La journée était froide et revigorante. Jun le savait, non pas parce qu'il le voyait de la fenêtre de sa chambre, mais surtout parce qu'il s'était entraîné dehors ce matin là. Le froid avait cinglé son visage, mais peu de temps après, il s'était réchauffé, les mouvements l'assouplissant, faisant monter la chaleur par le travail de ses muscles. Ses mouvements était tel une Geisha. Son maître lui avait toujours dit en riant, il sentit un sourire s'afficher sur son visage. Cependant, il n'était plus un enfant, il n'était plus la petite garçon qui apprenait patiemment, qui tentait d'évoluer plus vite pour prendre soin des deux personnes qui lui étaient chères. Son père Kaoru et sa sœur Ame. Le dresseur savait parfaitement qu'au départ, il n'était pas fait pour naître. Les jumeaux étaient un accident, un accident dont la mère s'était débarrassée et dont elle avait refilé le fardeau au père. Pourtant, ils étaient aimées, choyées, dorlotées. Et le temps avait passé, ils avaient grandit et désormais, il était l'heure pour eux de partir.

Il y avait peu de cela, Jun et Ame avait commencé en solo -bien qu'ils restaient toutes les deux ensembles- leur travail de dresseur. Leur apprentissage était terminé. ils pouvaient désormais voler de leur propre ailes, mais voilà, la boutique de leur père était déjà bien pleine, et leur carnet de commande ne finissait pas de désemplir. Alors qu'ils n'étaient qu'apprenti, ils s'étaient déjà fait un nom dans le métier. Et si Ame avait choisis en plus la voie du conte, Jun, lui, avait choisis la voie des poings. Pour protéger et servir. On aurait quasiment pu le prendre pour un samouraï, mais il n'en était pas un. Il ne voulait servir personne, seulement protéger sa famille. Mais avec le temps, avec les demande des clients toutes de plus en plus nombreuses, il était devenu urgent de s'en aller, de vivre pour eux, d'ouvrir quelque chose qui leur appartiendrait, quelque chose à eux. Les jumeaux en avaient longuement parlé. Des heures et des heures en réalité et si pour le moment leur père ne disait rien quand à l'envahissement de son espace personnel par tous les animaux, il n'en était pas moins évident que cela ne pouvait plus continuer.

Et ils avaient prit leur décision. Ouvrir un magasin. Un simple magasin, convivial, accueillant. Un endroit où ils pourraient recevoir leur client, leur montrer les installations pour leurs animaux le temps qu'ils resteraient avec eux, et puis ils avaient économisés pour cela. Ils avaient l'âge et il était réellement temps de désengorger la maison de thé. Pourtant, aucun d'eux n'avait encore décidé de le dire à leur père. Ils ne voulaient pas le blesser ou qu'il croit qu'ils en avaient marre d'être avec lui, au contraire, l'endroit qu'ils avaient trouvé était à Arano, non loin de lui, mais s'était toujours compliqué. Sachant que d'habitude, s'était Ame qui faisait ce genre de chose, plus diplomate, plus à même de faire de belles phrases, plus à même de tenir une conversation, cependant Ame était occupée, s'était donc à Jun de le faire. Il entra alors dans le magasin, une fois s'être lavée et bien habillé. Il vit son père prendre une sacoche et su de suite ce qu'il allait faire.

« Alors comme ça on va chercher des herbes sans sa fils ? »

Une sourire discret se fit sur les lèvres du jeune homme. Il était ainsi, discret, mais il adorait allait avec son père chercher des herbes. Ce n'était pas grand chose à dire vrai, mais s'était quelque chose qui lui plaisait. il n'aurait su dire pourquoi s'était ainsi. Il prit donc une veste en cas d'intempérie et Kiri sur ses talons comme toujours, il regarda doucement son père.

« Je t'accompagne. »

Ce n'était pas une question, pas plus qu'un ordre, seulement une affirmation. Peut importe ce que son père pouvait dire, il savait parfaitement qu'il ne changerait pas d'avis et était capable de le suivre tel un animal sauvage traquant une proie. S'était cela Jun, la force tranquille et discrète.

Habituellement Kaoru aimait à se réveiller avec le chants d'oiseaux matinaux, quel meilleur moyen d'être retiré des rêves envoûtants du sommeil que le sifflement si doux et particulier de ces animaux insaisissables. Hélas pour ce jour-ci ce fut la grosse voix d'un chien qui le tira de ses songes, gueulant sa joie de voir venir le repas du matin. Pestant contre la sale bête au cri sans grâce, l'artisan se tira de sa couche de mauvaise humeur et claudiqua jusqu'à sa commode pour sa toilette matinale. Toujours aussi coquet quelque soit le temps qui passait, Kaoru prenait un moment privilégié chaque matin pour prendre soin de sa peau, se coiffer et se parfumer. Il aimait particulièrement baigner son peigne dans une eau parfumée d'une odeur de fleur avant de se le passer dans les cheveux. Ce faisant il chantait.

Le chien oublié, Kaoru se rendit tranquillement dans sa serre personnelle pour prendre soin de ses plantes.

« Comment vous portez-vous mes chéries ? Voulez-vous que je chante pour vous ? Là, là, papa est là. »

Ainsi leur parlait-il tout en les chouchoutant, leur apportant la bonne quantité d'eau et d'engrais naturel. Ses belles fleurs dormaient encore, même si l'hiver était doux à Arano certaines ne s'éveillaient qu'au printemps, qu'importe le temps. En un sens celles-là excitaient davantage la passion du cultivateur qui attendait chaque année avec amour l'apparition des éphémères pétales veloutés aux couleurs chatoyantes. Il avait planté ses achats récents et les veillait avec attention pour s'assurer qu'elle prennent bien dans la terre d'Arano.

Satisfait Kaoru descendit prendre son un déjeuner. La journée était belle, ce qui tombait à merveille car l'artisan avait dans l'ambition d'aller se promener pour une cueillette. Il chantonna en savourant son dernier mélange à thé et quand il fut ragaillardi il alla prendre sa canne sans laquelle il ne pourrait marcher bien longtemps et une sacoche pour entreposer ses plantes. En sortant dans la cour il vit son réveil du matin.

« Te voilà, toi. J'espère que mes enfants te vendront bientôt… navré brave bête ce n'est rien de personnel, mais… mais que dis-je ! Bien sûr que c'est personnel puisque tu es bien trop gros et bruyant à mon goût ! Cependant je reconnais de bon grâce que tu ne sois en rien personnellement responsable de la chose. Ah ! Je sens que tu fleure bon l'animal mouillé, aurais-tu joué avec ta gamelle d'eau ? »

Qu'importe finalement, Kaoru n'avait guère beaucoup d'affinité avec les animaux pour peu qu'ils dépassent l'apparence d'une mignonne créature à câliner ou ne montrent pas de grande beauté sauvage. Par-dessus tout il préférait ceux dont le cri était mélodieux ce qui n'était pas le cas du chien en question. En parlant de voix mélodieuse il entendit résonner celle de son fils derrière lui. L'artisan se retourna pour sourire à la demoiselle.

« Je n'osais te proposer de venir, n'as-tu pas trop à faire avec tes animaux ? »

Il était néanmoins ravi de la proposition de son aîné et attendit patiemment qu'il ait achevé ses préparatifs. Il baissa les yeux sur le ijika qui la suivait toujours et lui fit un signe d'apaisement. Celui-là d'animal lui plaisait assez, pas trop bruyant et d'une grâce sauvage et féline. Et il ne puait pas le chien mouillé.

« Si tu viens je pourrais dire à Gangûro de rester. Cela ne lui fera pas de mal, je me suis laissé dire qu'il avait besoin de repos de temps en temps. »

Plus exactement, Minh le lui avait fait remarquer quelques jours plus tôt. Kaoru alla avertir son homme à tout faire qu'il avait quartier libre pour la journée et revint vers Jun pour prendre les devant et quitter la Maison de thé. Il jeta un coup d'œil à aux chiens qui gambadaient dans un enclos dédié de la cour et passa dessus sans dire mot.

« Ces animaux seront-ils bientôt vendus ? J'avoue que je n'apprécie pas vraiment d'avoir des chiens dans ma cour de devant. Hmm peut-être devrions-nous aménager une petite cour interne pour eux, cela sera plus agréable pour la clientèle de ne pas les voir en entrant. »

Il avait dit cela sans trop montré qu'il songeait vraiment que ces chiens n'avaient rien à faire dans une Maison de. Thé. Trop gros, trop bruyants, trop agités. Il n'avait accepté leur présence dans sa demeure que pour faire plaisir à ses jumeaux, mais tout de même cela avait tendance à nuire à ses affaires. L'artisan n'avait pas d'idée précise sur le lieu de sa promenade.

Ne pas trop avoir à faire avec ses animaux. Il savait très bien qu'on ne manquait jamais de travail dans ce genre de profession, car pour arriver à bien les dresser, il ne suffisait pas de lui dire assis pour qu'il s'assoit, dans le cas d'un chien. Il fallait tout un travail de patiente et de gentillesse et cela pouvait durer des mois ainsi. D'ailleurs cela ne faisait qu'un mois qu'ils avaient récupéré les derniers animaux arrivés. En un mois, ils avaient pu les rendre propres pour les gros, mais il restait encore du travail, beaucoup de boulot, cependant comme tout à chacun, ils avaient le droit à une journée de repos et donc aujourd'hui était cette journée.

« En fait aujourd'hui c'est leur jour de repos. Donc je n'ai pas trop à faire avec les animaux. De plus Ame s'occupe d'un oiseau là donc elle m'a dit qu'elle gardait les autres. Je suis donc libre. »

Il sourit discrètement comme à son habitude. Et répondit à l’affirmative en ce qui concernait Gangûro, il était évident que le garde du corps avait besoin de se poser un peu. Le pauvre semblait épuisé ces derniers temps. Et cela lui ferait beaucoup de bien de pouvoir se tenir tranquille ne serait-ce qu'une journée. Comme son père, Gangûro vieillissait et il fallait les ménager tous les deux. S'était aussi pour cela que les jumeaux avaient pris cette résolution. Cela valait mieux pour tout le monde. La phrase suivante de son père lui prouva qu'ils avaient eu raison. Lui était passionné par les plantes, ses enfants par les animaux. Depuis toujours cela avait été ainsi. Comment ? Pourquoi ? Jun n'en savait rien, mais toujours est-il que les passions ne se commandaient pas. Cependant il comprenait la réticence de son père. Loin du fait que ce soit des animaux, ce qui le dérangeait le plus, s'était surtout les animaux dans une maison de thé. Les clients était visiblement incommodé et d'ailleurs le dresseur avait fait transférer les nouveaux animaux dans leur nouvel endroit. Un endroit loin de tout qui leur permettrait de dresser les animaux sans gêner personne. Alors qu'ils prenaient tout deux le chemin pour aller chercher des herbes, Jun lui parla alors.

« En fait, ces animaux ne seront pas vendu avant des mois. Il ne suffit pas qu'il soit propre pour en faire des animaux dressés tu sais. »

Il vit la moue de son père et le comprenait parfaitement. Ce n'était pas son univers et les jumeaux envahissait le sien avec leur passion.

« Mais ne t'en fais pas, nous avons trouver une solution avec Ame en vérité. »

Il s'arrêta de nouveau, Kaoru semblait intriguer, mais le jeune homme était persuadé qu'il savait parfaitement ce qu'il allait dire.

« En fait, nous avons réunit assez d'argent pour ouvrir notre propre boutique, à Arano bien sur. Nous avons trouvé l'endroit, il y a largement assez de place pour accueillir tous les animaux que nous avons ici et ceux que nous avons déjà transférés là bas. »

Des explications claires et concises, il ne savait que parler ainsi. Pour lui, inutile de tourner autour du pot et d'ailleurs, il ne savait pas faire. Il n'embellissait pas les choses, ne tournait pas autour du pot et se contentait de dire ce qu'il en était.

« C'est aussi pour ça que je voulais te voir aujourd'hui. On a bien remarqué qu'on t'envahissait beaucoup et donc on s'est dit toutes les deux qu'il était temps qu'on déménage. Les animaux n'ont rien à faire dans une maison de thé n'est ce pas ? Et donc voilà on a déjà acheté ce qui deviendra la boutique. On a prévu de déménager d'ici la fin de la semaine. »

Et voilà, il avait tout dit, maintenant ne restait plus qu'à attendre de savoir ce qu'allait dire son père. Peut être aurait-il dû être plus diplomate sur certaines choses, mais maintenant que s'était dit...

La remarque sur les chiens était venu spontanément à Kaoru, sans désir de blesser ou déranger son fils. À vrai dire il était mal à l'aise en présence de ces animaux si envahissants, énergiques et demandeurs d'attention ! À chaque fois qu'un gros chien faisait mine de s'élancer vers lui, l'artisan craignait qu'il ne lui saute dessus, pour l'agresser ou le lécher qu'importe, voir cette masse de muscle bondir en sa direction l'impressionnait toujours. C'était une énorme preuve d'affection de sa part d'accepter que ses jumeaux élèvent de tels monstres dans sa demeure. Il prit une ruelle paisible pour rejoindre plus rapidement la sortie de la ville et éviter les grandes rues passantes – et leurs inévitables chevaux – pour avoir une promenade privilégiée avec Jun.

« En fait, ces animaux ne seront pas vendu avant des mois. Il ne suffit pas qu'il soit propre pour en faire des animaux dressé tu sais. »

Kaoru ne put se retenir de faire une petite grimace de désapprobation que son fils ne manqua pas.

« Mais ne t'en fais pas, nous avons trouver une solution avec Ame en vérité. »

Ah ? Kaoru tourna la tête vers elle, ses sourcils exprimant un questionnement curieux. Cela dit cette phrase n'avait pas tant de possibilités de réponses, surtout venant de ses jumeaux. Dans le fond l'artisan espérait qu'ils avaient trouvé un bâtiment non loin de la maison de thé pour y loger les animaux. Mais honnêtement il était plus probable qu'ils quittent le domicile paternel, ils en avaient déjà l'âge, mais tout de même… voilà il avait raison, ses chéris partaient.

L'artisan ne répondit pas de suite, il contourna une bonne femme sortie de sa maison pour vider les ordures et marcha les yeux vers l'avant. Puis il soupira et retourna un de ses sourires qui ne découvraient pas les dents, le regard plein de douceur vers son aînée. Tendrement il lui caressa la joue.

« Depuis quand êtes-vous si grands? murmura-t-il. Vous avez l'âge de voler de vos propres ailes… et avez déjà une boutique. »

Si jeune… lui était encore employé chez Kitajima à leur âge et pour encore quelques années. Ses enfants avaient grandi si rapidement et déjà elles prenaient leur indépendance d'adulte. Sans même avoir besoin de son aide ou de ses conseils. Perdu dans ces pensées amères, Kaoru se mit à pouffer de rire tout seul.

« Hé bien Jun, je viens de prendre un coup de vieux ! Voilà que je me mets à me comparer à vous deux ! Ha ha ha. Je ne vaux pas mieux que les autres ! »

Se disant il riait de sa réaction tout en avançant. C'était tellement cocasse ! Finalement le temps ne l'épargnait pas davantage que les autres et il réagissait de la même manière que les parents protecteurs. Plutôt que de s'attrister il devait se réjouir et de fait il envisagea les choses sous un autre angle et vit bien qu'il y avait plus matière à être fier que déçu. Quand deux petites pousses se développait en merveilleuses plantes solides et droites, on pouvait remercier aussi le tuteur. Certes l'analogie entre humains et plantes avait ses limites néanmoins Kaoru se plaisait à imaginer qu'il avait bien éduqué ses enfants pour qu'elles grandissent aussi bien.

« Ainsi va l'ordre des choses et c'est bien normal. Mais je tiens à voir votre boutique avant que vous emménagiez tout à fait et j'exige que vous reveniez me voir de temps en temps ! »

Ils quittèrent enfin la cité et l'artisan prit la direction de petites collines un peu plus loin.

Il le savait, il l'avait su dés le début que ce ne serait pas une mince affaire ou plutôt qu'il allait faire un minimum de mal à son père. Il était évident que cela se soit passé de la sorte. Les jumeaux étaient grands et depuis longtemps, ils avaient gagnés de l'argent très jeune et avaient commencé leur boulot très très jeunes aussi. Dés le début de leur apprentissage, seulement, il était évident que la situation ne pouvait pas en être autrement. La maison de thé n'était pas faite pour avoir des animaux et encore moins de gros animaux. De plus, leur père n'aimait pas foncièrement les animaux, oiseaux ça allait, Kiri allait aussi, mais le reste, il avait bien plus de mal. Il était donc évident que bientôt ils allaient devoir changer de coin, changer de vie, monter leur propre boutique pour qu'ainsi ce soit moins le bazar à la maison. Mais il était vrai que dix huit ans s'était un âge assez jeune. La réplique de son père le fit sourire. Depuis quand ? Depuis un certains temps en vérité.

Jun avait grandit extrêmement vite parce qu'il avait prit en compte le fait qu'il devait prendre soin de sa famille. Ame avait suivit et avait grandit vite aussi mais dans un autre genre. Tous deux s'étaient pris en charge pour éviter à leur père de n'avoir trop de chose à faire. La maison de thé lui prenait déjà pas mal de temps et il était hors de questions pour eux deux d'être un poids. Tout du moins, s'était ce que Jun s'était dit depuis le début. Il savait parfaitement que sa passion pour les animaux serait assez compliqué à la maison et depuis longtemps il s'était dit qu'il allait falloir prendre son envol. Mais il était vrai qu'il n'aurait pas pensé que leur notoriété les amène à devoir changer de lieu aussi vite et ainsi les obliger à prendre leur envol si rapidement. Peut être cela n'était pas une bonne chose, mais ils en avaient discutés longuement avec Ame, s'était la seule solution. La solution qui amènerait tout le monde à la quiétude et la tranquillité. De plus, la maison de thé n'était réellement pas fait pour accueillir les animaux.

Aussi se tut-il un moment. Perdu dans ses pensées, se demandant bien ce que son père allait pouvoir lui dire et la suite le fit sourire. Évidemment, on ne se rends compte qu'on ne vieillit réellement que lorsque ses enfants prennent leur envol. Jun n'avait pas encore d'enfant et de toute façon, encore fallait-il qu'il trouve quelqu'un qui s'intéresse à lui et lui plaise avant de faire quoi que ce soit. Quand à sa sœur, il savait très bien qu'Ame n'avait personne dans sa vie. Pas parce qu'elle n'avait trouvé personne, au contraire, beaucoup de garçon s'intéressait à elle, mais surtout parce qu'elle n'était pas à l'aise avec les hommes. Il ne pouvait lui en vouloir. Ame était quelqu'un de tellement doux. Le dresseur sortit doucement de ses pensées lorsque finalement Kaoru reprit la parole. Le c'est bien normal qu'il prononça était en quelque sorte emplit d'une certaine tristesse. Ses enfants allaient comme disparaître, parce qu'il savait parfaitement qu'ils ne pouvaient pas s'installer tout prêt de la maison de thé.

Les animaux ont besoin d'espace et cela tout le monde le savait parfaitement. Ils avaient trouvés une magnifique maison et juste à côté un magnifique bâtiment qui leur servirait de boutique. Ensuite, ils avaient commencé à mettre en place différent enclos pour les animaux, ainsi que des parcours de dressage pour certains animaux. Cela leur permettrait de bien répondre à leur maître. Il y avait même un autre bâtiment qu'ils étaient entrain de convertir en écurie. Alors que son père venait de dire exactement la phrase qu'il attendait, le jeune homme sourit tranquillement, ne pouvant s'empêcher de se dire que son père était prévisible. Un vrai papa protecteur, et si ils n'avaient jamais été prévu, Jun était heureux qu'il les ait gardé avec lui et élevé.

« Bien entendu, d'ailleurs si tu veux, on pourra pousser la balade un peu plus loin, c'est juste à la sortie au bout. Un coin tranquille, sans personne autour. Assez éloigné de la ville pour ne déranger personne et assez grand pour accueillir tout les animaux que nous allons avoir à nous occupé. »

Il s'arrêta un instant et reprit.

« On commence a aménager un peu. Il faut qu'on reprenne un bâtiment pour le transformer en écurie pour les chevaux. Nous avons déjà placé nombre d'enclos qui ont quelques pensionnaires par ailleurs. Il nous reste quelques trucs à faire, mais c'est en bonne voie. »

Il regarda son père et pour une fois un véritable sourire apparut sur ses lèvres. Il n'était pas très enjoué comme garçon, rarement il offrait des sourires, parce qu'il se disait que ce genre d'attitude ne l'aiderait pas à prendre soin de sa famille, mais il n'y avait bien qu'avec cette même famille qu'il se laissait aller à des débordement d'affection.

Le temps passait, ce ressemblait parfois et apportait des montagnes de surprises plus ou moins bonnes. La vie de Kaoru avait été mouvementée et elle le serait encore un bon moment et il ne regrettait rien. À partir de presque rien il avait construit une entreprise prospère et bien implantée dans la cité d'Arano, alors qu'il ne recherchait pas le mariage il avait eu un fils et une fille merveilleux et il fallait bien le reconnaître, il n'avait pas toujours eu le temps de s'occuper d'eux avec ses ambitions. Malgré tout il estimait bien s'en être sorti et ses enfants quittaient le giron paternel.

Il sourit en entendant Jun parler, il était si mature… et tellement entreprenant. Kaoru était sûr qu'ils réussiraient, ses jumeaux étaient doués, intelligents et réalistes. Il en était si fier ! Il n'aurait jamais cru cela possible par le passé. Avoir des enfants était merveilleux, il n'imaginait pas qu'il aurait plaisir aux réussites d'autrui. Lui qui était si égocentrique ne se souciait que de son intérêt plus ou moins direct, alors se réjouir pour quelqu'un d'autre était nouveau. Bien sûr il n'avait pas conscience de la part de narcissisme qu'il y avait à la réussite de ses enfants.

« Allons-y, je suis d'humeur à marcher. C'est toujours un plaisir de me promener avec toi. Ici. »

Il avait avisé un buisson épineux et alla regarder s'il y trouvait quelque chose d'intéressant. Pas grand chose en somme. Kaoru se releva en s'aidant de sa canne et se retourna vers son fils. Il ressentit une bouffée d'affection en la contemplant. Il n'avait rien d'un vaurien, ni d'un mauvais homme comme ceux que fréquentait l'artisan dans le monde de l'ombre. C'était un jeune homme fort et franc, loin des subtilités du langage et des jeux de séductions et de sous-entendus. Il devait tenir sa de sa mère, sans doute.

« Je n'aurais jamais pensé que ce jour viendrait si vite. Le choc passé je dois t'avouer que je suis fier de toi mon garçon, de toi et de ta sœur. J'ai l'impression que vous avez bien réfléchi à ce que vous faisiez. Poursuivons un peu la marche dans les bois, le temps est doux et je veux en profiter. Parle-moi encore de tes projets, de tes animaux. »

Autant l'herboriste se moquait des animaux en général, quand il ne les craignait pas, autant il appréciait écouter son garçon parler de sa vie et de ses passions. Même si elle n'était pas prolixe, Jun semblait plus à l'aise avec lui.

Jun regardait doucement son père et l'écouta, patiemment. Lorsqu'il lui dit qu'il était d'humeur à marcher, le jeune homme sentit une bouffée de joie s'emparer de lui. Son père et sa sœur, s'était les deux seuls personnes à qui il voulait absolument plaire. Il ferait tout pour sa famille quitte à donner sa vie et il était heureux de se rendre compte qu'en fait, ils lui rendaient bien. Tous les deux. De l'extérieur, tout le monde aurait pu penser que Kaoru serait un mauvais père et parfois dans les rues, Jun avait souvent entendu dire qu'on les plaignait ces deux enfants, mais tout le monde avait tord. Loin du père qui n'avait pas voulu les avoir au premier abord, loin du père distant, il était quelqu'un d'aimant. Quelqu'un sur qui on pouvait compter et qui avait su les élever dans le droit chemin sans jamais les frapper. Quand Jun voyait parfois des enfants se faire corriger bien trop souvent, il se disait qu'ils avaient eu beaucoup de chance. Le dresseur regarda tranquillement le ciel, ce ciel si bleu. Il n'en revenait pas. Parfois le temps pouvait réellement être clément et d'autre fois vous faire des misères comme pas possible.

Il sentit Kiri le pousser doucement lorsque son père reprit la parole. Le jinmen remercia silencieusement son ami. Il avait tellement l'habitude d'être seul et d'avoir la tête dans les étoiles que parfois il se perdait rapidement dans ses réflexions. Jun se reconcentra donc tranquillement sur la conversation. Il souriait bêtement aux dires de son père. Sa façon de le dire, sa façon d'être, sa façon tranquille de lui dire qu'il était fier de lui, d'eux, le jeune homme n'aurait pas cru qu'un jour son cœur puisse battre autant la chamade à un compliment. Son père était fier de lui. Il fallait avouer qu'il avait beaucoup travailler pour cela, enfin pas seulement pour qu'il soit fier de lui, mais aussi parce qu'il se devait de prendre soin d'eux. Son père boitait d'une jambe, sa sœur ne savait pas réellement se battre, il ne restait plus que lui. En cas de souci, il n'y avait plus que lui et Gangûro pour défendre la petite troupe, même s'il savait que la boiterie de son père ne l'empêchait pas de combattre, il ne pouvait s'empêcher de vouloir prendre un maximum soin de lui. C'était ainsi.

Cependant, en écoutant les paroles de son père. Il se dit qu'il avait loupé des tas de choses, tellement de chose qu'il ne su pas trop comment lui dire. Il avait tant de chose à lui dire, tant de chose dont il n'avait pas conscience qu'il ne savait même pas par où commencer. Comment lui expliquer que s'était grâce à lui qu'ils avaient tant évolué ? Qu'ils avaient pu prendre leur envol aussi facilement ? Qu'ils avaient tant de succès ? Comment lui dire que sans lui, sans son regard bienveillant, les jumeaux n'auraient jamais pu faire ce genre d chose ? Peut tout simplement en lui disant. Alors, au lieu de parler de ses projets, Jun se contenta de dire pour la première fois ce qu'il avait sur le cœur, parce qu'il savait une chose, si son père n'avait pas été là, il n'en serait pas là au jourd'hui.

« Tu sais, si on a autant évolué c'est grâce à toi. En fait c'est nous qui nous nous somme comparé à toi. On a toujours essayer de grandir pour devenir des enfants digne de toi, des enfants qui pourraient te rendre fiers. On s'est demandé mainte et mainte fois comment toi tu aurais agit à notre âge. Et finalement on a trouvé la force et le courage d'évoluer rapidement mais sûrement. Je sais que c'est un peu idiot ce que je dis, mais si nous t'avions pas eu, comme père mais aussi comme modèle, je doute que nous aurions tant avancé. Nous te devons une grande partie de notre réussite. Alors inutile de prendre un coup de vieux. »

Son visage se tourna doucement vers celui de son père avec un sourire très profond de joie apparente. Il n'avait pas exactement transmis tout ses sentiments parce qu'il ne savait pas comment faire, mais, sans son père et il était persuadé que sa sœur serait d'accord, jamais les jumeaux n'auraient autant évolué. Il reprit par la suite la parole.

« En ce qui concerne les animaux, il faut déjà que nous finissions les écuries. C'est la condition pour avancer correctement. Nous n'avons pas réellement le choix en fait. Il y a beaucoup de voyageur et une voir même peut être deux écuries ne serait pas du luxe. Ensuite, je suis entrain de créer un terrain d’entraînement et d'agilité pour les chiens et autre félins. Je dois en créer deux un pour les petits et un pour les grands. Ame s'occupe des volières. Et puis... »

Il continua à expliquer ainsi durant encore quelques minutes et finalement s'arrêta. Il s'emballait toujours un peu lorsqu'il parlait de sa passion. Cependant, Kiri s'était placé devant son père ce qui aurait pu faire manque de le faire trébucher, mais si l'animal avait fait cela, s'était que quelque chose n'allait pas.

« Je pense qu'il se passe quelque chose d'étrange. »

Il n'avait pas finit de dire cela qu'un félin sauta devant eux et avec lui son maître.

« Tiens donc, Jun Kitajima, le bâtard et son père, comme c'est touchant. »

« Kaede Inomiwa, qu'est ce que tu fais ici. »

« Je suis venu te défier, tu te souviens de la façon dont on te compare à moi. Toujours meilleur dans son domaine, toujours plus fort. Et bien je suis venu voir qui de nous deux est le plus fort. »

« Je ne pense pas qu'il soit utile de faire ça. D'une je n'ai pas envie de blesser mon compagnon, de deux, je suis avec mon père et il est hors de question qu'il lui arrive quelque chose. De trois, s'il n'y a que cela pour te faire plaisir, je veux bien dire que tu es meilleur que moi. Je me fou de la gloire, je veux juste vivre de mon métier. »

« Je m'en tape de ce que tu en pense, je vais te réduire en poussière. »

Jun soupira, pourquoi fallait-il que cet idiot se pointe maintenant, il n'eut pas trop le temps de mener sa réflexion que le félin sauta directement sur Kiri. La balade risquait d'être moins paisible que ce qu'il ne pensait finalement. Le jinmen se prépara au combat, hors de question de laisser qui que ce soit toucher son père et puis Kirino était bien plus entraîné que son comparse, cela se voyait, l'animal avait déjà l'avantage.

La promenade était agréable, malgré sa jambe boiteuse, à vrai dire il ne boitait pas tant que ça et la plupart du temps Kaoru parvenait à masquer la petite irrégularité dans sa marche et se déplacer d'une démarche gracieuse et souple. Sans cela l'artisan vivrait mal son handicap, mais ainsi il parvenait à apprécier l'apparence que lui donnait la canne. Non pas celle d'un grabataire, mais plutôt celle d'un seigneur qui ne se laissait pas défaire par les aléas de la vie. Même lorsqu'il se promenait dans la nature le Jinmen coquet soignait son apparence, c'était plus fort que lui. Son fils n'avait pas hérité de ce trait de caractère, sans doute était-ce une bonne chose, surtout pour devenir dresseur. Kaoru baissa son regard sur l'ijika et sourit doucement, il aimait la grâce naturelle des félins.

Jun n'étant pas bavard, son père ne le pressait pas et appréciait d'être simplement en sa compagnie, sentant l'affection du jeune homme même dans le silence. Cependant aujourd'hui le garçon paraissait vouloir parler, le père l'écouta avec joie exprimer ce qu'il ressentait. Il n'eut pas à le regretter. Ses paroles lui gonflèrent le cœur de fierté et d'émotion, lui qui aimait à être flatté et se pavaner dans son château se retrouva coi. Il rendit à son fils un sourire plein de fierté de ce que le garçon était devenu.

La journée se déroulait bien, Jun poursuivit sur ses projets. Bon Kaoru se fit une raison sur le fait qu'il devrait encore supporter les bestioles de ses enfants quelques temps. Il s'amusa à contempler le regard émerveillé de son dresseur de fils. Les humains réagissaient toujours de la même façon en parlant de leurs passions, seul le sujet changeait. Tout à coup l'artisan vit une ombre blanche devant lui, il baissa la tête et vit Kirino qui s'était placé devant lui.

« Que fais-tu, toi ? »

« Je pense qu'il se passe quelque chose d'étrange. »

Par réflexe Kaoru glissa la main dans sa ceinture pour y retirer un éventail en acier acéré qu'il pourrait brandir en un quart de seconde en cas de besoin. La méfiance de l'ijika se confirma lorsqu'un autre félin leur bondit dessus suivi d'un humain. L'homme ne ressemblait pas à un bandit de grand chemin, ni à un rônin. Kaoru se raidit sous l'insulte qu'il lâcha. Un bâtard, c'était vrai, Jun et Ame l'étaient puisqu'étant nés hors mariage. Ils étaient même une naissance adultérine. Malgré tout le père n'aimait pas cette dénomination pour désigner la chair de sa chair.

Visiblement son fils connaissant le malotru, Kaoru lâcha doucement son éventail d'acier et contemplait la scène d'un regard dédaigneux. Il écouta la discussion et en retint que le dénommé Kaede était un imbécile prétentieux et désagréable. Son fils se débrouillerait bien tout seul. Il s'amusa de constater que même sa progéniture s'obstinait à le considérer comme fragile, pourtant l'artisan pouvait toujours se battre même avec sa jambe. Cela dit il appréciait de pouvoir admirer le spectacle sans avoir rien d'autre à faire.

Le combat était inévitable et cela ennuyait particulièrement Jun. Il avait eu envie d'une balade tranquille et sans histoire avec son père, mais voilà, ce crétin était venu gâcher ce moment tranquille. Pourquoi fallait-il toujours que les gens aient envie de tout régler en se tapant dessus ? Kaede, il se souvenait encore de lui. De son regard mauvais lorsqu'avec Ame ils avaient ouvert la boutique des ailes enchantées. Lui aussi aurait aimé ouvrir sa boutique, seulement son caractère belliqueux et sa tendance à se prendre meilleur que les autres n'aidait vraiment pas. De plus, il ne fallait pas dire qu'on était meilleur que le client si on espérait vendre. Lui, il était tout en vanité, comme si chaque pores de sa peau transpirait cette vanité. Le jinmen se souvenait encore de l'enseignement qu'ils avaient suivit ensemble. Kaede s'était montré cruel et méchant envers les animaux qui ne l'écoutait pas et n'avançait pas assez vite. Il s'était bien vite retrouver dehors alors que Jun lui avait continuer l'apprentissage. Tout avait commencé à se moment là. Et tout se finirait maintenant. Le dresseur en avait marre, marre de ces enfantillages, marre de tout cela.

Alors que Jun tournait son regard vers Kiri qui venait de soumettre l'autre félin sans trop de difficulté, mon regard se tourna lui vers Kaede qui semblait légèrement moins sur de lui. Qu'avait-il cru ? Que mon compagnon de tous les jours se ferait réduire au silence parce que le sien semblait plus violent ? C'est ça qu'il ne comprenait pas. Kiri n'était pas violent, lorsqu'on le regardait, on avait bien plus l'impression d'avoir une bête de compagnie dressé comme un tout petit animal qui paraissait réellement gentil, mais s'était là, la force de l'animal. Sous son air doux se cachait une force et une puissance que personne ne connaissait. Sous sa grâce féline se cachait un véritable prédateur et une violence telle que personne ne se rendait compte, sauf Jun, parce que lui connaissait son ami. Il grandissait avec lui depuis longtemps, depuis très longtemps et cela faisait qu'ils étaient lié d'une manière très forte et indestructible si bien que lorsque l'autre félin se soumis et se posa couché à côté de Kiri, Kaede su qu'il avait perdu et commença à s'enfuir, sans sa bête. Quel lâche, mais ce coup-ci, il n'allait pas s'en tirer sans égratignure.

« Je reviens ! »

Une simple phrase, un sourire et il s'élança vers le jeune homme. Sa vitesse accrue lui permit de le rattraper facilement et alors que Jun le plaquait au sol, que le jeune homme leva les mains pour se protéger d'une attaque violente au visage, le jinmen se baissa vers lui doucement et lui dit une seule phrase.

« Je te pardonne. »

A ce moment, les larmes firent irruption dans les yeux de Kaede. Jun se dit qu'il aurait dû faire cela depuis longtemps, depuis très longtemps.

« Il faut que tu arrête de te dire que seul la violence te permettra d'arriver à tes fins. Tu dois le faire avec amour, pas avec de la haine. Je suis peut être un bâtard, mais j'ai une famille qui m'aime par dessus tout. Je ne suis pas le meilleur de nous deux parce que tu es nul, je suis meilleur parce que j'ai compris que la meilleure manière de comprendre et de dresser un animal était de le comprendre et d'apprendre de lui au lieu de l'obliger à faire ce que toi tu as envie. Si tu comprends ça, alors tu deviendra bon. Reprends ton ami, élève le avec douceur, rends toi compte que cela te permettra d'être meilleur. Il faut que tu fasse cela doucement et tranquillement. Ça ne sert à rien de se précipiter comme un sauvage. Et tu verras, tout ira mieux. »

« Je pourrais te rattraper et peut être te dépasser, tu y as pensé ? »

« Bien sûr et cela m'obligera à me surpasser encore plus, alors fais le, deviens quelqu'un de bon et pas quelqu'un de contraignant. Deviens quelqu'un ! »

Un sourire tranquille et le dresseur se releva, tendant la main à celui qui comprenait petit à petit que l'amour permettait bien plus de chose que la haine. Il ne lui avait pas infligé de blessures physiques, seulement une blessure à l'âme qui lui permettrait de devenir meilleur. Avec un visage plus doux, il appela son ami. Kiri grogna un instant puis laissa partir l'animal. Tous deux avait encore des choses a apprendre. Jun aussi avait encore des choses a apprendre. Il se rapprocha de son père et finalement avec un signe de la main dit au revoir à son rival de toujours.

« Désolé pour cela. Je pense qu'il avait besoin qu'on le remette un peu à sa place. Il faut dire que ses parents cultive l'élite et l'ont bourré de préjugé sur tout le monde. Ça n'aide pas vraiment. Mais maintenant qu'il est adulte, ça ira mieux, j'en suis certain. »

Il tourna la tête vers son père et sourit de plus belle.

« Alors qu'est ce qu'on disait déjà ? »

Un sourire qui cachait tout de même quelque chose. Le mot qu'il avait employé pour les désigner avec sa sœur l'avait blesser un minimum. C'était la vérité, mais se l'entendre balancer ainsi ne pouvait que faire souffrir. C'est donc avec une certaine tristesse qu'il se lança de nouveau dans cette balade.

Les mains sur le pommeau de sa canne, Kaoru était décidé à admirer le spectacle. Déjà Kirino  se chargeait avec maestria de l'autre animal. L'artisan constata avec satisfaction que ces créatures pouvaient être utiles même si décidément il s'en passait volontiers. Le félin contrôlé Jun passa à l'attaque, mais au lieu de frapper son adversaire il lui parla. L'artisan doutait sérieusement des chance de son fils de convaincre l'imbécile aussi fut-il surpris de voir qu'il avait réussi à le faire changer d'avis. En tout cas ponctuellement. Le dénommé Kaede repartit en larme sur cette leçon. Pitoyable.

« Tu es généreux. Je ne l'aurais pas laissé en vie après une telle insulte. »

D'ailleurs cela démangeait Kaoru de régler son compte à celui qui avait atteint à son honneur, cependant il n'en fit rien par respect pour la décision de son fils. Il nota tout de même le nom de l'insolent dans son esprit pour le garder à l'œil à l'avenir et lui rendre la vie insupportable s'il osait oublier son nouvel engagement. L'artisan avait conscience d'être égoïste et ne s'en embarrassait pas.

« Sur ce point-là tu diffère de moi. C'est une bonne chose je suppose. »

Un oiseau gazouilla en passant au-dessus d'eux tirant un sourire  Kaoru. Instinctivement il chantonna la mélodie du volatile en reprenant la marche d'un pas engagé. Sa bonne humeur était déjà retrouvée et l'imprévu oublié. Le temps était splendide et pas encore trop chaud comme l'air d'Arano savait le devenir. Étouffant était un terme plus exact. L'artisan baissa la tête qu'il avait levée sur la frondaison, pour regarder son fils et lui fit un sourire complice. Kaoru était le spécialiste des sourires pincés, de ceux qui ne découvraient pas les dents et c'était parfois étrange pour ceux qui n'y étaient pas habitués. Un inconnu mettait cela sur le compte de la réserve, mais ceux qui le connaissaient savaient décoder ses multiples significations. En ce moment Kaoru était heureux de la bonne température, heureux d'être avec son fils et heureux de se promener.

« Nous disions que j'était fier de toi Jun. De toi et de ta sœur. Tu me flattes, mais j'aime à croire que j'ai été un bon père. Après tout je n'ai pas eu d'exemple à suivre. J'ai du me battre pour fonder mon entreprise, j'avais le handicap d'être sans père et fils d'une geisha. Vous vous êtes sans mère et enfants d'un tenancier à la réputation parfois trouble. J'imagine que vous aviez les mêmes difficultés à vous élever dans la société que moi. »

Heureusement personne ne savait que la mère des jumeaux était une femme mariée. Oh bien sûr il y avait eu une rumeur peu après la naissance, mais Kaoru s'était arrangé pour lancer une contre-rumeur d'amour innocent avec une veuve esseulée et une autre rumeur sur une jeune fille encore vierge. Dans tous les cas l'infortunée était décédée en couches en émettant le souhait de voir ses enfants élevés par son père. Les discours étaient tellement divers que les commères finirent par s'y perdre et ne plusieurs savoir ce qu'elles pensaient être la vérité. Au final le public estima que la mère devait être une des geisha de la maison de thé de Kaoru.

« Ne parlons pas de sujets tristes. Je viendrais faire un tour dans votre établissement lorsque les écuries seront achevées et les chevaux bien gardés dedans. Tu sais comme j'aime ces bestioles. Sinon comment cela se passe-t-il pour toi niveau amour ? Papa serai heureux de te donner un conseil ou un service. »

Kaoru s'approcha de son fils et lui lança un regard taquin en lui prenant doucement le menton. Jun était mignon, droit, entreprenant en affaires et fort. Il avait pleins de qualités et pour ce que son père en savait, n'avait pas de belle dans sa vie. Ni de mignon d'ailleurs. En d'autres cas Kaoru se serait fait une joie de lui faire des avances, mais dans la vie sans grands tabous du Jinmen hédoniste, l'inceste était un interdit qu'il respectait. Séduire son propre fils ne l'intéressait en rien, au contraire, même s'il ne se gênait pas pour être aussi tactile avec lui qu'avec sa fille.

Tu es généreux. Il avait entendu cette phrase tellement de fois. Elle était souvent couplé à mais tu es réellement idiot. Comme si laisser quelqu'un en vie, ne pas lui en vouloir pouvait signifier la faiblesse. En réalité, pour lui ça n'en était pas. Aucune faiblesse, il s'agissait d'une force. Laisser aux gens le choix de ce qu'ils allaient faire, leur laisser l'opportunité de ses rattraper, c'était ainsi qu'il voulait être. Il savait parfaitement que Kaede ne faisait pas le poids, ce n'était pas nouveau, il n'avait jamais fait le poids face à lui. Pas parce que Jun était plus fort, mais surtout parce qu'il ne se battait pas avec de la haine, mais avec de l'amour. L'amour de sa famille, l'envie de les protéger et de bien faire. C'était tout cela qui lui permettait d'être le meilleur. Mais Kaede ne possédait pas ce genre de chose, il ne vivait que pour se battre, pour évoluer, pour devenir bon. C'était pour cela que Jun lui avait tout cela, pour qu'il comprenne que se battre d'accord, mais pas pour devenir le meilleur. Le mieux, s'était de se battre pour quelque chose qui en valait la peine. Kaede se battrait pour le rattraper maintenant et s'était un bien meilleur objectif.

« Je devais lui laisser une chance. Il n'a pas eu la même enfance que moi. Certes, je suis un bâtard je le conçois. Mais contrairement à lui, je n'ai jamais manqué d'amour. Que ce soit de toi ou d'Ame, j'ai toujours eu une raison de me battre, de devenir meilleur, lui n'avait que sa haine et celle de ses parents. Maintenant, il possède un meilleur objectif. Un de ceux qui lui permettront de ne plus se battre dans le vide et d'apprendre de des erreurs. Je lui devais bien ça. »

Un sourire doux et sincère se mit sur son visage. Peut importe ce que l'avenir lui réservait, il savait une chose. Il avait toujours sa sœur et son père et ils seraient toujours là pour lui. C'était ça sa chance. Il laissa partir la douleur qu'il avait ressentit peu de temps avant et puis finalement se remit dans la discussion. Fier de lui et de sa sœur. Ça lui réchauffait le cœur. Il était heureux de voir qu'avec Ame, ils faisaient la fierté de leur père. Mais il avait raison sur un point, se battre s'était un gêne de famille. Monter cette affaire n'avait pas été de tout repos, il se souvenait encore des quolibets de ses camarades. Toujours les mots pour blesser, seulement, il avait rapidement passer dessus. Peu lui importait ce que les gens pensait de lui, le but d'une vie c'est de réussir pour soit, de réussir parce qu'on l'a décidé et pas seulement parce qu'on a une famille qui suit derrière et qui paye. En cela, il était meilleur que tout le monde. Au vu de certains Ame et lui avait bien plus de mérite de leur réussite et cela, il le devait à leur éducation.

Il revint une nouvelle fois dans le présent en entendant son père. Les choses tristes faisaient partit de la vie. Le jeune jnmen le savait parfaitement. Tout ne pouvait pas être aussi beau, aussi frais, aussi joyeux. La vie réservait des haut et des bas. Lorsqu'il entendit son père dire qu'il viendrait une fois les écuries terminés, il ne put s'empêcher d'avoir un sourire. Les chevaux, Kaoru ne les aimait pas. Jun se demandait souvent pourquoi, mais après tout lui aimait tous les animaux indifféremment qui aurait pu comprendre sa passion ? Donc bon il n'avait rien à dire non plus.

« D'ailleurs en parlant de chevaux, je crois qu'il y en a un qui te plairait même de loin. Une fois que ce sera terminé, je t'emmènerais le voir. Toi qui aime la beauté, tu vas être servit. »

Un nouveau sourire. Il pensait ainsi pouvoir éviter de répondre à la question de son père, mais son regard instant le persuada qu'il devrait peut être en parler. Et puis de toute façon sa vie n'avait rien de palpitant de ce côté là.

« Eh bien, c'est comme d'habitude. Tu sais que je ne suis pas très doué avec les filles. Et puis, j'ai plein de travail, je dois m'occuper des animaux, de finir les travaux. Avec Ame, on a pas mal de client à contenté. On récupère tous les jours des clients mais aussi des animaux. Je n'ai pas vraiment le temps de me consacrer à ce genre de chose. Mais c'est vrai que toi tu dois être expert dans la matière. »

Un sourire taquin ainsi qu'un clin d'oeil vint s'afficher sur son visage. Son père était connu pour être un sacré amant. Qu'ils soient hommes ou femmes d'ailleurs. Parfois, il se demandait bien ce que cela ferait d'aimer quelqu'un, mais en vérité, personne ne lui avait plu jusqu'ici, si bien que l'amour restait un mystère. Et puis, il ne comprenait pas les femmes. Certaines étaient trop spécial, d'autre trop libertines. Contrairement à son père, il ne voulait pas se concentrer sur plusieurs personnes, mais bien sur une seule. L'amour s'était trop compliqué pour lui et puis il était encore jeune de toute façon.

Kaoru n'avait pas l'intention de blesser son fils, mais visiblement sa remarque avait réveillé quelques échos dans la mémoire de son fils. Heureusement le jeune homme était au-delà de ça, il avait une maturité et une confiance en soi solide. Et une persévérance à toute épreuve… L'artisan ne put s'empêcher de grimacer lorsqu'il lui proposa de voir un cheval, certes l'animal pouvait être beau, mais… S'il ne s'en approchait pas cela devrait aller, pensa-t-il.

« Ce sera avec joie. »

Il s'efforça de répondre d'une voix enjouée et ce dit qu'il fallait bien qu'il aime son fils pour supporter d'aller contempler un cheval. Plus tard Jun tenta d'éluder la question de son père, Kaoru savait que le garçon n'avait pas son aisance ni son goût du batifolage et s'inquiétait un peu qu'il si réservé en amour. Bien sûr il ne lui demandait pas d'être aussi libertin que lui, le Jinmen avait bien conscience de son manque de moralité en matière – sans lequel il n'aurait eu ses enfants cela dit. Il trouvait simplement étrange qu'un jeune homme en pleine forme paraisse si totalement concentré sur sa famille et son emploi sans se soucier des pulsions qui animent chaque être.

Finalement Jun fit une réponse classique, justifiant le travail très prenant et achevant sur une plaisanterie compliment. Kaoru rit à cette dernière, oui il était maître en la matière et se retenait fort bien de se mêler plus avant de l'intimité amoureuse de son garçon. Pourtant ça le démangeait vraiment, l'encourager, le pousser à aller vers une demoiselle, lui enseigner l'art de la séduction orale et pourquoi pas celui de faire l'amour. Cependant il sentait que cela embarrasserait son fils si droit.

« Si j'ai bien un conseil à te donner, ne te sers pas de ton métier comme excuse ou bouclier. La jeunesse passe trop vite et tu ne trouveras jamais la personne qui te convient en ne regardant que tes animaux. Si tu n'es pas à l'aise avec les filles, sors donc les rencontrer, parle leur de tout et de rien. Il n'est pas forcément besoin de parler de cœur avec une inconnue. Je pourrais te donner bien des conseils si tu le souhaitais. Mais, j'y songe… T'intéresse-tu davantage aux femmes ou pense-tu aux hommes parfois ? »

Voilà bien le genre de question que seul un homme comme Kaoru pouvait se poser et la réponse ne pouvait en rien le choquer. Tout en discutant il en vint à s'interroger sur sa fille, Ame. Qu'en était-il de ses sentiments à elle ? Curieux, l'artisan décida d'aller la voir plus tard pour un bavardage père-fille. En attendant il était tout à son fils.

« Bien sûr si ce sujet t'embarrasse tu peux me le dire, nous deviserons d'autre chose. »

Dit-il bien que très occupé par ce domaine.

Il sentait son père réticent au fait de voir le cheval, le jeune homme savait que ce n'était pas son fort seulement ce cheval là était réellement magnifique. Il n'y avait pas besoin de s'approcher et pas besoin de le toucher pour se rendre compte de sa beauté. Jun était donc persuadé que même son père si réticent pourrait le trouver joli, enfin il l'espérait, il ne voulait en aucun cas l'obliger à faire des choses dont il n'avait pas envie seulement lui qui aimait la beauté devrait fortement apprécier cet étalon. Il haussa doucement les épaules, il pouvait bien évidemment se tromper, il n'avait pas la science infuse, mais il avait au moins envie de partager cette image de beauté avec son père. Et puis peut être que ce cheval lui donnerait envie de renouer avec les gros animaux. On ne savait jamais après tout. Seulement plus il se disait ce genre de chose, moins il y croyait. Au niveau animaux, son père préférait largement les oiseaux, plus gracieux, plus joyeux et moins bruyant. Jun, lui, préférait les gros animaux même s'il s'occupait aussi des petits et des oiseaux, seulement les oiseaux c'était bien plus le domaine de sa sœur, plus douce.

Lorsqu'il s'agissait de gros animaux, il fallait plus de force et de puissance, il était plus à même de fournir ce genre de chose que de la douceur. Et puis, il revint dans la conversation. Cette conversation ne l’embarrassait pas, en vérité, les femmes ce n'était pas son truc, pas plus que les hommes finalement. Il ne comprenait pas les gens qui s'évertuait à aimé, on était très bien seul non ? Alors que son père lui servit ce qu'on lui disait toujours, de ne pas se servir de son métier comme excuse ou bouclier, il se dit qu'en fait il ne s'agissait ni de l'un ni de l'autre. Il n'avait pas envie de se pencher sur le sujet. Il n'avait pas envie de trouver quelqu'un avec qui il devrait faire des concession parce qu'elle ne voudrait pas telle ou telle chose. Le jinmen voulait juste vivre sa vie et pour l'instant sa vie se passait avec les animaux. Lorsqu'il s'occupait d'eux, il avait l'impression d'être réellement quelqu'un. Et puis sans s'en rendre compte, il avait quand même d'énorme responsabilité et entendre dans ses oreilles qu'il ne passait pas assez de temps avec celle qu'il était censé aimé l'énerverait probablement bien trop facilement. De plus, il n'était pas comme son père, il ne pouvait pas passer de personne en personne. S'il devait réellement tombé amoureux, ce ne serait que d'une seule femme.

« Ce n'est pas un bouclier ou une excuse. Je n'ai juste pas envie pour le moment de m'intéresser à qui que ce soit. Mon travail n'est pas un bouclier ni un prétexte, je préfère juste m'occuper de mes animaux qu'autre chose pour le moment. »

Il s'arrêta un instant et repris finalement.

« Ce n'est pas un sujet qui m’embarrasse, je me dis juste qu'en fait, je suis encore jeune et si je ne ressent pas le besoin de m'intéresser à qui que ce soit c'est que ce n'est pas encore le moment. De plus, si je devais m'intéresser à quelqu'un ce serait les femmes même si je ne les comprends pas. »

De ce sens là, il n'y avait eu que sa sœur réellement qu'il avait comprit depuis longtemps. Les autres avec leur préoccupation ne l’intéressait guère.

« Je ne comprends pas les femmes et je n'ai pas très envie de les comprendre. Toujours sur leur trente et un, avec leur bijou, à parler de chose inutile. Certes, je ne suis pas quelqu'un de doué dans les conversations, mais elles ne sont réellement pas intéressante franchement. Et puis si tu est doué pour faire la cours au femme et passer de femme en femme, moi ce n'est pas mon cas. Une seule me suffira et ce ne sera qu'à ce moment là que je commencerais à m'intéresser à elle. »

Il ne jugeait pas son père, de toute façon il se fichait bien de ce qu'il faisait. Il l'avait toujours connu ainsi et si c'était sa façon de voir les choses alors soit, mais lui n'était pas comme ça. Loin du faite que les femmes lui faisait peur, il n'avait juste pas envie de s'y intéressé maintenant.

Un oiseau survola les deux promeneurs en lançant une trille joyeuse. Kaoru leva la tête pour admirer l'animal gracieux et au chant si mélodieux. Il méditait les réponses de son fils en se demandant ce qu'il pouvait lui dire d'utile, hélas il ne parvenait pas à le déterminer. Jun sur ce plan était trop différent de lui et Kaoru ne parvenait pas à comprendre comment un jeune homme de son âge et de bonne constitution puisse être insensible aux pulsions de chairs qui animaient chaque être humain. Il savait que certains hommes pouvaient montrer un grand contrôle de leurs désirs, mais même les plus stoïques d'entre eux n'étaient pas insensibles. Tout hédoniste qu'il était, l'artisan savait contrôler ses pulsions et méprisait ceux qui perdaient leur raison au moindre jupon qui passait sous leurs yeux.

Kaoru crut percevoir une vague accusation dans la remarque de son fils et se raidit. S'il se moquait des commérages de bonnes femmes, il n'aimait pas l'idée que ses enfants aient une mauvaise image de lui. Bien qu'il avait conscience de ne pas être un modèle de droiture et de morale sur certains points.

« Si je ne m'étais attaché qu'à une seule femme tu ne serais pas né. »

Il avait chuchoté ces mots pour lui-même perdu dans ses pensées. Il avait aimé bien des femmes, même si ce terme était trop fort. Il avait même connu un amour passionné sans retour pour une samouraï dont il ne savait rien. Une rônin croisée une nuit puis plus jamais revue.

« Je ne suis pas d'accord avec ta vision des femmes. Elles aiment s'entretenir et se parer pour être belles. Elles veulent plaire, aux autres mais surtout à elles en premières. Je suis pareil, je ne supporte pas de ne pas être au meilleurs de mon apparence. Peut-être trouves-tu que certaines en font trop, mais demande-toi pourquoi elles le font. Regarde autour de toi le nombre d'hommes qui attendent des femmes qu'elles les séduisent, qu'elles leurs plaisent et soient juste assez intelligente pour être une bonne épouse ou pour les divertir. Conditionnées elles agissent de manière à augmenter leurs chances de survie, car, oui, toutes ne sont pas capables de voler de leurs propres ailes et ont besoin d'un conjoint pour bâtir à deux une vie. Elles cachent leurs personnalité entière, cèlent leurs faiblesses pour montrer aux hommes ce qu'elles croient être ce qu'ils veulent. Mais toi qui attend d'elle une identité propre, tu n'y trouves pas ton compte. Comprends qu'elles-même ne s'imaginent pas agir autrement. »

C'était d'autant plus vrai pour les geishas, dont le métier était de séduire et divertir. Elles donnaient une image de frivolité qui ne correspondait pas à leur identité réelle, même si pour certaines l'apparence prenait le pas sur l'être. Kaoru était bien placé pour le savoir, lui qui avait grandi parmi ces femmes.

« Si tu veux rencontrer une femme moins conditionnée par la séduction, va rencontrer celles qui travaillent à leur compte, comme Ame. Pour les autres tu peux leur faire remarquer gentiment que tu attends d'elle des réponses sincères et non ce qu'elles pensent que tu veux entendre. Ça ne marchera pas pour toutes, mais ça te facilitera peut-être tes relations quotidiennes. »

Ils arrivèrent dans une clairière agréable. Avisant un tronc d'arbre couché, Kaoru décida d'en profiter pour faire un arrêt.

« Je ne veux pas t'embêter plus avec cette histoire. Cessons d'en parler. As-tu déjà été en Azthia ? »

Il ne savait quoi dire et quoi faire. Il était parfaitement conscient du problème en vérité. Ce n'était pas son métier, ce n'était pas réellement ce qu'il pensait des autres mais surtout qu'il ne se sentait pas prêt à rien. Il avait parfois du mal à se voir dans une relation quelconque avec quelqu'un. Après tout, il n'avait pas réellement d'ami, il avait fait en sorte de se dévouer corps et à âme à sa famille. Jamais, au grand jamais il ne s'était dit que vivre quelque chose pour lui serait important. Alors il avait tout simplement laisse tomber. Il en avait même oublié carrément ce que signifiait une relation au point que finalement désormais il laissait tout tomber au profit d'autre chose : protéger et dresser. Comme un serment, il ne vivait que pour cela. Ne cherchant même pas à s'intéresser aux autres, ne cherchant même pas une relation particulière avec quelqu'un. Il était resté confiné dans une idée bien préconçu comme si tout cela était normal. Peut être l'était-ce mais en vérité, il savait parfaitement que ce n'était pas normal. Il savait parfaitement qu'il aurait dû être différent.

S'intéresser aux autres, chercher à séduire une fille, chercher à créer des liens, tout cela était de son âge, seulement ce n'était pas dans ses priorité. Maintenant que son père lui faisait remarquer, il comprenait très bien. Sauf que contrairement au Geisha, les filles qui venaient près de lui étaient toutes des idiotes. Obsédé par une apparence parfaite et si certaine faisait cela pour attirer les autres, lui préférait largement les voir au naturel. Il n'y avait rien de mieux pour le jeune homme qu'une femme qui s'assumait comme elle était, sans parure sans rien de particulier. Bien entendu, il comprenait parfaitement que comme les Geisha dont le métier était de séduire, certaine avait besoin de se parer, seulement, beaucoup d'autre, beaucoup trop ne cherchait qu'une chose, mettre les hommes dans leur lit avec une apparence magnifique qui était loin de la réalité. Il n'avait pas envie d'être un de ces pigeons.

En fait, ce qu'il y avait ce qu'il venait de comprendre c'est qu'il avait peur. Peur d'être blessé, peur de ne pas pouvoir assumer trois choses importantes dans sa vie. Il s'était dévoué depuis tout jeune à la protection de sa famille et à l'éducation des animaux qu'en vérité rien d'autre n'avait eu d'importance à ce jour et d'ailleurs il venait de remarquer en même temps que sa peur qu'il avait blessé son père. Parfois, il parlait sans trop réfléchir. Même en étant adulte, il avait encore besoin de grandir dans certains domaines. C'était quelque chose qu'il comprenait mais qu'il n'arrivait pas à faire, trop ancré dans ses idées. Il soupira intérieurement. Le jinmen avait encore pas mal de progrès à faire avant d'arriver à un niveau convenable en ce qui concernait les relations et il avait en réalité énormément de boulot de ce côté là. Il avisa son père qui s'asseyait sur une branche et qui posait une nouvelle question. Il vint doucement lui aussi s’asseoir.

« Tu sais, ce n'était pas un reproche lorsque j'ai dit que je ne pouvais être comme toi et que je ne m'attacherais qu'à une seule femme. En vérité, je voulais juste te dire que j'étais assez sectaire dans ce domaine. »

Il soupira doucement.

« En vérité, je ne suis pas doué et je crains de ne jamais l'être réellement. J'ai passé trop de temps à m’entraîner pour défendre ma famille et trop de temps à éduquer les animaux, le reste me fait peur et je n'ai pas envie de m'y intéresser pour le moment. »

Un aveu qui lui faisait un peu mal à l’ego. Après tout, il avait chercher à se montrer fort sauf qu'il venait d'avouer une faiblesse et ça, ça ne lui plaisait pas du tout. Il reprit ensuite finalement.

« Non, je n'ai pas encore été en Azthia. Normalement, je dois m'y rendre une fois que le magasin sera opérationnel. On nous demande toujours d'aller voir des tas d'animaux et dans différents endroits. Je crois que notre notoriété s’accroît énormément avec le temps. Peut être un peu trop d'ailleurs pour certaine chose. Mais bon, on a jamais rien sans rien. »

Il s'arrêta un instant et tourna son regard vers son père.

« Et toi papa, tu as déjà été en Azthia ? Tu pourrais me raconter un peu ? »

Il n'avait pas peur, la seule chose qu'il n'aimait pas c'est qu'il ne pouvait pas être prêt de sa famille pendant qu'il était loin et ce genre de chose le perturbait quelque peu. Mais bon après, il n'allait pas rester toute sa vie à les protéger, à un moment ou à un autre, il faudrait bien qu'il se bouge un minimum pour vivre sa vie et arrêter de vivre par procuration.

Jun était demeuré silencieux quelques temps, sans doute méditait-il sur les propos de son père. Kaoru le grand manipulateur peinait parfois à comprendre les pensées de son fils et se retrouvait déçu de lui-même à l'idée de l'avoir blessé l'embarrassait. Il était capable de punir ses enfants, de les gronder sans sourciller et de rester insensible à leurs pleurs. En revanche cette fois il ne s'agissait pas de faire un sermon, mais de comprendre et d'encourager. À ce titre le jeune père n'avait pas voulu remuer de s souffrances cachées. Cela dit s'il voulait que son fils se sente bien dans sa peau et trouve l'amour il lui fallait réaliser ce qui le bloquait, le rendait malheureux et pour cela il n'y avait rien de mieux que de remuer tout ça.

Néanmoins si Jun ne voulait pas en parler avec son père, Kaoru ne le forcerait pas. Il était déjà heureux des quelques aveux que le garçon lui faisait et lui caressa la joue tendrement avant de lui répondre.

« J'y suis allé une fois. J'ai commis la maladresse de ne pas prévoir d'interprète. C'était il y a dix ans, je ne parlais pas d'autres langues que le jinmen. Cela étant ça a été l'occasion d'une petite aventure instructive et divertissante. J'ai rencontré un Cydien et ai du communiquer par gestes. Te rends-tu compte ? Moi qui porte une grande importance à la parole et aux mots je me suis retrouvé à gesticuler pour me faire comprendre ! »

Kaoru en riait aujourd'hui, mais sur le moment il s'était retrouvé embêté et n'avait pu éviter une bataille avec des brigands. Habituellement face à de tels individus plus bêtes que méchants l'artisan chantait pour apaiser leur folie et cela tempérait leurs ardeurs. Hélas il avait découvert à cette occasion que les mots prononcés avaient une influence dans l'effet de ses chants et les azthiens n'y avaient pas été réceptifs.

« Cette expérience m'a suffi, surtout que j'ai horreur des voyages longs et de dormir dans un chariot. Non ce n'est pas pour moi. Je préfère t'inviter un soir à me raconter toutes tes aventures lorsque tu y seras allé. »

Il n'avait plus grand chose à raconter de plus, cela faisait longtemps qu'il avait franchi les montagnes et il n'y était pas resté plus de deux ou trois jours. Il se souvenait encore du nom du Cydien qu'il avait rencontré, Arsher. Il releva les yeux pour croiser le regard de son fils et le prit dans ses bras pour l'enlacer. Quelle sensation merveilleuse de sentir la chair de sa chair contre sa peau, de percevoir sa musculature d'adulte sous ses habits. Jun était fait de la moitié de son sang, il l'avait vu si petit et fragile à sa naissance et aujourd'hui c'était un être humain indépendant et si fort. Kaoru fut envahi de la certitude que quoi qu'il lui arrive, une part de lui vivrait toujours à travers son fils et il en éprouva un profond sentiment de béatitude. Ses enfants qui le faisaient vieillir à les voir si grands étaient dans le même temps un gage de vie éternelle. Ému il s'éloigna enfin du garçon et lui pris le visage entre ses mains.

« En fait je crois que nous nous ressemblons beaucoup toi et moi. Je suis très sociable et vole d'une conquête à une autre, cela étant si je regarde bien il n'y a pas tant de personnes qui me sont chères. Mes enfants, Minh, ma mère et Gangurô. Je sais converser, plaire, manipuler, mais au final je ne suis pas franc avec eux. Je ne leur ouvre pas mon cœur ou ma personnalité. Toi et moi… nous avons peur des autres, je ne sais pas nouer une véritable relation avec quelqu'un. Je crois qu'il n'y a qu'avec vous mes enfants que je ne suis pas toujours en retrait en train de calculer dans le plus profond de mon esprit ce que je peux dire et comment pour en retirer le maximum d'avantage. Cependant il me vient une chose à l'esprit dont je peux t'instruire. Lorsque tu rencontrera l'élue de ton cœur, il n'y aura ni doute de tes sentiments, ni calculs. Seul l'amour te consume l'âme et la désir de connaître davantage la personne aimée. Si le jour où des tels émois t'habitent te ne sais toujours pas comment approcher la personne je me ferais une joie de te l'enseigner mon fils. »

Un oiseau siffla une trille comme pour souligner la véracité de ces propos. Cette clairière paisible au cœur de la nature se révélait une scène admirable pour une discussion intime entre père et fils. Bientôt ce moment égocentrique serait brisé quand il faudrait retourner à la maison de thé. La journée était loin d'être finie et Kaoru avait encore beaucoup à faire. En attendant il goûtait chaque seconde de plaisir.

Il attendait patiemment la réponse de son père. Il attendait de savoir ce qu'il avait vécu dans Azthia parce que son départ était imminent. Beaucoup de personne leur avait envoyé des demande de dressage, surtout ces derniers temps, elles émanaient d'un peu partout dans le continent Jinmen, mais aussi dans Azthia. Étrangement, leur réputation allait aussi loin. Aussi avec Ame s'était-il décidé à enfin faire bouger les choses et allé en Azthia, sauf que voilà, le magasin n'était pas encore terminé, il y avait déjà pas mal d'animaux ici pour avoir du travail durant des mois. Il devait d'abord terminé ce qu'il y avait ici et une autre chose lui taraudait l'esprit. Comment ferait-il ? Comment allait-il faire pour protéger sa famille alors qu'il serait loin. Cette état de fait le rendait perplexe et en même temps, il se dit une chose : ce ne serait peut être pas mauvais pour lui. Il s'était persuadé depuis tout jeune qu'il devait absolument faire en sorte de protéger sa famille parce qu'eux même ne le pouvait pas. Mais contrairement à ce qu'il pensait, son père savait se battre, Ame savait se défendre et lui dans tout ça ? Et bien voilà, il restait là tranquillement à les regarder évolué alors que lui stagnait. Peut être qu'il était temps qu'il s'en aille, qu'il voit autre chose. Le dresseur savait dans son for intérieur qu'il en avait besoin et pourtant, pourtant, il en avait en quelque sorte peur. La peur de l'inconnu était quelque chose de bien connu, mais lui avait plus peur qu'en son absence quelque chose de grave arrive à sa famille. Étrange la façon dont tournait les événements.

Il revint doucement dans la conversation pour entendre son père. Ainsi il était déjà allé en Azthia. La suite de l'histoire le fit sourire. Effectivement, il comprenait parfaitement ce qu'il voulait dire. Lui l'adepte des mots et des belles phrases s'était vu sans voix finalement. Encore une fois Jun se dit qu'il pouvait remercier son père d'avoir voyager. C'était grâce à lui qu'Ame et lui connaissait tant de langue, c'était aussi grâce à lui qu'il pouvait discuter avec les autres même si leur accent prouvait bien leur appartenance au Jinmen. Effectivement, les voyages n'était pas réellement fait pour lui. Le dresseur ne pouvait le nier. Après tout, chaque fois qu'il prenait la route, il espérait que ce ne soit pas trop long et surtout qu'il pourrait avoir un bon lit pour se reposer. Le jeune homme lui s'en fichait éperdument. Le goût de l'aventure coulait dans ses veines, il l'avait sentit dés le départ. Ce goût de l'aventure lui donnait envie d'arpenter Azthia même si son désir de protection envers sa famille le retenait encore énormément. Seulement voilà, le temps passait et les choses devenaient différentes au fur et à mesure ou tout avançait, ou tout allait et venait. Alors qu'il allait prendre la parole, ce fut son père qui s'approcha, le prenant dans ses bras et finalement après un temps s'éloignant mais gardant son visage entre ses mains.

Ce n'était pas la première fois qu'il le faisait, mais c'était dans ce genre de situation qu'il comprenait l'amour qu'ils avaient reçu avec sa sœur. Étrangement, il avait l'impression que c'était cet amour qui l'avait poussé à avancer et à en faire toujours plus pour que son père soit fier de lui. Un sourire naquit sur ses lèvres et finalement il écouta ce que Kaoru avait à dire. Se ressembler. En fait, il n'avait pas tord. Je ressemblais bien plus à mon père que je ne l'aurais pensé. Lui si volage et moi trop en retenu. Nous étions tous les deux incapable de nous lier à une personne de peur de créer ce lien qui unissait deux êtres. Était-ce une mauvaise chose ? Il ne le pensais pas, pas réellement, cependant, cela freinait tout de même beaucoup de chose, peut être un peu trop. Il commençait doucement à comprendre ce que voulait dire son père. Il comprenait maintenant que se refermer sur lui n'était pas une option et surtout pas une bonne idée. Peut être devrait-il s'ouvrir un peu plus ? De toute façon il allait devoir encore avancé dans cette vie et s'ouvrir au sentiment faisait partie de ce qu'il devait absolument faire pour éviter de rester comme un idiot. Parce que lorsqu'il n'aurait plus rien à protéger parce que sa famille serait peut être protéger par d'autre que lui resterait-il ? Une bien bonne question que cela. Il regarda alors tranquillement son père et finalement prit la parole.

« Je commence un peu à comprendre ce que tu attends de moi, je commence doucement à entrevoir que je vais encore devoir m'améliorer surtout dans le domaine sentimental. Par contre, je serais heureux de recevoir tes conseils lorsque je serais perdu dans le domaine sentimental. Je te le promets. »

Il ne pouvait rien faire de mieux pour le moment, il ne pouvait rien promettre d'autre. Il n'était pas réellement doué pour faire des promesses. Mais voilà, il devait vraiment se bouger et aller de l'avant. Son regard se tourna vers le ciel. Effectivement, il était temps pour lui de rentrer. Le travail l'attendait à la maison. Il avait encore beaucoup de chose à faire pour aménager tout le magasin et pouvoir s'y installer rapidement.

« Bon Papa, ce n'est pas parce que je n'ai pas envie de rester avec toi, mais il me reste encore beaucoup de chose à faire pour que ce soit rapidement installé. Je vais devoir reprendre la route. Il est temps pour moi d'aller un peu tout mettre en place. »

Il souriait tranquillement. Et finalement se leva et commença le chemin pour aller jusque chez lui et finalement se retourna un instant.

« On se voit ce soir à la maison. Merci pour tout Papa, je te dois énormément quand même. »

Et il partit tranquillement vers les ailes enchantées qui allait bientôt naître.

Cessait-on de changer un jour ? Rien n'était immuable ou gravé dans le marbre, c'était un fait depuis longtemps établi. Tel le samouraï noble et réputé qui pouvait voir sa vie se fracturer en un instant et devenir un rônin sans honneur. L'humain était-il à l'image d'un fruit qui une fois arrivé à l'apogée de sa maturation finissait par moisir et se décomposé ? Ou pouvait-on considérer que jusqu'à sa mort il ne cessait de progresser pour s'améliorer encore et toujours jusqu'à ce que la fin inéluctable s'empare de sa vie péniblement bâtie ? La mort, cette fin arbitraire et absolue de toute chose, n'était pas tant ce qui effrayait le plus Kaoru, la décrépitude et et lé déchéance du corps et de l'esprit en revanche le hantaient. Son empire établi il concentrait son énergie à arrêter le temps qui s'acharnait à vouloir se marquer sur sa peau.

Le jeune père sourit à son fils. Cette discussion n'avait pas été à sens unique et Kaoru lui-même avait appris quelque chose à son sujet. Sa solitude… à vrai dire il s'en moquait un peu. La banalité humaine le fatiguait parfois et il se complaisait dans les jeux de société. Manipuler, progresser, se développer. Gagner.

« J'ai été heureux de cette promenade avec toi. Tu sais que je serais toujours disponible pour toi et, hmm je passerais un de ces jours voir ce cheval dont tu m'as parlé. »

Voir un cheval. Il fallait qu'il l'aime son fils pour envisager cette idée un peu folle et si contraire à sa nature profonde. Kaoru ignorait pourquoi il avait ces animaux en horreur. Pourtant le cheval était une créature noble, symbole de la noblesse qu'il recherchait tant. Rien que le fait de penser à cette bête lui donnait des frissons dans le dos, mais soit. Si Jun lui assurait qu'il en avait un dont la beauté plairait à son père alors l'artisan ferait l'effort d'aller le voir. Il en profiterait pour jauger l'établissement de ses jumeaux et prendre des nouvelles de sa fille.

Il était seul désormais. Seul à écouter la douce mélodie des oiseaux et des insectes. Il lui fallait repartir, sa maison de thé requerrait sa gérance. Paisiblement Kaoru reprit sa canne et se redressa pour prendre la route du retour.

[désengagé, merci de rp ]