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Jillian
Nombre de messages : 291 Race et âge : Cydienne, 28 ans Cité : La Troupe Métier : Saltimbanque Feuille de personnageCompétences: Dressage d'une bête ♣ Représentation ♠ Manipulation du vent Compétences bonus: Charisme ♦ Manipulation du feuRéputation : (9/10) | |
| Sujet: [DE][151] Tous les deux on déjeunait sur l'herbe, et moi j'en avais fumé un peu [Fini] Sam 20 Aoû - 4:43 | |
| Il faisait bon. Ils étaient bien. Pourvu que ça dure.
Chaque peuple regagnait peu à peu sa cité d’appartenance, quittant Tamawa et sa neutralité. Bientôt les querelles reprendraient et Erathia et l’union azthienne ne seraient plus qu’un souvenir, une légende à raconter aux générations futures avec dérision mais sans nostalgie. Foutue intolérance.
Jillian avait voulu profiter encore un peu – et aussi longtemps que possible – du calme du Temple spirituel et du confort que lui offrait la neutralité de la cité. Et souffler un peu. Garet n’était pas encore reparti pour Cydonia, la Troupe filait un coup de main aux Templiers pour la reconstruction de la ville. Ils avaient le temps.
C’est ce que s’étaient dit les frère et sœur Torrez ce matin en s’échappant des roulottes des Saltimbanques, un panier bien rempli sous le bras. Les portes de Tamawa passées, ils purent admirer l’étendue verte des pâturages qui s’étendait à perte de vue. La mer de verdure ondulait sous la bise, le soleil tapait fort. Pour peu ils se seraient crus sur une plage ! Ils se lancèrent à l’aventure et à la conquête de l’océan vert et marchèrent quelques heures tout en discutant. Ca pour discuter, ils discutaient ! Jillian racontait ses voyages, ses prises de tête avec certains Saltimbanques – tous des incapables c’est grave -, ses découvertes, ses projets de spectacles, ses escales. Lui l’écoutait en souriant, l’interrompant souvent pour lui faire partager une anecdote dont il venait de se rappeler. Avec les années, les chamailleries de frangins s’en étaient allées pour laisser place à une réelle complicité. A plusieurs reprises, le nom d’Amadeo leur échappa. Ils n’arrivaient pas encore à en parler avec nostalgie, un sourire triste, la voix douce. Leurs yeux s’embuaient et la gorge serrée, ils ne pouvaient pas prononcer un mot de plus. Un long silence suivait alors. Douloureux. Puis quand l’un d’eux s’en sentait capable, il embrayait sur une nouvelle histoire et ils repartaient sur les chemins de leurs souvenirs ou de leur futur. Le cœur lourd.
Lorsqu’ils eurent mis assez de distance entre la ville des Templiers et eux, ils s’arrêtèrent au creux d’une colline et s’assirent dans l’herbe grasse avec délice. Le soleil chaud de l’été tapait sur la capeline de Jillian, tandis que Garet ôtait ses chaussures pour fourrer ses pieds nus parmi les herbes folles. Il faisait bon. Ils étaient bien. Pourvu que ça dure.
« A table ? - Envoie ! J’ai la dalle ! »
Jillian sortit le pique-nique du gros panier d’osier et ils mangèrent volontiers. Le repas fini, ils s’allongèrent dans l’herbe, côte à côte.
« Quand est-ce que tu vas repasser à Cydonia, toi ? - Aucune idée. Pas tout de suite ma poule. Je compte aller sur les îles Nùas, tu sais, je t’ai raconté que les Almers en avaient fait des esclaves. C’est de là que vient Elly. - Ta petite copine ? - Ta gueule. »
Ils sourirent tous les deux à la réplique de Jillian et éclatèrent de rire quand Paco, reprit, avec un à propos déconcertant :
« Petite copine, petite copine ! »
Sam rugit comme chaque fois que le perroquet ouvrait le bec. La tigresse n’était pas du genre à partager son territoire, la présence de cet oiseau de malheur l’exaspérait au plus haut point. Lorsque Paco entreprit de répéter le rugissement du félin – était-il conscient de se provocation ? – Jillian cria :
« Oh ça suffit vous deux ! »
Plus impressionnant que les vociférations de Sam. Les deux la bouclèrent sans demander leur reste. Le silence s’installa, lourd de représailles, jusqu’à ce que Garet change brutalement de sujet :
« On s’en roule un ? - Aller ! »
Le Cydien se releva et fouilla dans le panier. Il en tira une petite pochette de cuir sombre dont il sortit une longue feuille transparente. Il parsema le papier de tabac et une autre feuille, plus verte, aux vertus si appréciées. De quoi faire planer un instant. Et oublier.
« Voilà, conclut-il, un petit boudin entre les doigts. »
Il le porta à ses lèvres, claqua des doigts. Une flamme apparut à l’extrémité de son pouce pour allumer le joint. Il aspira en même temps et le bout rougeoya.
« Tsss… Bouffon ! - Jalouse ! répliqua-t-il en recrachant la fumée. » C’était un peu vrai. Jillian était la seule Torrez à ne pas savoir manipuler le feu et voir son frère faire apparaître une flamme d’un claquement de doigts l’exaspérait. « Amad’ et ‘Man sont meilleurs que toi ! » Impossible de parler de lui au passé. Il est et restera un excellent pyromancien. Garet rit en tirant une nouvelle fois. « C’est vrai… »
Il lui tendit le joint, comme pour la faire taire. Jillian s’en saisit, y posa ses lèvres, inhala la fumée.
« Eh ! Tu sais qui j’ai croisé l’autre fois dans Cydonia ? Erwan ! - Non ?! lâcha-t-elle, en riant. - Si, si je t’assure ! Il a pris du bide. La bière, le mariage, et un corps d’athlète ça fait pas bon ménage. - Attends, attends, t’es en train de me dire qu’Erwan est marié ? Tu te fous de ma gueule là ! lança-t-elle, franchement étonnée, en tendant le joint à Garet. - Non, non, je t’assure ! Femme, enfants, emmerdes, tout ça ! - J’en reviens pas ! »
Et Jillian rit. Un rire un peu nerveux. Bientôt rejointe par son frère, ils finirent par s’esclaffer tous les deux, sans trop se rendre compte que la scène n’était pas si drôle que cela. Qu’importe ? Il faisait bon. Ils étaient bien…
« Si j’avais su, je l’aurais laissé, lui, avec ses boutons énormes et son pucelage ! - Je savais que t’allais dire ça, fit Garet en recrachant une nouvelle fois un nuage de fumée. T’inquiète pas, tu restes la femme de sa vie. - Quelle consolation, tu parles ! rétorqua-t-elle en se saisissant de la fausse cigarette. Si en plus des boutons, il a du bide, laisse tomber ! Trop sex’ pour moi ! »
Elle souffla la fumée, jusqu’à n’avoir plus d’air. Elle resta un instant en apnée, sans s’en soucier. La tête lui tournait, elle bougeait au ralenti. Elle respira à nouveau pour reprendre :
« J’la connais sa femme ? »
Et elle n’eut pas l’impression que sa voix était la sienne. C’était comme si elle s’entendait parler sans avoir vraiment conscience de le faire, pire, que quelqu’un parlait à sa place avec une voix qui n’était pas la sienne. Garet resta silencieux jusqu’à ce que Jillian l’interpèle.
« Euh, non, je crois pas. - C’est qui ? »
Silence. Pas très réceptif le jeune. Elle ne le relança pas, estimant qu’il avait le droit d’être ailleurs quelques instants. Il lui refila le joint, Jillian le porta à ses lèvres. Eteint.
« Eh, Garet ! Il est éteint. » Une éternité sembla s’écouler avant qu’il réponde enfin… « Eh ben ! Rallume le ! - Et t’es mignon toi ! Comment, banane ? Je prends deux silex et j’attends qu’ils fassent une étincelle ? - Ben non. T’as qu’à claquer des doigts ! » Complètement à l’ouest le Garet… « Haha, très drôle ! Steuplaît Garet fais pas chier ! - Claque des doigts, répéta-t-il d’un ton taquin. - T’es lourd ! Regarde, aller, je vais claquer des doigts. Voiiiilà ! Tu v… Oh putain ! Ca alors ! Garet ! Putain regarde ! Regarde ! » Le forgeron tourna lourdement la tête et posa un regard las sur sa sœur. « Ben quoi ? »
Une petite flamme dansait au dessus du pouce de Jillian. Voilà quoi ! Ca ne l’impressionnait pas ? Qu’une manipulatrice du vent sache créer du feu ? En tous cas, elle, restait sans voix. Ses yeux verts regardaient le feu avec une admiration sans borne, mêlée à la stupéfaction.
« Garet… c’est toi qui as fait ça ? »
Mais son frère ne répondit pas. Il planait quelque part entre ce monde et celui des rêves. Jillian éteint la flamme dans le creux de sa main afin de retenter l’expérience. Un claquement de doigts… la flammèche était là ! Elle posa le joint, pas tout à fait fini et se concentra, autant qu’elle le pouvait sur le feu qui flottait au dessus de sa main. Difficile, ses pensées étaient embrumées, lourdes, maladroites. Elle mit ses mains en coupole pour y faire naître un foyer plus grand… L’élément ardent lui obéit et vint illuminer ses paumes. Jillian jubilait. Elle n’osait détacher son regard de la lumière flamboyante de peur qu’elle s’éteigne et qu’elle se retrouve incapable de la rallumer. Les minutes s’écoulèrent sans qu’elle ne parvienne à se résoudre de lâcher le feu des yeux. Quand enfin elle se décida à l’étouffer, elle retenta presque aussitôt de le raviver. Les flammes se plièrent à sa volonté. C’était donc vraie ! Totalement comblée, elle s’allongea aux côtés de son frère qui avait fermé les yeux.
« Garet ! Je vais devenir meilleure dompteuses de flammes que toi ! - Ouais, ouais… »
Il faisait bon. Ils étaient bien. Pourvu que ça dure. |
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