En tant que capitaine de la garde de Silmarie, Anarel était amené à voyager dans le cadre de missions diplomatiques ou de recherches d'informations. Il rentrait avec plus ou moins de succès, mais toujours avec plus de joie que s'il était resté enfermé dans son bureau.

Cydonia exerçait un grand rayonnement sur le continent grâce à sa puissance démographique et économique et c'est pourquoi la cité était une des destinations clés pour nombre d'hommes politiques. Le capitaine en faisait partie et avait ainsi eu l'occasion de faire quelques allers et retours entre Silmarie et Cydonia.

Cette fois, Anarel avait dû discuter personnellement avec des Cydiens haut placés pour le maintien de faveurs économiques mutuelles. Les négociations avaient duré des heures pour n’être finalement que peu fructueuses. En fait, les accords étaient restés mot pour mot les mêmes que les précédents. La lutte pour y arriver avait pourtant été rude, elle consistait en un duel d’intérêts dans lequel chaque parti essayait de réduire ce qui était donné pour augmenter ce qui était reçu. Souvent, un équilibre était atteint, identique à celui qui avait été négocié la dois d'avant. Le processus était pour le jeune capitaine futile, cependant il savait bien que le résultat était nécessaire pour le bien de la cité. Il s'y pliait donc de bon gré.

Se préparant à quitter la ville, il préparait Etna ; cheval qu'il appréciait tendrement mais qu'il sortait uniquement pour des raisons pratiques. Après avoir proféré des paroles rassurantes à celle-ci, il la monta pour se mettre en route. Ce ne fut qu'après s’être éloigné de Cydonia qu'Anarel remarqua que le jour était plus qu'entamé et que déjà la nuit prenait le dessus. Tant pis, le retour attendrait, il avait besoin de repos et souhaitait ménager sa jument au pelage blanc. Il n'était cependant pas non plus d'avis de retourner en ville chercher une auberge ; y dormir ne l'intéressait pas.

Le soldat descendit alors du dos d'Etna tandis qu'elle l'observait d'un air interrogateur. Il n'était pas de l'habitude de son maître de faire ainsi les choses à moitié et lorsqu'il montait sur son dos, ils étaient la plupart du temps partis pour plusieurs lieux de trot. Il lui caressa l'écrin, puis installa un campement de fortune assez loin du chemin et à l'abri du regard pour ne pas se faire remarquer par d'éventuels bandits.

Il se jeta finalement sur l'herbe, les bras croisés sous la tête et les yeux rivés vers le ciel dénudé de tout brouillard ou de tout nuage contrairement à celui, pudique, de Silmarie. Une étoile en particulier parmi les milliards de sources de luminosité attirait son regard, la plus belle à ses yeux comme à son habitude. La lune, comme jalouse, paradait en émanant une lumière radieuse qui doucement berçait le capitaine. Les paupières lourdes, il se laissait prendre au jeu et perdait peu à peu notion de corps et de monde. Lorsqu'il s'abandonna enfin entièrement, le rêve vola immédiatement en éclats. Un son, un seul, s'était fait entendre non loin de là et Etna l'avait remarqué également car elle commençait à s'agiter.

Après avoir fait un signe discret au cheval blanc pour le détendre, Anarel fit mine de dormir, la main posé sur le pommeau de son épée. Il se tenait prêt à recevoir toutes menaces comme il se devait. C'était à celui qui surprendrait l'autre le premier.

[Si là, Anarel est agressif parce qu'il se sent menacé, pas besoin non plus de se taper dessus hein... sauf si tu es d'humeur belliqueuse ]

J'étais exténué... J'avais marché près de deux heures dans cette clairière derrière la cité, ressassant mes souvenirs les plus sombres, jusqu'à ce que las de me noyer dans les fonds infâmes de la mélancolie je décidai de rentrer chez moi. Je me dirigeai donc vers les portes de Cydonia, croisant quelques couples d'écureuils et de chevreuils sur mon trajet. Je pouvais d'ores et déjà admirer la seule beauté que je puisse encore trouver dans cette ville : la lumière des demeures se rependant à travers les rues et les réverbères, inondant la campagne de leurs feux remplis comme d'espoir. Le ciel dégagé se targuait de ses étoiles qui semblaient presque être les reflets de la cité dans le monde céleste. Cette pensée me redonna de la bonne humeur, et je décidai de trainer un peu avant de rentrer. Je regrettai alors d'être parti trop vite de la clairière dans laquelle devaient sûrement se trouver quelques fleurs nécessaires à mon commerce.
*Tant pis, les occasions ne manquent pas*, pensai-je.
Après quelques minutes de marche, j'entendis un bruit provenant de ma gauche, un bruit de métal touchant le sol. Les Astorgs avaient-ils percé les défenses cydiennes et étaient-ils venus attaquer la cité de nuit ? Non.. aucun bruit de masse n'était porté par le vent, et étant donné la courte distance me séparant de l'origine de ce son, j'aurais senti le sol trembler sous mes pieds en cas de déplacement Astorg c'était certain. Curieux, je tournai alors à gauche et m'avançai prudemment. Soudain, il y eut un craquement et une douleur lancinante me prit le crâne. Je n'avais pas vu la racine, ni les ronces dans lesquelles j'étais tombé. Heureusement ces ronces n'avaient aucune propriété pathologique et j'époussetai ma tunique en me redressant. Ma tête, qui avait percuté une roche, continuait de me lancer, et je puisai donc dans les quelques potions qui me restaient pour calmer la douleur.
En levant les yeux, je vis que je me trouvais au beau milieu d'un campement. Un coup d’œil sur ma droite me fit comprendre qu'il n'y avait ici qu'un jeune homme allongé par terre, accompagné de son cheval blanc. Celui-ci me regardait d'un air parfaitement apaisé, aussi trouvai-je ça très louche : un animal non dressé aurait paniqué, tandis qu'un animal dressé m'aurait attaqué pour défendre son maître. En aucun cas il resterait planté là, à fixer un inconnu qui venait de s'incruster dans leur campement. Comprenant que l'animal ne m'attaquerait pas, je portai mon attention sur le jeune homme étendu au sol. Dormait-il ? Peu probable vu l'ambiance étrange qui régnait ici. Une analyse, même bâclée de la situation mettait en évidence le fait que le maître savait déjà que quelqu'un le regardait. Aussi m'empressai-je de dire :
- Je sais que vous ne dormez pas, mais n'ayez crainte, je ne suis qu'un passant qui cherchait à se changer les idées en présence de ses amies les astres.
Je sifflai brusquement en direction du cheval. Soburin s'en était approché et reniflait à présent son derrière comme l'aurait fait un chien.
- Cesse donc de te comporter de façon si vulgaire, étourdi, le réprimandai-je, dans quel état serais-tu actuellement si cette jument t'avais donné un coup de sabot !
Puis me tournant vers le jeune homme qui s'était relevé je m'excusai en désignant l'endroit où j'étais tombé de la main :
- Désolé pour le dérangement causé, j'ai trébuché sur une racine et j'ai atterri dans ce buisson emplis de ronces. C'est le bruit de votre armure sur le sol qui m'a attiré ici, j'avais crains une invasion Ast-...
Je m'étais interrompu. Le jeune homme se tenant devant moi n'était pas juste un rôdeur accompagné par son cheval. C'était le capitaine de la garde de Silmarie, Anarel, un homme respecté pour ses actes passés et sa bravoure, mais surtout pour sa personnalité sans faille disait-on. Son armure, ses yeux de saphir, et même sa jument ! Comment n'avais-je pas reconnu Etna, alors que même l'animal avait été rendu célèbre par cette peinture anonyme de la bataille d'Erathia. Une rencontre des plus inattendues dans cette campagne !
- Vous.. Vous êtes Anarel n'est-ce pas ? Que faîtes-vous ici, à Cydonia ? bégayai-je encore sous le choc.
Puis me rendant compte de mon impolitesse, je tendis aussitôt mon bras droit en guise d'invitation :
- Je me nomme Swirl, honoré de faire votre connaissance, et voici Soburin, mon compagnon de voyage et ami, dis-je d'un ton respectueux, en désignant le renard qui s'était cette fois-ci mis en tête de chasser un papillon de nuit.
*Qu'il est menaçant* me moquai-je mentalement.

Je relâchai la main du Capitaine, après avoir échangé tous deux un sourire approbateur. Aucune trace d'inquiétude ne parcourait le visage du soldat, et je ne pus m'empêcher de penser que la seule menace que j'aurais pu représenter de toute façon aurait été de salir ses vêtements. Après s'être tenu face à Guerre, rencontrer un disparu tel que moi devait être comme se heurter l'orteil dans un coin de porte après s'être cassé le genou : simple détail insignifiant, exempté de toute nécessité d'y porter attention. Pourtant, je notais une pointe d'intérêt dans le regard d'Anarel. J'avais entendu parler de l'implication prodigieuse dont faisait preuve le Capitaine au sein de sa patrie, mais de là à porter de l'intérêt pour mon affaire, j'en doute fort. Je balayai cette pensée au moment où il présentait à Soburin sa jument Etna.
*Au moins, tout risque de se prendre un coup de sabot sera évité à cet impoli de renard* pensai-je.
Je vis Anarel partir chercher quelque chose dans sa tente, et revenir avec des bandages pleins les bras. Je m'apprêtai à refuser poliment, car j'avais déjà traité l'essentiel de mes blessures avec mes potions, mais le soldat n'avait pas attendu que je réponde et s'était déjà mis au travail. Je le laissai donc m'appliquer les bandages sans broncher, et sentis les picotements qui persistaient s'estomper. Le remerciant d'un geste de la tête, je le rejoignis dans sa position couchée afin d'admirer les étoiles. Le silence se prolongeait de façon paisible et agréable. J'avais entendu dire par un quelconque sage que lorsque deux personnes savaient savourer un silence, et n'en point faire un silence gêné, alors ces deux personnes s'entendraient bien à l'avenir en tout circonstance. Voilà qui était rassurant. Soudain, la voix du Capitaine s'éleva dans le crépuscule :
- Tu pourras faire réparer ta lame à Silmarie.
J'avais en effet oublié de réparer ma lame émoussée dernièrement, et la proposition d'Anarel me sembla judicieuse, car mon voyage était loin d'être achevé. Je notai avec un peu de retard que le Capitaine avait parlé de ma cité de naissance comme s'il avait deviné mon attention de m'y rendre, aussi me demandai-je si le fait que j'aie déserté puisse être une menace pour moi. De toute évidence, les habitants avaient rapporté une disparition à Anarel et non une désertion. Me promettant de réfléchir au sujet avant de rentrer chez moi, je m'enquis de répondre à la dernière question que venait de me poser le soldat :
- Alwaid. On peut dire que naître sous une bonne étoile ne fait pas tout si on épluche mon cas.
J'avais dit cela en désignant la plus grosse des quatre étoiles dessinant la tête de la constellation du Dragon.
- Elle a toujours été visible, aussi longtemps que j'ai pu admirer le ciel nocturne, même lorsque les nuages tentaient d'en obscurcir la lumière. Probablement est-ce un signe pour me donner la force de me dégager de l'emprise de l'obscurité qui me hante.. Car il reste toujours de la lumière même dans le néant le plus total n'est-ce pas ? fis-je avec une pointe d'espoir dans la voix.
Puis je le questionnai sur sa propre étoile. C'était assez inouï d'avoir une passion commune avec un si grand homme, et encore plus de sympathiser avec lors d'une nuit qui s'annonçait plutôt propice à la déprime et à la nuit cauchemardesque qui l'accompagnait.
Dans mes réflexions, je revins sur la proposition d'Anarel et me demandai si cette phrase ne cachait pas un autre sens.
*C'est comme s'il avait dit ça avec la prévision de m'emmener avec lui* constatai-je.
Ainsi, je lui demandai en l'appelant par son nom comme à mon habitude à l'égard de ceux qui n'étaient pas des amis ou dont le statut était bien au-dessus du mien :
- Monseigneur Sindh, dois-je comprendre que j'aurai l'honneur de votre compagnie lors de mon retour à Silmarie ?
La question me parut un peu trop osée et je regrettai aussitôt mes paroles. Et si j'avais mal interprété le message ? Je passerai sans doute pour un stalker..

[H-RP : j'écris des postes assez courts ces temps-ci, faute de temps manquant, et pis les descriptions sont jamais mon dada en terme de longueur, sorry ^^']

Allongés tous les deux sur le sol tels des amis de longue date, ils avaient entamé une conversation sur un sujet apprécié à l'unanimité. Anarel avait rarement eu un compagnon avec lequel observer les étoiles qui, elles, ne se gênaient pas de contempler l'humanité en bandes et de se rire d'elle en brillant de milles feux. Il appréciait tout particulièrement ce moment paisible, rare en ce monde en pleine transition. Les relations entre cités n'avaient jamais été aussi fortes et l'ouverture à un tout nouveau continent offrait des perspectives inimaginables.

Son nouvel ami lui avait parlé d'Alwaid ou l’œil du dragon. Anarel avait suivi le doigt de Kanjou pour trouver une étoile qui lui avait parue semblable aux yeux de celui-ci. Le capitaine n'avait pas été déçu par la réponse donnée, lui qui pensait, certains diront naïvement, que chacun correspondait à un astre bien que tout le monde ne fût pas capable de comprendre les mouvements et caprices des objets stellaires. Si le destin était lié à l'étoile de chacun, il ne se montrait pas indulgent pour autant. Les deux Elfes le savaient, le jeune rescapé plus encore que le haut-gradé de l'armée de Silmarie.

Lorsque Kanjou lui avait partagé ses espoirs d'une lumière bienveillante qui dominait même le vide le plus obscure, Anarel l'avait confirmé d'un regard qui lui-même vainquait la pénombre. Sa curiosité fut éveillée par les brèves évocations d'un sordide passé. La version du seul rescapé de la famille Archautys sur son histoire l'intéressait au plus haut point.

« Ton destin me semble particulièrement tragique. Que t'est-il arrivé qui te fasse aujourd'hui dire ça ? » le questionna-t-il.

Au moment où il avait aussi été soumis à l'interrogation, le soldat en repos avait allègrement cité son astre gardien :

« L'étoile du givre qui porte un nom que tu sembles connaître. Elle guide les explorateurs égarés jusqu'à leur destination. »

En effet, Anarel portait le nom elfique de l'étoile du froid autour de laquelle dansaient les autres en une cabriole sans fin. Elle formait le pilier lumineux de la constellation de la petite ours. Si Kanjou n'avait jamais failli repérer son météore favori, tout le monde s'accordait sur la constance de celle qui était également appelée Stella Maris pour l'aide précieuse apportée aux marins.

Ils étaient ainsi restés allongés dans l'herbe en écho à leur homologue spatial et l'univers avait semblé s'ouvrir de manière vertigineuse, laissant les quatre âmes en une communion harmonieuse et symétrique. Toutes les autres lueurs avaient paru s'éteindre et le néant avait recouvert l'immensité du ciel. Deux éclats lointains se dessinaient côte à côte au cœur d'une absolue noirceur, ils scrutaient les bordures de l'infini sans ne jamais les rencontrer.

Le jeune homme de l'armée avait été interpelé avec une extrême politesse, ce qui l'avait quelque peu désarçonné. Son ami était revenu sur une des déclarations ambiguës qu'il avait précédemment émises. En fait, il lui avait simplement conseillé d'aller remettre sa lame à neuve chez un forgeron de Silmarie puisqu'il n'en trouverait pas de meilleur dans l'ensemble d'Azthia. La compagnie d'une connaissance représentait cependant toujours un plaisir appréciable, en particulier dans la quinzaine de lieux qui les séparaient de leur cité natale. En connaissance de cause, Anarel avait décrété, sentencieux :

« La route est longue pour un voyageur esseulé. »

Le capitaine n'en serait pas un, s'il n'était pas apte à escorter les ressortissants jusqu'à leur contrée natale. Ces derniers temps, Anarel s'était habitué à la seule présence d'Etna lors de ses nombreux trajets de cité en cité, un peu de changement ne leur ferait aucun mal. De plus, le cheval s'était visiblement attaché au renard avec lequel il jouait bruyamment.

Les astres avaient longuement défilé pavanant de luminosité quand une voix se fit entendre depuis l'ombre d'un arbre de petite taille.

« Bonsoir ! », fit un homme d'une voix mielleuse tout en s'approchant. « Puis-je vous rejoindre pour me reposer avant de reprendre la route dès les premières lueurs de l'aube ? Les environs ne sont pas sûres pour un homme seul. »

Le nouvel inconnu révéla son visage à lumière de la lune. Il était défiguré par une cicatrice parcourant sa joue gauche de l’œil à la lèvre inférieur et par un sourire plein de dents qui inspirait la confiance ; un sourire longtemps travaillé. Il levait les bras en signe d'absence de danger et, l’œil vif, l'esprit habile, avait ajouté :

« Je me rends à Silmarie. Peut-être pourrais-je accompagner deux grands Elfes comme vous. Une telle escorte me ferait trop d'honneur. Je saurai vous payer généreusement en retour. »

Anarel s'était immédiatement mis sur pieds, aussi méfiant qu'à la rencontre avec Kanjou. Une main à sa ceinture, il observait le Cydien entré dans son champs de vision sans grand enthousiasme bien que celui-ci ne portait aucune arme apparente. Dressé en une position guerrière, pouvant dégainer à tout moment, le regard dur, il l'avait fermement mis en garde :

« Pas un pas de plus. »

« On se calme, mon bonhomme. Ton petit jeu doit bien marcher pour effrayer les bandits. Maintenant, je ne veux pas gâcher votre petit tête-à-tête. Je vous promets de me faire discret. » répondit l'homme en agitant lentement les bras de haut en bas.

Tandis qu'il continuait d'avancer, le capitaine sortit sa lame du fourreau pour exprimer sa détermination et se mit en garde. Ce manège lui était insupportable et il allait rapidement y mettre fin. Une mascarade aussi vulgaire ne pouvait tromper l'homme rodé au voyage.

Un instant la scène se figea d'une manière qui n'avait rien de naturel. Le rictus du balafré se tordait de déception et de rage face à l'échec d'un stratagème pourtant bien huilé ; le sabot d'Etna frappait le sol machinalement avec anxiété ; l'épée d'Anarel se maintenait droite en direction de l'opposant sans fléchir, sans faiblir.

« Tant pis pour vous. Je vous conseille de vous rendre. Des archers épient chacun de vos mouvements et n'attendent que l'opportunité de vous planter une flèche dans l’œil. » déclara-t-il moqueusement.

Le soldat avait vu plus impressionnant et ne fut aucunement décontenancé. Il ne succomba pas non plus à la tentation de laisser le polichinelle capter son attention. Conscient de ce qui l'entourait, il ne put cependant pas déterminer la menace qui guettait, insaisissable dans l'ombre. Tout de même, il eut le moyen de déjouer un fourbe, armé d'une hache, venu l'attaquer dans le dos par une parade prolongée en une esquive pour atteindre le flanc de l'adversaire et le renverser d'un coup d'épaule.

A ce moment même, une bourrasque était venue de l'homme qui s'était présenté aux deux compagnons vers Kanjou afin de le mettre hors d'état de nuire. Il fallait rester proche de l'ennemi et constamment en mouvement pour laisser le bénéfice du doute aux éventuels archers qui ne devaient pas bien discerner les silhouettes par cette nuit éclairée par les étoiles uniquement, mais Anarel n'eut que le temps d'ouvrir la bouche pour prévenir son allié de fortune, car déjà le bourreau à la hache était à nouveau sur lui.

Celui-ci était une véritable armoire à glace en comparaison avec le premier bandit qui s'acharnait avec des sortilèges du vent sur le dresseur de renard. Il leva son instrument de mort en l'air avant d'abattre sur l'armure un coup qui aurait découpé la personne en dessous en deux s'il n'avait pas été dévié par une lame qui glissa le long du manche pour blesser une main malheureuse. L'entaille n'était que superficielle et ne fit qu'éveiller davantage l'ire de la brute épaisse qui hurla du fond de ses entrailles. Le cri de guerre avait percé les plaines et les nuages, le combat et la douleur faisaient rage.

Anarel ne releva pas le fait que j'avais évité sa question sur mon passé. Sans doute partageait-il cette morale stipulant que certaines choses doivent être révélées à cœur ouvert au moment voulu.

J'appris l'identité de son astre et ne pus réprimer un sourire : l'étoile polaire, rien que ça ? En réalité la nouvelle ne m'étonnait pas tant que ça, c'était digne du Capitaine et de sa réputation. On pouvait apprendre bien des choses sur quelqu'un rien qu'en interrogeant son étoile, aussi contemplai-je Stella Maris en sentant qu'Anarel faisait de même avec Alwaid. Cet interrogatoire secret et silencieux dura de longues minutes qui parurent des heures, et je ne ressentait plus la présence de rien d'autre que les deux étoiles et leurs élus. La sensation était celle d'un néant se remplissant de lumière petit à petit, puis vinrent les couleurs, les vents, la fraicheur nocturne, l'herbe sous nos masses reposées, le bruissement des feuilles... Non, ce bruissement là n'était pas causé par le vent.

À peine eus-je le temps de me retourner que la voix de l'inconnu détonna :

- Bonsoir ! Puis-je vous rejoindre pour me reposer avant de reprendre la route dès les premières lueurs de l'aube ? Les environs ne sont pas sûres pour un homme seul.

L'homme ne portait aucune arme, il souriait d'un air se voulant rassurant et mon premier réflexe aurait été de vouloir aider cette personne à s'abriter et à prendre repos. Oui ça l'aurait été s'il n'avait pas continué en citant notre prochaine destination. Cet homme nous avait donc espionné pour qu'il détienne cette information, aussi rappelai-je Soburin auprès de moi, tandis qu'Anarel se mettait sur pieds pressentant lui aussi le subterfuge. Le sournois continua d'avancer malgré la mise en garde d'Anarel. Ses intentions pour moi étaient fondées et je portai immédiatement une main à la garde de Screw. Elle avait beau avoir une lame émoussée, mon épée double restait aussi efficace qu'une lance, arme dont j'avais également appris la maitrise dans la forêt auprès de mon maître. "Toujours être prévoyant" disait-il, et cela m'avait sauvé la vie plus d'une fois. Aussi portai-je mon attention sur l'homme suspect qui à présent affichait un air dédaigneux.

- Tant pis pour vous. Je vous conseille de vous rendre. Des archers épient chacun de vos mouvements et n'attendent que l'opportunité de vous planter une flèche dans l’œil, siffla-t-il.

Évidemment, cette éventualité avait déjà été analysée comme étant la plus probable, car l'homme ne ce serait jamais présenté seul et désarmé à deux jeunes gens eux armés, dont un soldat, sans être lui-même accompagné. Son absence d'arme me troublait tout de même, à moins qu'il...

Sans même prendre le temps de réfléchir davantage je me concentrai sur les arbres environnants, puisant dans mon pouvoir, et fis sortir de la terre un torrent de racines qui se rassemblèrent alors pour contrer le vent violent qui venait d'être éjecté des mains du mage. J'avais encore une fois été sauvé par mes réflexes et mon observation : si ce maraud n'avait pas besoin d'armes c'était bien sûr qu'il maitrisait un pouvoir naturel. Le vent hein ? Malheureusement pour lui, le campement était entouré de végétation, et les gens ignorent que trop à quel point on peut donner de la résistance à une plante.

À quelques mètres de moi, Anarel se battait stratégiquement contre une brute épaisse armée d'une hache qui ne pouvait atteindre sa cible, faute de maitrise. Ces bandits semblaient donc inexpérimentés, pas très rapides, et bourrins. Mais il y avait la menace des archers. Après une rapide analyse de la situation, tout en me baissant pour éviter une bourrasque me visant le visage, la défaite des bandits était toutefois clairement visibles. Le fait est que les archers ne représentaient aucune menace pour moi, car le vent de mon opposant et l'obscurité nocturne gênaient leur précision, or Anarel avait lui aussi déjoué cette menace en restant au corps à corps avec son adversaire de telle façon que les chances de se tromper de cible étaient tout aussi grandes que celles de l'atteindre. De plus, le magicien n'avait pas remarqué Soburin qui s'était déplacé dans son dos et j'apercevais déjà du coin de l'oeil Etna allant porté assistance à son maître.

J'étais aux aguets du moindre bruit depuis maintenant presque une minute, sans succès : les archers semblaient rester immobiles afin de ne pas trahit leur position. Mais la nature n'était pas seulement une arme. J'élaborai mon plan : l'herbe me servira à localiser les archers, ensuite il me suffira d'en emprisonner quelques uns dans des branches, semant la confusion dans leurs rangs, et alors leur première et ultime faute causera leur perte.

Mais il me fallait d'abord me débarrasser du magicien. En un sifflement bref et aigu j'ordonnai à Soburin d'attaquer. Le visage du mage se crispa en une mimique d'incompréhension avant d'afficher chronologiquement l'étonnement, la douleur puis l'effroi. Soburin l'avait plaqué au sol en lui bondissant sur le dos et lui mordait férocement le bras droit. Je pris profit de la situation pour envelopper la tête de mon adversaire par des fougères, tandis que des elodea nuttallii s'occupaient de lier ses mains. Laissant le reste à Soburin je me tournai vers Anarel pour prendre connaissance de son état.

Constatant que le Capitaine prenait clairement le dessus sur son opposant, je me réfugiai entre deux roches car le vent du mage ne gênait plus les archers. Heureusement il restait la pénombre et caché ainsi ma silhouette devait probablement se confondre avec celles des pierres. Du moins pendant le temps nécessaire à l’exécution de mon plan. Je me concentrai donc pour se faire mouvoir l'herbe présente autour de moi dans un rayon de 100m. Je doutai fort que les flèches viendraient de plus loin, car elles auraient alors manqué de précision pour atteindre leur cible, et le ciel savait à quel point ces archers n'avaient pas le droit à l'erreur sans quoi leur position serait immédiatement trahie. Je sentais l'herbe se mouver et rencontrer de temps à autre la résistance d'un insecte qui se faisait éjecter dans l'instant suivant.

Cependant à cinq reprises je fus incapable de bouger la nature sur des zones qui reliées formait un pentagone autour du campement. Ainsi, ils nous avaient bien entourés comme l'avait dit le rusé mage. Ils ignoraient qu'ils avaient été repérés par la nature, aussi m'enquis-je de prévenir Anarel au plus vite avant qu'ils ne remarquent un comportement suspect. Mais ce dernier était encore au corps à corps à une bonne dizaine de mètres de moi et je ne pouvais me mouvoir sans la protection constante des racines formant comme un bouclier autour de moi. Discrètement je fis sortir l'une d'elles juste devant les jambes de la brute qui s'écroula sur le sol à la merci du Capitaine. Je me promis de ne pas révéler ce coup de pouce à Anarel, car beaucoup de soldats préfèrent finir leur combat en un contre un. Mais il n'y avait pas de temps à perdre, et bien que la victoire du Capitaine était imminente, chaque secondes comptaient.

Je m'empressai d'aller lui expliquer mon plan, ainsi que la position des archers quand je sentis celui situé dans le dos d'Anarel se crisper en exerçant une plus forte pression sur l'herbe qu'il écrasait. Je hurlai au soldat de s'allonger tandis que l'archer semblait tendre son arc et qu'une branche de chêne s'abattait sur ses épaules. L'effet de surprise commençait à jouer son rôle, mais le temps qu'il était censé nous donner pour attaquer furtivement les archers servait à présent au partage de mes connaissances avec Anarel. Même inexpérimentés, les bandits allaient bientôt comprendre la ruse et nous n'avions plus le temps de les surprendre davantage. Il nous restait encore la vitesse de nos animaux respectifs, ainsi que notre expérience des combats nocturnes, car si celle du Capitaine de la Garde n'était plus à prouver, la mienne n'en restait pas moins développée après tant d'années à chasser de nuit dans la forêt.

[Si tu ne réponds pas de suite, peut-être que j'étoffe un peu, mais mon post ne restera pas dans les annales ^^']

Le jeune rescapé ne souhaitait ainsi pas révéler aussi rapidement les tragiques événements qui avaient modelé son passé et le capitaine pouvait le comprendre. C'est pourquoi il avait dérivé sur le sujet des étoiles qui n'avaient, quant à elles, rien à cacher. Certains démons se devaient d'arriver à maturation avant d’être libérés.

Mais cette discussion tranquille était loin à présent. Des opposants de taille s'étaient dressés contre les deux compagnons de route. Malgré la fatigue et la surprise, ceux-ci se portaient comme un charme et maîtrisaient visiblement leur adversaire direct. Anarel avait vérifié d'un rapide coup d’œil la situation de son allié qui avait réussi à neutraliser son opposant. Le capitaine avait préféré faire durer le duel qui lui offrait un couvert plus sûr encore que n'importe quel arbre ou rocher, du moins le temps de trouver une solution aux archers inconnus en nombre. Ses actions avaient de ce fait essentiellement consisté en des esquives et provocations, tantôt pour fatiguer la brute, tantôt pour la relancer.

Aucune flèche n'avait été décochée depuis le début des hostilités. En effet, le risque d'une flèche perdue était bien grand et la nuit était bien noire ; si noire que le barbare à la hache avait lamentablement trébuché sur une racine tandis qu'il s'était vivement démené sans ne jamais blesser le soldat. D'ailleurs le croche-pied providentiel avait un instant éveillé ses soupçons qu'il avait immédiatement chassés pour assommer proprement son ennemi et rejoindre Kanjou, sans quoi les flèches auraient fusé probablement de toutes parts déjà.

Apparemment, le dresseur animalier avait un plan à partager. Il avait une malice dans le sourire à peine perceptible sous les astres paresseux. Un mur de ronces s'était dressé tout autour de son lui en plus de la couverture que lui offrait deux énormes rochers. Seulement, la tactique avait été remplacée par un bref cri :

« A terre ! »

Le capitaine ne s'était pas fait prier. Il s'était écrasé au sol en un plongeon, mais aucun trait n'avait été tiré. D'un regard en arrière, il avait remarqué une silhouette se mouver comme déboussoler. De cette désorientation avait été tiré le temps de dévoiler les positions des différents antagonistes. Par un mystérieux sortilège, Kanjou avait su l'endroit exact où se trouvait les archers. Mais le moment n'était pas aux questions, il était à l'acte. Etna l'avait compris le plus tôt et ne s'était pas encombrée d'une stratégie. Elle avait profité de l'intensité de l'action pour faire profil bas et réapparaitre du côté du tireur pour l'écraser sous ses sabots.

Sans attendre, Anarel s'était relevé. Si son ami voulait se la jouer incognito, qu'il le fît. Le capitaine doté d'une armure éclatante et bruyante ne pouvait pas y prétendre. Après avoir mentalement noté les places des bandits à partir de repères de fortune, il avait débuté une course en se dirigeant dans la direction opposée à celle de l'archer déjà hors de combat pour atteindre le point qu'il estimait être le centre du pentagone. Une vérification de la précision des arcs s'imposait.

La démarche fut courte. Il avait attiré l'attention, comme l'était son intention, par de gestes amples et de brusques appels. Il s'arrêta l'espace d'une seconde. Une cible statique représentait une tentation trop forte. Quatre sons fendirent l'air, mais déjà le soldat était face contre terre. Deux clameurs diamétralement opposées suivirent à l'unisson.

« Deux de moins, » souffla Anarel faisant s'élever légèrement de la poussière.

Il reprit son chemin passant de couvert en couvert pour arriver jusqu'à l'archer le plus éloigné de Kanjou. Vainement, le brigand avait désempli son carquois. Les traits filaient un à un, sans atteindre leur proie. Bien heureusement, la jument s'était à nouveau enfuie pour ne plus courir de risque avant la fin de la bataille. Le chef des armées de Silmarie n'eut qu'à projeter violemment l'archer à la détente facile du pied, puis de le menacer, l'épée contre la gorge. Il faisait confiance en l'efficacité de son ami pour s'occuper du dernier criminel.

« Où se trouve votre repère ? » demanda-t-il, car il devait y avoir un repère dans lequel camoufler le butin volé aux honnêtes gens.

La terreur donna un air chantant à la réponse :

« Ne me tuez pas ! Je vous montrerai où. Ne me tuez pas ! S'il vous plait. »

Anarel n'avait pas en l'idée d'organiser de massacres. Il attendit pourtant l'avis du jeune dresseur de renards, car il avait perçu des brefs signes de luttes de son côté. La garde cydienne saurait surement se montrer très reconnaissante à l'arrestation d'une bande de coupe-gorges et du rapport de ses trésors récupérés au prix du sang.

J'avais vu la jument se ruer sur l'archer ayant reçu la branche, aussi portai-je mon attention sur le comportement des autres. Ils n'avaient pas bouger, pourtant il était impossible de ne pas avoir entendu leur compagnon se faire aplatir par les sabots de la bête. Sûrement pensaient-ils être inaperçus encore et que leur compagnon tombé avait juste fait une erreur. C'était parfait, je pouvais encore nous débarrasser d'un ennemi avant qu'ils comprennent enfin.

Soburin avait suivi le fil de mes pensées et attaquait déjà l'archer situé au plus près de moi, plantant ses crocs dans les cuisses et les genoux de sa victime afin de l'immobiliser. L'archer s'évanouit et je le liai précautionneusement avec quelques végétaux solides. C'est alors que mes pieds se détachèrent du sol et je heurtai le sol violemment quelques mètres plus loin. Encore un peu sonné, je vis le magicien toujours conscient que Soburin avait laissé sans surveillance sourire sournoisement. Il était toujours au sol car j'avais cru bon de le plaquer à terre avec une racine d'arbre sur le dos, mais il était parvenu à se défaire des plantes lui liant les mains grâce au sang qui en coulait, les rendant glissantes. Il s'apprêtait à relancer l'attaque quand une ombre massive lui asséna un violent coup de griffes entre les yeux. Il était vraiment bon d'avoir un animal sur qui compter. Deux cris simultanés mais opposés m'annoncèrent que Anarel ne chômait pas, ainsi il ne restait plus qu'un archer. Je vis ce dernier dans les mains du Capitaine qui semblait l'interroger.

*Allons les rejoindre*

Je croisai au passage le corps de la brute qui gémissait encore et m'enquis de ligoter tous nos opposants vaincus, on ne sait jamais. Aillant enfin rejoint Anarel je l'interrogeai en regardant le bandit :

- Alors ? Qu'a-t-il dit ? Une planque, une affaire solitaire, des assassins payés pour nous tuer ?

Le bandit continuait de répéter comme une prière :

- Ne me tuez pas, par pitié, j'ai des enfants, une femme et des enfants !

- Oui, et j'imagine que vous volez pour les nourrir, répondis-je sur un ton ironique. Mais pour nourrir votre famille il vous aurait suffit de vous engager dans l'armée, Azthia est en guerre et chaque camp a besoin de soldats, alors ne venez pas me faire croire que vous n'aviez pas d'alternative, votre crime est volontaire, PUREMENT VOLONTAIRE !

J'avais crié sur ces deux derniers mots, les criminels étaient de la pire espèce, rependant le mal partout alors que le monde est déjà à feu et à sang, et celui-là voulait nous duper en mensonges !

- Si vous avez vraiment une femme et des enfants, alors que faîtes-vous ici en pleine nuit ? Ne devriez-vous pas être auprès d'eux pour les soutenir dans leur misère ? Scélérat !

Soburin mettait de petits coups de museau dans ma main, aussi repris-je mon calme. Il ne manquerait plus que ces bandits soient des Almers pour que je rompe la promesse faite en mémoire de Kaya et les achève sur le champ. Mais ce ne serait plus de la légitime défense et le Capitaine n'aurait d'autre choix que de m'arrêter. Si je voulais rentrer dans ma patrie en sa compagnie, il me fallait me maitriser face à ces malfrats.

- Venez, je vais vous conduire là où sont cachés les butins, c'est à même pas un kilomètre d'ici. déclara le bandit, la peur audible dans sa voix.

Comprenant par le regard interrogateur d'Anarel que celui-ci m'avait attendu pour décider de si oui ou non nous devions le suivre, je fis oui de la tête :

- Ne tentez même pas une embuscade, c'est dans la forêt que vous nous emmenez, et nous y serons encore plus efficace moi et mon renard.

Et comme pour confirmer ce que je venais de dire, Soburin glapit méchamment dans sa direction en montrant les crocs. Ainsi, le bandit nous conduisit au milieu des arbres, tandis que j'inspectais les alentours en interrogeant les plantes. Personne. Ces bandits n'étaient-ils que sept en tout ? Il devait bien y avoir un chef, était-ce le magicien ? Peu importe, Anarel avait envoyé Etna pour contacter la garde qui se ferait une joie d'interroger les criminels.

Le bandit s'arrêta devant une sorte de grotte, un creux formé au milieu de la roche, où étaient disposés ce qui représentait à vue d’œil plusieurs milliers de Talents, une vingtaine de bijoux de toute sortes et un assortiment de couverts en argent. Encore fallait-il retrouver les propriétaires de tout cela et compte tenu du peu de gardes encore présents dans la cité à cause de la guerre en cours, je me devais de proposer mon aide. Sans attendre une quelconque autorisation de la part du bandit, je commençai à regrouper les objets volés dans un sac formé à partir de plusieurs couches de feuilles afin qu'il soit assez résistant. J'avais énormément utilisé la nature en peu de temps et je sentais déjà mon corps se ramollir. J'utilisai mes dernières forces pour ligoter l'archer restant afin qu'il ne nous assassine pas de dos, et je fis signe à Anarel que j'avais besoin de repos. Dormir dans une forêt, voilà qui faisait longtemps...

Quand j'ouvris les yeux, la première chose que je vis fut l'absence de l'archer ligoté là où je l'avais laissé. D'un bond je fus sur mes pieds et scruta les environs. Anarel était absent aussi, je compris alors qu'il avait dû amener le prisonnier plus loin. Soulagé, je m'enquis d'analyser plus en détail la situation. D'abord le temps, d'après les lueurs des étoiles et la position de la Lune par rapport à celle qu'elle avait lorsque je m'étais endormi, mon repos n'avait duré qu'une heure grand maximum. Et puisque Anarel n'était pas encore revenu, cela signifiait qu'il était allé rencontrer les renforts il y a moins d'une demie-heure.

Soburin me fixait d'un oeil interrogateur, l'air de dire "Bon on y va ou quoi ?". Je lui accordai un sourire et examinai la caverne. La moitié du butin avait pu rentrer dans mon sac de fortune, mais il restait encore beaucoup de possessions ici. Peut-être valait-il mieux que je reste surveiller tout ça après tout, le temps qu'ils reviennent ? Nan. De toute évidence, l'absence de gardes signifiait que les bandits n'avaient pas été prudents et avaient rassemblés toute leur force sur leurs cibles, en vain. Par soucis de précaution je formai quelques pièges naturels autour de la grotte avec le peu de force que j'avais récupéré, et je me dirigeai en direction de la lisière de la forêt en compagnie de Soburin. Une fois là-bas, j'intimai à mon renard de se poster en guet, comptant sur notre lien pour détecter toute anomalie même s'il venait à être maitrisé par un nombre plus important.

*De la pure précaution.. je deviens sacrément parano oui ! J'exagère un peu sur la défense là* me fis-je pour moi-même.

Je continuai ensuite sur quelques centaines de mètre pour finalement atteindre notre camp. Pas moins de cinq soldats s'étaient déplacés pour cette mission. Trois avaient déjà monté les brigands prisonniers sur leurs chevaux et s'éloignaient au trot en direction de la ville. Ce qui laissait donc deux soldats, Anarel et moi pour emporter le reste du butin. Plus que suffisant... Les trois hommes s'étaient retournés ver moi à mon arrivée, je tendis donc le sac que je portais dans le dos à un des deux soldats qui suivit ses trois compagnons. Plus que trois, parfait. Je fis un signe de tête au soldat et Anarel pour qu'ils me suivent, je ne savais pas quel était leur sens de l'orientation mais cette forêt était assez traitre. Mais bon, un Capitaine avait sûrement les qualités nécessaires pour retrouver son chemin dans les lieux les plus ardus.

Personne n'avait pipé mot encore, d'ailleurs Anarel n'avait pas parlé depuis que j'avais réprimandé le bandit, et s'était contenté d'acquiescer de la tête quand j'avais signaler ma prise de repos. Boh cela faisait longtemps que j'avais cessé de croire qu'on puisse me comprendre de toute façon. Nous récupérâmes Soburin au passage, ce dernier n'avait rien vu d'autre qu'un sanglier qu'il avait fuir sauvagement. Puis nous arrivâmes sur les lieux. J'avais vérifié brièvement quelques minutes plus tôt que mes pièges soient toujours intacts : c'était le cas. Je les avais donc retiré les uns après les autres en puisant dans mes dernières forces. Cette fois, plus de magie, retirer ces pièges m'avais demandé un effort plus intense que prévu et il me fallait une vraie nuit de repos ainsi qu'un souper si je comptais pouvoir puiser de nouveau dans la végétation environnante. Je notai que le phénomène avait déjà eu lieu lorsque j'avais combattu aux côtés d'Anarel, mais cette pensée partit aussi vite qu'elle fut venu. Le trésor était toujours là, reflétant les rayons lunaires d'un éclat sinistre.

- Bon et bien, voilà Messieurs, je vous laisse ramener ça à votre base, et je viendrai vous donner un coup de main pour la redistribution si besoin est.

Sur ces mots, je tournai les talons afin d'aller récupérer mon sac laissé au camp. Je marquai une pause avant de dire à Anarel :

- Hm.. bon. Je t'attends au camp.

J'étais passé au tutoiement sans m'en rendre compte. Je filai donc au camp, où je m'installai auprès de mon sac. Je fis un feu pour réchauffer mes membres encore tendus après toute cette agitation, et commençai ma séance quotidienne de méditation. Le sang, la famille supposée du bandit - j'eus un court frisson - le trésor, Anarel, la douleur.. J'avais un hématome dans le dos suite à la rafale qui m'avais éjecté à plus de deux mètres de haut pour retomber lourdement sur le sol. Je grognai un juron avant de me faire couler un peu d'eau sur l'endroit touché. Apaisant.

Un mouvement brusque de Soburin me fit comprendre que quelqu'un approchait. J'aperçus Anarel s'arrêter à côté de Etna qui était restée au camp après l'arrivée des soldats. Il lui chuchota quelque chose dans l'oreille et j'entendis la jument hennir fièrement. Je regardai Soburin qui semblait presque jaloux.

- Toi aussi tu as fait de l'excellent travail mon brave imbécile, le taquinai-je en lui grattant le coup.

Anarel s'assit finalement à mes côtés. Et maintenant ? J'étais trop fatigué pour m'éterniser ici, aussi ne restait-il plus qu'à clarifier les récents événements ainsi que les projets futurs.

Les garçons, n'oubliez pas d'éditer le titre de votre RP ([Terminé] ou [Fini] suffira) et de signaler qu'il est terminé dans la partie adéquate.