Une belle après-midi se profilait devant Ashrand quand il sortit de la bibliothèque elfique. Ce n'était certes pas la plus grande ni la plus complète du continent mais il s'y trouvait des ouvrages n'existant nulle part ailleurs, c'était aussi la plus simple d'accès compte tenu de l'endroit où vivait le Cydien. Il y avait bien celle de Tamawa mais quasiment une journée de route était nécessaire pour y parvenir, autant faire un tour du côté de celle de Silmarie afin de voir s'il ne trouverait pas son bonheur là-bas, il savait d'ailleurs exactement ce qui le comblerait. Un livre, un manuscrit, n'importe quoi qui puisse le renseigner ou au moins rendre certaines choses moins floues lui suffirait, juste un minuscule ouvrage qui puisse l'aiguiller sur le bon chemin afin de maîtriser ses pouvoirs conviendrait.

Commander au vent était formidable ... quand on y arrivait correctement ! Lui faisait souvent n'importe quoi, pas dans le sens où des catastrophes avaient lieux quand il s'essayait à jouer le maître de l'air mais plutôt que dès qu'il tentait une manœuvre un tant soit peu complexe, ce qui se produisait était rarement ce qu'il avait voulu faire. Faire du vent dans un sens ou dans l'autre n'était guère compliqué, c'était même la base, mais tisser séparément des fils d'air ou se risquer à un quelconque exercice plus laborieux ne donnait aucun résultat probant. Oui, il savait pertinemment que cela prenait des mois voire des années d'entraînement aux Élémentaires ou même aux Zélotes pour y parvenir mais lui voulait y arriver le plus vite possible.
La veille encore, le gladiateur avait tenté de voir jusqu'où il pouvait aller, quelle puissance atteindraient les brises qu'il invoquait mais il ne fallut pas bien longtemps pour qu'il atteigne les limites de son niveau actuel. Il força néanmoins, tant et si bien qu'une profonde fatigue s'empara aussitôt de lui et l'obligea à s'en retourner au lit où il dormit tout le restant du jour. Il avait été idiot, il le savait. Ashrand ne faisait que répéter les erreurs du passé, se précipitant vers le sommet alors qu'il fallait avant tout établir et consolider les bases. Enfin, la leçon précédente lui avait au moins appris qu'apprendre et maîtriser toutes sortes de manipulations mineures serait indispensable s'il souhaitait progresser et tirer profit du don que possédaient les Élémentaires de Vent. Seulement, il ne possédait pas d'instructeur comme il avait eu son père pour l'initier à l'épée et Jiven pour dominer son sixième sens, aussi l'apprentissage n'en était que plus ardu. Voilà pourquoi il s'était rendu jusqu'à la bibliothèque de la Cité Brumeuse aujourd'hui, pour y trouver quelque chose de concret sur l'art de l'air et du vent mais n'étant pas une chose matérielle au même titre que l'Esprit, cela demeurait compliqué à expliciter, toutefois la soif d'apprendre du Cydien ne faiblissait pas.
La matinée et une partie de l'après-midi furent ainsi passées à farfouiller dans les rayons à la recherche du volume contenant les précieuses informations qu'il recherchait. Bien entendu, il n'eût pas le temps de lire grand chose vu le temps qu'il passât à fouiner dans les couvertures poussiéreuses mais il prit tout de même la peine de noter sur un bout de papier froissé l'emplacement ainsi et surtout que le titre de tout ce qui avait suscité son intérêt. Trois livres, c'est tout ce qu'il dénichât, deux d'à peine une cinquantaine de page qui semblaient être des notes et des griffonnages ainsi qu'un dernier plus épais qui cependant semblait ne traiter des éléments que de façon très superficielles. Savait-on jamais, peut-être qu'un indice ou deux était caché dans ces amas de pages et d'encre. C'est un peu déçu qu'il quittât l'établissement, décidant d'y revenir une prochaine fois afin de commencer la lecture de tout ceci.

Ses pensées vagabondant ça et là, l'Ancien Soumis marchait tranquillement dans la rue marchande pour rejoindre son domicile quand il aperçut une vieille dame visiblement en lutte totale avec ses paquets. Non seulement elle en avait beaucoup mais tous paraissaient pesants pour quelqu'un de cette âge. C'est immédiatement qu'Ashrand se porta à son secours, la délestant de ses sacs en les prenant lui-même.

« Laissez-moi donc vous aider » proposa-t-il aimablement.

Elle accepta sans se faire prier, ses articulations n'étant plus faites pour de telles charges, puis elle pesta envers quelqu'un d'absent suite à quoi le garçon aux cheveux d'ébène lui demanda si elle était accompagnée.

« Oh oui, mais cet empoté d'Aldric a encore été se perdre je ne sais où. Les dieux savent à quel point il peut être tête en l'air. »

« Peut-être vaudrait-il mieux l'attendre, non ? Il doit probablement être en train de vous chercher. »

« Tant pis, il me rejoindra plus tard, je le paie pour me protéger, pas pour disparaître ainsi ! »

Et voilà donc le Cydien affublé de plusieurs paquets et d'une vieille dame qui, elle, ne semblait pas faire partie du peuple, se dirigeant probablement vers la maison où elle déposerait ses affaires. Ils discutèrent un peu en route et Ashrand apprit qu'elle était une noble de la cité, ayant décidé d'aller se dégourdir les jambes en ville avec son garde du corps jusqu'à ce qu'elle déniche de belles draperies et diverses choses qui devaient coûter un os à ceux qui voudraient en faire l'acquisition. Aldric, le garde en question, avait sûrement perdu sa patronne dans la foule et, plutôt que de l'attendre, elle décida de rentrer seule avant de faire la rencontre d'un certain gladiateur.
Ils parvinrent ainsi au pied d'une vaste demeure, très grande comparée à celle de l'homme libre, où Ashrand déposa tous les paquets une fois entré dans le hall.

« Dans tous les cas, je vous remercie car sans vous, je ne serais sans doute pas arrivée jusqu'ici » dit-elle.

« Pas de quoi, c'était avec plaisir que je vous ai aidée »

Saluant la dame, il tourna les talons pour s'en aller quand elle l'interpella de nouveau.

« Attendez, vous n'allez tout de même pas nous quitter ? Je ne peux décemment pas laisser partir une âme aussi charitable que la votre sans la remercier. Entrez donc cinq minutes »

Il avait le temps, certes, mais tout ce luxe le mettait un peu mal à l'aise lui qui était habitué à vivre dans la simplicité. Cependant, il jugea impoli de refuser l'invitation, aussi l'accepta-t-il avec sourire avant de reprendre les paquets et de suivre l'ancêtre jusqu'à ce que des domestiques les prennent en charges. Délestés, ils se dirigèrent vers un vaste salon, richement décoré de couleurs chatoyantes où – il ne le vit pas tout de suite – une splendide jeune femme se trouvait. La dame tonna d'un ton un peu plus exigeant :

« Ashe, tu pourrais au moins dire bonjour ! »

Le Cydien sursauta à l'écoute du ton employé et bafouilla rapidement une réponse

« Ah, heu... oui bien sûr, j'en oublie les bonnes manières : Bonjour, mademoiselle »

Deux paires d'yeux se posèrent sur lui dont celle de la vieille dame, surprise. Lui ne comprenait pas pourquoi on le regardait ainsi et dévisagea la jeune femme blonde en cherchant un réponse dans ses yeux en amande.

« Et bien quoi, qu'y a-t-il ? »

Il n'avait pas tiqué à l'entente du langage cydien alors que l'ancêtre s'exprimait en elfique depuis tout à l'heure, à tel point que lui aussi répondit inconsciemment en cydien, ni plus à l'entente de ce nom alors qu'il ne se rappelait même pas l'avoir donné à l'ancêtre mais bien qu'il ne le devina pas, tout portait à croire que la réflexion de la dame ne lui était pas adressée et qu'un autre « Ash » se trouvait ici...

Le jeune homme sourcilla à la façon dont la jeune femme parlait à sa grand-mère, il la jugea peu respectueuse. Lui-même appelait parfois sa mère « la vieille » pour plaisanter mais la manière dont la blonde avait ensuite répondu à son aïeule ne montrait pas vraiment qu'il s'agissait là d'une taquinerie. Il se contenta de ne rien dire à ce moment, après tout, la relation qu'entretenaient ces deux femmes ne le regardait pas.

« Ah, heu... Je me nomme Ashrand, Cahen Ashrand, c'est pour ça que j'ai cru que... voilà, quoi. » répondit-il enfin, encore un peu gêné d'avoir cru que c'était à lui que Silië s'était adressée tout à l'heure, « Et, pour ma part, je suis Cydien d'origine »

Mais ça, elle devait s'en douter, il n'avait ni les oreilles pointues des Elfes, ni le teint halé des Nùas ou des Almers et encore moins la tignasse blonde des Astorgs, qu'il vienne des territoires cydiens était évident !
La belle s'éloigna ensuite et le gladiateur ne put s'empêcher de constater que c'était une bien charmante jeune femme. Son regard revint sur la vieille Elfe, comme elle lui demandait ce qui avait conduit ses pas jusqu'à la Cité des Brumes.

« Je vis à Silmarie, en fait. J'habitais autrefois à Cydonia mais ça fait quelques temps que j'ai quitté la ville »

C'était tout relatif, cela ne faisait guère que quelques mois qu'il s'était installé à proprement parler ici mais le peu de temps passé au Joyau ces derniers temps ne comptant pas vraiment et les six années où il avait été captif des femmes... Autant dire qu'il ne vivait plus à Cydonia depuis ses quinze ans, âge auquel il avait eu la malchance – ou la chance, selon le point de vue – de se perdre dans la forêt jouxtant Muria.
Pour finir, Silië et lui s'installèrent dans le salon et on leur servit un délicieux hydromel, meilleur que celui servit dans la plupart des auberges en tout cas, puis ils discutèrent un peu avant que l'ancêtre n'en vienne forcément à parler de sa jeunesse, à croire que les vieux aimaient radoter. Elle lui raconta des tas de choses, certaines intéressantes, d'autres moins, Ashrand se contentant de placer un commentaire de temps en temps. Quelques minutes plus tard, la dénommée Ashelia réapparut et lui fit un demande que le garçon jugea pour le moins étrange, assez pour lui faire froncer les sourcils.

« Hmm... je ne sais pas trop »

L'idée de discutailler et de faire connaissance avec elle ne le dérangeait pas, il avait depuis longtemps dépassé les préjugés sur les gens d'origine Astorg, seulement toute la question était de savoir où est-ce qu'elle comptait se rendre. Ses maigres bagages auraient tout aussi bien pu indiquer qu'elle se rendait au bout de la rue mais elle venait d'employer le terme « voyage », cela annonçait un trajet un peu plus long, devina le jeune homme.

« Ce n'est pas que j'y voie un inconvénient, non, je voulais dire que ça dépendait surtout de votre destination » ajouta-t-il, de peur qu'elle prenne son indécision pour de l'appréhension.

Là était le problème, la raccompagner jusqu'aux portes de la ville voire même faire une ou deux lieues en sa compagnie ne le gênerait pas – il n'allait de toutes façons plus rien faire de la journée – mais si elle comptait aller plus loin, elle devrait probablement le faire seule. L'air suppliant qu'elle adoptait le poussait presque à accepter mais il avait besoin de quelques précision avant de lui donner une réponse.

« Si vous comptez aller à Storghein, très peu pour moi ! »

Il plaisantait sur le sujet mais si c'était bien le lieu où se rendait Ashelia, elle devrait probablement se trouver un autre compagnon de route : qu'un Cydien se rende jusque là était insensé voire dangereux.

Ashelia pouvait observer une pointe de suspicion dans son regard... Cet homme au charme duquel elle n'était pas insensible ne semblait pas avoir l'air pour mais ne paraissait pas contre non plus... Elle hésitait sur la réponse à lui donner car elle ne savait pas vraiment où elle voulait aller... Elle voulait juste s'éloigner d'ici. En effet, elle n'avait jamais été très proche de sa famille maternelle et l'on pouvait aisément le ressentir dans son comportement vis à vis de sa grand mère par exemple... Elle se souvint d'une petite bourgade non loin de Silmarie et elle lui répondit:

"Euh... Et bien... Je comptais passer quelques jours dans une bourgade aux environs de Silmarie... Et il me serait fort agréable de m'y voir accompagné par un aussi bel homme que vous..."

La jeune demoiselle put voir ses joues rougir d'un ton rosé après cette déclaration, mais même si elle sentait en ce jeune cydien une note de fidélité qui lui laissait envisager une relation avec une femme dont elle ignorait sans doute le nom, elle n'avait pas froid aux yeux... Vous pourrez sans doute croire ce qu'il vous semble bon de croire mais quand une personne vous attire, il faut bien du courage pour arriver à ne plus y penser et à ne pas avoir l'envie d'essayer...

Elle était là, devant l'imposant hall de la bâtisse, avec ce grand sourire angélique, son air candide, ses joues roses et ses yeux pétillants... Elle attendait alors que la réponse pouvait très bien être négative comme positive mais cela n'était pas dans le caractère de la jeune femme de s'avouer vaincue avant même d'avoir essayé.. Tout en sachant que même si Ashrand devait avoir quelques doutes sur les intentions de la jeune femme, il ne savait absolument pas qu'elle était tombée sous son charme... Peut être était ce le fait de braver un interdit de moeurs qui lui donnait tout cet intêret...

La réponse que lui donna la jeune femme poussait le Cydien à accepter l'invitation. Non seulement le fait qu'elle ne souhaitait guère se rendre à plus de quelques lieues lui convenait, lui qui ne voulait pas aller plus loin mais en plus l'idée de se balader un peu aux alentours de Silmarie n'était pas pour lui déplaire ; prendre un peu l'air ne pouvait que lui faire du bien après s'être enfermé pendant plusieurs heures à la bibliothèque. De plus, cette Astorg semblait une bien sympathique personne et le trajet en sa compagnie promettait d'être agréable. Ashrand n'allait naturellement pas lui demander une rétribution pour l'accompagner, il ferait ça par plaisir mais également pour rendre service à la demoiselle. Par ailleurs, le compliment qu'elle lui fit ne le laissa pas de marbre et l'espace d'un instant, il crût que ses joues allaient s'empourprer, tout embarrassé qu'il était.
Il marmotta alors alors quelque chose d'incompréhensible, ne sachant pas vraiment quoi répondre. Il était vrai qu'elle avait un physique plutôt avantageux mais s'il le lui disait ainsi, qui sait comment elle irait l'interpréter ? Probablement pas avec le sens voulu par le gladiateur. Elle irait peut-être prendre cela comme une proposition implicite et inavouable alors que lui voulait juste lui faire un compliment sincère. Ainsi Ashrand fit-il les choses comme elles lui ressemblaient le plus, dire les choses sans grands détours :

« Vous êtes très charmante également »

Il agrémenta sa phrase d'un tendre sourire en espérant qu'elle prendrait cela comme il le fallait. Le brun se montrait toujours chaleureux et attentionné envers tout le monde et parfois quelques personnes se méprenaient sur ses intentions, prenant sa gentillesse pour de l'intérêt et il avait alors beaucoup de mal à les éconduire...
Dans tous les cas, Ashelia savait glisser les compliments là où il le fallait pour obtenir ce qu'elle désirait.

« Cela me va dans ce cas, nous partons dès que vous le souhaitez » annonça-t-il

Le plus vite serait sans doutes le mieux, ainsi il serait de retour au sein de la Cité des Brumes dans la soirée. Non pas que passer la nuit dans une auberge de village le dérange, il pensait plutôt que cela serait dommage alors qu'il pourrait être bien au chaud dans son propre lit. Sa manière d'agir trahissait peut-être le fond de sa pensée puisqu'il ne tarda pas à finir son verre d'hydromel pour ensuite dire au revoir à la vieille Silië.
Il n'avait pas de bagages à emporter puisqu'il rentrerait vraisemblablement chez lui pour la nuit, nul besoin de provisions ni de vêtements de rechange donc. Un petit sac avec un casse-croûte pour le dîner suffirait. Ashelia et lui quittèrent la vaste demeure peu après, laissant derrière eux l'ancêtre et ses commérages.

Ayant besoin de sa monture pour voyager, ils se mirent tout deux en chemin pour l'écurie située aux portes de la ville elfique. Voilà quelques jours qu'Ashrand n'avait pas fait gambader sa jument et il ne doutait pas qu'elle serait ravie d'aller se dégourdir les pattes dehors. Elle n'était pas particulièrement rapide ou endurante, c'était à vrai dire un cheval tout ce qu'il y a de plus commun mais elle lui suffisait. Lui n'avait pas besoin d'un étalon athlétique, un cheval qui le portait sur son dos et lui évitait par la même occasion de longues heures de marche lui suffisait amplement.
En chemin, le jeune homme s'arrêta devant l'échoppe d'un marchand et réfléchit avant d'y entrer. Tout ce dont il avait besoin était de quoi se remplir l'estomac en chemin, acheter cela ici lui épargnerait de devoir retourner chez lui. C'était décidé : plutôt que de perdre encore davantage de temps, il entrerait dans la boutique

« Vous êtes certaine qu'il ne vous manque rien, au moins ? »demanda-t-il à l'Amazone avant de pénétrer à l'intérieur.

Ashrand en ressortit quelques minutes après, avec juste du pain et du fromage, qu'il fourrerait dans une des sacoches de sa selle. Il fit un dernier inventaire de tout ce dont il avait besoin afin de s'assurer qu'il n'oublierait rien car, quelquefois distrait, il omettait d'emporter certaines choses. Cela lui paraissait tout bon cette fois-ci, il avait de l'argent, bien qu'il doutât en avoir besoin aujourd'hui, de la nourriture fraîchement achetée et ses deux épées. S'il emmenait automatiquement ses armes chaque fois qu'il quittait Silmarie, c'était avant tout par précaution : nul ne pouvait prévoir sur qui ou quoi il tomberait à l'extérieur. Les bandits n'étaient pas rares et même si le Cydien privilégiait le dialogue aux discours musclés, il était bien souvent difficile de faire entendre raison aux brigands, ceux-ci ayant souvent besoin d'une démonstration de force avec d'abandonner l'idée d'essayer de détrousser un malheureux voyageur. Il était vrai que le jeune homme préférait largement voyager n compagnie d'autres gens plutôt que seul, d'un point de vue sécurité comme du contact humain : il appréciait beaucoup bavarder avec d'autres personnes et il trouvait que chevaucher seul rendait parfois le voyage un peu triste.

« Vous n'avez pas l'air de vos entendre à merveille, vous et votre grand-mère... » se risqua-t-il à demander, toujours en chemin pour les écuries.

Encore une fois, il avait cédé à la curiosité même si au fond, il semblait logique que la relation entre les deux femmes n'était pas au beau fixe. La question était certes un peu indiscrète mais cela n'avait pas fait hésite longtemps le Cydien avant de la poser, il comprendrait cependant qu'elle lui réponde de se mêler de ses affaires mais bon, on ne le changerait pas.

Ashelia avait le sourire jusqu'aux oreilles aprés le retour positif que Ashrand avait fait à sa demande, ils prirent le temps de discuter un temps soit peu puis ils partirent et prirent la direction de la rue marchande... Le jeune homme prit le temps de refaire un peu son inventaire puis il demanda à la jeune femme si elle s'entendait bien avec sa grand mère.

"Vous savez... Moi et ma famille ça n'a jamais été ça !"

Ils arrivèrent aux écuries et discutèrent tout en attelant leur monture. Celle de la belle blonde était un étalon aussi blanc qu'une plume... Ashelia n'appréciait guère de voyager en cheval, elle préférait à la limite le carrosse ou la caravelle voir la marche à pied mais monter cet étalon n'était vraiment pas dans ses préférences... Ils passèrent ensuite les portes de la ville et commencèrent à entrer dans la Campagne aux alentours de Silmarie. Ces beaux pâturages verts, cette tranquillité de vivre qui pesait dans l'air était très agréable malgré que la demoiselle préférait largement la ville à la campagne...

En route qu'elle ne fut leur surprise lorsqu'un groupe de bandit vinrent les interpeller :

"Haltes là ! Ne bougez plus..."

Ils étaient là en face des deux jeunes gens, ils étaient 3-4 et ils s’approchèrent du duo. Les jeunes essayèrent en vain de se défendre mais leur infériorité numérique prit le dessus... Le jeune homme n'avait pas l'air de les intéresser, c'était la jeune femme qu'il était venu chercher et plutôt violemment l'on pourrait dire... Venir chercher une femme et la traîner par les cheveux en lui enlevant tout honneur et fierté... Elle avait la tête baisser vers le bas, mais elle esquissa quelques mots à Ashrand tout en laissant couler ses larmes.

"Pars... Pars pendant que tu peux... Toi on t'attend, moi non. Des gens t'aiment et ne veulent pas te perdre ! Va les retrouver ! Je ne serai qu'un boulet pour qui que ce soit toute ma vie... Laisse moi..."

A peine eut-elle finit ses mots qu'elle fondit en larme avant de tenter une riposte qui n'était qu'une vile tentative pour appâter leur attention et permettre au jeune gladiateur de prendre le poudre d'escampette...

Une fois les chevaux sellés, le bruit de leurs fers claquant sur les pavés ne tarda pas à se faire entendre et lentement, le duo se mit en route pour le village elfique. Au rythme tranquille qu’ils imposaient à leur monture, ils passèrent les portes de Silmarie pour peu à peu entrer dans la campagne périphérique. Les bâtisses des Elfes cédaient progressivement la place aux champs, aux prés où paissaient les têtes des bétails sans oublier quelques vergers. Mais cela se limitait aux alentours de la ville car à mesures que les deux jeunes gens s’éloignaient, les témoins de cette civilisation s’estompaient jusqu’à ce qu’il ne reste plus que pour seul paysage d’immenses prairies dont les brins d’herbe ployaient sous la brise.
Ashrand laissait la blonde le guider tout en mémorisant le chemin qu’ils empruntaient pour que lui-même puisse revenir ensuite mais à vrai dire, il avait comme un vague souvenir d’avoir déjà fait halte dans un petit hameau plus loin dans cette direction. Bien sûr, moulin à paroles qu’il était, le gladiateur ne tarda pas à entrer en grande conversation avec elle, discutant de tout et de rien, de la pluie et du beau temps. Le voyage promettait d’être tranquille et agréable à ses yeux.

Or, comme si cette discussion ponctuée de gesticulations depuis sa selle avait absorbé toute son attention, comme s’il en était de même pour Ashelia également, aucun des deux détenteurs de l’Esprit ne nota la présence étrangère tapie dans les fourrés plus loin. Ils ne s’en aperçurent que trop tard, une fois que les quatre malandrins eurent bondi hors de leur cachette, arme à la main. Le premier leur ordonna de s’arrêter, avec le ton de celui qui s’attend à être obéi. Le cydien ne doutait pas le moins du monde que les bandits utiliseraient leurs lames pour peu qu’un des voyageur les y pousse et encore, rien n’assurait de s’en tirer indemne même en leur donnant ce qu’ils voulaient.

« Que …? » s’exclama-t-il de surprise, prêt à talonner sa monture pour s’enfuir.

Il ordonna mentalement à sa compagne d’en faire de même mais comme si un tressaillement de la mâchoire l’avait trahi, le hors-la-loi le plus proche de lui le saisit par la tunique et le désarçonna. N’ayant pu se rattraper à quelque chose, il tomba mais par un miraculeux réflexe, il empoigna son agresseur au passage et le fit chuter avec lui sauf que le Cydien, bien plus agile et rapide, se remit aussi tôt debout après avoir roulé sur le côté.

La hanche douloureuse après que le pommeau de son épée s’y soit enfoncé lors de l’impact, Ashrand évalua rapidement la situation. Deux bandits venaient d’appliquer le même processus sur l’Astorg, la faisant tomber de sa selle et à présent, ils la tiraient par les cheveux. Était-ce donc tout ce qu’ils désiraient, une femme ? Leur bourse ne leur suffiraient-elles pas ?
Il avait été trop bête, se faire ainsi avoir… il était habituellement plus prudent en voyage mais il fallait croire que voyage en si charmante compagnie et qui plus est avec une Sensible qui pourrait détecter la menace comme lui avait endormi sa vigilance et autant dire qu’il s’en voulait d’entraîner une jeune inconnue avec lui à cause de son imprudence. Il devait réagir et vite !

Malgré ce que la demoiselle en pleurs lui dit, les intentions de l’Ancien Soumis étaient tout autres. Il ne pouvait décemment la laisser aux mains de ces gens-là, qui sait ce qu’ils feraient d’elle, quelles atrocités ils commettraient ? De plus c’était sa faute à lui si les deux voyageurs étaient tombés dans ce piège… Non, il ne pouvait pas prendre la poudre d’escampette comme elle le lui avait demandé. D’un autre côté, même s’il le voulait, il ne pourrait pas le faire : Il n’aurait jamais le temps de remonter en selle avant de se prendre un coup ni de s’enfuir à pied et si par hasard il y parvenait, il laissait sa jument aux bandits qui ne se gêneraient pas pour l’utiliser afin de poursuivre le garçon.

Il envoya son pied dans l’estomac du malandrin en face de lui pour l’écarter et il se précipita vers sa compagne de voyage pour qu’elle puisse se libérer. Il passa juste devant sa jument, manquant de peu d’être sévèrement touché par un coup de sabot, tandis qu’il sortait son épée du fourreau et la lame s’enfonça dans le côté d’une des deux personnes qui tenaient Ashelia, le blessé s’affaissa dans un râle.
Il ne devait pas réfléchir, pas penser au fait qu’il venait de toucher mortellement cet homme, sans quoi il hésiterait et cela rendrait son épée gauche. Il accomplissait ce qui devait être fait, il défendait sa vie et celle d’une innocente… il n’y avait pas de doutes à avoir : ses meurtres seraient justifiés ! Dommage pour eux, ils s’en étaient pris à la mauvaise personne aujourd’hui…
Profitant de sa main libre, Ashrand tira la blonde par le bras afin de la relever et, profitant de la surprise des malfaiteurs, ajouta grâce à l’Esprit :

** Ressaisissez-vous ! Ils ne sont plus que trois, prenez votre arme et aidez moi ! **

Il se mit entre elle et l’autre qui la tenait encore quelque secondes auparavant, prêt à parer sa lame de fourbe. Restait à espérer qu’Ashelia ne tarde pas à sortir sa propre arme pour venir lui prêter main forte…

« Votre comparse est grièvement blessé, prenez-le et allez-vous en … ne m’obligez pas à commettre un acte regrettable ! » ajouta-t-il à l’attention des bandits pour gagner un peu de temps.

Fort heureusement, la demoiselle ne se morfondit pas davantage après les dires du gladiateur. Sans doute avait-elle compris que rester amorphe ne les aiderait pas à s'en sortir, ni lui ni elle. Ashrand ignorait si elle savait se battre, si elle avait la moindre expérience dans le domaine du maniement des armes, être un détenteur de l'Esprit ne signifiait pas forcément être Templier, lui-même en était la preuve absolue : malgré qu'il possède ce sixième sens et qu'il ait suivi une formation sous l’œil d'un Templier, il s'était volontairement détourné d'Ankdor pour se consacrer aux combats d'arène et à sa petite personne... C'est vrai qu'avec un peu de recul, il s'était rendu compte que sa décision était particulièrement égoïste mais n'avait-il pas le droit de prendre un peu soin de lui après toutes ces années en captivité ? Même si son métier était diamétralement opposé aux idéaux du Temple, même s'il se battait pour son plaisir et pour amuser la galerie, même s'il n'était qu'un mercenaire qui combattait pour de l'argent, était-il quelqu'un de « mauvais » pour autant ?

Un bandit s'écroula après avoir sa chair entamée par la lame runique de la dame. Invocation, hein ? Ça ressemblait trop aux enseignements du Temple : quasiment tous les Templiers étaient capable d'invoquer une arme à partir d'un manche serti d'une pierre runique, qu'elle en soit capable en plus de maîtriser l'Esprit tentait le jeune homme à la classer parmi les rangs d'Ankdor.
Peu importait qui elle était vraiment pour le moment, il était à présent plus important de mettre les hors-la-loi en déroute car maintenant que deux d'entre eux étaient grièvement blessé et mourraient probablement, il ne fallait pas s'attendre à de la pitié de la part des deux bandits restant si jamais les voyageurs venaient à être battus.

« Je vous laisse vous occuper du premier » répondit-il précipitamment.

Lui prendrait le dernier – celui qu'Ashrand avait frappé au tout début – et laisserait celui de gauche aux soins de la demoiselle. Il ne connaissait toujours pas son expérience en matière de combat mais pour l'instant il lui faisait confiance, avoir une paire de bras pour se défendre était toujours ça de pris. Seul, il aurait probablement réussi à s'en sortir sans trop de mal face à deux hommes, qui plus est de vulgaires malandrins mais le brun n'irait pas cracher sur l'aide de la jeune femme. Le bandit de gauche s'attaqua à elle tandis que lui concentrait son attention sur celui un peu plus loin.
Celui qu'il avait frappé avait déjà récupéré et sorti son arme, une lame courte semblable à celle qu'utilisait le jeune homme auparavant : sans fioritures mais diablement efficace quand on savait s'en servir. A présent, le garçon employait une épée achetée il n'y a pas si longtemps que cela lors d'une petite visite chez un forgeron au Joyau.

Le tintement du métal s'entrechoquant se fit entendre, signe que la joute qui opposait un homme ayant fait des armes son métier à un bandit venait de débuter. Ashrand était plutôt confiant quant à sa victoire, sans pour autant se montrer imprudent en agissant comme si le fait qu'il sorte du combat en tant que vainqueur était acquis. Il n'était juste pas en proie aux vagues doutes qui s'emparaient de lui avant d'entrer dans l'arène quand il savait avoir affaire à un adversaire doué. Enfin, ce sentiment ne durait jamais guère plus de quelques secondes, juste le temps de croiser le fer avec l'ennemi, la concentration chassait ensuite ces doutes. Exactement comme en ce moment même, le Cydien arborait une expression sérieuse tandis qu'il s'affairait à pousser le hors-la-loi à la faute pour le vaincre.
Manier l'épée était devenu presque aussi naturel que respirer pour lui mais ce n'était pas là une raison suffisante pour se battre en toute insouciance, la défaite n'était jamais une probabilité à exclure et ça, peu importe le niveau de la personne. Le brun avait trop souvent vu un guerrier trop sûr de lui vaincu pour avoir pris un duel à la légère tout comme il avait plusieurs fois assisté à une victoire de la part d'un débutant pour la simple et bonne raison qu'il y avait mis davantage d'application.

La lame fendit l'air avant que l'Ancien Soumis ne la bloque habilement pour contre-attaquer immédiatement ; son épée à lui écarta l'autre et fondit vers l'homme. Le métal pénétra les chairs molles de l'abdomen du bandit et dessina une entaille dans celui-ci. La blessure n'était que superficielle, il le savait, elle ne le mettrait probablement même pas hors d'état de nuire, aussi fit-il remonter son épée et, profitant de la surprise de son adversaire qui ne s'attendait pas à être ainsi atteint, le frappa à la tête avec le plat de son arme. La seconde d'après, il s'était écroulé au sol, inconscient.
Ashrand n'avait pas spécialement cherché à le blesser ou le tuer mais si jamais cela s'était imposé, il n'aurait pas hésité une seule seconde ; le premier malandrin en avait d'ailleurs fait les frais. Certes, il aurait pu juste l’assommer mais avec la demoiselle qu'ils tenaient en otage, son sang n'avait fait qu'un tour.
En attendant, sa compagnonne de voyage était toujours aux prises avec son propre adversaire ...

Une fois qu'il eût mis son adversaire hors d'état de nuire, Ashrand se retourna pour évaluer la situation de sa comparse. Elle éprouvait des difficultés à vaincre son adversaire, ce dernier parant habilement chacune des attaques de la jeune femme. Sans doute était-ce là le seul homme avec un minimum de compétences à l'épée, et Ashrand lui avait offert cette femme sans défense pour aller s'occuper d'un autre monte-en-l'air.
Il allait s'élancer aussitôt pour lui venir en aide, pour la secourir afin qu'elle n'aille pas tâter la lame ennemie mais elle parvint à se ressaisir à l'instant où lui la pensait perdue. Ashelia parvint enfin à porter atteinte à son opposant, lui enfonçant la pointe de son épée dans le ventre. Le geste mit un terme à la vie du malandrin, qui avait à peine dû réaliser ce qui lui arrivait. Il s'affaissa.

Soulagé de voir sa compagne de voyage encore vivante, le gladiateur s'empressa de calmer sa monture. La bête n'avait pas été dressée pour la guerre ni même pour des petites altercations comme celle d'aujourd'hui, le cheval piaffait nerveusement à présent. Un fois calmé, le Cydien s'en détourna pour revenir vers la demi-sang, qui se trouvait à genoux et en train de pleurer sur le cadavre de l'homme qu'elle venait de tuer. Elle s'en voulait vraisemblablement pour avoir couper court à l'existence de l'homme, ce que le garçon comprenait ; il n'était jamais facile de tuer quelqu'un. Lui-même ne le faisait pas le cœur léger et loin de lui était le plaisir d'ôter la vie à une personne, preuve étant qu'il avait juste assommé son propre adversaire. Mais l'Ancien Soumis savait toutefois où se trouvaient ses priorités, quels actes ou quelles décisions étaient les plus appropriés à une situation donnée, aussi n'avait-il pas eu l'ombre d'une hésitation lorsqu'il planta son épée dans le premier homme, et il en aurait fait de même avec l'autre s'il n'avait eu d'autre choix. Il ne se laisserait pas tuer sans rien faire. Jamais.
Il s'accroupit à côté de la demoiselle en larmes, respectant à sa manière sa tristesse.

« Vous n'avez pas à vous en vouloir... » lui dit-il, « Il vous aurait tuée autrement, vous n'aviez pas le choix. »

C'était vrai. Ces hommes-là n'aurait pas hésité un seul instant à les tuer elle et lui, ils étaient tous préparés à le faire avant même qu'ils ne rencontrent ces deux malheureux voyageurs. Elle ne devait pas les prendre en pitié, ces bandits n'avaient eu que ce qu'ils méritaient d'une certaine façon.
Il passa un doigt sur les joues de la jeune femme afin d'en sécher les larmes salées avant de la prendre doucement par les bras et de la relever. Elle n'avait pas l'air blessée, voilà qui était une fort bonne chose.

« Venez, nous n'avons plus rien à faire ici »

Et il la guida vers son cheval. Tant pis pour les corps, ils n'auraient pas de sépulture décente, du moins par par lui. Le seul bandit encore vivant ne tarderait quand même pas à revenir à lui, peut-être s'occuperait-il de ses camarades en méditant sur la voie qu'il avait choisie jusqu'ici...
Les deux jeunes gens reprirent la route. La suite du voyage débuta dans un silence pesant, la demoiselle encore un peu sous le choc et lui n'osant la troubler davantage en brisant ce mutisme. Peu à peu, les langues finirent par se délier et la conversation reprit, quoiqu'ils évitaient toujours de reparler des événements qui s'étaient déroulés peu avant. Non pas que cela gênait le garçon, il n'y pensait déjà plus vraiment, juste qu'il n'y avait aucun intérêt à revenir dessus, surtout que la demoiselle n'avait pas l'air de porter ce genre de sujet dans son cœur.
Le petit village en question se dessina à l'horizon quelques lieues plus loin et ils s'arrêtèrent sur la petite place du hameau, prêt à se quitter.

« Et surtout, n'hésitez pas à passer par chez moi si jamais vous revenez à Silmarie ! » ajouta-t-il avant de lui offrir un sourire plein de chaleur.

La demoiselle était une Sensible à l'Esprit, aucun doute à ce qu'elle puisse le retrouver n'importe où dans la ville, ou inversement mais c'était de toute façon avec plaisir qu'il imaginait de futures retrouvailles.
Il s'en fut ensuite, laissant Ashelia retourner à sa vie, et reprit la direction de Silmarie. Ashrand était satisfait d'avoir fait quelque chose de sa journée, même s'il y avait eu un petit problème sur la route. Au moins penserait-il à faire suffisamment attention sur le chemin du retour.

[Ashelia & Ashrand désengagés]
[RP clos]

[Merci pour ce RP, au plaisir d'en refaire un à l'occasion n_n]