[FH] Héritage (fini)

Rêve.
Doutes.
Destinée.

Ces mots me hantaient depuis quelques jours. J'ignorais totalement ce qu'ils pouvaient signifier, mais j'avais l'impression qu'ils résonnaient dans ma tête à longueur de journée. J'étais bien incapable pour le coup de savoir ce qu'ils signifiaient et s'ils étaient réellement important. J'avais comme l'impression que quelque chose m'échappait et cela m'agaçait profondément. Ça avait commencé quelques jours plus tôt, j'étais plus fatiguée que d'habitude malgré mes heures de sommeil et je ne parvenais pas à me concentrer sur mes études. Je tentais de m'entraîner mais mon manque de concentration avait énervé mon père si bien qu'il m'avait mise en garde sur la nécessité de prendre au sérieux ses enseignements sans quoi, il n'hésiterait pas à sévir. Je savais qu'il n'hésiterait pas à le faire, je connaissais suffisamment bien mon père pour savoir que s'il m'estimait trop faible ou pas assez douée, il me renverrait chez les Élémentaires. Je n'avais pas fourni tous ces efforts pour me voir refuser maintenant le titre de Zélote ! Bon, j'étais encore loin bien sur d'être virée mais si je continuais, mon père ne voudrait plus m'enseigner quoi que ce soit … et il aurait bien raison, j'étais une piètre élève depuis deux jours.

« Erys ! »

La voix de mon petit frère me rappela à l'ordre. Il semblait visiblement fâché que je n'ai pas pris la peine de l'écouter plus que ça … A vrai dire, j'ignorais totalement ce dont il me parlait et il, lorsqu'il le comprit, il prit sa petite moue de gamin vexé. J'adorais cette moue et je ne pus m'empêcher de sourire en m'excusant. Il se renfrogna mais finit par sourire à son tour. Contrairement à moi, Elios n'avait jamais eu un mauvais fond. Adorable, gentil et brillant, il était de loin le plus talentueux des élémentaires à mes yeux mais heureusement, je semblais encore la seule à le penser puisque personne n'avait remarqué son talent plus que ça. Notre tante veillait à sa formation et ce n'était pas plus mal, je savais qu'elle avait en horreur les Zélotes et que jamais elle ne le vendrait à notre pourriture de cousin. Mon jeune frère me demanda si j'allais bien.

- Je me sens étrange depuis deux jours, j'ai du mal à dormir, résultat, papa crois que je met de côté mon entraînement ...
« Tu dors mal ? Tu es malade ? »
- Non, je ne pense pas. J'ai l'impression de passer à côté de quelque chose. Tu … tu ne devais pas t'entraîner aujourd'hui ?
« Si, tu veux venir avec moi ? »
- Avec plaisir, allez, viens !

Il ne fallut pas longtemps pour que mon petit frère m'entraîne vers le jardin. Il faisait encore froid mais le soleil, bien haut dans le ciel, rendait la fin de matinée plutôt agréable. Il n'avait pas neigé depuis quelques jours si bien qu'on voyait l'herbe rase. Elios se plaça en face de moi, emmailloté dans son manteau, il ressemblait plus à un pingouin qu'autre chose. Je devais ressembler à ça moi aussi. Nous nous échauffâmes pendant plusieurs minutes puis il passa à l'attaque le premier, ce qui ne manqua pas de me surprendre. Il ne me fut pas difficile d'éviter la gerbe d'eau qu'il venait de m'envoyer. Je répliquais par une langue enflammée. Plus je suivais ses mouvements, plus je repensais aux séances d'entraînement que je passais avec maman à l'époque. Je revoyais notre mère dans chacun de ses mouvements même s'il ne s'était jamais entraîné avec elle de mémoire. Notre tante ressemblait bien plus à maman qu'elle ne voulait bien l'avouer …

Nos échanges durèrent un peu, si bien que ni l'un ni l'autre ne parvenait vraiment à prendre le dessus. Nos deux éléments étaient antinomiques pour le coup, ça ne nous aidait pas vraiment à gagner et puis, je crois qu'Elios était comme moi, il n'avait pas vraiment envie que notre « combat » se termine. Malgré son plus jeune âge, il était doué, il arrivait à anticiper mes mouvements et si j'étais capable d'en faire de même, il semblait avoir un temps d'avance sur moi à chaque fois. J'adorais m'entraîner avec lui, je pouvais déceler ses faiblesses, percevoir les miennes et nos séances étaient bénéfiques pour lui comme pour moi. J'adorais passer du temps avec lui, cela me rassurait et j'avais ainsi l'occasion de veiller sur lui … Elios tenta une feinte à gauche tandis que je faisais de même, notre attaque se court-circuita.

« Qu'est ce que tu fais ? » me demanda-t-il soudain paniqué.

Je le regardais avec étonnement sans comprendre ce qu'il venait de dire. C'est alors que je remarquais la langue de flammes qui avait failli le blesser tant elle était passée près de lui. Je me demandais alors pourquoi il n'avait pas pu l'esquiver en utilisant sa maîtrise de l'eau. C'était ce qu'il faisait normalement ! Pourquoi avait-il oublié de se protéger ?

« Erys ? »
- Pourquoi tu n'as pas évité mon attaque ?
« Mais j'ai essayé ! C'est … c'est toi qui m'en a empêché ! Tu as détourné l'eau que j'avais créé ! »
- C'est impossible, je maîtrise le feu, pas l'ea...

Quelque chose venait de faire tilt dans mon esprit. Comme si quelqu'un venait d'allumer la lumière, je comprenais enfin cette sensation étrange, à la fois rassurante, connue et totalement terrifiante et inconnue. L'eau. L'eau était la réponse ! Elios me regardait comme s'il ne comprenait que trop bien ce qu'il se passait. Je n'avais pas fait exprès mais je venais de dévier son attaque pour imposer la mienne. A force de l'observer, était-il possible que j'ai réussi de maîtriser l'eau à mon tour ? Etait-il possible que je possède un peu de maman à mon tour ? Non, je ne savais même pas comment tout cela était possible et en prime, je n'avais jamais rien appris concernant cet élément !

« Recommence. »
- Pardon ?
« Je vais créer de l'eau, essaye de me la piquer ! »

L'air malicieux de mon frère me poussa à lui obéir. Je ne risquais pas grand chose à le faire. Copiant ses gestes, je sentais quelque chose au fond de moi qui me poussait à poursuivre mes efforts. Une force jusque là inconnue semblait me murmurer des mots de réconfort. Je poursuivais la mélodie, j'entrais dans la danse et j'avais l'impression que tout avait toujours été limpide. Les mouvements étaient comme des notes de musique que je devais suivre pour comprendre la chanson. Apaisée, je suivais le rythme imposé par mon petit frère et, lorsqu'il m'envoya la gerbe d'eau, mes mains réagirent d'instinct, se plaçant comme maman me l'avait appris lorsque j'étais encore enfant, il n'y avait pas si longtemps que ça … La gerbe d'eau dévia de sa trajectoire et alla s'écraser plus loin, hors de portée. Un sentiment de fierté monta en moi et des larmes me montèrent aux yeux.

- Je … j'ai réussi ?
« Oui ! Oui, c'était bien toi ! Tu … tu sais maîtriser l'eau Erys ! »

Je regardais mon frère, totalement abasourdie. Toutes ces années, ce don dormait en moi. Maman ne m'avait jamais vraiment quitté finalement. Je partageais cette pensée avec mon frère et il ne put s'empêcher de sourire.

« Maman ne nous a jamais quitté mais par contre, une chose est sure, c'est pas encore demain que tu me battras ! »
- Ah oui ? Tu en es sur ?

Je le regardais avec un sourire et lui ébouriffait les cheveux. Oui, c'était sur que je n'avais pas du tout le niveau pour maîtriser l'eau mais une chose était sure, maintenant, je savais ce que mon esprit essayait de me dire depuis deux jours. J'avais un don, endormi, encore incertain, mais un véritable don et il ne tenait qu'à moi d'apprendre à le maîtriser.

[ Désengagé ]

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