la rassure, qu'on lui dise "ce n'est rien, ce n'est qu'un cauchemar, rien ne peut t'arriver ici". Même si ce n'était qu'un mensonge, même si elle le savait pertinnament, il fallait qu'elle l'entende, au moins pour se sentir mieux maintenant. Pour la suite, on verrait bien. La demoiselle posa son regard bleuté dans celui de sa soeur, espérant, tandis que sa main parcourrait le pelage de la louve à ses côtés ...

Philéa ne les avait pas réunies par hasard.
En effet, elle s'attendait à ce que Lyne, la fière et forte Amazone qui s'illustrait plus sur les champs de batailles que sur les relations humaines ou autre, soit de son côté. Mieux, la réaction de celle-ci la confortait dans son idée qu'elle avait eu raison d'accepter cette alliance. Elle s'attendait également à ce que Elysia émette des doutes sur son idée, doutes qu'elle balaya facilement, d'un revers de main. Pour ce qui était de Kiera, la jeune Chef des Sentinelles serait forcément de son côté, quant bien même émettrait-elle des doutes, la reine Amazone savait qu'elle n'aurait aucun mal à la convaincre. Restait Eléa, sa fille ainée, qu'elle avait fait venir ici dans le but d'exprimer toutes les oppositions qu'on pouvait lui présenter, ce que bien sur, sa progéniture ne s'empêcha pas de faire. Mais là encore, la femme aux cheveux blonds n'eu aucun mal à décourager les arguments avancés par sa fille.
Tout était parfait.

Même Jelenna ne disait plus rien.
De ce côté-ci, Philéa était soudain moins sure d'elle. N'avait-elle pas fait une erreur en emmenant à cetet réunion secrète sa cadette ? A sept ans, il était difficile de se rendre compte de la portée des choses, de ce qu'elles valent et de ce qu'est une guerre. Pour ce dernier point, la reine en était sure, la gamine savait ce que c'était, ce que le mot signifiait et surtout, impliquait. C'était facile de le savoir à voir la réaction de la petiote. Au final, non, elle n'avait pas eu tord de la mener ici. Après tout, Jelenna serait peut-être amenée un jour à occuper le trône ou, si Eléa survivait à toutes les épreuves que le destin s'acharnait à mettre sur son chemin -ou le MJ - du moins serait-elle amenée à remplier un poste important. Peut-être chef des Sentinelles quand on voyait son talent au tir-à-l'arc. Dans tous les cas, elle se devait de s'endurcir, de cesser de croire au père noël et aux fées. Elle devait voir les choses comme une souveraine en puissance et plus comme une enfant qu'elle était pourtant encore.
Philéa craignait en réalité que sa cadette ne devienne comme son père. Faible et soumise à toute proposition qu'on lui ferait, et ça, pour son bien comme celui de Muria, c'était inconcevable. Impossible même, autant la tuer de ses propres mains que de laisser la cité courir à sa perte avec elle. Du coup, là encore, la reine ne regrettait pas sa décision. Au fond, elle faisait comme tout le monde des erreurs, mais aujourd'hui, elle était convaincue que non. Point final.

La réunion prit fin plus vite que ne l'avait espéré la jeune femme.
Elle se leva tranquillement, faisant signe à Kiera et Lyne de la suivre, tout en intimant à toutes que ce qu'elles venaient de se dire devait rester entre elles jusqu'au jour J. Pour l'heure, la discussion était close, elles devaient toutes réfléchir dans leur coin à la meilleure stratégie, aux éventualités de la guerre, à la question de la nourriture, de Muria etc. Pour sa part, Philéa avait encore à faire, il lui fallait préparer sa visite à son cher mari ... ce dernier ayant eu la bonne idée de rencontrer Eléa, il n'était pas question qu'il la récupère, pas maintenant où le trône n'avait que besoin de sa présence pour la suite. Pas question !
La jeune femme quitta la pièce d'un pas décidée. Contente que la réunion se soit si bien passée, elle se dirigea vers ses appartements en compagnie de Kiera et de Lyne. Sur le chemin, elles parlèrent en conciliabulle de certain détails de l'alliance sur lesquels il serait bon de préciser les choses. La reine écouta d'une oreille entendue puis toutes les trois disparurent dans la chambre de la souveraine. La porte se ferma derrière elle pour une nouvelle réunion des plus secrètes ...

[ Désengagée ]
[ Désolée, je n'ai pas le temps de faire plus long et de faire mieux T^T ]

La question était posée tellement naïvement.
Pourtant, grâce à ce charmant don hérité de mon père, que ces idiots de Templiers nommaient "L'Esprit", je ne pouvais que ressentir de façon certaine la crainte, non, la terreur, qui émanait du corps de ma frêle petite sœur. Malgré la bonne figure qu'elle essayait de montrer devant moi, tout dans son comportement me démontrait le contraire. Elle était tétanisée de peur, comme toute gamine de sept ans devait l'être à l'annonce de la fin des temps. Je maudissais ma mère en cet instant pour avoir convié Jel' à cette réunion. Réunion O combien inutile étant donné qu'elle avait déjà décidé que nous participerions à cette guerre, quoi qu'il advienne. Je ne le comprenais plus vraiment en ce moment ... pourquoi vouloir faire de sa cadette ce qu'elle ne serait visiblement jamais ? Et puis, à son âge, on ne pouvait pas lui en vouloir d'être peureuse et chétive. Mais bon, Philéa était comme ça, je ne la changerais pas et bien d'autres avant moi s'étaient brisé contre le mur qu'elle représentait. Le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais revenons-en à Jelenna. La petite gardait ses grands bleus ouverts et fixés sur moi, tandis que sa main caressait machinalement le dos de Haiiro, surement pour chercher du réconfort ou de l'assurance. Que devais-je lui dire ?

La peur qui émanait de son esprit commençait à parasiter le mien.
Comment mentir à une gamine de son âge ? Comment lui dire "tout ira bien" tout en sachant que ce n'était pas assuré ... car au fond de moi, je ne pouvais que croire et être persuadée que cette guerre adviendrait. Après tout, jamais le rêve d'une Prêtresse ne s'était révélé erroné ... celui-ci n'échapperait donc pas à la règle. Non, il fallait trouver quelque chose. Dire la vérité à cette enfant qui représentait à peu près tout dans ma vie ou lui cacher une vérité qu'elle savait être vraie ? Car il était clair que sa question ne demandait que confirmation de sa peur. La petite ne craignait visiblement pas de mourir, mais de voir disparaitre ce qui la constituait. Les murailles douces et rassurantes de Muria, les Sentinelles, ses amies, sa famille ... voilà ce qui la terrorisait plus que tout, c'en était tellement touchant. Oui mais voilà, que devais-je dire ? Je n'étais ni mère ni rien, juste une pauvre sœur tout aussi apeurée par le futur que ma cadette. Un futur de sang et de haine n'était jamais à espérer, quand même les adultes le craignait, comment pouvait-on assurer aux enfants que le lendemain serait aussi doux que la veille ?

" Cette guerre aura lieu. "

C'était une réalité qu'il ne fallait pas cacher.
Ici bas, chacun est libre de choisir son destin, chacun est libre de choisir s'il sera lâche ou assez fou pour s'opposer à la menace invisible. Ici bas, même une enfant innocente mêlée malgré elle aux affaires des adultes avait le droit de savoir, le droit de ne pas se voiler la face. C'est pourquoi j'avais répondu aussi franchement à Jelenna, sachant pertinemment que la petite vivrait jusque là dans une peur plus grande. Celle d'attendre.
Dire qu'elle ne participerait pas à cet affrontement, je ferais tout pour ça du moins. Triste spectatrice d'un futur sans lendemain ... Au moins, elle saurait à quoi s'attendre. Pour autant, ma réponse n'évoqua pas dans l'esprit de la gamine les sentiments que je pensais y trouver. La peur était toujours là, forte et sauvage, mais un autre sentiment émergeait. Le courage, celui de voir les choses en face, de savoir que tout n'était pas perdu d'avance, que tout changerait peut-être mais qu'elle pouvait aussi participer à ce changement, à son échelle. Jelenna était-elle plus forte que je ne le pensais ? Mes yeux se posèrent sur celle à qui je donnerais sans hésiter ma vie car, si mon allégeance allait naturellement à ma cité, Muria passerait toujours après Jel'. Tandis que ses prunelles azurées se posèrent sur les miennes, je continuais, pensive :

" Elle aura lieu Jelenna, mais j'ai fait une promesse. Quoi qu'il advienne, Muria pourra bien brûler que je ne te laisserais pas mourir. Rien ne t'arrivera tant que je pourrais te protéger. Ce n'est pas un futur sans lendemain, pas encore. "

Un pâle sourire que je voulais rassurant se dessina sur mes lèvres tandis que je voyais les traits de ma cadette se détendre. Un petit peu, pas grand chose, mais ma réplique l'avait ne serait-ce que rassurée un peu. C'était le principal. Au fond, je n'avais pas menti, cette promesse, je la tiendrais, je l'avais assuré devant les elfes comme devant la terrible Philéa. Philéa d'ailleurs ... que ferait-elle pour préserver les vies de celles qui ne pourraient se battre ? Sa précieuse petite dernière la première ? Que ferait-elle pour protéger Jelenna le jour venu ? Il était idiot de penser que devant une telle armée, toutes survivraient, les alliances auraient beau y faire, cela ne serait qu'une faible chose dans la balance de la vie. Cette armée qu'avait vu Nalween était effrayante, sans âmes, alors à quoi bon au final essayer de faire la forte, de promettre ce que personne ne pourrait réaliser ? Oui mais voilà, devant les yeux d'une enfant innocente, seule la vérité nue comptait. Dans ces yeux effrayés, bercés par la naïveté enfantine des gamins de sept ans, on pouvait lire le courage, la détermination, mais plus que tout, l'espoir.
Rien que ça me suffisait à croire au lendemain, à pousser la chance. De toute façon, je connaissais mes priorités, et tant pis pour le reste.

" Tu ne risques rien, ne t'en fais pas. J'aurais envie de te dire que cette guerre n'arrivera pas, je l'espère, même si au fond, la Grande Prêtresse n'a jamais eu tord quant à ses rêves. Mais ... quand bien même, je suis ta grande sœur, tu ne craindras rien, je te protègerais. Ce mal viendra à nos portes, mais c'est ensemble que nous le repousserons, nous n'avons pas le choix. Alors ne crains rien, et continue de croire. "

Et voilà, je devenais complètement tarée.
C'était dingue comme Jelenna avait de l'influence sur le cœur des gens. Peut-être même plus, elle avait l'influence de l'espoir, elle aurait fait croire à un mourant qu'il allait survivre. Ses prunelles reflétèrent quelques doutes avant de finalement détourner leur regard. Jelenna contemplait Haiiro lorsqu'elle murmura :

" J'ai peur ... "

C'était compréhensible.
Mais je ne pouvais pas faire plus. Ce n'était pas mon rôle, je n'étais pas sa mère, mais à voir la sienne, il n'était pas plus recommandable que cette dernière agisse en fait. Mieux valait sans doutes ma maladresse que celle de Philéa. Perdue dans son monde d'adulte, la reine amazone avait toujours fait passer Muria avant ses priorités familiales. Elle avait toujours fait passer le groupe avant la famille, même si cette tendance s'était plus ou moins effacée avec la naissance de Jelenna, une vraie amazone née entre les murs de la cité. Oui mais Philéa n'en restait pas moins la même et au fond, je me demandais ce qui était le pire, cette alliance foireuse qu'elle avait pris à la légère et pour des raisons plus que personnelles ou son attitude envers nous, ses propres filles. Il me paraissait évident qu'il me faudrait réfléchir plus que sérieusement à la protection de la petiote. Un choix devrait être fait ...

" Jel', j'ai quelque chose à te dire. "

C'était égoïste, mais j'avais besoin de me confier à mon tour. Réaction humaine face à des sentiments et des évènements qui m'échappaient. Jelenna était depuis toujours et resterait sans doutes à jamais ma confidente la plus fidèle. Du haut de ses sept ans, elle faisait toujours preuve de calme pour me répondre et m'écoutait avec patience. Sa présence en elle-même était rassurante et apaisante. Aujourd'hui, malgré la peur qu'elle ressentait déjà, il fallait que je lui parle ... cette dernière mission ne m'avait pas laissé indemne, quelqu'un devait savoir et qui de mieux que ma petite sœur adorée ?

" J'ai retrouvé mon père. "

[ Avancée sur la mission avec accord de Jacen. ]

Terrorisée.
Qu'est-ce-qu'une gamine faisait ici, au beau milieu de ces adultes qui ne pensaient qu'à guerroyer, qu'à s'entre-tuer pour un morceau de terre ou un morceau de viande. Franchement, qu'est-ce-que Jelenna faisait au milieu de ces notions abstraites qu'étaient la violence, la mort ... pourquoi ne pouvait-on pas lui offrir un futur sur ? Pourquoi ne pouvait-on pas lui dire " ne t'en fais pas, tout ira bien " à elle aussi ? Non, la gamine ne comprenait pas comment sa mère avait pu faire s'effondrer en quelques mots son univers qu'elle pensait pourtant si solide, ancré à jamais dans son esprit. Et maintenant, même sa chère sœur ne pouvait pas la réconforter. Pourtant, il était clair qu'elle essayait de le faire de toutes ses forces, malgré sa maladresse toute aussi évidente. Eléa semblait chercher les mots, ceux qui, contrairement à ceux de la reine Amazone, apaiseraient le coeur troublé de sa cadette. Oui mais voilà, après bien des tergiversions, la demoiselle s'était décidée à donner la vérité, aussi dure et crue soit-elle, à la petite archère en puissance.

Son monde s'écroulait.
Au fur et à mesure que Eléa enchainait les phrases de son monologue, un pan entier du monde de sa sœur tombait au sol, réduit à néant. En somme, même son ainée ne lui offrait qu'un futur incertain, une mort toute aussi incertaine et une vie sans joie. Super ! Encore mieux que ce que Philéa avait décrit quelques minutes ou quelques heures plus tôt. Franchement, c'en était presque risible, à croire que les deux faisaient la course pour voir qui arriverait le plus vite à enterrer Jel'. Oui mais voilà, la petite ne pouvait pas leur en vouloir. La souveraine avait ses raisons, elle n'agissait pas pour elle mais au nom de son peuple, en leur nom. Aussi, il était quasi-impossible de lui en vouloir de les mener au fil des mois à une mort certaine face à l'armée sans âmes qui se lèverait bientôt devant eux. Quant à Eléa, opposée visiblement à sa génitrice sur ce point, Jelenna était persuadée qu'elle tiendrait sa promesse, qu'elle donnerait sa vie pour sa cadette, quant bien même son allégeance envers sa cité, envers Muria, l'aurait obligé à la laisser disparaitre. Elle l'avait dit elle-même, quant bien même la cité Amazone brulerait, elle l'abandonnerait volontiers pour la vie de sa sœur. Ça, Jelenna n'en doutait pas une seule seconde, bien loin de là, elle se surprenait encore à confier tous ses espoirs en sa sœur.
Jelenna était complètement perdue entre les propos de Philéa, ceux d'Eléa et les propres réflexions qui l'habitaient. Comment faire le tri quand un bordel sans nom quand on avait que sept ans ? Et bien voilà, on ne le faisait pas. Jelenna était complètement paumée dans ses pensées lorsqu'une phrase d'Eléa la ramena à la réalité.

" Me protéger ... Eléa, si je viens à être en danger, ne viens pas me chercher, quoi qu'il arrive, reste fidèle à Muria, j'ai la conviction que ma vie vaut moins que la cité, que nos sœurs. Promets-le moi, si je viens à mourir, ne me regrette pas, ne me cherche pas si je viens à être capturée, si je viens à sortir de ta vie, laisse-moi sortir. "

La petite se tut.
En réalité, elle avait parlé les larmes aux yeux, consciente qu'elle demandait un énorme sacrifice à Eléa et qu'elle-même ne voudrait pas, le moment, si ces éventualités se produisaient, que sa sœur l'abandonne. Mais la fidélité de la jeune Amazone allait à sa citée bien plus que pour son ainée. Pour autant, elle en était persuadée, à la place d'Eléa, elle ferait de même, elle placerait ses propres intérêts avant ceux de la cité, telle une traitre, juste pour sauver ce qui lui restait de son univers. Cette promesse, elle le savait déjà, quant bien même la princesse la prendrait, elle ne la tiendrait pas. Mais peu importait, Jelenna voulait juste la protéger à son tour, du haut de son petit mètre soixante.
La jeunette ferma les yeux sans rien dire de plus. Elle ne souhaitait pas entendre la réponse de sa sœur, si réponse il y aurait. Jel venait de jouer les capricieuses, non, elle avait juste essayé d'être un peu plus courageuse que d'habitude, de se raccrocher à quelque chose, à Eléa, à celle qui depuis sa naissance, avait plus fait figure de mère, de confidente, d'amie éternelle que de sœur. En agissant ainsi, tout en sachant pertinemment qu'Eléa ne promettrait rien, tout en sachant qu'elle ne voulait pas qu'elle le lui promette, qu'au contraire, si elle venait à disparaitre, elle voudrait que la princesse la cherche, retourne le monde entier pour elle. Oui mais en agissant ainsi, la petite agissait égoïstement pour tenter de préserver le peu d'amour qu'il lui restait dans ce monde, celui de sa sœur.

Elle aurait pu tergiverser encore longtemps sur la question lorsqu'une phrase, une seule, d'Eléa, la tira de ses pensée.
De quoi ? Elle avait quoi ? Un ... son ... père ? Mais comment ? Où ? Qui ? Les questions se multipliaient dans la tête de l'enfant tandis qu'une nouvelle partie de sa vie s'effondrait. A croire que ce n'était pas son jour, même si Jelenna n'en était pas encore à penser cela, beaucoup trop naïve et profondément gentille qu'elle était. Comment se faisait-il que la nouvelle troublait à ce point Eléa, au point que sa sœur doutait qu'elle était heureuse de la situation présente ? Et puis, qui était ce père qui avait disparu depuis si longtemps ? Après tout, Jelenna avait toujours ressenti le besoin de sa sœur d'avoir une figure paternelle, ce manque plutôt. Alors pourquoi n'avait-elle pas l'air heureuse mais plutôt soucieuse ? Jelenna ne comprenait plus, en même temps, elle ne comprenait pas grand chose aujourd'hui. Et puis ce mal de tête ne l'aidait en rien ...
La petite regarda son ainée droit dans les yeux, cherchant une vérité, plus qu'elle n'avait cherché celle concernant leur discussion première sur une éventuelle guerre. Pourquoi tout ceci maintenant ? Et ho Eléa, tu devais être heureuse non ? N'était-ce pas ton rêve d'avoir un père ? De le retrouver pour comprendre pourquoi il t'avait abandonné ? N'était-ce pas pour cette raison que tu détestais autant les hommes alors que se passe-t-il ? Voilà les questions que Jelenna aurait voulu poser tout de suite à sa sœur, pour autant, elle s'en garda bien. Si Eléa avait parlait, c'était là encore une preuve de confiance qu'elle lui offrait, Jelenna ne pouvait donc pas se permettre d'être à nouveau égoïste et de ne penser qu'à la satisfaction de sa propre curiosité. Non, il fallait réfléchir autrement, mais ce mal de crâne, persistant depuis quelques jours déjà, l'empêchait de vraiment profiter de ses pleines capacités intellectuelles.

" Eléa ... es-tu sure de toi ? "

Pour le moment, elle se contenterait de ça.
C'était en réalité la seule justification qui venait à l'esprit de la petite quant à la réaction si étrange de sa sœur à cette nouvelle. A défaut de pouvoir lui demander pourquoi elle était malheureuse alors que sa volonté première avait abouti, elle se contenterait de savoir si la jeune fille était sure d'elle. En même temps, Jelenna souffrait réellement de son mal de tête depuis que la jeune fille lui avait fait cette révélation. Que se passait-il ? Pourquoi tout le monde s'acharnait à détruire un à un les fondements de son existence ?
Pour autant, malgré le mal inconnu, malgré la surprise, la joie mêlée de crainte vis-à-vis de la nouvelle, la présence de sa sœur, de Haiiro à ses côtés, malgré la guerre qui prenait une part importante dans sa tête, malgré tout, Jelenna se força à rester concentrée sur ce qu'allait lui avouer sa sœur ainée.

J'ouvris de grands yeux.
Il était vrai que j'étais préoccupée par le sort de mon avenir mais plus particulièrement de celui de Jelenna. Et ce, depuis sa naissance et d'autant plus maintenant qu'une guerre inévitable s'annonçait à nos portes. Comment Jel pouvait-il me demander de l'abandonner en cas de problème ? Il fallait l'avouer, souvent, la petite princesse bis me surprenait dans ses réactions. Pensait-elle sincèrement que sa vie valait moins à mes yeux que la cité ? Que le monde lui-même ? J'aurais donné ma vie, mon sang, Muria et toutes ses amazones pour elle. Aujourd'hui même, je cherchais un moyen de la protéger alors … comment pouvait-elle croire que je l'abandonnerais dans un moment où elle aurait le plus besoin de moi ?

« Jelenna, je suis ta sœur et, en tant que telle, je te protègerais quoi qu'il arrive. Ta vie vaut plus que n'importe quelle pierre, qu'elle soit de Muria ou d'ailleurs. Cesse de dires ce genre d'idioties. Laisse le monde des adultes et ces décisions de ce genre à notre mère. Je ne tiendrais pas cette promesse, je suis désolée. »

J'avais peut-être parlé d'un ton trop dur … peu importait, la petite devait savoir que je ne pouvais pas lui assurer ce genre de choses. D'ailleurs, rien qu'imaginer la perdre me mettait mal à l'aise. Je savais depuis bien longtemps qu'il était malsain, pour elle comme pour moi, d'entretenir une relation aussi fusionnelle, mais il m'était impossible de faire autrement. N'ayant pas de père et disons-le, une mère plus qu'absente du fait de ses fonctions, j'avais construit mon univers autour du seul être qui avait su m'accepter telle que j'étais : Jelenna. Dans les yeux de ma sœur, j'avais vu ce que personne d'autre avant n'avait su me montre : de la fierté et de l'amour. C'était idiot, stupide et tout ce qu'on veut, mais ça m'avait sauvé bien des fois. Aujourd'hui encore, malgré l'annonce que je venais de lui faire à propos de mon père, je savais au fond de mon cœur que la petite garderait cette place privilégiée en moi.
Non.
Il me serait impossible d'imaginer la perdre ou de lui promettre de la laisser mourir sans la regretter. En tant que soeur comme en tant qu'amazone. Impossible. Tant pis si cela allait à l'encontre de sa volonté, j'étais la plus grande, j'avais le pouvoir de décider qu'elle n'avait pas. Et puis … rien ne lui arriverait, je ferais en sorte que rien ni personne ne puisse l'atteindre. Ma première idée avait été de la placer en lieu sur, loin de Muria … mais où ? C'était durant ma mission que l'idée était parvenue à mon Esprit : si vraiment ce Jacen était mon père, il avait une sacré dette envers moi, d'autant plus que je ne comptais pas vraiment lui pardonner et encore moins le laisser en vie. Donc soit il protégeait ma sœur, soit il mourrait. Je savais que les Templiers avaient des pouvoirs différents des gens normaux, et pour se faire, je comptais bien les mettre à profit pour Jelenna. Oui mais voilà, comment ?
Les lois de Muria étaient claires là-dessus : Jelenna devait rester un secret, du moins jusqu'à ma mort ou celle de Philéa. Personne ne devait savoir qu'elle existait et encore moins les Templiers en qui notre mère faisait peu confiance. Sans parler que la petite n'avait pas le droit de quitter la ville … alors oui, j'étais face à un dilemme, le même que celui évoqué précédemment : où allait ma loyauté ? A ma famille … ou à ma citée ?

La question n'était pas si simple.
J'étais princesse et en cela, totalement dévouée à Muria. Je l'avais prouvé bien des fois, mais quand bien même, Jelenna était ma petite sœur, mon trésor. Celle qui me sauvait des tourments de mon esprit … La voix de la petite coupa net ma réflexion.
Sure de moi ?
Ah la la la, si elle savait. Non, je n'étais pas sure de moi. C'était tout le contraire. Mais au moins, pour ce Jacen, je pouvais lui apporter une réponse. Au vue des arguments développés par cette Asora, qui visiblement ne me portait pas dans son cœur et n'avait donc, de ce fait, aucun avantage à tirer de la situation qu'elle m'avait révélée, il était clair que j'étais la fille de ce Templier. Du moins, les probabilités étaient plus que … probables. Je me levais et, devant le regard étonné de ma soeur, je m'accroupis à sa hauteur. Les yeux dans les yeux, je pouvais lire toute la peur, la joie et l'appréhension mêlée de la gamine. Elle était courageuse. Elle ne m'avait demandé de l'abandonner que par égard pour moi. Je l'aimais.

« Jelenna, je pense que c'est mon père. »

Je marquais une pause.
Prendre le temps de peser le pour et le contre.

« Je vais aller le rencontrer. Je comptais partir aujourd'hui mais notre mère avait besoin de nous. J'ai donc repoussé mon départ. »

Une nouvelle pause.
Réfléchis.
N'agis pas à la hâte.
Cherche la meilleure solution.
Il n'y en avait qu'une.

« Jel, je veux que tu viennes avec moi. »

La décision était prise.

[ Désengagée ]

La nouvelle tomba.
Jelenna releva la tête comme si rien ne pouvait plus lui faire peur. Qu'était donc en train de lui annoncer sa sœur ? N'était-elle pas en train de l'éloigner de Muria pour la protéger ? Eléa n'avait jamais eu aucun secret pour Jel', inconsciemment, cette dernière comprenait toujours où son ainée voulait en venir, tout aussi inconsciemment, elle savait aussi la comprendre en long, en large et en travers. Il était rare que l'intuition de la gamine se trompe dans le cas d'Eléa. Alors pourquoi sentait-elle que sa sœur cherchait à tout prix à l'éloigner de leur cité protectrice ? Ce devait être une erreur n'est-ce-pas ? La princesse de Muria ne pouvait décemment pas penser à trahir sa cité pour la protéger, elle, une petite fille si insignifiante.

Pourtant, il était tellement évident que Jelenna ne se trompait pas quant aux motivations de son ainée qu'elle n'osa même pas poser de questions. Inutile puisque de toute façon, elle en connaissait la réponse et, même si elle ignorait les raisons de ses agissements, la petite savait qu'il serait impossible de faire changer d'avis la demoiselle en face d'elle. De ce fait, Jelenna garda le silence.
Longtemps.
Peut-être trop ?

Aucune idée, en réalité, la gamine était plus perdue dans ses pensées qu'autre chose. Elle se demandait simplement si sa sœur n'était pas en train de commettre l'erreur de sa vie. Mais après tout, elle pouvait aussi se tromper non ? Peut-être que sa sœur avait simplement besoin d'elle à ses côtés pour ce moment si particulier dans sa vie. Ou encore, plus simplement, sa sœur avait peut-être envie de lui montrer sa vie, les changements qui allaient s'opérer, tout en lui intimant qu'elle ne l'oublierait pas, qu'elle resterait à jamais celle qu'elle aimait le plus. Les idées se mélangeaient un peu trop dans la tête de l'enfant pour qu'elle parvienne à en tirer quelque chose de clair.
Hésitation.
Tel le titre du bouquin, la gamine hésitait totalement. Faire preuve de courage et suivre Eléa alors même qu'elle avait de gros doutes sur les motivations de cette dernière ? Rester ici mais voir ainsi sa sœur, celle qu'elle aimait plus que tout, à l'exception de sa mère, partir loin d'elle. Et si Eléa lui en voulait de ne pas la suivre ...

Et puis il y avait ce père.
Toute sa courte vie, Jelenna avait espéré, prié même pour que sa soeur trouve enfin le repos de son âme. Pour qu'enfin, elle cesse de se tourmenter. Aujourd'hui que ce rêve devenait quasi réalité, Jel' n'était plus très sure de vouloir tout ça. Les enfants ont tous la même et unique peur : celle d'être abandonnés par ceux qu'ils aiment. Eléa oublierait-elle sa cadette en partant à Tamawa rencontré ce père tant attendu ?

" Eléa ... tu m'aimeras quoi que je dise ? "

Réfléchir.
La réponse était pourtant si évidente.
Le cœur a ses raisons que la raison ne connait pas.
Agir.

" Je viendrais. "

Voix timide.
Multiples questions sans réponses.
Questions muettes.
Trahison.
Peur.
Ne m'abandonne pas.

[ Désengagée ]

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» [ D-E ] Caprice de princesse (Feanaro, Philéa, Jelenna)(fini)
» [151][DP] La bataille des rois (Asora, Eléa, Jelenna, Aerin)(fini)
» (intrigue)[DA] Aub'Hiwaan (Sora, Arzhel, Jelenna, Eléa, Asora, Thingol)(fini)
» [DH] Reines en danger (intrigue) (Kriisten, Kiera, Cassandra, Philéa) (fini)
» [DH] Un seul être vous manque et tout est dépeuplé (pv Philéa) (fini)

[D-E] Faites l'amour pas la guerre (Pv Philéa, Eléa, Jelenna)(fini)

[D-E] Faites l'amour pas la guerre (Pv Philéa, Eléa, Jelenna)(fini)

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