[FA] Muria, enfin… (?) (pv Kurai)

Lilith avançait vers la forêt dans laquelle la cité libre des femmes Muria avait élu résidence. L'Amazone avait vu la masse déjà en grande partie dépouillée de ses feuilles depuis une bonne dizaine de minutes mais se retenait de son envie grandissante de galoper à bride abattue vers la cité qui avait hanté ses dernières journées de voyage. Enfin elle revenait chez elle ! Toutes ses pérégrinations depuis son départ quelques mois plutôt seulement lui avaient paru durer des années. Elle qui n'était d'abord partie que pour une semaine ou deux afin d'aller voir Cydonia et de rencontrer son père avait fini par faire un vaste détour l'amenant jusqu'aux portes de Silmarie – ou du moins la forêt qui l'abritait.

Ce détour était en partie imposé par la traque que lui avait fait subir son père, désireux de s'emparer d'elle et de son talent de catalyseur, si l'on pouvait parler de “talent” et avait été l'occasion de visiter un peu le pays. Elle ressassa un instant le souvenir des personnes qu'elle avait rencontrées, Lunielle qui lui avait été d'une aide précieuse à Cydonia, la joueuse Mashiro et encore Kaenie pour ne citer que ces trois là… Malgré tout elle était heureuse de rentrer à la maison et se languissait de ses sœurs. La Sentinelle eut d'ailleurs une pensée pour ses camarades et son poste qu'elle avait pour le coup délaissé… Certes pour s'assurer qu'elle n'était plus poursuivie et donc protéger Muria, mais tout de même, elle doutait que Kiera accepterait cette explication ! Ce n'était toutefois par l'appréhension d'un sermon bien mérité qui la poussait à retenir son envie de talonner Jâani pour aller au galop. Non, elle voulait savourer l'approche de sa ville adorée et éviter au passage d'attirer l'attention d'éventuels curieux de sexes masculins.

Tranquillement Lilith arriva à l'orée de la forêt. Le vent glacée la fit frissonner et elle resserra sa cape autour de son cou. Elle se tourna et scruta la plaine derrière de son regard perçant en quête d'un intrus. Assurée qu'elle n'était pas suivie – son père avait-il renoncé ? – l'Amazone pénétra dans la forêt. Au bout de quelques pas elle mit pied à terre pour emprunter un passage masqué par des sapins et des ronces qui lui permettrait de regagner plus rapidement la cité sans grand détour. Elle avançait d'un pas calme mais preste, tentant de limiter les bruits. Elle appréciait les chants des oiseaux qui restaient dans la forêt froide pour l'hiver et se frottait les bras de froid tout en maintenant la bride de Jâani. Davantage pour qu'elle ne traine pas que par sécurité, la jument connaissait aussi bien les bois que sa maîtresse et serait aussi hâtive que l'humaine de rejoindre Muria.

Elle n'était plus très loin des murs de la cité quand Jâani hennit. Lilith lui flatta le cou pensant qu'elle était ravie de rentrer à la maison elle aussi et puis vit un mouvement pas loin d'elle. Un homme ou une Amazone ? Ou autre chose ?

Lilith prit son arc et encocha une flèche au cas où. Au vu de l'attitude de sa jument qui regarda fixement devant elle, les oreilles tendues vers l'avant, il n'y avait personne d'autre.

« Bonjour sœur, vous promenez-vous dans la forêt ? Je suis Lilith Grandvin, Sentinelle. »

Lilith ne leva pas son arc de suite, elle avait décidé de jouer sur la forte probabilité que ce soit une Amazone et se tenait prête à réagir le cas échéant.

Kurai rentrait enfin, elle savait que ça ne durerait que peu de temps mais ça lui ferait le plus grand bien de retrouver la cité qui l'avait si bien accueillie alors qu'elle était mourante. A chaque fois qu'elle traversait cette forêt qui paraissait insondable aux néophytes, elle se rappelait de ce qui l'avait mené ici. Son maître, celui en qui elle avait eut toute confiance jusqu'au jour où elle avait réalisé qu'il l'avait manipulé, et ce jour là, il avait failli la tuer. D'ailleurs, s'il n'avait eu vent de ses recherches le concernant, il devait sans doute la croire morte...

Jusqu'à maintenant, les-dites recherches n'avaient rien donné, la menant toujours sur de fausses pistes où déjà bien trop ancienne pour lui être utiles. Elle avait sillonné tout le pays sous couvert de guider des voyageurs pour tenter de le retrouver, faisant parfois, souvent à vrai dire, de mauvaises rencontres en chemin. Au moins, ça la confortait dans son comportement détaché et distant, froid. Ne jamais faire confiance à qui que ce soit. Chaque âme avait son prix pour la trahison, elle n'en doutait plus, la nature des habitants de ce monde lui avait prouvé à maintes reprises et c'est encore plus désabusée qu'à son départ qu'elle rentrait à Muria. Cela faisait déjà des mois qu'elle n'y avait pas remit les pieds, s'acharnant à trouver un indice, une piste qui pourrait la mener à son ancien maître.

Elle en était persuadée, elle n'irait pas mieux tant qu'elle ne lui aurait pas remit la main dessus pour le vaincre... Si la Jinmen n'y parvenait pas, la mort serait sa dernière solution. Son unique rédemption. Ça lui convenait. La revanche ou la mort, il n'y avait rien d'autre à quoi se raccrocher dans ce monde qui était le sien.

Toute à ses réflexions, elle cheminait lentement, Arashi la suivant en humant l'air de la cité qui l'avait vu naître avec une joyeuse appréhension à la retrouver. Sa cavalière restait un peu plus sur sa réserve. Après tant de temps loin de ses soeurs, l'accueil qu'elle allait recevoir lui faisait un peu peur. Mais après tout, c'était devenu sa cité également non ? Pourquoi craindre d'y revenir ? Peut être les souvenirs des histoires de sa mère à propos de leur propre famille qui avait tué son père... Avant d'achever sa pauvre mère. Comment avoir confiance dans l'humanité après ça ?

Silencieuse dans la forêt bruissant de milles vies fragiles, elle poussait un léger soupire quand Arashi s'immobilisa. Qu'avait-il vu encore ?

-" Ben alors ? Tu n'as plus si hâte de rentrer ?"

Son regard se portait dans la même direction que celui de son cheval et une voix féminine retentit. Il n'avait pas fallut longtemps avant qu'on ne la trouve mais... Quelque chose clochait. Les sentinelles se tenaient plus proches de la cité, rarement à une telle distance alors, peut être était ce l'une de celle qui comme elle, se décidait à sortir pour voyager ? Dans le doute, la Jinmen laissait Arashi en retrait et rejoignait l'autre amazone. Aucun doute là-dessus aux propos qu'elle tenait.

-" Je rentre en notre cité Lilith. Je suis Kurai, la chamane."

Elle était partie depuis trop longtemps, restée trop peu d'années pour connaître toutes les femmes peuplant Muria et le prénom de sa consoeur ne lui disait rien. D'un regard inquisiteur, elle l'examinait de haut en bas sans faire un geste pour sembler se défendre face à l'arc de Lilith bien qu'elle le tienne bas. Habillée de son éternel kimono et d'une longue écharpe large couvrant ses épaules et son cou, elle semblait tout aussi vulnérable qu'au jour de son arrivée et pourtant, son visage portait les marques de ses déceptions.

Son arc toujours baissé mais prêt à être relevé en cas de danger, Lilith regarda la personne s'approcher d'elle et sourit quand elle entendit une voix féminine dire :

« Je rentre en notre cité Lilith. Je suis Kuraï, la chamane. »

La femme qui se présenta devant Lilith était vêtu d'un kimono, habit pour le moins rare en Azthia, et une écharpe. À ses cheveux noirs raides et son visage aux traits exotiques Lilith reconnut une Jinmen, il y en avait peu à Muria du fait que les deux terres s'étaient redécouvertes très récemment et l'Amazone avait les yeux remplis d'étoiles à chaque fois qu'elle entendait parler d'Oyashima et elle ne put s'empêcher d'être émerveillée de rencontrer une consœur originaire de ce peuple.

La Sentinelle relâcha la tension sur la corde de son arc et rangea sa flèche : elle ne doutait pas un instant de la sincérité de Kuraï, rares étaient les personnes qui connaissaient l'emplacement même approximatif de la cité des femmes. Lilith continuait à sourire de toutes ses dents, sincèrement ravie de croiser une sœur tout autant que de rejoindre bientôt sa cité adorée.

« Je suis enchantée de faire votre connaissance Kuraï, car il me semble que nous ne nous sommes encore jamais rencontrée auparavant et c'est toujours une joie pour moi de rencontrer de nouvelles personnes croyez-m'en. »

Elle s'était sentit obligée de rajouter c'est dernière remarque en voyant le regard sombre et triste de la chamane. Elle ne savait ce que c'était mais Lilith avait le sentiment d'y lire une émotion familière, quoique peu habituelle chez la cydienne souvent de bonne humeur.

« Je m'en reviens d'un voyage éprouvant et retrouver ma cité et mes sœurs est d'un grand réconfort. Puis-je me montrer curieuse et vous demander ce que vous ressentez à ce sujet ? »

La mère de Lilith lui avait appris autrefois que la curiosité était un vilain défaut… cependant cette même mère lui avait également apprise que seule la curiosité permettait de s'enrichir de savoirs et d'amitiés, puisque ceux qui muselaient ce soi-disant défaut de l'enfance n'allaient jamais vers un inconnu pour s'enquérir de sa vie afin de le découvrir ni chercher à savoir ce qu'on ne leur apprenait pas. Ils demeuraient cloîtrés dans leurs certitudes fragiles et douteuses jamais ébranlées et dans leurs petites maisons loin de la vie elle-même si pleine de merveilles et d'aventures. Heureusement pour la jeune femme, si elle avait un défaut s'était bien la curiosité ! Et s'était fait un devoir de ne pas respecter cet enseignement et de se montrer très curieuse en ne se posant qu'en seule limite le respect des secrets des autres. Si Kurai ne voulait pas répondre à un sujet aussi personnel de la part d'une inconnue c'était son droit et Lilith n'insisterait pas.

L'amazone en face d'elle finissait par ranger sa flèche dans une attitude amicale et un sourire de bienvenue. Ravie et soulagée de ne pas avoir à se battre, la Jinmen s'autorisa à répondre au visage souriant de Lilith par un demi sourire un peu distant malgré tout. Il ne fallait pas trop exiger de la chamane en manque de confiance. Sa consoeur semblait être une véritable guerrière elle mais Kurai ne pouvait se vanter d'en faire autant ou même d'en arborer l'apparence. Son apparente vulnérabilité était autant une arme qu'un énorme défaut pour elle, au moins on ne s'attendait à ce qu'elle réplique mais surtout, ça faisait d'elle une proie de choix pour les bandits de grands chemins.

Passant sur les différences entre Llilith et elle-même, elle lui fit un petit signe de tête pour qu'elle la suive. Arashi était seul et même si elle avait une parfaite confiance en lui, c'est dans ceux qui pourraient vagabonder ici qu'elle n'avait pas confiance.

-" Je ne puis me targuer d'être aussi sociable que vous Lilith mais cela me réjouit de ne pas finir ma route seule. "

L'entendant, Arashi venait à leur rencontre et observait la monture de l'autre jeune femme avec insistance, Jâani semblait titiller les hormones de l'étalon et Kurai lâcha un petit soupire agacé.

-" Ca suffit!"

L'animal comprenait à son ton qu'il n'était pas encore l'heure de se laisser aller à ses instincts et il vint quémander une caresse comme pour se faire pardonner, caresse qu'il obtint avec un nouveau soupire de la part de sa cavalière. Kurai n'était pas du genre loquasse, c'était évident en la voyant aussi, Lilith ne l'aurait pas questionné, elle aurait fini la route en silence, profitant du paysage familier avec l'appréhension de retrouver celles qui l'avaient aidée par le passé mais la sentinelle semblait bien plus ouverte qu'elle, sympathique aussi. Et puis, c'était une autre Amazone. Elle ne devait rien craindre d'elle alors elle osa lui répondre.

-" Je...Je ne suis pas très proche des femmes de notre cité exceptée une, celle qui m'y a amené. Je redoute un peu sa réaction. Je suis guide donc j'ai déjà fait de longues pérégrinations mais celle-ci s'est éternisée et si on eut besoin de mes services en nos murs, elle ne manquera pas de m'en faire réprimande..."

Un soupire presque amusé, bienveillant, lui échappa. Cette femme, c'était un peu toute une famille à elle toute seule, une mère attentionné, un père volontaire, une grande soeur pleine de leçons et une amie qui seule la comprenait...C'est avec cette constatation qu'elle se rendit compte qu'elle lui manquait cruellement mais déjà avant qu'elle ne parte. Kurai ne pouvait pas se permettre de parler de son passé ou ça reviendrait à parler de la Maho et pour cela, on la craindrait, peut-être même la mettrait-on au ban de la cité. Même si elle ne voulait pas admettre avoir besoin de ces habitantes, allant jusqu'à fuir leurs amitiés par crainte d'être à nouveau trahie et déçue, la Jinmen ne pouvait se résoudre à revivre les mêmes épreuves que sa mère avait traversé.

-"... Mais, il me tarde de retrouver sa compagnie et mon foyer."

Oui, Kurai, la si froide et distante Jinmen, admettait que se reposer un peu dans un lieu où elle ne craignait rien lui avait manqué. Pas qu'elle manquait de courage pour affronter les obstacles du monde extérieur mais les déceptions et attaques à répétitions l'avaient assez éprouvée pour qu'elle ressente le besoin de se ressourcer. La jeune femme savait déjà qu'elle ne resterait pas longtemps statique et repartirait rapidement à la recherche de son maître mais il lui fallait une pause bien méritée.

Son regard se posait à nouveau sur Lilith, les rênes d'Arashi en main et ouvrant la marche à travers la forêt, assez confiante en approche de Muria pour en pas être sur ses gardes.

-" Vous êtes l'une de nos farouches sentinelles ou l'une des gardes ? A mon tour, permettez-moi d'être curieuse et de vous demander ce qui vous a tiré loin de notre belle cité ?"

Il était rare de voir l'une de leurs femmes si bien équipée s'éloigner de leur cité au-delà de leurs rondes dans la forêt. Assez pour qu'elle puisse poser la question.

Lilith suivit Kuraï et vit son cheval, un étalon au vu de l'intérêt qu'il porta à Jâani, c'était une belle bête à la robe noire. La Jinmen répondit avec un peu d'hésitation comme ceux qui n'ont pas l'habitude de s'ouvrir aux autres après avoir reconnu qu'elle ne se voyait pas comme sociable.

« Je...Je ne suis pas très proche des femmes de notre cité exceptée une, celle qui m'y a amené. Je redoute un peu sa réaction. Je suis guide donc j'ai déjà fait de longues pérégrinations mais celle-ci s'est éternisée et si on eut besoin de mes services en nos murs, elle ne manquera pas de m'en faire réprimande... »

Lilith vit un sourire s'esquisser sur le visage de Kuraï à la mention de son amie. La jeune femme comprenait très bien l'affection qu'elle pouvait ressentir envers l'Amazone qui l'avait amenée à Muria, elle-même se sentait toujours redevable envers celle qui lui avait sauver la vie quelques années plus tôt. La femme qui faisait découvrir la cité libre était souvent considérée comme une seconde mère, une mère de cœur.

« ... Mais, il me tarde de retrouver sa compagnie et mon foyer. »

Lilith sourit spontanément, quel être n'était pas heureux de rentrer chez soi ? En parlant de chez soi, elles ne tarderaient plus à approcher de la cité. Marcher à deux côte à côte et avec des chevaux n'était pas aisé sur le chemin qu'elles empruntaient, les équidés, ravis de voyager avec un congénère se frottaient la tête.

« Vous êtes l'une de nos farouches sentinelles ou l'une des gardes ? A mon tour, permettez-moi d'être curieuse et de vous demander ce qui vous a tiré loin de notre belle cité ? »

Lilith détourna la tête des broussailles partiellement dépouillées de leurs feuilles devant elle pour répondre à sa consœur. La Jinmen avait accepté de satisfaire sa curiosité et demandait sa part en retour, c'était ainsi que cela marchait et la Sentinelle ne s'en plaignait pas du tout, loin de se méfier de ses sœurs Amazones.

« Je suis une Sentinelle, confirma-t-elle amusée mais un peu flattée quand même du terme « farouche ». Je profitais d'un temps de congé pour accompagner une sœur à Cydonia, je voulais visiter cette ville dont je suis originaire, hélas j'y ai eu certaines mésaventures qui m'ont forcées à différer mon retour à Muria. Je préfère de mille fois m'attirer les foudres de Kiera que risquer d'attirer des ennuis à notre cité. J'en ai profité pour visiter un peu Azthia. »

Une visite riche en aventure et en péripéties au cours de laquelle elle avait été proie et chasseresse. Riche également en leçons et expériences. Lilith avança quelques minutes la tête dans ses souvenirs. La forêt était calme si l'on comptait les bruits de pas des quatre voyageurs, le sifflement du vent froid d'automne dans les branches et les bruissements d'insectes.

« Vers quelle contrée votre travail de guide vous a-t-il mené ? »

Demanda-t-elle au bout d'un moment à Kuraï.

Kurai hochait légèrement la tête à sa réponse, elle comprenait parfaitement qu'elle ai préféré s'éloigner de la cité, gardant ses embêtements pour elle plutôt de les communiquer à leurs soeurs qui n'étaient en rien concernée. C'était la base de la philosophie de cette cité, vivre cachée pour vivre heureuse, sortir, c'était s'exposer aux ennuis, aux dangers et aucune de celle qui s'y risquaient n'aurait eu l'audace de les apporter à Muria.

C'était donc une sentinelle, native de Cydonia... Toujours bon à savoir. Le nom de celle dont elle était si proche aussi, au cas où elle aurait eu besoin de la trouver. Ce n'était pas qu'elle en eu l'intention mais on ne pouvait jamais prévoir ce que l'avenir nous réservait.

Kurai acquiesçait simplement sans relancer la conversation, profitant du calme à l'approche de Muria, sachant pertinemment que ça ne durerait pas une fois dans ses murs. Si Lilith et elle étaient parties depuis trop longtemps, l'annonce de leur retour allait faire venir à elles pas mal de leur consoeurs... Et leurs protectrices respectives sans aucun doute et ce à peine auraient-elles fait un pas dans leur cité. Pas un instant, elle ne doutait qu'on ne les ai déjà repéré et que la rumeur ne commence dors et déjà à se répandre.

-" Vers quelle contrée votre travail de guide vous a-t-il mené ? "

Lilith relançait leur discussion et Kurai lâcha un petit soupire amusé.

-" Toutes ?" Elle lui sourit, amusée.

-" Non, presque, surtout concentrées au sud et à l'intérieur des terres. Je me suis arrêtée aux plaines arides mais j'ai vu pas mal de ce pays je dois admettre. Sa diversité est une joie mais ses habitants, peu importe les villes traversées, sont bien plus souvent mal intentionnés que de nobles gens. Il me tarde de retrouver Muria pour son calme et sa tranquillité, ne pas avoir à se défendre pendant quelques temps me reposera."

C'est vrai qu'elle en avait vu des choses, rencontré des gens, pas forcément que des mauvais comme elle le laissait sous entendre mais certaines rencontres, douloureuses, étaient encore trop fraîches dans sa mémoire pour pouvoir les confier à qui que ce soit avec les doutes qu'elles avaient réussi à faire naître en elle. Ses sentiments avaient été révélés à certains, à elle-même surtout, lui faisant croire qu'elle n'était peut être pas seulement vouée à la vengeance...

-" Je crois que Muria est une réelle chance pour nous, l'un des rares endroits où l'on peut vivre en paix avec celles qui ont choisit d'y être et d'y demeurer."

Oui, elle l'aimait sa cité, bien plus maintenant qu'elle avait passé de si longs mois sur les routes qu'au moment de son départ, mue par le besoin de se venger, de retrouver celui qui avait noircit son coeur et son âme.

[ Modération par Eléa : Attention, les actions doivent être en italique ]
[ POST MJ A VENIR ]

Lilith entendit Kuraï soupirer, elle l'embêtait peut-être avec ses questions : la Jinmen ne paraissait pas habituée à un papotage innocent. Cependant elle lui répondit avec un petit sourire, indiquant que cela ne la dérangeait pas tant que ça.

« Toutes ? »

La réponse fit rire Lilith.

« Non, presque, surtout concentrées au sud et à l'intérieur des terres. Je me suis arrêtée aux plaines arides mais j'ai vu pas mal de ce pays je dois admettre. Sa diversité est une joie mais ses habitants, peu importe les villes traversées, sont bien plus souvent mal intentionnés que de nobles gens. Il me tarde de retrouver Muria pour son calme et sa tranquillité, ne pas avoir à se défendre pendant quelques temps me reposera. »

Les propos de Kuraï sur les personnes mal-intentionnées ramenèrent à l'esprit de Lilith celles qu'elle avait elle-même rencontrées, c'est vrai qu'il y avait pas mal de gens qui agissaient avec un mépris pour les vie des autres et uniquement dans leur propre intérêt, cependant elle n'aurait pas dit que ceux-là comptaient la majorité de la population. Ceci posé elle ne pouvait nier qu'après sa rencontre avec son père il lui avait fallu du temps pour cesser de se méfier de chaque hommes qui l'approchaient, était-il plus aisé de voir la méchanceté chez les autres quand elle nous obsédait ?

Tout comme la Jinmen, Lilith se réjouissait de retrouver l'univers fiable et confiant de Muria, car il était indéniable qu'après ces dernières péripéties elle apprécierait la sécurité de la cité caché, bien que contrairement à la chaman elle reprendrait son service dès son retour.

« Je crois que Muria est une réelle chance pour nous, l'un des rares endroits où l'on peut vivre en paix avec celles qui ont choisit d'y être et d'y demeurer. »

La Sentinelle opina tout à fait d'accord avec Kuraï. Pour une fois elle ne regrettait pas le manque d'hommes libres à Muria, ceux qu'elle avait rencontré lui avaient appris qu'ils oubliaient facilement que les femmes étaient leurs égales.

« J'aime Muria et mes dernières péripéties me l'ont confirmée. Si je n'ai pas choisi de m'y installer contrairement à toi, je n'hésite pas à décider d'y demeurer et c'est pour permettre aux femmes qui désirent y rester libre que je suis devenue Sentinelle. »

Un vent froid se leva arrachant des feuilles résistantes sur leurs branches. Lilith resserra les pans de sa cape pour empêcher la bise de s'y infiltrer la faisant frissonner. Jâani hennit doucement en sentant qu'ils approchaient de Muria et la jeune femme l'apaisa en lui tapotant le cou. La chaleur corporelle de la jument était très agréable et elle prolongea son câlin pour en profiter un peu plus. Plongée dans ses rêveries Lilith eut une idée.

« Dis-moi Kuraï, accepterais-tu de m'enseigner ta langue natale ? J'ai une certaine aisance dans les langues, cependant je n'ai encore jamais eu l'occasion d'apprendre le Jinmen. »

Lilith lui offrit un sourire avec un regard pétillant, apprendre le Jinmen était une idée qui lui trottait dans la tête depuis un moment et qui de mieux qu'une consœur Amazone pour le lui apprendre ? À supposer qu'elle accepte bien sûr.

-" J'aime Muria et mes dernières péripéties me l'ont confirmée. Si je n'ai pas choisi de m'y installer contrairement à toi, je n'hésite pas à décider d'y demeurer et c'est pour permettre aux femmes qui désirent y rester libre que je suis devenue Sentinelle. "

La confidence de Lilith lui tira un sourire ironique. Comment s'empêcher de mettre en opposition leurs motivations? Ce n'était pas pour la sentinelle ce sourire acerbe mais pour elle-même qui ne se vouait qu'à une sombre vengeance alors que l'autre amazone se vouait à défendre leurs soeurs... Ayant noté qu'elle la tutoyait, elle se le permettait aussi bien qu'elle en ai quelque peu perdu l'habitude. Pourtant à Muria, toutes les femmes ou presque le faisaient même sans se connaître mais en hors de cette cité, Kurai se refusait à user du tutoiement en dehors d'une relation de confiance. Ça imposait une certaine distance, une notion de respect de l'autre.

-" Tu fais de ta vie une noble cause Lilith. Tu sembles être ce que l'on peut appeler quelqu'un de bien. "

Elle n'en disait pas plus, saisie par le froid et la différence de mentalité entre elles. Pourtant toutes deux étaient des femmes blessées, sinon elle comme Lilith ne seraient pas là, mais contrairement à la Jinmen, la sentinelle ne gardait pour seul motivation la vengeance... Ou peut être l'avait-elle déjà accomplit et trouvé la paix? Bêtement, elle se retrouva la bouche ouverte, sur le point de lui poser la question mais se retint au dernier moment. C'est presque si ses mâchoires ne claquèrent pas quand elle referma la bouche. Non, elle ne pouvait pas exiger de Lilith qu'elle lui confie cette expérience, cette bribe de passé qui était si douloureuse pour chacune des femmes ayant élu domicile à Muria alors qu'elle ne le ferait pas si on le lui demandait.

Le froid lui tirait un long frisson et son écharpe se gonfla du vent qui faisait voler les feuilles de leur forêt comme des papillons en plein été. D'une main aux doigts glacés, elle ramenait l'étoffe sur sa poitrine découverte et remonta les pans de son kimono un peu plus haut sur ses épaules. Pas qu'elle soit spécialement frileuse mais l'hiver commençait à se montrer au bout de cet automne et il lui semblait particulièrement précoce.

-" Dis-moi Kuraï, accepterais-tu de m'enseigner ta langue natale ? J'ai une certaine aisance dans les langues, cependant je n'ai encore jamais eu l'occasion d'apprendre le Jinmen. "

Lilith coupait court à ses pensées futiles sur le temps qui allait en se rafraîchissant et la Jinmen s'étonna de pareille requête. Pas que ce soit déplaisant mais simplement, oui, surprenant. Un instant, elle réfléchit à question mais un petit sourire innocemment joyeux se dessina sur son visage. Elle adorait les langues, alors enseigner la sienne serait un privilège, surtout à une femme telle que Lilith, droite et fière, forte aussi.;

-" Ce sera avec plaisir. "

Le regard pétillant de sa consoeur la confortait dans l'idée qu'elle méritait bien un effort de socialisation de sa part. Il y avait quelque chose de franc et de candide chez elle qui la touchait, comme une preuve qu'on pouvait se reconstruire après l’évènement sinistre qui nous menait en cette cité. Dans un soucis d'équité, la Jinmen eut une idée en se souvenant de l'arc que Lilith avait menacé de pointer sur elle à leur rencontre.

-" Et serais-tu capable de m'apprendre à me défendre un minimum ? Je ne suis pas très forte no très habile, je ne voudrais pas empiéter sur ton temps..."

Hors de question de lui dire pour la Maho et ce serait toujours utile de pouvoir se défaire d'un assaillant sans avoir à utiliser cette magie qui la dévorait à petit feu, l'emmenant toujours plus loin dans l'ignominie. Et puis... Il pouvait lui être utile de conserver son effet de surprise contre un adversaire trop fort pour qu'elle puisse s'en défaire à main nue.

Désormais, Kurai était bien plus détendue aux côtés de Lilith alors qu'elles avançaient côtes à côtes, comme les deux opposés d'un même ensemble.

[ S'il vous plait, POST MJ à VENIR, merci de ne plus poster à la suite en attendant ^^' ]

Tandis qu'à l'Est se levait la puissance tant redoutée, la forêt Amazone recouvrait quant à elle la tombe d'une âme éternelle qui n'attendait que son réveil. Le vent se faisait discret, comme impressionné par la présence de celle qui fut jadis « une grande Dame » des contrées d'Azthia. Le chant des oiseaux s'était tut, les animaux avaient fui la scène comme apeurés par celle qui dormait encore dans son tombeau. Son âme demeurait malgré le poids des années et sa mémoire, intacte, était un écho de la cité des femmes libres. Il fut jadis un temps où elle était une reine Amazone, celle qui avait pris le contrôle d'une cité chancelante pour le bien de cette dernière, celle qui mena la guerre contre son propre sang. Diane avait cherché la vérité parmi les mensonges, malgré son immortalité, elle avait réveillé l'âme endormie et son ombre avait recouvert le royaume des morts, son ambition avait consumé son corps et son esprit. Elle régnait sur le monde spirituel depuis si longtemps que son ombre rôdait derrière chaque âme perdue en ces lieux et pourtant, la présence d'une simple petite fille avait suffit à venir à bout de son enveloppe charnelle. La vengeance ravivait sa chair, rongeait son âme au point qu'elle avait juré revenir. IL était éveillé désormais, et son tour venait, nécessairement.

La vie de l'Amazone avait été parsemée de doutes, de morts et de sang. Elle avait été en son temps le cauchemar le plus craint d'Azthia et sa propre cité n'osait pas murmurer son nom. Fantôme parmi les morts, celle qui naquit dans le Joyau jadis n'avait pas hésité à tuer son propre sang plus d'une fois, celles qui s'opposaient à sa Grâce étaient exécutées en public, ni plus ni moins, au nom de la trahison. Les hommes ne trouvaient pas grâce aux yeux de la jeune Cydienne et pourtant, l'un d'eux avait survécu suffisamment longtemps pour qu'elle engendre un enfant. Une fille, qu'elle avait renié en comprenant qu'elle lui volerait un jour le pouvoir. Dévorée d'ambition, la souveraine avait supprimé toutes celles qui auraient pu prétendre à son titre, que ce soit sa chef des Sentinelles, ses fidèles Amazones ou encore, les filles qui se montraient trop ambitieuses.

Le monde l'avait rejeté, son âme consumée, IL était venu à son secours, lui offrant un second souffle, un espoir de se venger mais le temps avait passé et le monde s'était refermé une nouvelle fois sur elle et sur son « maître ». Ambitieuse, jamais elle ne l'avait considéré comme tel et plus encore, elle souhaitait prendre sa place. Le monde spirituel ne lui avait jamais suffit, elle avait toujours rêvé de plus et les portes du royaume de celui qui lui avait offert l'immortalité l'attiraient inexorablement. Invariablement, elle voulait en devenir à son tour le maître car régner sur l'âme et l'esprit était une vengeance suffisante à ses yeux. Les années avaient passé et si la petite fille avait fait voler en éclats ses aspirations, jamais l'Amazone n'avait cessé d'y croire, elle serait le pilier de la mort.
Car elle était la Mort en personne.

La terre s'écarta et une main jaillit du sol tandis qu'un corps reprenait vie. La vengeance animait chaque fibre de son corps tandis qu'elle s'extirpait des entrailles du monde. Méconnaissable, son corps rachitique reprenait peu à peu des couleurs à l'appel du « maître ». IL était revenu et d'aussi loin que venait l'appel, elle devait y répondre. Son réveil était proche, et elle savait déjà ce qu'elle avait à faire. IL ne l'avait jamais domptée et ce n'était malheureusement pas aujourd'hui, si faible, qu'il parviendrait à le faire. Tandis qu'elle revenait à la vie, la Mort entendit deux femmes parler. Elle se leva, prenant le temps de goûter à cette vie nouvelle, la quatrième qu'elle avait l'occasion de connaître. Elle serait une chance et cette fois-ci, elle aurait sa vengeance. Son corps reprenait vie et fut bientôt à son paroxysme, ses longs cheveux bruns flottant dans son dos comme si elle n'était jamais morte. Elle s'approcha des voix en restant discrète. L'une parlait une langue qu'elle ne comprenait pas et semblait l'apprendre à l'autre.

« Quelle est cette langue de sous être ? » fut sa seule question lorsqu'elle sortit des sous bois.

Elle remarqua alors l'arc, signe distinctif des traîtresses de son ancienne cité. Son sourire s'élargit tandis qu'elle demandait alors, d'un ton froid et pourtant si habituel :

« Amazones pas vrai ? Menez-moi à l'enfant. »

C'était un ordre, de toute évidence. Bein qu'elle ai perdu l'habitude de parler depuis quatre ans qu'avait duré son trépas, Nessa était née pour régner, chaque fibre de son être ne vivait que pour cela.

[ A vous de jouer ! ]

Lilith attendit avec patience la réponse de sa compagne, détendue par la proximité de Muria et de ses murs protecteurs. La réponse affirmative de Kuraï renforça sa joie. Sa question la fit déborder de bonheur.

« Et serais-tu capable de m'apprendre à me défendre un minimum ? Je ne suis pas très forte ni très habile, je ne voudrais pas empiéter sur ton temps... »

Enseigner l'art du tir-à-l'arc et partager ainsi sa passion était une bénédiction pour elle et la Sentinelle se voyait bien transmettre ses connaissances aux autres Sentinelles quand elle serait plus âgée. Ce fut donc sans hésitation qu'elle répondit.

« Ce sera avec joie de t'apprendre à tirer à l'arc, c'est la seule arme que je maîtrise et pour combler d'autres forces c'est déjà bien. Rassure-toi, la force vient avec la pratique, de même que l'habileté et c'est vrai pour toute compétence : “c'est en forgeant que l'on devient forgeron”. Et mon temps n'est pas trop précieux au point de ne plus en avoir pour mes consœurs, c'est le moindre que je puisse faire en retour si tu m'apprends le Jinmen. »

Lilith se sentait pleine d'une grande extase à l'idée des prochains jours à venir à Muria, entre toutes ses sœurs qu'elle n'avait vu depuis de longues semaines et les leçons elle aurait de quoi occuper les dernières semaines d'automnes. Profitant du fait qu'il leur faudrait encore quelques dizaines de minutes avant d'atteindre la cité cachée Kuraï commença à lui enseigner sa langue maternelle et Lilith de répéter ce qu'elle lui enseignait avec d'autant plus de plaisir qu'elle sentait que la Jinmen n'était pas accoutumée à cette complicité entre élève et professeur et la cydienne lui était reconnaissante de l'effort qu'elle consentait à faire.

Occupée aux leçons Lilith ne perçut pas la présence dans leur dos et se retourna brusquement avec surprise en entendant une voix féminine derrière elle.

« Quelle est cette langue de sous être ? »

Lilith s'injuria mentalement : comment avait-elle pu se laisser distraire alors qu'elle n'étaient pas encore en sécurité ? Était-elle une Sentinelle ou une adolescente naïve ? La femme sortie de nulle part n'était pas armée mais elle arborait un sourire qui faisait froid dans le dos de la jeune femme. Ses traits étaient indubitablement ceux d'une cydienne, mais elle ne la reconnaissait pas et sa question la mettait mal-à-l'aise. “Sous-êtres” ? Ce mot lui fit décider que la femme était une ennemie. Voyant son arc l'inconnue reprit la parole en affichant un sourire étrange.

« Amazones pas vrai ? Menez-moi à l'enfant. »

Le ton était froid et autoritaire et Lilith ne s'y trompa pas, cette femme était dangereuse. D'ailleurs de quel enfant parlait-elle ? Elle doutait qu'il s'agisse d'une mère revenant chercher sa fille… Lilith banda son arc vers la femme.

« Puisque vous savez qui nous sommes, vous devriez savoir que vous ne pourrez partir d'ici saine et sauve. Quant à vous amener auprès de l'une des nôtres il vous faudra nous faire preuve que vous êtes une amie et entre nous vous êtes sur la mauvaise voie. »

Au fond d'elle Lilith sentait que la menace était vaine, que cette femme n'en aurait cure, cependant si elle leur avait demandé de les guider vers une Amazone, qui d'autre serait cette enfant sinon ? C'était qu'elle ne connaissait pas la route vers Muria. Quoiqu'elle n'aurait pas parié dessus. Néanmoins son devoir lui dictait de ne pas céder ni permettre à cette femme d'approcher davantage de Muria sans avoir montré patte blanche quoique cela lui en compte. Et dire qu'elle se réjouissait de rentrer enfin chez elle !

[Kuraï : je me suis permise de te faire agir pour coller au post de Mort]

[ Je suis rouillée désolée. ^^ ]

La jeune femme était née pour régner, elle avait toujours été une déesse, de son vivant comme dans son trépas. Elle traumatisait les mémoires et son nom avait été tut des années durant après sa disparition, tel était le pouvoir aux yeux de la Mort en personne. Nessa était puissante, elle possédait le don de vie et de mort sur les autres, plus encore qu'Azael, elle dominait le monde astral, la porte entre les morts et les vivants. Telle était la véritable puissance aux yeux de celle qui fut jadis une Cydienne. Les femmes étaient sans doutes la pire engeance aux yeux de l'ancienne reine Amazone, elle qui considérait qu'elle avait été trahi par toutes celles peuplant son ancienne cité et pourtant, c'était bien à des femmes qu'elle devait parler pour pénétrer dans cette cité qui n'était qu'un lointain souvenir qui résonnait encore dans sa mémoire.

La forêt sentait toujours la même odeur. De tout temps, Nessa avait trouvé refuge dans cette forêt. Les arbres, les bestioles qui y vivaient ne mentaient pas, tous étaient terrorisés par sa présence et la forêt elle-même semblait retenir son souffle en sa présence. Quand elle était là, le monde lui-même semblait craindre son souffle. Celle qui fut jadis la reine de la cité des femmes libres se complaisait dans cette situation. Elle aimait son pouvoir, elle aimait l'aura qu'elle dégageait et la crainte que sa seule présence insufflait chez les êtres vivants de ce bas monde.

Le temps avait passé depuis sa deuxième ou troisième mort, elle ne se souvenait plus exactement combien de fois elle avait quitté le monde et pourtant, elle tenait encore rancœur à la petite qui avait causé sa perte. De son vivant, Nessa s'en était toujours méfiée, elle avait commandité sa mort et celle de sa jumelle pour être certaine de s'éviter des problèmes mais la dévotion de ces deux imbéciles envers leur cité s'était muée en déification. Elles avaient eu accès au panthéon et c'était à cause de cette garce qu'elle avait été tuée. A son réveil, elle avait compris que Diane avait été obligée de se réincarner, seule solution pour subsister après avoir violé les lois sacrées des dieux. La dame avait cherché longtemps qui aurait pu accueillir son âme et c'était nécessairement la Clé qui avait du être son réceptacle. C'était pour elle que l'autre s'était réveillée et par elle qu'elle avait péri.

La Mort en personne, voilà qui elle était et pourtant, cette Amazone ne semblait pas la craindre. Amusée tout autant qu'agacée qu'elle ne lui réponde pas ou encore, qu'elle se permette de la pointer de son arc, la Cydienne la toisa d'un regard froid.

« Je fus jadis reine de cette cité misérable créature. Mène moi à la Clé, car sans elle, ton arme ridicule ne pourra rien contre moi. » lâcha-t-elle froidement « Je ne suis ni amie ni ennemie de cette cité, je suis au dessus de tout ça. Vous me connaissez, votre mémoire me connaît, réfléchissez bien. »

Nessa avait marqué la vie de chaque Amazone, c'était évident à ses yeux. Elle était la « mort », la « faucheuse », la « dernière âme ». Il était impensable à ses yeux qu'elles ne puissent pas la connaître, elle était morte la veille … et pourtant, elle commença à douter.

« En quelle année sommes-nous ? »demanda-t-elle enfin.

Le vent froid d'automne balayait les mèches sur le front de Lilith, chatouillant son nez sans qu'elle s'en soucie tant toute son attention était concentrée vers l'étrange femme qui se moquait d'être la cible de sa flèche. Il existe toute sorte de personnes dans ce monde et au moins autant de façons de réagir lorsqu'on est menacé par d'arme qui se regroupent en un nombre restreint d'émotions. En règle général il y avait toujours une point de crainte. La réaction de la femme était des plus étranges, pas la moindre once de crainte d'être blessée juste de la froideur, du désintérêt pour le danger dans laquelle sa position la plaçait et du mépris pour celle qui la menaçait. Son regard plus que le vent fit frissonner la Sentinelle.

« Je fus jadis reine de cette cité misérable créature. Mène moi à la Clé, car sans elle, ton arme ridicule ne pourra rien contre moi. Je ne suis ni amie ni ennemie de cette cité, je suis au dessus de tout ça. Vous me connaissez, votre mémoire me connaît, réfléchissez bien. »
Les premiers mots la glacèrent, était-ce une plaisanterie ? Une reine de Muria ? Lilith tenta de se remémorer le nom des reines ayant précédé Philéa : Jenaa et Nessa. Cependant il était trop improbable que l'inconnue soit l'une d'entre elles puisqu'elles étaient toutes deux décédées. Présomptions insultantes, n'est-ce pas ? La jeune femme espérait en être aussi certaine que sa raison. Près d'elle Kuraï ne pouvait lui être d'une plus grande utilité puisque n'étant pas à Muria depuis longtemps ni même azthienne. Pensive l'Amazone analysa le reste de l'affirmation de l'inconnue. Le terme de “Clé” appliqué de toute évidence à une jeune fille, dans sa mémoire cette idée fit résonner un souvenir, mais impossible de remettre la main dessus. Pour ce qui était de l'invulnérabilité ce serait aisé à vérifier si cela avait été dans le caractère de Lilith de tirer sur une personne qui n'avait eu encore aucun geste d’agressivité.

La femme pouvait bien se prétendre ni amie ni ennemie autant qu'elle le désirait pour Lilith la décision était déjà prise : l'inconnue était ennemie. Hors de question de baisser son arc malgré les frissons qui s'insinuaient en elle et la Sentinelle resserra sa prise ne sachant encore si elle allait attaquer en prévention ce qu'elle désapprouvait habituellement ou tenter de contacter la cité pour demander aide et conseil.

« En quelle année sommes-nous ? »

Lilith tressaillit en entendant la question qui paraissait sincère et cela la rendait encore plus menaçante car cela laissa envisager la vérité de son identité. Puisque rester à se méfier sans dire mot ne servait à rien la Sentinelle prit l'initiative de répondre.

« Plutôt que d'affirmer quelque chose d'impossible délivrez donc votre identité, j'aviserais ensuite si vous êtes alliée ou ennemie. »

Tout en parlant Lilith recula et donna un coup de coude sur la croupe de Jâani pour la lancer au galop, ainsi la jument se dirigerait vers la cité et l'Amazone espérait que ses collègues sentinelles viendraient faire un tour dans la forêt en la voyant arriver sans cavalier. Avec un peu de chance l'une d'entre elles reconnaîtrait la jument et encouragerait les autres à se presser. Puis elle ajouta afin de maintenir la femme sous garde.

« Nous sommes en 155. »

Elle n'ajouta rien scrutant la réaction avec attention de l'inconnue.

Il y avait tellement d'années qu'elle n'avait pas foulé ces terres, nombreuses auraient été les âmes heureuses de rejoindre le monde des vivants, d'obtenir une nouvelle chance de salut et surtout, la joie de revoir les êtres aimés et si vite délaissés par le trépas. Beaucoup de défunts auraient échangés le peu d'humanité qu'ils avaient su conserver pour quelques jours de vie. Pour sentir à nouveau le soleil sur leur peau, la chaleur de le cœur battant à tout rompre et le souffle chaud de la vie. Mais Elle n'était pas de ces gens-là, la mort était son pain quotidien, elle retirait la vie avec plaisir et non sans une certaine extase. Elle se complaisait du dernier soupir d'un mourant et s'émerveillait du dernier cri d'un condamné. Le soleil, la chaleur du monde, tout cela était bien étranger à celle qui hantait le monde spirituel.

Le vent se fit plus froid que jamais et pourtant, la peau de la jeune femme ne semblait pas s'en soucier, bien au contraire, malgré le peu de tissus sur cette dernière, sa chair semblait simplement figée dans le temps. L’œuvre de son maître était derrière cela, voilà bien longtemps que Nessa ne ressentait plus aucune émotion en dehors des meurtres ou des meurtrissures qu'elle pouvait infliger et bien longtemps que son corps avait oublié la douleur. Même quand cette traîtresse de Diane lui avait ôté la vie, elle n'avait rien ressenti, comme si par trop longtemps déjà, son âme était vide. De son vivant, la Reine avait tout fait pour la voir mourir et les dieux l'avaient acceptés en son sein tandis qu'ils lui refusaient l'entrée au Panthéon. Une haine viscérale avait nouée l'âme même de l'ancienne Amazone envers celle qui fut jadis sa Chef des Sentinelles, la plus jeune qu'il soit. Presque cent ans séparaient désormais leur propre trépas et pourtant, leurs destins semblaient être voués à s'affronter quoi qu'il advienne. Mort aurait volontiers échangé sa place avec celle qui boudait le Panthéon et préférait se réfugier dans les jupes d'une gamine. Pourquoi les dieux ne comprenaient-ils pas la puissance ? Pourquoi avoir choisi cette adolescente incapable de son vivant d'accomplir quoi que ce soit ? Quelle honte. De toute façon, elle était presque aussi forte que la plupart d'entre eux désormais et bien au dessus du piètre niveau de la déesse sylvestre. Sa vengeance aurait tout lieu de lui offrir les portes du royaume divin.

La peur, Nessa s'en nourrissait plus que tout. Elle avait passé son existence entière à dénigrer les êtres vivants, ce n'était pas pour changer dans la mort. Elle ressentait allègrement celle de la jeune femme en face d'elle et cela ne pouvait que la réjouir. Inspirer la peur était tellement plus jouissif que se savoir aimée. Tout ce qui comptait désormais était de rejoindre la Clé, d'aspirer à une vengeance tant méritée. Jamais plus une fille de Diane ne verrait le jour sans qu'elle ne lui ôte la vie, qu'elle soit de son sang n'y changeait rien.

Son interlocutrice la mettait en joie. Une joie malsaine aspirée essentiellement par l'envie de lui faire du mal certes mais en joie tout de même. Elle l'observait et comprenait que la jeune femme ne savait pas qui elle était. D'instinct, Mort eu envie de prendre sa vie mais, n'ayant plus les droits pour trouver la cité des femmes libres, elle avait besoin d'elle pour y pénétrer. Qu'elle ne sache pas qui elle était la mettait en colère mais pour autant, cela la réjouissait également, elle n'en aurait que plus peur lorsqu'elle comprendrait.

« J'ai toujours aimé les personnes dans ton genre » offrit-elle pour toute réponse, « Elles sont celles qui me procurent le plus de plaisir une fois leur heure venue. »

Pour toute réponse à nouveau, elle lui offrit un sourire malsain, où régnait tant d'émotions négatives que mieux valait sans doutes les ignorer. Nessa approcha alors, pour ne plus se trouver qu'à quelques centimètres de la pointe de la flèche. Elle n'avait pas une seule fois lâché du regard son interlocutrice, bien au contraire, elle semblait comme prise au piège sauf que c'était tout l'inverse. Le piège, c'était elle qui le maniait avec dextérité. 155, elle avait donc perdu près de quatre ans mais peu importait, le jeu n'en serait que plus amusant.

« Mon nom est Mort mais je fus jadis appelée Nessa Juhel, première Reine Amazone de ta misérable cité. Quel est le tien petite créature ? »

La voix semblait comme sortie d'Outre tombe et ce n'était pas peu dire. Son regard, vide d'émotion, froid comme la mort, restait fixé sur sa victime. Son souffle était régulier, preuve qu'elle n'avait ni peur de mourir, ni peur de t'affronter.

« Et bien, qu'attends-tu pour me tuer ? Une fois que tu l'auras fait, mène-moi à la Clé, je n'ai pas de temps à perdre avec de basses engeances, IL m'attend déjà. »

[ Normalement je clos au prochain post. ^^
D'ailleurs, il faudra voir si tu souhaites faire un rapport à Eléa ou Philéa ! ]

« J'ai toujours aimé les personnes dans ton genre. Elles sont celles qui me procurent le plus de plaisir une fois leur heure venue. »

Cette phrase, cette phrase seule suffit à assurer à la jeune Sentinelle du danger de l'inconnue. C'était une ennemie, une amoureuse de la mort qui suintait la menace. Lilith resserra encore sa prise sur la manche de son arc. Elle lui paru que rien d'autre n'existait qu'elle et sa cible, parfaitement visible face à elle. L'inconnue ne sembla pas plus affectée d'entendre l'année que d'être prise pour cible par une flèche de Sentinelle. Au fond d'elle Lilith doutait qu'il s'agisse de folie ou d'inconscience, cette femme ne la craignait pas. Ses prochains mots la glacèrent.

« Mon nom est Mort mais je fus jadis appelée Nessa Juhel, première Reine Amazone de ta misérable cité. Quel est le tien petite créature ? »

Ce n'était pas possible, un mensonge et pourtant au fond d'elle Lilth savait que c'était la vérité. Quelle Amazone n'avait jamais entendu parler de Mort ou de Nessa la première impératrice ? La mort était face à elle.

Des peurs anciennes rejaillirent du trefond de la mémoire de la jeune femme, à l'époque où chez son père elle écoutait terrifiée les récits de ses frères sur la Mort qui arpentait la terre pour emporter avec elle les vivants. Des histoires que les garçons, taquins, se plaisaient à raconter à leur petite sœur sans s'avouer qu'elles les effrayaient de même, et la petite les écoutaient incapable de se détourner malgré sa peur, blottie contre le seul des trois frères à ne pas raconter qui bravait sa propre frayeur pour la rassurer. Systématiquement leur mère devait dormir dans le lit de sa fille pour apaiser ses angoisses sans comprendre d'où lui venaient ces cauchemars, la petite fille n'osant jamais lui dévoiler les plaisanteries de ses frères.

Face à elle la Mort s'avança, sa voix sonnait comme issue du royaume des morts et ses yeux, plongés dans ceux de Lilith était un appel au trépas. Elle s'avança jusqu'à toucher la pointe de la flèche toujours tenue contre elle et sa dernière provocation résonna dans l'esprit de la jeune femme sans parvenir à lui donner du sens.

Un hennissement strident déchira le silence de la forêt. Jâani ? Qui qui soit le destinataire du cri, l'appel rappela la Sentinelle à la raison. Elle n'était plus la petite fille qui pleurait à l'idée que la Mort elle-même puisse venir la chercher, non, elle était une Sentinelle, une femme libre qui avait choisi d'offrir ses talents pour protéger ses sœurs.

Elle lâcha la corde.

Une nouvelle rafale de vent secoua les branches presque dégarnies de la forêt, la morsure du froid sur son visage assurait à la jeune femme qu'elle était toujours en vie. La flèche n'avait pas eu l'occasion de voler bien loin et s'était fichée profondément dans la poitrine de celle qui se nommait elle-même Mort. Nessa, la première impératrice. Juhel ? Qu'importe son nom finalement. Elle sourit d'un air entendu, le trait ne lui avait pas même causé la moindre douleur. Lilith recula prestement, dégoûtée de sa proximité. Elle la voyait telle qu'elle était désormais, non pas La Mort en personne mais l'un de ses misérable pantin, faible ersatz qui avait besoin d'un nom ancien. Si faible qu'elle avait besoin d'une Amazone pour regagner la cité cachée quant elle se prétendait sa première impératrice.

« Je ne peux vous tuer d'un simple trait, c'est un fait maintenant avéré, déclara-t-elle d'un voix qui avait repris de son assurance, comme s'il lui avait fallu se perdre dans ses vieux démons pour retrouver sa maîtrise d'elle-même et son ton était froid, froid d'indifférence et de mépris pour celle qui se réjouissait de ne plus ni souffrir, ni mourir. Toutefois, pour autant que je m'en souvienne, vous avez été défaite, tout immortelle et invulnérable que vous paraissez. Vous me demandez de vous mener à la Clé ? Ainsi donc c'est vous qui avez besoin de moi, pourquoi devrais)je vous craindre ? Parce que vous pouvez me tuer ? Lilith éclata d'un rire mécanique et un peu fou, si loin de son naturel. Allons si vous me tuer, il vous faudra attendre un autre Amazone. Combien devrez-vous en éliminer avant d'en trouver une assez faible pour s'asservir ? Si je meurs de votre main, je souhaite revenir en fantôme pour le seul plaisir de vous voir être défaite une fois encore par vos anciennes sœurs. Je rirais alors à mon tour de votre faiblesse si bien masquée par votre apparente invulnérabilité. C'est là la supériorité de la Vie sur la Mort : quoique la Mort soit notre destinée à tous, la Vie revient sans cesse encore et encore, elle faire bourgeonner les arbres au printemps alors que le gel de l'hiver avait tué toutes les herbes retardataires. Venez ! Tuez-moi donc vous verrez si je vous mènerais plus sûrement à la Clé en cadavre ou non ! En attendant je me ferais une joie de vous transformer en jolie petite hérisson, hérissé de flèches afin que mes sœurs en arrivant vous reconnaissent comme celle que vous êtes : une erreur de la Mort au cœur de la Vie ! »

Lilith aimait la vie. Elle l'aimait avec fureur et passion et c'est parce qu'elle l'aimait tant qu'elle se refusait de se faire le guide d'un pantin de la Mort. En devenant Sentinelle elle s'était engager à sacrifier s'il le fallait sa vie pour celle de ses sœurs. Selon sa promesse l'archère encocha une nouvelle flèche et prit soin de viser l'œil gauche de Mort. Chaque trait qu'elle planterait sur son corps serait un hymne à sa vie.

Au loin derrière elles montait un écho d'agitation, les Sentinelles avaient vu la jument.

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