[DA] Audience privilégiée au Pays des Neige [Privé Kriisten] [Terminé]

La pluie tombait, les feuilles mortes volaient et le vent soufflait. Le début d'une nouvelle saison était annoncée, les agréables chaleurs de l'été étaient terminées laissant place aux douces nuits d'Automne. Une nouvelle page s'ouvrait dans le cycle des saisons, tout comme dans la vie d'Ashelia. Cela faisait longtemps que la jeune astorg n'était pas revenue dans ses contrées natales, mais il était désormais de son devoir de préserver la réputation de la maison Armstrong. Pour ce faire, elle avait dû déserter la cité amazone de Muria pour revenir s'installer dans le manoir familial, à Storghein.

Les funestes enterrements du Comte Armstrong achevés, la jeune femme put entreprendre la rénovation du manoir ce qui facilita son intégration au sein de la demeure. Elle avait maintenant un rang à tenir, et une réputation à préserver. Le moindre de ses faits et gestes seront désormais épiés. Mais dans cette foule d'événements, elle avait oublié l'essentiel : c'est à dire un travail. Elle aimait son travail de politicienne par dessus tout, mais elle n'avait plus rien. La jeune femme avait délaissé son poste d'ambassadrice, il lui fallait désormais retrouver un autre poste. Mais comment allait-elle faire ? Il lui fallait demander à ce que l'Oblat la reçoive, c'était elle qui serait plus à même de juger de son utilité. Il ne restait plus qu'à espérer qu'Ashelia soit d'une utilité quelconque au sein du gouvernement de l'Oblat.

La jeune femme fit apprêter un carrosse en destination du palais, elle ne pouvait plus se passer d'un travail politique. Elle se rendit demander audience auprés de la reine des neiges, espérant que celle ci puisse avoir besoin de ses services. Les portes du monument était là, elle était arrivée. Elle descendit de la voiture habillée d'une magnifique robe faite d'un corsage et tissée de soie. Ses cheveux étaient comme à leur habitude bouclés et coiffés de sorte à retomber sur l'épaule de la noble astorg. Elle monta une à une les marches avec ses chaussures à talons accordées à sa robe et pénétra ensuite dans le bâtiment jusqu'à atteindre la salle du trône. Les portes étaient fermées et un garde faisait le guet. Ashelia prit la parole.

"Bonjour humble soldat, je suis venue ici même demander une audience à sa majesté l'Oblat. Pourriez vous faire passer le message à son altesse ? J'aimerai expressement la voir pour parler d'une affaire qui m'est personnelle. Je vous en serai trés reconnaissante."

Il ne restait plus qu'à attendre que Kriisten accorde une audience à la jeune politicienne, toutes ses espérances professionnelles étaient désormais entre les mains de celle ci.

Des gouttes de sang tâchaient son corset. Mauvais mouvement d’un de ses hommes lorsqu’ils avaient hissé le puissant cerf sur sa monture, regrettable dans la mesure où elle tenait sincèrement à ce corset qui mettait de façon formidable sa poitrine en valeur et qu’elle avait prévu de rendre visite à Joris en rentrant mais l’Oblat était trop satisfaite de leur prise pour lui en tenir rigueur. Un soupir s’échappa tout de même de ses lèvres alors qu’elle faisait signe au cor de sonner la retraite. Dans tous les cas, les Astorgs auraient de quoi nourrir toute la cour avec ce gibier sans compter celui qu’ils avaient en réserve et qui disait bon repas disait bonne soirée en perspective. Flattant l’encolure de sa jument pour la rassurer pendant que l’on hissait le cerf, Kriisten plaça bientôt son pied dans l’étrier d’acier et enfourcha son canasson sentant une fois en selle l’excitation parcourir la moindre parcelle de son être. Un lien unissait la dame à sa monture depuis des années et pressant son flan toutes deux partagèrent un paisible instant jusqu’à l’orée du bois jusqu’à ce que, enfin libre, Fridhilde se libère dans un galop soutenu. Excellente cavalière comme tout membre de la noblesse qui avait accès à l’équitation depuis leur enfance, Kriisten retrouvait dans ses chevauchées la liberté qui filait entre ses doigts au Palais où elle était constamment demandée, épiée, surveillée par les membres de la cour et ses conseillers. Bien entendu, Kriisten assumait sa charge avec toute la force qui lui était donnée et habituée qu’elle était de cette ritournelle incessante la situation ne l’indisposait plus depuis une vingtaine d’année mais pouvoir, ne serait-ce que quelques heures, tout abandonner à son adorable Consort pour partir avec ses compagnons lui procurait un plaisir inégalé –si on excluait le contact avec son peuple et le sport de chambre-.

La mince colonne de cavaliers ne s’était pas trop éloignée de Storghein, ainsi lorsqu’elle quitta les Montagnes elle mit peu de temps à rejoindre la Cité des Neiges. Ils croisèrent tout de même un ruisseau qui courrait sauvage et glacial dans son lit. Avisant un ours qui attendait qu’un saumon dodu passe à sa portée, elle comprit que c’était un astorg transformé quand ce dernier fit respectueusement signe à la procession. Kriisten lui répondit avec un sourire éclatant et un grand salut de la main avant de presser le pas pour entrer dans la Cité.

Comme toujours, une bouffée de fierté l’emplit en traversant sa chère Cité saluant avec un plaisir non feint ses sujets tout en remontant vers le palais des neiges. Siegfried son capitaine remonta à sa hauteur sans pour autant décrocher un mot afin sans doute de pouvoir protéger ses côtés. Kriisten pensait cela assez inutile au sein de Storghein puisque la cadence de son cheval ralentie elle pouvait sans mal porter sa main à son épée bâtarde qui ne la quittait pour ainsi dire jamais mais aussi parce qu’elle savait, même si elle n’était pas la meilleure Oblat de tous les temps, qu’un attentat à son encontre serait un pur suicide car les Astorgs eux-mêmes ne laisseraient pas se produire une telle chose. Quant au sort réservait aux traîtres… Elle n’eut pas à se préoccuper outre mesure de tout cela puisque le grand escalier et les portes du Palais se dessinaient déjà. Dans la cour Kriisten sauta lestement de son cheval, accompagnée de deux de ses compagnons tandis que des écuyers venaient attraper les rênes de sa jument. Frottant son museau de sa main, elle fit face alors au palais et monta les marches quatre à quatre pressée qu’elle était de prendre un bain glacée mais alors qu’elle saluait les gardes l’un d’eux l’interpella.

- Une visite pour vous, ma Reine

avant d’ajouter en dévisageant ladite visite,

elle ne s'est pas présentée mais vous demande audience. »

Se retournant vers la jeune femme, elle considéra une blague du genre « Vous ne serez pas une princesse Jinmen venue pour défendre l’honneur de votre mère par hasard » mais d’une l’Oblat avait assez de jugeote pour ne pas dire des énormités pareilles et de deux la demoiselle en question n’avait rien de jinmen. Froufroutante de soierie, la jeune femme était à peu près l’exacte opposée de l’Oblat vêtue de son pantalon et de son corset alors que ses cheveux étaient ramenés en un chignon simplement retenu par un peigne. Pour autant, si ce n’était pas là son passe-temps favori de se pomponner, Kriisten n’était pas femme à juger sur les apparences ainsi ajouta t-elle accueillante.

- Pardonnez l’hostilité de mes gardes Lady Armstrong mais j’ai récemment fait renforcer la sécurité du Palais et je ne peux me plaindre de leur travail. Je ne reçois pas de doléances aujourd’hui mais j’aurai sans doute du temps à vous accorder si vous me faites le plaisir de me suivre. Quelles nouvelles de Muria ?»

Se mettant en route suivie de près par ses deux compagnons, la reine du Nord attendit patiemment la réponse à sa question pour déterminer à quelle noblesse pouvait bien appartenir ce bouton de rose. Arrivés dans la large salle des audiences, Kriisten monta les marches jusqu’à son trône où elle s’assit avec légèreté, majestueuse dans toute sa simplicité. Les compagnons se divisèrent, l’un se portant sur le côté du trône alors que l’autre restait sur la droite d’Ashelia. L’Oblat fit signe à une servante de s’approcher commandant avec un sourire.

- Une coupe de vin pour moi et pour l'Ambassadrice si elle le désire. Alors, que me vaut le plaisir de votre visite ? »

Gracieuse, agréable… Elle parvenait presque à faire oublier à quel point le moindre faux pas devant une Reine pouvait être létale surtout quand on évoquait sa chère amie Philéa et ses amazones. Prudence petite…

Ashelia n'avait pas attendu longtemps avant de voir débarquer une légère escorte de compagnons accompagnant l'Oblat à l'une de ces parties de chasse comme pouvait l'apprécier de nombreux astorgs en cette saison. Kriisten était toujours aussi magnifique, même la sueur et la crasse de ce genre de ballade n'arrivaient à ternir sa légendaire beauté. C'était une femme remplie de savoir vivre, mais également de savoir faire. Elle maniait l'épée aussi bien que ses compagnons, aimait la présence de son peuple et n'était pas le genre de reine à passer des heures à se regarder dans le miroir. C'était sans doute cela qui faisait sa séduisante réputation, une beauté naturel tel un diamant brut.

Il devait être à peine une ou deux heures de l’après midi, la Reine des Neiges était à peine descendue de son étalon qu'elle s'avança pour monter les marches du palais, mais sa rapide ascension fut vite interrompu par un garde qui l'informa d'une mystérieuse visite. Un petit sourire se dessinait sur le coin de ses lèvres avant de se retourner en direction d'Ashelia. L'Oblat n'avait pas le temps de tergiverser si bien qu'elle se hâta d'atteindre la salle du trône. Sa garde d'élite prenait soin d'entourer les deux femmes, mais la reine exténuait de sa journée n'hésita pas à proposer une coupe de vin à la jeune femme. Il était rare de voir une femme telle que Kriisten être aussi naturelle dans sa façon d'être et d'agir, la grâce et l'éloquence d'une reine en toute simplicité. La dirigeante de Storghein s'impatientait face au mutisme de son invitée, sûrement trop absorbée à contempler la maîtresse de maison mais elle ne tarda pas à répondre à celle ci lorsqu'elle reprit parole.

"Une coupe de vin pour moi et pour l'Ambassadrice si elle le désire. Alors, que me vaut le plaisir de votre visite ?"

"Merci de votre accueil votre majesté. Je tenais tout d'abord à m'entretenir avec vous pour me présenter à vous désormais en tant que sujet et non en tant qu'ambassadrice. J'ai pris la décision de revenir au sein de votre cité pour reprendre la place de mon défunt père, le comte Armstrong. C'est la moindre des choses que de venir vous informer d'un tel changement !"

Les deux femmes prirent le temps de discuter de quelques broutilles d'usages à la noblesse astorg. Ashelia appréciait la présence de Kriisten qui savait extrêmement bien mettre à l'aise ses invités, c'était une reine accomplie. Elle avait la prestance d'une reine mais elle se savait avant tout astorg, et elle aimait mettre en avant ce détail pour pouvoir se rapprocher d'avantage de son peuple. Après quelques gorgées de vins, la jeune femme reprit la parole.

"Comme vous le savez, j'exerçais à Muria le poste d'ambassadrice et j'aurai aimé savoir si une place au sein de votre gouvernement avait un siège vacant. Le métier de politicienne me tient à coeur et j'aimerai pouvoir mettre mes talents au service de ma cité. Je vous laisse le soin de juger de la qualité et de l'utilité de mes capacités votre majesté, mais sachez que je puisse me montrer à la hauteur de vos exigences."

Le sourcil de l’Oblat s’éleva mine de rien pendant l’exposé de la jolie ambassadrice et pour être tout à fait honnête Kriisten eu du mal à comprendre la tirade de la jeune femme. Tout du moins, Ashelia vivait à Storghein en sa qualité d’ambassadrice bien qu’elle représentait Muria et avait juré allégeance non pas à elle mais à la Reine Amazone mais comme l’ambassadrice continua sur la mort de son père l’Oblat ne s’appesantit pas plus que de raison sur le sujet. Reprendre la place du Comte ? Pourquoi pas en tout honnêteté la noblesse n’était pas ce qu’y préoccupait le plus l’Oblat mais elle laissa le sujet dériver à la guise de l’ambassadrice afin de tester ses connaissances sur les familles l’air de rien. Ainsi Kriisten évoqua-t-elle les tensions entre les Marsh et les Corbois sans parler la vieille amitié qui unissait deux autres familles et ainsi de suite. Si Ashelia n’était pas incollable sur le sujet Kriisten trouva les réponses tout à fait correctes pour une Dame qui avait plus traité des affaires de sa patrie que de celle de Storghein et avec un sourire elle apporta sa bénédiction pour cette passation de pouvoir entre la fille et le Comte. Et ce n’est qu’à ce moment qu’elle comprit, trop préoccupée par ses bandits de grand chemin qu’elle était qu’il était impossible qu’une amazone devienne Comtesse Astorg, quand bien même le titre lui revenait de droit puisqu’elle y avait renoncé en rejoignant Muria.

La suite la fit tomber des nues et elle décroisa et recroisa ses longues jambes finement musclées en posant la coupe sur un accoudoir de son trône. Ashelia avait donc quitté Muria. Comme çà, comme Meliant avait quitté Storghein. Kriisten papillonna des yeux un instant. Les lois de Muria avaient-elles dès lors changé ? De ce qu’elle savait –et cela avait toujours été ainsi- Muria était une cité « martiale » et par la même, quitter Muria était qualifié de désertion et punissable par… bref. C’était bien évidement dur, moins pour celle qui y avait trouvé refuge suite à des agressions mais bien pour celles qui y étaient nées les plus à même d’être tentées de partir mais nécessaire pour la survie d’une Cité qui il n’y avait pas une décennie était menacée par les forces conjuguées de Cydonia et des Almers. Aujourd’hui ce cher peuple du sud ne représentait pas une grande menace et Cydonia avait malheureusement revu ses espérances à la baisse ce qui s’était soldé par la non prise d’Erathia par les forces conjuguées de Storghein et de Muria cette dernière ne voulant pas s’impliquer dans le conflit.

Inutile de dire que laisser passer cette chance de menacer directement Cydonia l’avait fortement contrariée néanmoins elle comprenait les craintes de Philéa de perdre ses précieuses amazones… peu importe ce n’était pas le sujet du moment. Revenant à la jeune ambassadrice Kriisten s’employa à prendre une visage neutre, espérant qu’Ashelia avait omis de lui présenter une information pourtant capitale.

«Votre démarche est-elle approuvée par la Reine Amazone ? »

Un lourd silence tomba sur la salle alors que l’Oblat dardait sur la jeune astorg ses iris de glace. Elle allait ajouter quelque chose quand elle s’aperçut qu’un page se tortillait dans un coin de la salle. Avisant ce dernier, elle lui fit signe d’approcher et de prendre la parole ce qui fit que ce dernier se plongea dans la contemplation de ses orteils.

« Un corbeau ma Reine, arrivée pendant votre chasse de Muria… J’ai pensé qu’il n’était pas urgent de vous en inf… »
« Va me chercher ce message. »

Malgré elle le ton s’était fait cassant. Le page se détourna en troisième vitesse et courut à toute jambe en quête du message. Si la réponse était négative, Ashelia devenait dès lors une déserteuse et comme tel une prisonnière dont la tête tomberait sans doute de retour à Muria. Par les Dieux, les amazones étaient au courant des lois de Muria était-ce trop dur de s’y tenir ? Ses ongles tapaient le bois tout en considérant la jeunette quand le message lui parvint enfin. Encore scellé, Kriisten fit sauter ce dernier sans plus de cérémonie et s’attaqua à la lecture du message rédigé de la plume même de Philéa. Lorsqu’elle eut fini, Kriisten rejeta une mèche platine dans le reste de sa crinière alors qu’un sourire de soulagement s’étirait sur ses pulpeuses lèvres.

«Et bien Comtesse voilà qui est sans précèdent. Philéa vous recommande à mon service »

le soulagement se lisait dans ses yeux et elle ajouta alors que ses lèvres pulpeuses s’étiraient en un sourire, « Et moi qui vous voyez déjà au bout d’une corde ! »

[i]De toute évidence, la saillie ne fit sourire qu’elle, ainsi reprit-elle d'un air grave à moitié sérieux.

« Bref ! Ayant toute confiance en l’avis de mon amie Philéa, je vais me fier à son jugement. En espérant que vous soyez avisée en tant que Conseillère, Comtesse.»

[Désengagées n_n !]

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