[151][DP] Suite d'un nouvel apprentissage. [-Elisabeth.] (fini)

Sheireen se retourna pour voir où en était son nouveau maître, et l’apercevant sur le dos de son compagnon animal, elle esquissa un sourire. Faire route avec cette Elisabeth semblait une perspective amusante, et elle avait hâte.
« Dépêche-toi, avant qu’il n’y est plus de place. »
En effet, la foule se faisait de plus en plus nombreuse, et ce n’est qu’en exploitant sa grande souplesse qu’elle arrivait encore à se mouvoir correctement et à avancer. Bientôt, elle eut devant elle une petite auberge portant l’inscription « AUX PETITS ROIS ». Elle hésita une seconde puis, avisant les ivrognes qui en sortaient, elle opta pour l’auberge à côté. « A LA BELLE ETOILE », s’appelait-elle. L’endroit avait l’air plutôt calme, est n’était pas pour autant déserté. C’était un endroit assez réputé, mais un peu trop cher pour les habitants du coin, elle-même n’avait déjeuné dans le restaurant qu’une fois, quand son père était encore en vie. Il était dans les 19h, l’heure à laquelle les auberges se remplissent à vue d’œil, et même si « A LA BELLE ETOILE » était encore vide, il ne fallait pas espérer la trouver dans le même état quelques minutes plus tard. Elle fit donc signe à la jeune femme d’entrer et s’installa à une table vide. Elle lança un « Laisse ton loup dehors, à moins que tu veuille être jetée hors d’ici. » et attrapa le papier bleu qui servait de menu. Elle ne savait pas lire mais la majorité de plats, si non ne devait dire tous, étaient illustrés d’images peintes par un professionnel culinaire. De la peinture culinaire, précisons. Sheireen passa son doigt sur la miniature d’un plat de viandes saignantes et grasses, et se le fit commander. Elle n’oublia pas d’ajouter que ce n’était que pour commencer, qu’elle allait manger bien d’autres choses, et aussi qu’elle voulait le plat avec beaucoup de sauce. Sans oublier un sourire mielleux à l’adresse du serveur.

Elisabeth suivit la jeune fille au travers de cette ville qu'elle semblait connaître parfaitement, elle s'arrêta momentanément devant une échoppe du nom de "Aux Petits Rois", puis tourna les talons et ralentit sa course jusqu'à "A la Belle Étoile" et fit finalement signe à la femme au loup qu'il s'agissait de l'endroit recherché. Sans l'attendre, l'adolescente s'engouffra dans la salle et, alors que Whigo et son amie se tenait devant l'entrée, leur lança d'une façon trop décontractée pour le propos:

« Laisse ton loup dehors, à moins que tu veuille être jetée hors d’ici. »

Le sang d'Elisabeth ne fit qu'un tour. Alors qu'elle pouvait faire preuve d'une grande patience, c'était son côté impulsif qui avait immédiatement prit le dessus. Chaque mots de la phrase était déplacé par rapport à sa situation. Ce contre quoi elle s'insurgeait était tout d'abord l'utilisation du mot "ton" en désignant le loup. Sheireen avait chosifiée l'animal, ne le considérant que comme la propriété de la jeune femme âgée de 19ans, plutôt que comme un individu à part entière. Il était pourtant tellement clair dans son esprit que Whigo jamais n'eût été "son" loup, mais bien au contraire son compagnon. Elle le considérait comme un être à part entière et non pas comme un objet ou une arme qu'elle se serait trimballé avec elle. Par ce simple mots, la jeune fille avait profondément manqué de respect à son ami, ce qui était une des choses qu'elle supportait le moins, avec les êtres de sexe masculin.
Ce qui la fit ensuite bondir, fut la suite de son propos. Le laisser dehors à moins d'être jeté de l'auberge. Comment pouvait elle concevoir se faire jeter en dehors d'un endroit parce qu'elle serait en la compagnie d'un animal à la logique probablement bien plus développée que bien des personnes qui allait s'y trouver, ces ivrognes sans manières, ces hommes répugnants. Le souvenir douloureux de son enfance lui revint en mémoire. La cruauté des autres petites filles envers son ami. Ce refus de laisser en leur compagnie ce qu'elles pensaient être un monstre mais qui était pour elle le plus doux des compagnons. Bien que Muria fut une citée ou l'art de la métamorphose était relativement rependu chez les Sentinelles, ce qui aurait du faire prendre conscience à toute femme de l'identité propre d'un animal, l'éducation de certains enfants était à revoir. Comment pouvait on refuser la compagnie d'un être qui lui était chère sous prétexte qu'il serait en présence d'être à la moralité religieuse plus développée? Elle avait voulut découvrir à quoi ressemblait d'une des villes de ses origines, et elle avait été grassement servie.
Elisabeth ne mettrait pas un seul orteil dans cette auberge sois disant prestigieuse et ainsi se tenant debout devant l'entrée, ses idées s'entrechoquant à toute allure. Un homme qui voulait passé, bien qu'elle l'eut entendu venir d'ici plusieurs mètres dans la foule grouillante, lui intima de façon stricte en la frôlant à peine de "bouger". Ses yeux se tournèrent rapidement vers l'inconnu et elle les plongeas dans les siens. L'or de son œil était marqué de quelques éclats noirs et ses yeux expressifs lui montrèrent clairement la haine et le dégout qu'elle avait pour lui. Comme si une menace silencieuse avait été proférée, l'homme intimidé fit demi tour et, apeuré, ne prit pas la peine de s'excuser car, ayant prit ses jambes à son coup, était déjà loin de la jeune femme. Elle se retourna alors vers Sheireen et lui intima de venir puis lui annonça de l'air de celle qui n'accepterai pas un refus:

"Si nous ne sommes pas accepté par des personnes se pensant supérieur à des êtres plus réfléchit qu'eux, alors nous leur prouverons que nous pouvons très bien nous débrouiller sans leur aide. Ce soir, nous n'auront pas à manger à moins de l'avoir mérité. Tu n'as besoin que de ta lame. Nous partons chasser."

Sheireen passa sa main dans sa chevelue sombre pour la recoiffer et jeta un oeil surpris à Elisabeth qui semblait curieusement agitée par de violente pensées. Elle esquissa un sourire quand l'homme qui l'avait bousculé s'enfuit et reporta son regard au menu illustré.
"Si nous ne sommes pas accepté par des personnes se pensant supérieur à des êtres plus réfléchit qu'eux, alors nous leur prouverons que nous pouvons très bien nous débrouiller sans leur aide. Ce soir, nous n'auront pas à manger à moins de l'avoir mérité. Tu n'as besoin que de ta lame. Nous partons chasser."
Sheireen sursauta. Pourquoi cette décision soudaine ? Pourquoi partir .. chasser, alors qu'ici, en balançant quelques pièces sur la table, elle pouvait obtenir la meilleure nourriture de Silmarie ? Sheireen serra les dents. Elle avait la réputation de s'énerver pour un rien, et il fallait le dire, la jeune fille commençait à chauffer. Elle se leva en renversant sa chaise et planta son regard dans celui, doré, de son nouveau mentor. Elle hésita un peu et baissa finalement la tête. Elle n'avait jamais, jamais, détourné le regard, mais cette fois ci, c'était différent. Elisabeth était son aînée, elle allait lui apprendre l'harmonie. Et dans son regard, il y avait un sorte de sagesse, une sagesse douloureuse, une sagesse acquise sur la souffrance. Sheireen soupira et revint vers la jeune femme.
"Juste, se permit-elle de dire. Pourquoi dis-tu qu'on traite mal ton loup ? Et d'ailleurs tu as eu l'air de t'offusquer, est-ce parce que j'ai dit "ton" loup ? Oui je me rappelle ce que tu as dit sur ce loup, justement. Que ce n'est pas le tien. Mais tu sais, ce n'est pas un manque de respect. C'est comme si je disais ... "ta soeur", ou "ton fils", ou "ton" ami ... Enfin bref, si ça te gêne, je ne recommencerais pas. "
Elle toussota et tandis qu'elle sortait, elle continua :
"Et aussi, ces personnes n'acceptent pas les animaux dans leur auberge, et si j'étais à leur place j'aurais fait pareil. Ils ne peuvent pas savoir que ton loup .. pardon, ce loup, est calme. Si je voyais une femme arriver avec un tigre, je ne les ferai pas entrer... Même un chien, parce qu'un chien ça fait caca.. tu vois ce que je veux dire ? Enfin bref, ce n'est pas de manquer de respect d'interdire le loup d'entrer... Et puis bon, je te le dis parce que ça me dérange un peu que tu trouve que tout est un manque de respect. Après, tu fais comme tu veux. "
Elle avait parlé d'un ton nonchalant est distrait, elle doutait même qu'Elisabeth est compris quelque chose de ses paroles. Car Sheireen, tandis qu'elle parlait, pensait à sa jument. Cela faisait 3 jours qu'elle l'avait laissée à l'écuyer du coin. Si elle la laissait un peu plus, ça allait finir par lui coûter cher. Elle se retourna sur la femme aux cheveux blancs et lui lança un "D'abord je vais chercher Euphorie! Attends là !"
Sur ce, et sans un regard pour Elisabeth, elle se dirigea tranquillement vers la ruelle suivante.

Le temps passe et jamais ne s'arrête.

Le changement de saison s'annonce et bientôt, le blanc manteau de l'hiver qui recouvrait ce monde laissera place à l'herbe grasse et aux timides rayons du soleil. Le silence cédera sa place au chant des oiseaux et le monde s'éveillera petit à petit, sortant lentement de son cocon de glace. Dans ce décor que le temps semblait avoir figé, le moment est venu de s'éclipser, de laisser la nature reprendre ses droits et le cours des choses se faire.

[ Désengagées : Sheireen, Elisabeth ]

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