« L'amour ne voit pas avec les yeux, mais avec l'âme. »
Shakespeare.

Cela faisait quelques temps déjà que son père avait décidé de le garder près de lui au Temple et pourtant, Aerin se sentait toujours aussi attristé de la situation. Thémis lui manquait, les enfants lui manquaient encore plus cruellement et même Soren finissait par lui manquer à son tour … Cydonia lui manquait bien qu'elle ne soit pas sa cité d'origine et que sa mère l'ai toujours eu en horreur. S'il avait connu des moments de doutes ou encore, eu quelques problèmes du fait de son ascendance ou de son métissage, il ne s'était jamais aussi bien que dans cette famille depuis la mort de Celyween. La fille du Consul avait été pour lui une deuxième mère, prévenante et attentionnée, quant à ses enfants et particulièrement sa fille, ils avaient été ses frères et sœurs que la Crépusculaire voulait tant mais qu'elle n'avait pu lui offrir. En l'absence de Jade, il s'était senti déboussolé, totalement seul, et les Clari avaient su combler ce vide. L'apprentissage de la magie élémentaire lui avait ensuite permis de comprendre que l'aversion de sa mère pour cette magie était infondée. Que les Zélotes comme les élémentaires connaissaient de bonnes et de mauvaises personnes, à l'image du reste du monde. Celyween avait commis une erreur en pensant qu'il n'y avait dans le Joyau que corruption et pourriture et au fond de lui, l'adolescent aurait aimé qu'elle puisse un jour s'en rendre compte. Il s'était souvent demandé si elle serait en mesure de lui pardonner ses choix et son mode de vie. Sans doutes que non, quoi que l'amour d'une mère soit inconditionnel d'après Jiven.

Le destin en avait choisi autrement. Était-ce là encore la volonté d'Ilith que de le pousser à quitter ce qui faisait jusque là sa vie ? Que de lui apprendre cette horrible vérité sur sa mère ? Était-ce seulement la vérité … Ilith y était sûrement pour quelque chose et quand bien même ce ne fut pas le cas, peu importait, les faits étaient là. L'incident au Monastère était inéluctable mais il aurait préféré qu'il advienne plus tard. Il n'avait jamais trouvé le courage de demander la vérité à son père concernant l'aveu de son tortionnaire et cela le minait de jour en jour. Celyween avait-elle réellement été … violée ? Cela justifiait en effet sa haine profonde pour les Zélotes et expliquait également certains de ses comportements à l'égard des hommes. Au fond, le métisse ne l'avait jamais vu douce qu'en présence de Jiven, bien que ces souvenirs soient relativement vagues à ce sujet. Maître Jacen devait certainement faire partie des personnes masculines qu'elle autorisait dans son périmètre mais jamais au grand jamais l'enfant n'avait vu d'homme en mesure de l'approcher sans qu'elle ne dresse de solides barrières entre elle et lui. Était-ce par fidélité envers son amant ou parce qu'elle voulait se protéger ? Ces questions demeurées sans réponse perturbaient l'apprenti mais il ne parvenait pas à mettre des mots sur ses sentiments une fois en face de son père. Il n'avait peut-être pas envie de savoir la vérité au fond à moins qu'il ne cherche à protéger le Directeur … Aerin était incapable de le dire mais une chose était certaine, si ces informations le minaient, il ne se sentait pas en mesure de les partager, pas même avec la douce et belle Jelenna …

Jiven faisait tout pour apaiser son fils et malgré ses efforts, le métisse se sentait en proie à une terreur permanente. Comme si quelque chose bloquait sa cage thoracique au risque de l'achever d'un instant à l'autre. L'Almer ne se sentait pas en danger au Temple, loin de là, il y était bien plus en sûreté qu'à Cydonia cependant, quelque chose manquait et voilà ce qui le tuait à petit feu et le minait à longueur de journée bien qu'il tente de ne pas le montrer. C'était sans doutes l'une des motivations de son père lorsqu'il décida de le confier à un Maître pour le former à l'Esprit. Espérait-il par là même qu'il se sentirait plus apaisé ? Sans doutes mais l'Elfe en doutait. Après tout, il n'était pas à sa place ici non plus. Mais où était sa place au fond … L'enfant chassa ces sombres pensées autant que possible de sa tête et se rendit dans la salle d'entraînement comme le lui avait demandé son père. Il avait obtenu de ce dernier de pouvoir se déplacer librement avec Nyméria. Si d'ordinaire Jiven n'appréciait pas spécialement la louve, il avait sans doutes compris qu'elle était le dernier pilier qui permettait au gamin de rester debout. Accompagnée de son amie à quatre pattes, il poussa la lourde porte de l'endroit indiqué. Il ne fit pas attention aux autres élèves et aurait été pour ainsi dire incapable de dire s'ils étaient nombreux ou non et qui se trouvait là. Une chose était sûre, la jeune princesse bis n'y était pas sans quoi, elle serait déjà venue à sa rencontre. Saisissant son arc, le jeune homme se plaça en face d'une cible, faisant volontairement abstraction du reste mais malgré sa concentration, il fut incapable de tirer la moindre flèche. Rien n'apparaissait au bout de ses doigts tendus si bien qu'au bout de quelques minutes, il renonça, des larmes de frustration roulant le long de ses joues. Aerin se sentait perdu, ses pensées toutes tournées vers des éléments dont il ne pouvait ni se défaire, ni trouver les réponses si bien qu'il se laissa tomber au sol et rabattit ses jambes devant lui, ses mains entourant ses genoux. Il posa ensuite sa tête sur les dits genoux et ferma les yeux, espérant vainement chasser tout cela de son esprit. A ses côtés, la louve couleur crème posa son museau sur son épaule. Son jeune ami avait besoin d'être sauvé, mais encore fallait-il qu'il l'accepte. Si Jelenna avait toujours été son ancre, elle ne pourrait l'aider tant qu'il ne serait pas en mesure de parler aussi la louve espérait-elle une autre main tendue.

[ Je suis partie du principe que le RP Jiven / Evenor avait eu lieu à la toute fin de l'été, si je me suis trompée, j'éditerais ^^' ]

Nyméria était certainement un animal magnifique aux yeux de ceux qui n'avaient pas l'habitude de côtoyer pareil bête mais pour le jeune homme, ce n'était pas un simple animal mais plus une amie, une confidente et une « sœur ». La louve était apparue à un moment crucial de sa vie et sans doutes avait-elle contribué plus que de mesure à sauver son existence. Quoi qu'il en soit, la louve était encore là aujourd'hui à ses côtés, calme et paisible, attendant simplement que quelqu'un d'autre lève la main vers lui. Beaucoup avaient contribué depuis sa chute à sa renaissance mais si la plupart d'entre eux l'avaient en effet sauvé, le métisse ne voulait pas s'en soucier. Il se sentait seul et quelque peu perdu mais peu importait n'est-ce-pas ? Dans ce Temple, tous tentaient de l'aider et quand ils s'en sentaient incapable, ils cherchaient à l'éviter. Son cœur était difficilement pénétrable si bien qu'il évitait de lui-même la plupart des jeunes de son âge. Sa tête était le centre de pensées lugubres si bien qu'il évitait également les adultes, bien trop moralisateurs à son goût. Seul Jiven échappait à cette règle, à quelques exceptions près, mais Aerin se sentait coupable de le sentir triste parfois. Il était incapable de le lire dans son Esprit mais l'enfant était tout à fait capable de le lire dans ses yeux. Son père était malheureux de le savoir si triste à son tour que le gamin essayait de son mieux de cacher ses sentiments mais c'était presque impossible quand on connaissait le talent du Directeur pour l'Esprit. Si son père n'usait que rarement de ce don pour connaître ses véritables sentiments, sans doutes comprenait-il parfaitement son fils sans même que ce dernier n'ait à parler.

Aerin s'était promis de faire un effort, pour son père plus que pour lui-même, il avait juré en son fort intérieur de tout faire pour ne pas le décevoir et, en conséquence, il se devait d'obéir à son futur maître dont il ignorait à peu près tout. Tout ce que le gamin voulait, c'était de faire plaisir à son père même si au fond, il s'en sentait totalement incapable … Il était évident qu'il ne serait jamais un Templier de premier ordre, encore moins quelqu'un sur qui compter mais l'adolescent espérait toutefois être suffisamment doué pour aider le Temple et pour répondre aux attentes inavouées de Jiven. Sa mère par le passé lui avait un jour avoué son envie de lui offrir une petite sœur, mais la vie lui en avait volé l'occasion, elle lui avait également dit à quel point elle était fière de lui et, à quel point elle le serait, quoi qu'il advienne. Le serait-elle encore aujourd'hui ? Aerin n'en savait rien mais préférait l'ignorer quelque part. Il estimait que les espoirs qu'avaient fondé en lui la défunte Crépusculaire continuaient de vivre dans les yeux de son amant et c'était lui que le jeune homme ne voulait surtout pas décevoir. Ainsi qu'une petite princesse Amazone …

Le gamin n'avait nullement senti la présence du Templier, en réalité, il avait tenté de fermer son Esprit au reste du monde et si les maîtres devaient le sentir très facilement, lui était incapable de percevoir quoi que ce soit, c'était le principal. L'Esprit s'était révélé après la mort de Celyween, alors qu'il n'avait que neuf ou dix ans et depuis, même s'il s'était entraîné pour tenter de le maîtriser, le gamin n'avait fait que peu de progrès, le principal étant son incroyable capacité à s'isoler des autres. C'était d'ordinaire la leçon la plus complexe pour un jeune mais lui l'avait compris relativement vite et avait appris à maîtriser autant que faire se peut cette facette de son don.
L'invocation en revanche … était une autre paire de manche. S'il en avait appris les bases bien malgré lui durant ce fameux jour où Auween, Ewan et lui avaient été attaqués, le gamin n'en maîtrisait pas encore tous les tenants et les aboutissants. Frustré, paumé, il posa sa main sur la tête de sa compagne à poils et essuya ses larmes d'un geste brusque, marqué très nettement par sa frustration. Ce fut à cet instant précis qu'il prit conscience de la présence d'Evenor, lorsque ce dernier toucha son Esprit. Il manqua de sursauter, ne s'attendant plus à le voir arriver mais il se retint au dernier moment, s'accrochant à ce qu'il disait.

La voix n'était pas spécialement pleine de reproches mais le gamin le prit en ce sens. Toucher Nyméria revenait à toucher un point sensible et lui dire qu'il n'était pas capable de voir sa détresse le piqua au vif si bien qu'il releva la tête et, d'un ton méchant, il répondit tout haut :

« Ca ne te regarde pas, tu ne peux pas comprendre »

L'éternelle violence d'un enfant meurtri. Aerin était tout à fait conscient de ne pas être à la hauteur pour la louve mais également cruellement conscient qu'elle souffrait de son état actuel cependant, il n'était pas encore tout à fait prêt à l'entendre, surtout de la bouche d'un quasi inconnu pour lui ! Il tenta de se calmer lorsqu'il remarqua que la louve reniflait en paix la main tendue d'Evenor. Des efforts, il avait promis d'en faire et voilà qu'il commençait bien mal … Nym' lécha une fois la main tendue avant d'avancer sa tête pour une caresse, preuve qu'elle avait accepté le jeune homme et obligeant ainsi le métisse à se rendre à l'évidence qu'il agissait stupidement en repoussant l'aide et la vérité. Sans doutes n'était-elle pas assez intelligente en réalité pour comprendre tout cela et ne voyait-il peut être là que des excuses à moins que la louve soit réellement capable de voir tout cela bref, quoi qu'il en soit, il se calma.

La voix reprit à nouveau et il comprit que cet Elfe n'était là que pour l'aider. Pourquoi ? Parce que Jiven lui avait demandé de veiller sur lui ? Sans doutes. Qu'est ce que ça pouvait lui faire ce qui le tracassait hein ? Comme s'il en avait quelque chose à faire ! Nyméria grogna une seconde avant de planter son regard dans le sien. Une seconde interminable avant qu'elle ne détourne les yeux et retourne à son « nouvel ami ». Visiblement en confiance, peut-être cherchait-elle à lui faire comprendre qu'il devait en faire de même. Le gamin se sentait mal, comme s'il était pris entre deux feux. Il ne comprenait pas mais en même temps, il avait tellement envie de se confier. Il ne pouvait pas le faire avec Jiven, pas même avec la belle Jelenna … il crevait d'envie de mettre des mots sur ses problèmes, sur ce qui le hantait

« Pourquoi tu veux m'aider ... » débuta-t-il sans grande conviction, tandis que des larmes de frustration et de colère montaient, « Vous êtes tous pareils, vous voulez « m'aider » mais au fond, vous vous en foutez pas vrai … Au final … au final … Je ne sais plus ce que je dois faire, je ne sais plus qui je suis ... » il marqua une pause avant de reprendre comme s'il parlait à lui-même plutôt qu'à son interlocuteur, « Je ... », une nouvelle pause, « Elle m'a dit des choses terribles, elle a dit qu'elle les tuerait si je n'obéissais pas et … j'ai obéis mais elle m'a privé de Thémis, et lui, il a dit des choses sur … il a dit que ma mère avait été … qu'il l'avait … qu'ils l'avaient … violée. Tout le monde disparais autour de moi ! Je … je ne sais plus quoi faire, j'aimerai être fort mais j'en suis incapable, je pensais que je l'étais, j'aurais tout donné pour le sourire d'Erys ou pour protéger Elios, je l'ai prouvé, je l'ai fait mais .. mais … elle m'a rejetée, elle m'a renvoyée ici ! Elle ... »

Il se tut, incapable de continuer. Il avait tant sur le cœur qu'il ne parvenait plus à savoir ce qu'il avait dit, devait dire ou encore, devait faire. A ses côtés, la louve couleur crème semblait étrangement calme, comme si elle était consciente que l’abcès était enfin crevé.

[ Je ne sais pas si j'ai laissé assez d'ouvertures, n'hésite pas, j'éditerai dans le cas contraire ^^ ]

Quand la louve lécha la main du jeune homme, il passa la main sur sa tête, grattouillant sa peau bien enfouie sous son pelage blanc tandis que l'animal se délectait de ce contact, contrairement à Aerin qui avait décidé de lui rétorquer de s'occuper de ses affaires.
L'elfe n'était pas naïf au point de croire que le simple fait de lui adresser la parole lui suffirait à se livrer, bien au contraire. Jiven l'avait bien prévenu que l'enfant était à prendre avec des pincettes, chose qu'il ne faisait pas totalement. Toutefois, ce fut la raison pour laquelle le jeune maître ne s'offusqua pas, restant silencieux, continuant de caresser Nyméria, apparemment pas satisfaite du comportement du petit métis.
Par un simple grognement, elle le rappela à l'ordre, tandis qu'Evenor réfléchissait à ce qu'il allait pouvoir dire maintenant. En tout cas, il était plutôt content de savoir qu'il avait le soutient de la louve dans son entreprise.
Il écouta Aerin et ses lamentations brouillonne. L'elfe avait un mal de chien à le suivre, et ce même si le lien entre l'Esprit du petit et le siens était encore là.
Il y avait quelque chose de perturbant dans cette situation. Les mots en plus de venir à ses oreilles, résonnaient avec force dans sa tête, déchirant. C'était un morceau de l'âme d'Evenor qui souffrait avec lui. Le vieil homme ne lui avait apparemment pas tout dit. En même temps, peut-être n'était-il pas au courant de certaines choses. Sans doute n'avait-il pas osé violer l'intimité de son fils, comme Evenor s'efforçait de le faire, sans trop de mal grâce aux solides barrières mentales que le gosse avait érigées. Il lui rappelait un peu Eléa. Il n'avait jamais réussi à percer ses remparts et Aerin semblait présenter les mêmes prédispositions à se protéger.

- Oui c'est Jiven qui m'a choisi pour devenir ton maître. Mais s'il n'y avait que ça, tu serais déjà en train de courir autour du Temple pour te faire les jambes au lieu d'être ici et moi derrière toi.

Il n'avait pas parlé avec un ton dur, contrairement à ces mots qui auraient sans-doute braqué plus d'un gamin. Seulement, Aerin ne semblait pas avoir la même logique que les autres mômes qui entraient au Temple. Non pas qu'il le considérait comme mature ; déjà qu'il ne l'était pas lui-même, il n'allait pas qualifier un petit beaucoup moins sage que lui de cette manière. Mais l'elfe savait qu'il serait amené à grandir vite. C'était ainsi que ça se passait quand vivait l'expérience du garçon. Les rêves d'enfants n'existent plus pour des gamins comme lui. Il ne lui restait plus que sa souffrance pour accompagner le temps qui filait et Evenor savait bien que ce n'était pas quelque chose dont il se débarrasserait. Il en avait déjà fait l'expérience auprès d'Eléa qui vivait toujours avec sa rancoeur et sa haine d'adolescente perdue, même si aujourd'hui elle était une femme.
Il fit une petite pause, flattant le flanc de la compagne du petit apprenti, et tenta de comprendre ce que l'adolescent lui avait raconté. Seulement, tout était bien trop décousu, si bien que tout ce qu'il avait réussi à retenir, c'était qu'il pensait que Thémis l'avait abandonné. Il ne devait sans-doute rien y avoir de pire que ce sentiment-là et la gorge de l'elfe se serra, cherchant les mots adapté pour lui faire comprendre qu'il se trompait.

- Je pense que tu es trop dur avec Thémis Clari. Elle ne t'as pas ramené au Temple parce qu'elle ne souhaitait plus de toi. Je pense au contraire qu'elle souffre beaucoup de ton absence, car elle a fait ça pour ton bien.
Remarquant que ce qu'il venait de lui dire faisait atrocement cliché, il tenta d'appuyer avec un exemple :

- Il y en a beaucoup ici qui ont été laissés par leurs proches... tourne-toi et regarde-les, lui dit-il en elfique en lui désignant les autres apprentis présents qui s'entrainaient. Ils sont là parce que leurs parents veulent qu'ils puissent avoir une vie normale avec le don dont ils ont hérité. Tu sais, j'ai cru devenir fou quand j'ai découvert l'Esprit. Si mon père n'avait pas accepté de me laisser venir au Temple, je me dis que j'aurais été dans de sales draps. Ne crois-tu pas que Thémis t'as amené ici parce que tu étais en danger à Cydonia, et non pas pour se débarrasser de toi ? Oh tu vas me dire que je ne la connais pas. C'est vrai, je ne la connais pas personnellement, mais je connais ton père, et je connais l'impression qu'elle lui a laissé quand elle t'a ramené. Elle aussi souffre... tout le monde souffre un jour ou l'autre et c'est pourquoi il est important d'avoir quelqu'un avec qui partager sa souffrance. Il y a un dicton elfe qui dit que d'accepter la solitude, c'est comme mourir un peu. Et c'est elle qui va se retrouver seule si tu meurs, finit-il par dire en désignant Nyméria d'un signe de tête avec un sourire complice.

[HRP : désolé pour le looooooooooooooong retard T_T]

Il s'était tut, incapable de continuer. Il en avait tant sur le cœur qu'il ne parvenait plus à savoir ce qu'il avait dit, devait dire ou encore, devait faire. A ses côtés, la louve couleur crème semblait étrangement calme, comme si elle était consciente que l’abcès était enfin crevé … Le gamin laissa la louve agir à sa guise, Nyméria était et demeurerait toute sa vie un esprit libre à ses yeux, il ne voulait surtout pas briser quelque chose entre eux, et encore moins cette amitié qui lui avait permis de se remettre sur pied, de s'accrocher à la vie et d'accepter qu'elle devait continuer, même sans sa mère. Il l'observa s'approcher du Templier et se laisser gratter la tête. Méfiant, Aerin quant à lui n'était pas décidé à laisser cet Evenor entrer si facilement dans son cœur. Blessé, perdu, bafoué, il n'avait pas l'intention de laisser quelqu'un d'autre lui faire miroiter de douces paroles pour le blesser encore plus par la suite. Il était lasse de la vérité, lasse de s'entendre dire toujours les mêmes choses comme si les gens pouvaient le connaître mieux que lui-même ! Reclus, il ne voulait l'aide de personne, car tous finissaient par le trahir de toute façon. Nyméria pour sa part semblait prête à faire totalement confiance à l'être humain, aussi étrange cela soit-il. D'ordinaire, elle était plutôt du genre à le défendre crocs et griffes même quand cela n'était pas spécialement nécessaire mais là, elle se laissait grattouiller, comme si elle cherchait à lui envoyer un signe, à lui faire comprendre quelque chose qu'il n'avait pas envie de comprendre.

Le grognement le rappela à l'ordre certes mais il décida de bouder l'animal. Il n'avait pas envie d'être blessé à nouveau, ne pouvait-elle pas le comprendre mieux que quiconque elle qui était liée à lui par quelque chose de bien trop puissant pour qu'il ne puisse le définir clairement ? Nyméria semblait avoir bien vite oublié tout ce qu'il venait de traverser … Pourtant, la louve semblait « sincère », tout autant que pouvait l'être un animal en tout cas. Le jeune métisse savait qu'il devait lui faire confiance, il l'avait toujours fait jusque là, mais en même temps, il n'en avait pas spécialement envie. Il devait bien l'avouer.

Quelque part, le gamin sentit qu'Evenor cherchait à percer ses défenses, ce qui ne le poussa que plus à les ériger. Violentes, meurtrières, il mit toutes ses forces à les rendre imperméables, et plus encore, à les rendre dangereuses pour quiconque voudrait se frotter à elles. L'Esprit était un don, son père le lui avait souvent dit, sa mère également dans ses souvenirs, et si le gamin le considérait comme tel parce qu'il lui permettait de rester en contact avec les filles, il se sentait violé à chaque fois qu'un Sensible tentait de l'aider. Il était devenu en très peu de temps très doué pour fermer son Esprit, parfois même, il n'arrivait plus à l'ouvrir au monde à sa guise, enfermé qu'il était derrière ses murailles de pierres mentales.

La révélation ne le surprit pas. Il avait failli rétorquer « cause toujours » mais au lieu de cela, il mit un point d'honneur à le sortir de sa tête et à le mettre dehors une bonne fois pour toute, non par méchanceté pure, mais parce qu'il ne voulait pas de liens entre eux, il ne voulait pas qu'il l'aide, comme les autres, comme tous ceux qui avaient prétendus pouvoir l'aider avant lui. Il voulait être tranquille et qu'on lui fiche la paix … Une nouvelle fois, la louve le rappela à l'ordre, grognant de plus belle, ses prunelles se posant sur lui d'un air mécontent.

Bien que le gamin n'ai aucune envie de parler, se confier l'avait soulagé et visiblement, la louve en était satisfaite puisqu'elle ne le rappelait plus à l'ordre et se contentait de profiter de la main flatteuse de l'Elfe. Il devait ouvrir son cœur, faire confiance, voilà ce que son comportement semblait suggérer et l'enfant se demandait si elle n'avait pas raison, même s'il n'était pas encore prêt à s'engager dans cette voie. Il écouta les paroles de son maître et chacune d'entre elles s'inscrivit dans son âme. Bien sûr qu'il savait au fond de lui que la jeune Astorg ne l'avait pas abandonné, bien sur qu'il savait qu'elle était triste, il l'avait senti lorsqu'elle avait pris cette décision, encore plus lorsqu'elle était repartie sans lui mais il ne voulait pas l'entendre, il ne pouvait pas le croire parce qu'elle était partie sans lui. Elle lui avait promis de veiller sur lui, de le protéger, et elle était partie SANS LUI !! Une nouvelle vague de violence marqua son Esprit tandis qu'il se rendait compte qu'elle avait souffert autant que lui de cette séparation …
Il s'abstint de commentaire, il savait, il avait toujours su qu'elle l'aimait sincèrement et qu'elle avait beaucoup fait pour lui. Thémis Clari l'avait protégé, avait veillé sur lui et sur son apprentissage tout en faisant en sorte que son nom le protège de tout dans cette cité. Aerin était même persuadé qu'elle n'avait jamais cessé de veiller sur lui, sur ses escapades et qu'elle avait toujours eu toute confiance en lui pour l'avoir laissé joué avec ses enfants. Ses si précieux enfants … Ils avaient vécu des choses terribles ensemble, comme son enlèvement ou cette folle qui voulait tuer les deux petits mais ils étaient liés. Pour toujours et à jamais …

L'eflique … sa langue maternelle, celle qui serrait son cœur mais qu'il comprenait tellement bien. Il comprit alors pourquoi la louve avait confiance en Evenor, parce qu'il cherchait sincèrement à l'aider, non pas pour se donner bonne conscience, mais parce qu'il voulait l'aider, tout simplement.

« Je ne mourrais pas ! » répondit-il vivement, sans même y réfléchir.

Il avait promis, quand il avait croisé son regard, il avait promis de la protéger, de veiller sur elle, de lui offrir une famille et un avenir. C'était débile, idiot, mais il n'avait pas pu se résoudre à laisser la Templière l'achever. Aerin l'avait sauvée et c'était elle qui le sauvait aujourd'hui. Il venait de comprendre où il voulait en venir, il venait de comprendre ce que la louve essayait désespérément de lui faire comprendre : Evenor voulait l'aider comme Thémis avant lui avait sincèrement voulu l'aimer et le protéger. Son père le connaissait bien, voilà pourquoi il l'avait confié à l'Elfe et à personne d'autre.

« Je ne mourrais pas … » reprit-il avec ferveur, puis, il posa son regard sur Evenor et des larmes se mirent à rouler sur ses joues sans qu'il ne parvienne à les arrêter. Il avait comprit, enfin, il avait comprit ce que tous essayaient de lui faire comprendre, la confiance était le premier pas vers le chemin de l'espoir et de la vie, « Mer...ci » souffla-t-il, s'essuyant les yeux.

Il n'était pas guéri, loin de là, mais le chemin de la rédemption et du pardon s'ouvrait désormais devant lui. Il aimait Thémis, elle l'aimait également, il le savait et l'avait toujours su. Il n'avait jamais été abandonné, même si son cœur saignait encore aujourd'hui, il ne serait plus jamais seul, il le sentait. Il posa son regard embué de larmes sur Evenor et y lut l'envie sincère de créer un lien. Sans plus hésiter une seconde, sachant que le chemin serait long, le gamin se décida à accepter la main tendue par le destin …

[ Désengagés ]
[ Merci pour ce RP ! ♥ Je me suis dit qu'il valait mieux nous désengager vu ton absence, j'espère que j'ai bien fait, on aura l'occasion de reprendre un peu plus tard ^^ ]