[ Une toute petite précision, Muria étant une cité cachée, personne ne connaît réellement le nom et le visage des enfants de Philéa (en dehors de Jelenna et Eléa bien que pour Jelenna, son visage soit peu connu en dehors de la cité) car la reine Amazone ne tient pas à ce qu'ils soient reconnus. En somme, il faut faire attention, seules les deux premières nées sont connues et si leur noms sont connus, tu ne trouveras pas de document (sur elle comme sur les autres de la fratrie) dans une bibliothèque à ce sujet ^^' ]

Les choses avaient changé, trop vite, trop soudainement pour que la jeune fille soit capable de s'y habituer. Trop de choses dans sa tête et d'événements plus ou moins sombres l'empêchaient de se calmer et de se sentir en sécurité. Car le passé refaisait surface une nouvelle fois et cette fois-ci, la petite princesse bis ne s'y était pas préparée. Il lui avait semblé impossible de revivre cela mais plus que tout, elle croyait ses peurs depuis longtemps vaincues et enfouies quelque part en elle sauf que là-bas, dans la cité des neiges, tout était remonté. Violemment et soudainement si bien qu'elle s'était sentie seule, en proie totale à ses anciennes craintes. Ce sentiment lui était resté malgré son départ du palais si bien qu'elle espérait trouver au Temple un peu de cette paix qui le caractérisait tant.

Eléa avait de prime abord refusé qu'elle rentre au Temple plutôt qu'à Muria, comme si pour elle aussi, les vieilles craintes s'étaient réveillées avec lui. La jeune femme avait été jusqu'à écrire à leur mère une missive urgente et, par l'Esprit, avait contacté leur père bien que leurs relations soient relativement tendues ces derniers temps par rapport aux progrès entamés jusque là. Si Philéa rejoignait l'avis de son aînée, elle avait cependant cherché à savoir ce que la petite demoiselle en pensait et Eléa, en toute honnêteté, lui avait répondu que Jelenna se sentait plus en sécurité au Temple. La petite fille savait que ce n'était pas tout à fait vrai et qu'elle avait certainement blessé sa mère mais pour l'heure, elle avait besoin du calme des lieux et Jacen avait promis de veiller sur elle. « Comme la dernière fois » avait craché l'héritière sans pour autant partagé sa pensée avec ce dernier. Certainement que leur père en était conscient mais peu importait. Jelenna avait rejoint le Temple en compagnie de son maître, Asora, et cette dernière aurait certainement tué pour sauver l'existence de la petite apprentie. De son côté, la Tribun s'était arrangée pour se rendre disponible le jour du retour de sa cadette et lui avait enjoint, pour toute négociation, de rentrer la semaine suivant son arrivée.

La semaine était passée relativement vite et Jelenna n'avait toujours pas retrouvé sa paix intérieure. Incapable de savoir comment réagir à ces événements, la petite princesse n'avait pas avancé d'un pouce dans ses recherches intérieures. Perturbée par l'avènement d'un passé qu'elle croyait révolu, elle avait espéré trouver des réponses dans la bibliothèque du Temple toutefois, après une semaine passée à étudier les ouvrages les plus anciens et les plus poussiéreux, la Cydienne n'avait rien trouvé. Aucun de ces livres, même manuscrits, ne faisaient référence à ce qu'elle cherchait et l'adolescente avait eu beau poser des questions, y compris à maître Yodah, personne n'avait été en mesure de la rassurer … Son propre père avait tendance à ne pas savoir quoi faire pour la réconforter, et pourtant, elle était la plus à même sans doutes de savoir à quel point il l'aimait et souhaitait la protéger et l'aider.

La jeune fille savait devoir partir en fin de journée, cependant, elle avait tenu à passer une dernière matinée dans la bibliothèque et Aerin l'y avait accompagnée. Le jeune homme semblait tout autant perturbé qu'elle en ce moment et ce n'était qu'en sa présence qu'elle était capable d'oublier ses peurs ou en tout cas, de les faire taire. L'Almer avait compris que sa compagne était plutôt ailleurs et avait décidé de lui remonter le moral, pour cela, et pour bien d'autre, Jelenna lui en serait éternellement reconnaissante. Elle ne l'avait que peu vu au bal et encore moins durant le trajet du retour mais pourtant, s'il était venu juste pour elle à ce fichu bal, il lui pardonnait. Sans même qu'elle ne s'excuse, sans même qu'elle n'exprime à voix haute son trouble, il la comprenait et acceptait tout d'elle.

Le gamin lui proposa avec le sourire de se plonger dans les textes sur les contes et légendes d'Azthia. Le continent recelait de contes et légendes des plus étranges mais également des plus drôles ! Les histoires sur Kiki le chat sauvage notamment étaient de véritables perles et ce surtout, quand on connaissait la véritable Kiki ! Cette réflexion fit sourire tristement Jelenna.

« Elle reviendra tu sais » répondit Aerin avec un sourire doux.

Sans doutes, mais les choses ne seraient plus jamais pareilles … Et Jelenna ignorait si elle aurait seulement envie de revenir. L'avenir seul le lui dirait, comme pour le reste en réalité … Là encore, le fils du Directeur comprit qu'il y avait quelque chose d'étrange dans son attitude mais un sourire de la belle suffit pour le faire taire. Il se contenta donc de lui prendre la main dans la sienne et d'ajouter d'un ton calme :

« Je serais là tu sais, toujours »
« Je sais, je l'ai toujours su. Ce jour là, quand j'ai parcouru tes rêves, j'ai senti que nos destins étaient liés. »
« Imala ? »

Elle se surprit à se faire la réflexion de se demander comment il était au courant mais ce n'était autre qu'elle qui lui avait parlé de l'esprit louve, si souvent même qu'il devait la connaître aussi bien qu'elle ! Aerin était un confident tellement fiable que Jelenna oubliait parfois la prudence à son égard.

« Non, quelque chose en moi qui me le disait. C'est ce quelque chose qui m'a poussé à suivre le chemin qui s'offrait à moi tu sais … J'ai même pensé que c'était ... » elle hésita, « Ta mère »
« Maman était là, dans mon rêve, tout le temps mais je ne pense pas que ce soit elle qui t'ai guidé à moi, je pense que c'est autre chose, le destin, les dieux, ce que tu veux, mais quand tu es venue, tu étais comme … tu étais la lumière. Tu sais, ces noms qu'ils te donnent, la Clé, Ankha tout ça, je suis sur qu'ils ont raison quelque part, tu n'es pas là par hasard, tu étais là-bas pour me sauver et me guider, tu as guidé ta sœur également et tu continues de le faire. Jelenna, je pense sincèrement que chacun a un rôle ici bas et le tien est de nous guider. »
« Aerin je ... »
« Chut, ne dis rien, je ne cherchais pas de réponse, c'est mon sentiment c'est tout. Mais tu sais, je pense que tu devrais te confier, quand tu seras prête. »

Elle aurait aimé se confier, surtout à lui même s'il était sans doutes le plus mal placé à ce niveau là !

« Tu comptes beaucoup pour moi tu sais mais il m'est difficile de me confier à quelqu'un qui ne veut pas me dire ce qu'il a en tête ! » le taquina-t-elle.

Elle sentit un courant de culpabilité de sa part bien qu'il n'ouvrit pas la bouche. Il garda le silence quelques minutes avant de reprendre, soudain sérieux.

« J'ai fait un rêve étrange. » lâcha-t-il enfin, lui racontant par la suite ce dernier.

Plus il se confiait, plus il semblait hésiter mais pourtant, il continuait, avouant à la petite princesse bis ses inquiétudes sur sa mère, sur ce qu'elle penserait de lui mais aussi sur … son viol. C'était ce point là qui faisait le plus mal pour le garçon, elle le sentait mais sur le coup, elle se sentait incapable de répondre. Elle prit donc la peine de réfléchir à la réponse la plus adéquate et, lorsqu'elle sentit le moment propice pour répondre, elle lui répondit doucement, pour le protéger :

« Je n'ai pas la réponse Aerin, mais si tu le souhaites, nous pouvons la chercher ensemble. Il y a peut-être dans cette bibliothèque quelque chose sur le sujet et, le moment venu, il sera toujours temps de parler à ton père. Il souffre comme toi tu sais et parler vous fera du bien, parce que, au fond de vos cœurs, Celyween est toujours vivante et doit le rester. La vérité t'es due, mais penses-tu sincèrement que tu ne la doives pas à ton père ? Il souffre de ne pouvoir t'aider tu sais. »
« Oui, mais … j'ai peur. »
« Je serais là, pour toi. »

Le jeune homme sourit et la demoiselle sentit son cœur s'emballer. Elle sentit le sien également à travers les pulsations de sa main qu'il retira prestement avant d'ajouter :

« Cela fait un moment que nous sommes là, tu dois avoir faim et, te connaissant, tu n'oseras pas demander. Je vais chercher de quoi manger. »

Et, sans attendre, il se leva, la gratifiant d'un sourire qu'il n'attribuait qu'à elle et quitta la pièce. En l'attendant, la petite demoiselle se mit à réfléchir sur l'endroit où chercher le fameux livre qui peut-être, leur accorderait une réponse sur Celyween. L'Amazone se leva et, sans un bruit, elle déposa l'ouvrage emprunté sur les contes et légendes dans l'armoire où ils l'avaient pris. D'un pas lent, elle fit le tour de la première rangée de livres mais ce ne fut que sur la troisième qu'elle trouva quelque chose d'intéressant. « Rapports du Temple, année 143 ». Dans ses souvenirs, la mère de l'Elfe avait quitté le Temple cette année là. Jelenna se dirigeait vers la table qu'elle avait occupé jusque là avec Aerin lorsque son regard se posa sur la salle et plus particulièrement, sur la jeune femme qui lisait un ouvrage non loin, à deux tables de la sienne.

Son cœur manqua un battement lorsqu'elle reconnu Ayane, la jeune Jinmen qu'elle avait rencontré avant tout cela. Elle allait faire comme si de rien n'était mais la jeune femme releva la tête à ce moment précis et la Cydienne se sentit mal à l'aise. Leur dernière rencontre s'était soldée par un horrible mensonge et Jelenna se sentait particulièrement coupable de lui avoir menti … Elle hésita une seconde encore avant d'aller à sa rencontre, serrant le livre dans ses mains devant son torse et priant d'une part pour qu'Aerin revienne vite et d'autre part, pour que la jeune fille ne lui en veuille pas. Avec une voix timide, elle lui demanda néanmoins, en chuchotant comme l'exigeaient les lieux :

« Bonjour mademoiselle Ayane, j'ignorais que ta visite au Temple s'était prolongée, j'ose espérer que rien de grave ne t'es arrivée qui ne t'oblige à rester ici ! C'est un plaisir de te revoir. »

[ Désolée, le post est un peu pourri je ferais mieux la prochaine fois ! ]

Jelenna ne se sentait pas forcément très bien, à vrai dire, la jeune fille regrettait d'avoir menti à son interlocutrice sur son statut au sein de sa cité natale. Muria était son secret, si beaucoup savaient qui elle était, la demoiselle n'avait cependant jamais fait quoi que ce soit pour profiter de son titre de princesse. Au contraire, elle aurait rêvé que tous l'oublient et c'était pour cela que lorsque son interlocuteur ne connaissait pas son titre, la demoiselle le taisait. Plus que tout, elle rêvait de ne plus être reconnue pour être « la princesse de Muria » ou « la fille de Philéa » mais pour être « Jelenna Ryran ». Non que la petite princesse soit spécialement embêtée par tout cela mais au fond d'elle, elle était toujours tiraillée. Elle avait souvent peur au final que les autres voient en elle quelqu'un à qui l'on pouvait demander des choses plutôt que quelqu'un en qui on peut avoir confiance naturellement. La jeune fille avait quelques amis fidèles comme Aerin ou encore Siobhan et Eloween mais elle n'était pas en mesure de savoir si les autres l'aimaient pour ce qu'elle était réellement ou pour ce qu'elle représentait. De plus, par nature et par tradition, elle se devait de cacher son statut et l'endroit d'où elle venait. Enfant, elle avait toujours menti sur son prénom, ses origines ou encore, sur ses parents. Cette vieille habitude, un peu décalée aujourd'hui peut-être bien que seules les hautes sphères et le Temple ne connaissent son existence et surtout, son visage, était demeurée ancrée. C'était pour cette raison qu'elle n'avait rien dit, pour n'être au fond qu'une petite fille ordinaire dans une ville ordinaire mais elle sentait que cela avait agacé son interlocutrice et plus encore, qu'elle s'était sentie trahie. Bien consciente de ce point, Jelenna avait cependant estimé nécessaire de devoir lui parler.

Elle sentit dans la première réplique quelque chose de froid, comme si la jeune femme lui reprochait son mensonge et Jelenna ne s'en offusqua pas. Bien au contraire, il était normal quelque part qu'elle réagisse de la sorte, le contraire l'aurait sans doutes plus étonnée en réalité. Elle sourit malgré tout, essayant de faire fi de la colère que pouvait ressentir, à juste titre, Ayane. Il était d'ailleurs amusant pour l'enfant, en d'autres circonstances, de se souvenir qu'elle avait parlé de la princesse Ayane à la conseillère de Storghein quelques jours auparavant. Quoi qu'il en soit, cela n'avait pas d'importance et la jeune aprpentie se focalisa sur la suite du discours de la shugenja.

« Avec grand plaisir » répondit-elle, curieuse.

Que son père ai pu rapporter des livres du continent Jinmen, la jeunette n'en doutait pas, en réalité, elle avait profité de nombreux écrits ou des quelques ouvrages qu'il avait pu ramener, sans parler bien entendu de ses innombrables histoires, mais qu'il ai eu l'audace d'emporter une telle source d'informations l'étonnait. Jacen n'était pas quelqu'un d'intéressé par la magie, au contraire, il préférait s'en éloigner autant que possible et la jeune princesse se souvenait même des « farces » qu'Eléa avait pu lui faire à ce sujet alors la question était de savoir pourquoi il s'était intéressé à la technique de … l'hydre ? Peu importait de toute façon, la question n'était pas là et elle ne comptait pas soulever cette hypothèse.
Aerin revint rapidement dans la bibliothèque, une brioche encore chaude dans les mains. Il la tendit à sa jeune compagne avec un sourire timide avant de saluer rapidement la Jinmen. Il n'était pas du genre à s'attarder sur les apparences, encore moins sur les règles de politesse. Si ses parents avaient veillé à son éducation, il ne montrait en général de respect qu'à ceux qu'il estimait digne de son respect. En l'occurrence, il ne connaissait pas la jeune fille et ne comptait pas se montrer spécialement amical avec elle lorsqu'elle lui volait de précieuses heures en compagnie de son amie.

« Je vous prie de m'excuser tous les deux. Demoiselle Ayane, je vous présente Aerin Estal, le fils du directeur de ce Temple et mon meilleur ami. Aerin, je te présente mademoiselle Ayane, princesse Jinmen venue par chance dans nos contrées. »

Le jeune homme inclina légèrement la tête poliment sans dire un mot de plus. Il observa rapidement la jeune femme sans pour autant ajouter quoi que ce soit. Sans un mot, il suivit son amie, se demandant s'il n'aurait pas mieux fait de rester dans la bibliothèque.

** Si tu veux rentrer, tu peux, je te rejoindrais. **
** Non, j'ai fait une promesse, s'il t'arrive quelque chose, Eléa me tuera. Et puis, tu ne peux pas faire confiance à tout le monde sous prétexte que les gens ont l'air gentils. **
** Je sais. **
** Excuse-moi, je ne voulais pas … pourquoi veut-elle aller dehors ? **
** Elle veut tester une technique de manipulation de l'eau, ça devrait te plaire. **

Le jeune homme n'ajouta rien et se contenta de suivre le petit groupe en silence. Il se demandait qu'elle technique avait pu apprendre la demoiselle mais il était aussi curieux de voir si elle réussirait à la maîtriser. De plus, il voulait protéger Jelenna en cas de problème et ça, la jeune Amazone en était plus que consciente. L'apprenti Templier avait toujours été quelqu'un de fiable qui avait veillé sur elle au péril de sa vie et qui n'avait jamais hésité à mettre sa vie en balance pour la sienne. La princesse Jinmen reprit la parole, interrompant ainsi les pensées de la fille de reine. Elle savait que cette question viendrait mais elle n'osait pas y penser. Aerin perçut son trouble et il allait répondre lorsqu'elle l'arrêta en lui prenant la main. Sa réaction, la demoiselle l'assumait pleinement, il n'était pas question qu'Ayane en pâtisse une nouvelle fois.

« Je ne voulais pas que tu deviennes mon amie pour mon titre, là est la première raison de mon mensonge mais plus encore, je voulais protéger les miens. Je suis la fille d'une grande reine, l'héritière d'une cité cachée, je ne peux pas me permettre de mettre en péril les miens sous prétexte d'amitié. Ma loyauté va avant tout aux miens. »

Jelenna se savait injuste, peu importait, sa loyauté, sa vie tournait autour de Muria. Son cœur était appelé sans cesse à elle et personne ne pouvait se mettre dans son chemin. L'amitié, l'amour, rien ne pourrait jamais entamer sa sincérité et sa volonté de protéger sa cité.

« Ma cité est tout pour moi, j'ai grandi au sein d'une cité cachée, elle se doit de rester cachée. Même envers ceux que j'aime, je suis liée par mon serment. Je ne t'ai pas menti en tant qu'amie, j'ai menti en tant qu'héritière, car mon devoir est de veiller sur le peuple qui m'a permis de grandir protégée et aimée. »
« Tu ne dois rien à personne. Amie ou pas, cela aurait-il changé quelque chose que tu la saches princesse ou non ? Cela aurait-il changé ton jugement ? »

Aerin avait parlé sans haine, avec beaucoup de calme mais Jelenna sentait néanmoins qu'il cherchait à la protéger. Il ne supportait que très peu de la savoir en danger, du moins l'estimait-il en danger. En réalité, la jeune fille ne se sentait pas particulièrement dans une situation délicate. Du moins, il fallait expliquer la situation. En réalité, il était clair que la situation était difficile mais au final, elle l'avait cherchée et avait caché sciemment tout cela pour protéger les siens.

« Aerin se montre dur envers toi ... » poursuivit-elle avec un sourire taquin sur les lèvres, « Il a cependant raison, je ne pouvais pas t'avouer la vérité, non pas envie, mais par nécessité. J'espère que tu me pardonneras. »

Ses paroles étaient sincères. Jelenna n'avait pas cherché à faire du mal à la demoiselle car après tout, ce qu'elle ignorait ne pouvait pas la blesser, mais elle avait espéré également que la jeune fille ne souffrait pas de son mensonge. Depuis toute petite, elle cachait son ascendance, son titre et tout ce qui lui était cher pour préserver les siens. Son enlèvement n'avait pas arrangé les choses sans doutes …

« Jelenna a été enlevée il y a quatre ans de cela, révéler au monde qu'elle est la fille de la puissance Philéa attiserait sans doutes les envies et les haines les plus stériles. Que dirais-tu si, au nom de ton amitié, elle se faisait enlever pour t'avoir révélé la vérité ? Ma mère disait toujours qu'il fallait se satisfaire de la vérité. »

Une nouvelle fois, la demoiselle trouva que le jeune homme parlait trop franchement et un peu trop durement cependant, elle ne parvint pas à trouver quelque chose de plus doux pour rebondir sur ses propos. De peur d'aggraver la situation, elle préféra garder le silence en espérant qu'il se calmerait et parviendrait à lui faire confiance, comme elle le faisait elle-même.
Le silence s'installa entre les trois protagonistes jusqu'à ce que la jeune élémentaire ne se décide à agir. Curieuse, Jelenna la regarda faire sans oser l'interrompre, se demandant à quoi pouvait ressembler une hydre. Sa présence aiderait certainement l'apprentie à réaliser ce qu'elle désirait et en cela, la petite princesse était ravie. Si son pouvoir pouvait être utile à quelqu'un, c'était le principal.

« C'est parce qu'elle est là » se contenta de répondre Aerin d'un ton détaché, ne quittant pas des yeux Jelenna, comme pour la protéger.

De son côté, la demoiselle était tellement sous le charme de ce qu'elle venait de voir qu'elle ignorait comment réagir. Elle avait toujours admiré ceux qui, par magie, parvenaient à maîtriser les éléments, quels qu'ils soient alors voir une pareille chose était un plaisir pour elle.

« Tu es très douée ! Cela fait longtemps que tu t'entraînes ? »

La curiosité est un vilain défaut … Oui, c'était un fait.

[ T'as le droit de dire qu'Aerin est casse pied XD J'en profite parce que c'est la première fois que je peux jouer leur relation ^^' ]

Aerin était quelqu'un de protecteur, d'extrêmement doux et calme mais également de très protecteur. Jaloux n'était pas vraiment le terme à employer pour qualifier l'adolescent, il était simplement conscient mieux que quiconque des zones d'ombres de la jeune princesse et en conséquence, il se sentait le plus à même de veiller sur elle, en dehors de sa sœur aînée cela allait de soi. Jelenna avait toujours était consciente de ce trait de caractère et si elle demandait souvent au jeune homme de se montrer plus tolérant, plus confiant, elle appréciait également qu'il cherche à prendre soin d'elle. Sans vraiment s'en rendre compte, la petite princesse bis avait tendance à se reposer sur lui de plus en plus souvent comme elle le faisait avec Eléa. Souvent, c'était de peur de le décevoir ou de trop empiéter sur sa vie et son destin qu'elle se refrénait mais malheureusement, elle ne parvenait pas à être suffisamment mature pour s'en rendre compte tous les jours.

La jeune fille remarqua le ton réprobateur et lourd de reproches de son compagnon et tenta de l'apaiser par l'Esprit en vain. Lorsque Aerin commençait à agir de la sorte, il lui fermait son Esprit, sachant pertinemment qu'elle tenterait de le raisonner. La petite demoiselle était bien loin de posséder le don de Maître Jiven et ne parvenait pas encore à percer les défenses mentales, pourtant ridicules d'après sa sœur aînée, de l'Elfe. Agacée, elle lui prit la main pour tenter d'établir un contact physique et s'il était totalement conscient de ce qu'il faisait, il ne parvint pas à faire plus qu'à lui décrocher un maigre sourire d'excuse. Comment lui en vouloir ? Il ne faisait que la protéger à l'instar de ce qu'Eléa ou sa mère avaient toujours fait pour elle ! Jelenna se sachant impuissante, elle essaya de son mieux de diminuer la tension qui s'installait entre eux et, plus encore, d'éviter qu'il ne commette un impair. Elle-même avait déjà du mentir à la princesse Jinmen, il n'était certainement pas nécessaire de réitérer les choses ou encore, de la blesser. C'était la pire chose qui puisse arriver aux yeux de l'enfant. Fort heureusement, Ayane semblait prête à faire l'impasse sur le mauvais caractère apparent du garçon et surtout, sur sa mauvaise grâce quant à lui accorder du temps !

Aerin se montrait quelque peu hostile mais relativement poli, ce qui ne manqua pas d'étonner Jelenna qui se surprit à le voir si « calme ». D'ordinaire, quand quelqu'un ne lui plaisait pas, le gamin ne s'encombrait pas et le lui disait clairement. En l'occurrence, il était évident qu'il ne portait pas la shugenja dans son cœur cependant, il faisait des efforts et la petite le sentait. Etait-ce parce qu'il était face à une princesse ? Non, l'apprentie savait que son ami ne prêtait aucune attention aux étiquettes. Qu'elle soit une princesse n'avait aucune importance. Alors était-ce parce qu'il sentait qu'elle appréciait son interlocutrice ? La réponse ne pouvait qu'être là.

« Il n'y a pas de mal, cette … période de ma vie est loin derrière moi. Enfin je ... »
« Jel »

La voix d'Aerin la surprit. Elle avait eu une absence et s'était laissée emporter par ses sentiments. Ses yeux étaient embués de larmes qui ne parvenaient pas à rouler le long de ses joues. Elle posa son regard sur le jeune Almer qui le soutint et, sans le savoir, lui permit de se raccrocher à la réalité. Les récents événements, qu'elle n'avait partagé au Temple qu'avec le métisse, lui avaient fait douter de ses capacités à surmonter tout cela. IL était revenu et elle ne pouvait rien faire de plus que le craindre en silence. IL n'était pas là pour elle, il l'avait promis, mais cependant, elle ne parvenait pas à le croire.

** Jel ? **

Elle posa son attention sur la jeune femme avant de reprendre, enfin calmée ou presque :

« Excuse-moi », elle prit quelques secondes pour se calmer encore un peu avant de reprendre, « Je suis impressionnée en tout cas ! »

Son enthousiasme n'était pas feint. Peu importait sa présence qui aidait grandement en général les élémentaires, la jeune femme n'en restait pas moins très douée et Jelenna était impressionnée par sa prestation. Aerin aussi visiblement même s'il cachait sa mauvaise foi derrière de vilaines répliques qu'elle tentait d'apaiser tant bien que mal.

** Aerin, tu devrais te montrer plus patient tu sais … **
** Désolé mais je n'ai pas confiance en elle. **
** Elle ne t'a rien fait tu sais. ** tenta-t-elle de défendre.
** Peu importe, je déteste les gens qui te jugent sans savoir et qui se croient tout permis parce que tu es gentille. **

Que pouvait-elle répondre à cela ? Il était vrai que souvent les gens ne faisaient pas attention à elle et qu'ils profitaient de ses faiblesses et de sa gentillesse maladive pour obtenir d'elle ce qu'ils désiraient certes mais de là à dire qu'Ayane était ce genre de personnes … Jelenna ne pouvait pas le croire ! Aerin se montrait dur envers la Jinmen et elle avait du mal à comprendre pourquoi. Certes il lui présentait des inquiétudes auxquelles elle ne pouvait pas répondre mais elle ne voulait pas non plus y croire.
« Je pense que tu te fais des illusions, entendre une vérité n'est pas synonyme de mépris, accepter ses erreurs n'est pas une faiblesse. »

Il avait parlé d'un ton glacial, répondant à ce qu'il estimait être une pique injuste. Pour lui, il n'avait fait qu'énoncer une vérité simple à savoir que la jeune femme ne connaissait rien à sa protégée et qu'elle n'était pas une « amie » pour elle. A ses yeux, elle n'était qu'une opportuniste.

« Si tu veux. » répondit-il confiant.

Il avait eu le meilleur des maîtres d'Azthia à ses yeux et il se savait suffisamment doué pour venir à bout de quelqu'un sans le blesser. Sa magie n'était pas offensive mais il savait se servir de celle des autres pour les épuiser tant physiquement que moralement. Ce duel, il savait être en mesure de le gagner, surtout en présence de la jeune catalyseur !

« Aerin ça suffit ! »
« Je n'ai rien fait, c'est elle qui s'imagine des choses, comme si je pouvais détester quelqu'un que je ne connais pas, je ne fais que constater s... »
« Aerin, s'il te plait » reprit-elle plus calmement.

Le gamin devait bien reconnaître qu'il avait été un peu loin mais pour autant, il ne comprenait pas pourquoi elle voulait qu'il se calme. Il était calme et n'énonçait que ce qu'il pensait être des vérités. Cette Ayane ne connaissait rien de la petite princesse bis et encore moins de ce qu'elle pouvait ressentir mais était-ce pour autant sa faute ? Elle venait d'un autre pays, d'une autre contrée et qui plus est, elle n'était pas reliée en permanence à la petite Amazone. Le jeune homme soupira en croisant le regard de la demoiselle. Il était allé trop loin certes.

« Jelenna a raison, je suis allé trop loin. »

Jelenna sourit timidement au jeune garçon ce qui lui suffit à comprendre ce qu'elle cherchait à lui dire depuis le début. Faire confiance aux autres était bien plus efficace que de se les mettre à dos dès le départ. Soupirant à nouveau, il poursuivit :

« Je ne pensais pas à mal, je ne veux que protéger Jelenna. »

Il était sincère, tous pouvaient le sentir mais plus encore, il était plein de rancœur car s'il s'excusait certes, mais il était encore sur ses gardes. Ilith l'avait prévenu, elle mettrait sur le chemin de la princesse tout ce qui lui permettrait de remporter la bataille des dieux. Il avait cédé, promettant de devenir le bras de sa vengeance en échange de la protection des deux réincarnations mais le gamin n'était pas confiant, il ne faisait pas du tout confiance à la déesse sur ce point. Il avait peur et il traduisait cela par une surprotection de sa princesse.

La réitération de la proposition par la Jinmen laissa perplexe l'Amazone mais laissa de marbre le gamin qui, agacé par le comportement qu'il jugeait infantile de la demoiselle lui répondit qu'il allait lui offrir son duel si telle était sa volonté. La tension montait entre les deux protagonistes si bien que Jelenna se sentait mal en leur présence. Aerin s'était excusé à sa façon certes, mais excusé tout de même alors que souhaitait-elle de plus ? Et pourquoi toujours en venir à la magie ? Pourquoi toujours chercher à se montrer le plus fort ?

« Ca suffit tous les deux ! » finit-elle pas crier.

Le ton surpris les deux adolescents, sans doutes peu habitués de la voir en colère. Jelenna posa son regard tour à tour sur les deux avant de reprendre d'une voix calme mais tranchante :

« Ne trouvez-vous pas qu'il y a assez de conflits dans ce monde pour en rajouter ? Cessez de faire les enfants avec vos duels idiots ! Aerin, tu n'aurais pas du t'emporter, peu importe tes motivations, tu ne dois pas juger les gens sur leurs apparences quant à toi Ayane, il a raison, tu ne peux pas me reprocher ma loyauté en ne sachant pas pourquoi j'ai agi de la sorte. Je suis une Amazone, je me dois de protéger ma cité plus que ma vie. Si vous souhaitez réellement faire ce duel, faites-le, mais sachez que vous le ferez seuls. Je ne veux pas cautionner cela ! Il n'y aura aucun vainqueur. »

La demoiselle était passablement agacée de leur comportement et ne comprenait pas comment ils en étaient arrivés là. Elle passa son regard de l'un à l'autre et l'apprenti Templier choisi ce moment pour intervenir.

« Tu as raison, désolé. »

[ Je ne savais pas trop comment relancer mais je pense que ça devrait te laisser suffisamment d'ouvertures. ]

Jelenna ne comprenait vraiment pas ce qui pouvait leur passer par la tête à ces deux là et elle se demandait également pourquoi les choses étaient toujours aussi compliquées quand Aerin s'en mêlait. A trop vouloir la protéger, il en devenait parfois étouffant et si la jeune fille ne pouvait pas lui en vouloir, elle était cependant désolée de le voir se prendre la tête pour des choses aussi futiles. Si seulement il pouvait accepter de vivre sans se poser autant de questions … Sans se rendre autant malade. Il semblait croire qu'un danger rôdait à chaque coin de ruelle, sous chaque brin d'herbe si bien que la situation commençait sincèrement à agacer la jeune princesse Amazone. Et pourtant, elle adorait qu'il s'occupe d'elle ainsi et veille sur sa protection car ce lien qui existait entre eux depuis leur rencontre était si fort qu'elle y tenait comme à la prunelle de ses yeux. C'était dans ce mélange de sentiments que la jeune femme regardait la situation, prête à tourner les talons tant les deux étaient exaspérants. Que le métisse soit éternellement lié à elle et la protège outrageusement était une chose mais que la princesse Jinmen s'y mette à son tour, c'était totalement impensable ! Qu'est-ce-qui leur passait par la tête ? Jelenna ne manqua pas de ressentir de la honte perler dans son Esprit. Elle crut dans un premier temps qu'il s'agissait de son compagnon d'infortune mais comprit bien vite que ce n'était pas le cas, Aerin n'était pas méchant, loin de là, mais jamais il n'aurait honte de son comportement envers elle. A bien décortiquer le sentiment, il s'agissait nécessairement de celui d'Ayane. Sans doutes n'avait-elle pas l'habitude qu'on lui tienne tête de la sorte et la petite princesse ne pouvait que le comprendre. Il était en effet rare de tomber sur quelqu'un d'aussi têtu et fier qu'Aerin, encore plus lorsqu'il s'agissait de défendre la jeune réincarnation !

La jeune Amazone fut surprise de la réaction de son compagnon, peu habituée à le voir s'excuser, mais également de celle de la princesse Jinmen. Elle avait pensé que cette dernière agirait au contraire comme Eléa, qu'elle refuserait de reconnaître en public qu'elle avait tord et que ça lui écorcherait la langue que de s'excuser. Visiblement, la petite fille s'était trompée et ce n'était pas plus mal car sa grande sœur avait ce petit côté agaçant de ne jamais en démordre, même quand elle savait avoir tord.

« Aerin devrait surtout prendre exemple sur toi. » lâcha-t-elle dans un soupir avant de reprendre, « Tu n'as pas à t'en aller, tu es la bienvenue parmi nous »

Elle appuya sa remarque d'un regard qu'elle posa sur le jeune apprenti Templier qui concéda la partie. Elle avait gagné pour cette fois même si sans doutes, il n'hésiterait pas à lui reprocher son manque de confiance en lui et plus encore, son manque de sécurité. Elle avait selon lui tendance à faire trop facilement confiance aux autres, ce n'était certes pas tout à fait faux.
La jeune princesse se mit à pleurer et pour la première fois, Jelenna ressentit une onde de compassion dans les sentiments du jeune homme. Il se sentait fautif d'avoir poussé la demoiselle dans de tels retranchements et plus que tout, il n'avait jamais su résister aux larmes. C'était une arme infaillible contre lui car elles le mettaient mal à l'aise et ce, même s'il apprenait ou tentait d'apprendre à s'en prémunir.

« Euh ... » le gamin ne savait pas vraiment quoi dire, en réalité, tout était un peu de sa faute et il n'était pas vraiment habitué à rencontrer une telle résistance.

Jelenna quant à elle était incapable de trouver la bonne solution. Elle avait appris de son père que les Jinmens étaient très pudiques et n'appréciaient que peu les contacts physiques en public aussi décida-t-elle de s'abstenir de peur d'offenser la jeune fille cependant, elle lui envoya des ondes positives et douces par empathie. C'était là tout ce qu'elle s'autorisait à faire de peur de la brusquer davantage.

L'enfant réfléchit à la tirade de la jeune Jinmen. Il était vrai que ce peuple était inconnu de la plupart des gens de ce côté-ci des montagnes et plus encore, il fallait bien sûr souligner le problème selon lequel il était difficile de faire valoir ses droits dans un pays étranger qui n'était guère intéressé de manière générale par le peuple d'au delà les montagnes. Les petites gens se moquaient totalement de ce qu'il pouvait se passer loin de chez eux ! Tandis que la petite réfléchissait, Ayane proposa à Aerin de « faire la paix » comme disaient les enfants des rues. L'Elfe hésita quelques secondes puis, dans un soupir, il accepta de serrer la main de la jeune femme et répondit simplement :

« Enchanté, je m'appelle Aerin Estal »

C'était sa façon à lui de lui expliquer qu'elle n'avait plus rien à craindre, qu'il rentrait dans le rang et qu'il venait miraculeusement d'oublier ce qu'il venait de se passer entre eux.

« Azthia est une nation solidaire malgré les apparences mais les peuples ont souvent peur du changement. Seuls les érudits connaissent l'existence des tiens, et plus encore, la valeur de ta lignée mais il est vrai que nous ne sommes pas nombreux … Qui as-tu tenté de rencontrer ? Si je puis me permettre, dans quel but souhaites-tu rencontrer tous ces dirigeants ? »

Parler politique était certainement étrange vu leur jeune âge mais Jelenna avait soudain un doute.

Parler de politique avait un goût étrange dans la bouche de la jeune fille. Elle s'était promis il y a bien longtemps de cela de laisser ce jeu étrange entre les mains de sa mère ou encore, de sa sœur aînée lorsqu'elle monterait sur le trône. Si elle se révélait plutôt douée dans ce domaine pour défaire les tenants et les aboutissants, Jelenna ne prenait aucun plaisir à l'art de la politique, bien au contraire. Mentir, voler, tuer, cela ne faisait pas vraiment partie de ses principes et encore moins de ce qu'elle attendait de son propre avenir. La jeune princesse souhaitait œuvrer pour la paix et si la politique était l'une des armes qui permettait d'aboutir à la paix, elle n'était cependant pas la meilleure et la plus durable à ses yeux. Aussi la demoiselle préférait-elle s'éviter ce genre de jeu trouble mais pour l'heure, il était évident qu'Ayane cherchait quelque chose qui avait trait à la politique et il était d'autant plus évident qu'elle attendait quelque chose d'elle. Jelenna se demandait sincèrement ce qu'une princesse, étrangère de surcroît pouvait bien attendre de sa patrie. Azthia n'était pas réputée pour ses alliances durables et encore moins pour son envie de respecter et d'aider ses voisins. Pourquoi l'empereur du si puissant Oyashima avait-il envoyé l'une de ses héritières potentielles sur des terres si éloignées ? D'autant que d'après ce qu'elle avait compris, l'empereur était attristé par la disparition de ses jumelles héritières ce qui laissait douter la jeune fille de la sincérité d'Ayane. Etait-elle vraiment là par la volonté de son père ? Sans doutes que non mais elle ne pouvait pas la juger pour cela …

La jeune réincarnation avait entendu parler de beaucoup de choses au sujet du trône. Beaucoup prétendaient que l'absence et peut-être même la mort des jumelles Miki et Maya seraient la cause d'une bataille interne entre les enfants de l'empereur. Pour sa part, l'enfant en doutait, elle sentait que ce n'était pas dans la culture Jinmen que de vouloir prendre la place légitime du successeur et de plus, rien ne disait que les jumelles étaient mortes … Encore moins depuis qu'elle était allée à Storghein et qu'elle les avaient vu de ses propres yeux. Enfin presque. Quoi qu'il en soit, l'Amazone estimait qu'il était improbable que ces rumeurs soient fondées et pourtant, à voir Ayane sur Azthia ou à écouter Kriisten en parler, la jeune femme commençait à sincèrement en douter. Jelenna s'était tenue très loin de cette discussion et elle regrettait presque aujourd'hui de ne pas en avoir les détails. Tandis qu'elle cogitait, elle vit la jeune femme sourire et entamer une réponse à ses nombreuses questions.

« Il est vrai que la voix d'une enfant est peu entendue par nos contrées » répondit-elle d'un ton doux et songeur.

Il fallait être fort dans ce pays pour faire entendre sa voix. Surtout en tant que femme, d'autant plus en tant qu'adolescente. Eléa était sans doutes l'une des rares « gamines » qu'on respectait et elle ne s'était attirée cette sympathie que par le fil de sa rapière et son franc parler. En cela, son aînée ressemblait beaucoup à sa mère ! Philéa s'était taillée la part du lion à coup de fouet, de flèches et de verbe acéré. Jelenna était sans doutes tout leur contraire mais peut-être que sa situation avait joué dans la sympathie que lui offraient certains dirigeants comme l'Oblat ou l'ancienne Grande Prêtresse. Et puis … il n'avait pas été difficile de faire d'Eloween une amie puisque les deux gamines avaient le même âge !

Avant de poursuivre, l'apprentie préférait attendre d'en savoir plus sur les intentions de la Jinmen. Si elle ne sentait rien de mauvais chez elle, il était tout de même important qu'elle fasse attention à ce que la jeune femme allait lui révéler. Ses intentions n'étaient peut-être pas aussi louables qu'elle semblait le faire croire … Dans ce monde, tout était possible ! L'enfant écouta en silence la jeune princesse, réfléchissant à ce qu'elle disait. Ayane avoua être venue non pas sur ordre de son père mais sur celui de sa mère. Elle cherchait visiblement à assurer ses arrières et à s'assurer une place dans la politique de son père. Autrement dit, il n'était pas difficile de comprendre ce qu'elle voulait, ce qui laissait perplexe Jelenna. Miki et Maya étaient semble-t-il vivantes même si elle se devait de garder le silence à ce sujet, à vrai dire, elle n'aurait même jamais du le savoir sans doutes. Mais les jumelles avaient-elles remplis leur rôle ? Seraient-elles de bonnes héritières après tout ce temps passé loin de leur royaume ? Ce n'était pas à Jel' d'en juger.

« Nous n'avons pas de seigneurs ici tu sais, mais peut-être que je devrais te présenter rapidement les dirigeants de nos contrées. Si tu vas à Cydonia, il te faudra demander le Consul Anatoli Clari mais autant te prévenir, la cité ne tolère pas que les femmes fassent de la politique … Si tu te rends à Storghein, son ennemie ancestrale, il te faudra t'adresser au Consort, Joris Delhior voire à l'Oblat si tu as cette chance, Kriisten Fridèn. Silmarie n'a pas de dirigeant en tant que telle mais une guide spirituelle, la Grande Prêtresse, Eloween. C'est une enfant, mais elle a tout autant de sagesse que la plupart des adultes ! Le peuple du désert est gouverné par le P'yra, Thétis Ibn Moah Ibel qui se trouve être également le Tribun d'Erathia, cité que je te suggère d'éviter, car le Tribunat est malheureusement inflexible … »

Elle avait passé sous silence sa propre cité, sans savoir pourquoi en réalité. Ce n'était pas parce que la jeune fille apprenait le nom de sa mère que cela mettrait en danger sa cité … Quoi qu'il en soit, le rajouter maintenant serait un peu étrange, mieux valait attendre que la Jinmen posa la question elle-même.

« Pourquoi ne pas avoir demandé un entretien à maître Jiven Estal ? » demanda-t-elle, pensant soudainement qu'il était sans doutes l'homme le plus avisé qu'elle connaissait dans son entourage.

La question suivante de la jeune femme la laissa perplexe mais pour autant, elle se décida à répondre. Ce n'était pas vraiment facile d'expliquer en quoi elle était une réincarnation ou même en quoi elle était la vie sur terre d'une illustre déesse.

« Nos dieux sont miséricordieux, ils décident parfois d'accorder leur bénédiction à certains élus et dans de rares cas, ils offrent leurs vies pour nous. Je ne serais pas capable de t'expliquer pourquoi certains dieux renoncent à l'éternité mais il y a en effet quelques exemples de réincarnations telles que moi. Diane m'a choisi et je protège son âme désormais tout comme la Grande Prêtresse protège celle de Silmaria. Si notre corps venait à mourir, l'âme de notre déesse choisirait un autre corps pour s'y réincarner. C'est difficile à expliquer, mais je la « sens » à l'intérieur de moi, comme un guide. »

Jelenna n'était pas certaine d'avoir répondu avec justesse mais espérait que l'explication serait suffisante. Elle était prête de toute façon à lui faire découvrir les dieux et déesses de son peuple si cela intéressait Ayane.

« Diane est la déesse de la Nuit et de la Forêt pour ceux qui la prient, elle est un symbole de paix à Muria » ajouta Aerin pour compléter le tout, « Vous ne priez donc pas ? » ajouta-t-il.

[ Mon 200e message ! XD ]